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Livres - Page 70

  • [Livre] Revived

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    Résumé : Grâce au Revive, un sérum mis au point par une agence ultrasecrète, Daisy est déjà morte cinq fois et entame sa sixième existence.

    Nouvelle ville, nouveau lycée, nouvelle identité... La jeune fille est habituée. Mais cette fois, en regardant les autres autour d'elle, elle se sent troublée. Et quand elle rencontre Matt, son malaise grandit.

    Que lui reste-t-il de son enfance et de ses vies passées ? Daisy n'est-elle, finalement, qu'un pantin manipulé par des êtres sans scrupule ? Pour exister vraiment, pour aimer, ne faut-il pas savoir qu'on va mourir un jour ? Sa sixième vie sera peut-être la dernière, mais ce sera la sienne !

     

    Auteur : Cat Patrick

     

    Edition : La Martinière Jeunesse

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 18 Mai 2012

     

    Prix moyen : 10€

     

    Mon avis : Ce roman a réussi à me faire pleurer (bien évidemment, je lisais à mon bureau pendant ma pause déjeuner, ça ne serait pas drôle sinon… mais bon, je lis tous les jours à ma pause, mes collègues ont l’habitude).
    Daisy se sent très impliquée dans le protocole Revived. Elle n’est pas du tout dans une optique de révolte comme je l’ai cru en lisant le résumé. A aucun moment elle dit clairement : « je laisse tout tomber, j’abandonne le projet, laissez-moi vivre ma vie. »
    Les changements qui s’opèrent en elle sont beaucoup plus progressifs, beaucoup plus subtils.
    Concernant les personnages, j’ai beaucoup aimé le groupe d’ado qui entoure Daisy, même s’ils ne sont pas tous présents en même temps. Que ce soit Megan, Matt ou Audrey, ils apportent tous quelque chose à Daisy. Même si Matt est celui pour qui elle commence à remettre sa vie en cause, c’est Audrey qui va avoir le plus d’impact sur elle.
    Du coté des adultes, je suis plus partagée.
    Quand on voit le sujet du livre, on se doute qu’à un moment ou un autre, quelqu’un va la trahir et je penche pour un des adultes de son entourage car ils peuvent faire bien plus de dégâts que les ados.
    Je me méfie de Cassie. Elle est très froide, indifférente et semble avoir une assurance qu’elle ne devrait pas avoir si elle était associé depuis si peu de temps au projet. Mais comme tout est fait pour nous la présenter comme la méchante, ou du moins celle qui pourrait l’être, je réserve mon jugement.
    Je me méfie tout autant de Mason. Parce que dans ce genre d’histoire qui met en scène une branche obscure du gouvernement, j’ai tendance à me méfier de celui qui a l’air sympa et ouvert. Peut-être que j’extrapole mais souvent c’est celui dont on se méfie le moins qui se révèle être le pire.
    Après le pauvre homme est peut être vraiment sympa.
    Il y a aussi cet homme, ce directeur du programme que tout le monde appelle Dieu parce qu’il décide de tout et que personne ne l’a vu. Je n’aime pas trop quand un chef est trop mystérieux. En général ils sont tout sauf honnêtes !

    Une autre chose m’intrigue aussi : Cassie semble être la seule « convertie » à vivre avec deux agents et je me demande pourquoi elle est plus sous « surveillance » que les autres. Ou peut-être n’est-ce dû qu’au fait qu’elle est morte plusieurs fois.
    Au fur et à mesure du livre, on sent qu’il y a quelque chose qui cloche, mais ce n’est qu’à la fin qu’on aura toutes les réponses.
    Je suis un peu plus circonspecte quant à l’épilogue à cause de la présence de certaines personnes qui me semblent incompatibles avec la nouvelle vie de Daisy. Mais je pense que la volonté d’avoir une fin heureuse l’a emporté sur la cohérence. Cependant, ce n’est vraiment qu’un minuscule défaut au regard de la qualité de ce livre qui a frôlé le coup de cœur.

    Un extrait : Je suis par terre.

    Je sens le soleil sur mon visage et, sous mon corps secoué de soubresauts, un sol mou... Ce n'est pas de l'asphalte, plutôt un revêtement spongieux dont l'odeur, infecte, me rappelle... celle de la piste de course du lycée, toute neuve, qui longe le terrain de football... C'est là que je me suis effondrée.

    Une femme est agenouillée près de moi, son téléphone collé à l'oreille.

    - Elle s'appelle Daisy ! hurle-t-elle. Je... Non, je ne connais pas son nom de famille !

    Je ne m'en souviens pas non plus.

    - Appleby ! crie un professeur.

    - Appleby, répète la femme, sans doute au médecin d'urgence. Je crois qu'elle fait une réaction allergique à... quelque chose.

    Les guêpes, ai-je envie de lui dire. Mais aucun souffle, pas un mot ne franchit mes lèvres.

    Brusquement, le groupe d'élèves qui m'entourent recule. Devant leurs yeux horrifiés, mes bras et mes jambes doivent s'agiter comme des serpents venimeux. J'essaie de respirer. Dans une ultime convulsion, je sens une infime portion d'oxygène entrer dans mes poumons.

    Je sais que ce sera l'une des dernières.

    Quand le professeur d'éducation physique nous a demandé de nous échauffer avant le match de volley, je me suis lancée sur la piste, ravie de ce bol d'air frais et des couleurs qu'il allait peut-être me donner. Mais j'ai tout de suite vu la menace, jaune et noir, bourdonner autour de moi. Elle n'a pas été longue et, en plus, elle n'était pas seule. J'ai pressé la touche 1 de mon téléphone à l'instant où j'ai senti la brûlure familière de la première piqûre.

    Maintenant, je n'espère plus qu'une chose : que Mason arrive à temps.

    Une vague d'apaisement m'envahit. Ce ne sera plus très long. Le cercle des élèves se resserre autour de moi. Mes yeux rebondissent de visage en visage. Ce sont tous des inconnus. L'année scolaire a débuté hier.

    Quelques filles sont en larmes. Le principal est arrivé et tente de les écarter. Mais ils sont comme des aimants, attirés par le frisson du drame.

    - Poussez-vous ! leur crie-t-il. Reculez ! L'équipe de réanimation va avoir besoin de place.

    Mais personne ne l'écoute. Personne ne bouge.

    Au contraire, ils forment un mur entre les secours et moi.

    Mon regard s'arrête sur une jolie fille à la peau mate dont le casier est juste à côté du mien. Elle ne pleure pas, mais son visage est ravagé.

    Peut-être serions-nous devenues amies.

    Je la regarde, sans qu'elle détourne les yeux, jusqu'au moment où mes paupières se ferment.

    Un hoquet saisit la foule.

    - Ô mon Dieu !

    - Faites quelque chose !

    - Sauvez-la ! supplie un garçon.

    J'entends les sirènes. Je perçois un mouvement de foule, des pas précipités, sans doute l'équipe médicale. S'agit-il de vrais ambulanciers ou de Mason et Cassie ?

    Mes bras s'affaissent.

    - Daisy, tiens le coup !

    J'aime croire que c'est la voix de mon amie potentielle, mais je n'ouvre pas les yeux pour vérifier. À la place, je laisse mon esprit dériver.

    Les sons deviennent de plus en plus sourds. Le monde glisse vers le néant. Je suis en train de mourir.

     

  • [Livre] En quête de l'Etranger

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    Résumé : La lecture de L’Étranger tient du rite d’initiation. Partout dans le monde, elle accompagne le passage à l’âge adulte et la découverte des grandes questions de la vie. L’histoire de Meursault, cet homme dont le nom même évoque un saut dans la mort, n’est simple qu’en apparence, elle demeure aussi impénétrable aujourd’hui qu’elle l’était en 1942, avec ses images à la fois ordinaires et inoubliables : la vue qui s’offre depuis un balcon par un dimanche d’indolence, les gémissements d’un chien battu, la lumière qui se reflète sur la lame d’un couteau, une vue sur la mer à travers les barreaux d’une prison. Et ces quatre coups de feu tirés en illégitime défense. Comment un jeune homme, qui n’a pas encore trente ans, a-t-il pu écrire dans un hôtel miteux de Montmartre un chef-d’œuvre qui, des décennies après, continue à captiver des millions de lecteurs? Alice Kaplan raconte cette histoire d’une réussite inattendue d’un auteur désœuvré, gravement malade, en temps d’occupation ennemie. «J’ai bien vu à la façon dont je l’écrivais qu’il était tout tracé en moi.» Le lecteur repère les premiers signes annonciateurs du roman dans les carnets et la correspondance de Camus, traverse les années de son élaboration progressive, observe d’abord l’écrivain au travail, puis les mots sur la page, accompagne l’auteur mois après mois, comme par-dessus son épaule, pour entendre l’histoire du roman de son point de vue. En quête de L’Étranger n’est pas une interprétation de plus : c’est la vie du roman.

     

    Auteur : Alice Kaplan

     

    Edition : Gallimard

     

    Genre : Essai

     

    Date de parution : 15 Septembre 2016

     

    Prix moyen : 22€

     

    Mon avis : Alice Kaplan nous livre une biographie de Camus avec comme ligne directrice la conception, la maturation, l’écriture et la publication de « l’Etranger », premier livre publié de l’auteur.
    J’ai beaucoup aimé voir les doutes et les critiques qui ont poussé Camus à remiser son premier livre et à se plonger dans l’écriture de l’Etranger.
    Le cheminement que va faire le manuscrit de l’Etranger pour être publié dans la France occupée, passer la censure allemande et collaboratrice est très intéressant à lire tout comme de voir les différentes critiques, positives ou négatives que ce manuscrit a inspiré aux proches de Camus et aux auteurs contemporains.
    Néanmoins, je trouve que cet essai fait 50 à 70 pages de trop : à trop s’étaler sur la question, l’attention finie par s’émousser. J’ai eu beaucoup de mal avec les notes : d’abord je n’ai pas apprécié de devoir à chaque note me reporter à la fin du livre, plutôt que d’avoir les notes en bas de page ; ensuite j’ai trouvé ces notes la plupart du temps inadaptées. A chaque fois que je m’attendais à avoir une précision sur ce qui avait généré le renvoie à la note, je me suis retrouvée face au titre d’un livre et de son auteur. J’aurais préféré une explication, avant que la source ne soit citée car je ne vais pas lire 15 livres pour avoir des explications. Du coup, très vite, j’ai cessé d’aller voir les notes car ces deux défauts étaient pour moi trop gênants.
    A plusieurs reprises, j’ai lu que « En quête de l’Etranger » était la biographie de l’œuvre. Je ne suis pas d’accord. D’une part parce que pour moi on explique une œuvre mais on n’en fait pas une biographie, d’autre part parce que j’en ai plus appris sur Camus, sur ses difficultés, ses aspirations, son caractère que sur l’œuvre en elle-même.
    Pour autant, après avoir lu cet essai, je pense que je ne vais pas lire l’Etranger, en tout cas pas dans un avenir proche. Voir le livre ainsi résumé en long, en large et en travers, la fin dévoilée, les divers développements aussi, m’ont fait perdre l’envie de le lire. Et contrairement à ce que pense Alice Kaplan, tout le monde n’a pas lu ce livre dans le milieu scolaire. Peut-être aurai-je du le lire avant de me plonger dans cet essai.
    La « vraie » identité de « l’arabe » m’a semblée de trop. Peut-être que Camus s’est effectivement inspiré de ce fait divers là pour créer le personnage de « l’arabe », mais s’il a décidé de ne pas lui donner de nom, de le réduire à sa nationalité, pourquoi dénaturer ses choix en cherchant à toute force à identifier l’homme ? Lui ou un autre, cela change-t-il le sens du roman et de l’acte commis ? A trop vouloir expliquer, analyser, on finit par obtenir l’effet inverse de celui recherché et, au lieu de donner envie de se plonger dans le roman, on en détache les lecteurs qui se retrouvent avec un livre vidé de sa substance à force d’être mâché et régurgité.

     

    Un extrait : Si l’on veut bien comprendre ce jeune homme talentueux qui entreprend d’écrire l’Etranger durant l’été de 1939, il n’est pas inutile de revenir aux cinq années que Camus souhaitait rayer de son existence – une période de mutations vertigineuses qui commence par son mariage avec Simone Hié.
    Quand il la rencontre, en 1933, Camus prépare sa licence à l’université d’Alger. Avec son fard à paupières bleu-mauve, ses faux cils et ses robes transparentes, Simone joue les vamps pour séduire Albert le coureur.
    Ils se marient un an plus tard ; lui a vingt-et-un ans, elle en a vingt. Ses manières flamboyantes cachent une réalité plus sinistre : depuis que sa mère, une ophtalmologue de renom, lui a injecté de la morphine pour apaiser des règles douloureuses, Simone est devenue toxicomane. Les amis de Camus le mettent en garde : n’est ce pas seulement pour tenter de la guérir qu’il épouse Simone ? Louis Bénisti lui reproche de tomber dans l’angélisme, ou de jouer les saint-bernard. Yves Bourgeois, qui a voyagé en compagnie du couple, se rappelle avec amertume une « séductrice presque professionnelle » ayant une « vocation […] de femme fatale ».
    Mais Camus n’y est pas pour rien : c’est la fiancée de son ami Max-Pol Fouchet qu’il séduit, et ce triomphe accroit encore sa ferveur amoureuse. Simone a le charme voluptueux d’un personnage de roman ; elle est la version camusienne de la Nadja de Breton, une âme errante. Pour un jeune homme bien décidé à devenir écrivain, elle apparaît comme l’épouse idéale : plus qu’une compagne, un mystère à contempler.
    L’oncle de Camus, Gustave Acault, n’approuve nullement ce choix. Il lance un ultimatum à son neveu : soit il quitte cette femme, soit il renonce à toute aide financière. Dans les deux familles, seule la mère de Simone, Martha Sogler, parait enchantée par cette union qui constitue à ses yeux le salut de sa fille. Elle installe les jeunes mariés dans une petite villa curieusement baptisée Villa Frais Cottage, située dans la rue n°12 du parc d’Hydra, une résidence moderne du faubourg d’Hydra, sur les hauteurs d’Alger. C’est un quartier résidentiel européen où Camus a souvent rendu visite à son professeur de lycée Jean Grenier, qui habite une grande villa dans la rue n°9. Grenier sait que Camus a fait du chemin pour en arriver là. Au début de la longue maladie de son élève, il s’était rendu en taxi à l’adresse indiquée sur le dossier scolaire ; sidéré par le dénuement de l’appartement de Belcourt, il avait trouvé le jeune homme embarrassé et sans voix. La rue de Lyon, artère encombrée d’un quartier populaire, était pour l’élégant professeur un territoire inconnu.

     

  • [Livre] Northanger abbey

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    Résumé : Par sa gaucherie, ses rêveries naïves et son engouement pour les vieux châteaux, Catherine Morland semble loin des modèles de vertu.

    Mais si cette jeune Bovary délicatement british n'a rien d'une héroïne, c'est que Jane Austen s'amuse !

    Et nous emporte, d'une plume malicieuse, d'un bout à l'autre du plus moderne des romans austeniens.

     

    Auteur : Jane Austen

     

    Edition : Milady

     

    Genre : Classique étranger

     

    Date de parution : 29 Janvier 2016

     

    Prix moyen : 6€

     

    Mon avis : Dès les premières pages, Jane Austen nous prévient : Catherine Morland est une anti-héroïne. Non qu’elle soit frivole, inconstante ou mal éduquée, mais elle est désespérément ordinaire. C’est une jeune fille de la campagne, dépourvue de talent particulier tel que la couture, le dessin ou la musique, ni laide, ni d’une grande beauté, ni excessivement vertueuse, ni scandaleuse, un peu naïve, avec très peu de connaissance du monde dans lequel elle s’apprête à faire son entrée aux coté de Mme Allen, voisine et amie de ses parents qui l’emmène en séjour à Bath.
    Mais, parce que l’auteur en a décidé ainsi, ce sera une héroïne.
    Ce n’est pas mon roman préféré de Jane Austen, je lui ai préféré Raison et sentiments qui reste mon roman préféré, mais ce n’est pas pour autant que je ne l’ai pas aimé. Malgré sa normalité Catherine est une jeune femme très agréable. Sa naïveté, ou plus exactement son manque de duplicité qui la rend quasiment incapable de déceler ce genre de comportement chez autrui, la fait paraître plus faible qu’elle ne l’est en réalité.
    En revanche, chez les personnages secondaires, on se retrouve vraiment dans le bain Jane Austen : Isabelle Thorpe est manipulatrice et fausse, son frère John Thorpe est vaniteux et d’un sans gène qui m’a vraiment énervée. J’ai regretté que les convenances de l’époque empêchent Catherine de lui dire ses quatre vérités parce que j’aurais vraiment adoré qu’il s’en prenne plein la tronche cet insupportable arrogant.
    Quant au général Tilney, son comportement est déplorable. Non seulement il se conduit d’une manière indigne de son rang, mais en plus il met en danger une autre personne par orgueil !
    Même si Mme Allen manque singulièrement d’intelligence, du moins est-elle sincère dans ses affections et digne d’être l’amie des Morland.
    De même Henry et Eléonore Tilney, les enfants du général, malgré la grossièreté de leur père, sont-ils parfaitement sympathique et honnête. Catherine a de la chance d’avoir Eléonore pour amie (et inversement).

    Comme toujours chez Jane Austen, tout est bien qui fini bien, mais j’aurais aimé que les Thorpe et le général Tilney récoltent ce qu’ils avaient semé.

    Un extrait : Au moment où Catherine Morland va être jetée dans les difficultés et les dangers d’un séjour de six semaines à Bath, et pour le cas où les pages suivantes ne parviendraient pas à documenter suffisamment le lecteur, ajoutons quelques mots à ce qui a déjà été dit sur elle : Son cœur était affectueux ; son caractère, gai et ouvert, sans vanité ni affectation. Ses manières perdaient leur gaucherie effarouchée. Sa personne était avenante et, dans ses bons jours, jolie ; son intelligence à peu près aussi inculte que l’est ordinairement l’intelligence d’une fille de dix-sept ans.

    On pourrait supposer que, l’heure du départ approchant, l’anxiété maternelle de Mme Morland fut très cruelle ; mille pressentiments des maux qui pouvaient résulter pour sa chère Catherine de cette terrible séparation devaient accabler son cœur et la « jeter dans les larmes », le dernier ou les deux derniers jours de leur vie en commun ; et les avis les plus topiques devaient naturellement fluer de ses lèvres sages dans leur entretien d’adieu, en son cabinet. Des instructions en vue de déjouer la violence de tels nobles et baronnets, qui se plaisent à enlever de vive force les jeunes femmes et les conduisent en quelque ferme isolée, devaient, en un tel moment, soulager le trop plein de son cœur. Qui ne le penserait ? Mais Mme Morland savait si peu de chose des lords et baronnets qu’elle ne dit pas un mot de leur coutumière malfaisance et ne se méfia pas du danger que leurs machinations pouvaient faire courir à sa fille. Ses avis se restreignirent aux points suivants : « Je vous prie, Catherine, de vous envelopper toujours bien chaudement le cou, pour rentrer le soir ; et je désire que vous teniez à jour le compte de l’argent que vous dépenserez ; voici un petit livre à cet effet. »

    Sally, ou plutôt Sarah (comment une jeune fille de grandes manières atteindrait-elle seize ans sans donner à son nom de tous les jours une forme plus romantique ?) doit, de par la force des choses, être en l’occurrence l’amie intime et la confidente de sa sœur. Cependant (est-ce assez remarquable !) elle ne contraignit pas Catherine à faire telles promesses solennelles : écrire par chaque poste, fournir des renseignements sur tout le monde, relater en détail les conversations entendues à Bath.

    Vraiment toute chose relative à cet important voyage fut traitée par les Morland avec une modération et un calme mieux d’accord avec les usages de la vie courante qu’avec cette sensibilité affinée que devrait mettre en éveil la première séparation d’une héroïne et de sa famille. Son père, au lieu de lui ouvrir un compte illimité chez son banquier ou même de lui mettre dans la main une centaine de livres en bank-notes, lui donna seulement dix guinées et lui promit de lui envoyer d’autre argent quand elle en aurait besoin.

    Sous ces modestes auspices, le voyage commença. Il fut dénué d’événements. Ni voleurs ni tempêtes n’intervinrent, ni d’accident de voiture propice à la présentation d’un héros. Rien de plus alarmant ne se produisit, qu’une crainte, – savoir : si madame Allen n’avait pas oublié ses socques dans une auberge ; et heureusement cette crainte était sans fondement.

     

  • [Livre] Ma vie d'esclave chez les mormons

     

    Je remercie la masse critique de Babelio et les éditions Jourdan pour cette lecture.

     

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    Résumé : Dix ans après son mariage, dans un cas historique qui a secoué la nation américaine et mené à la réécriture des lois, Ann a divorcé de son puissant mari mormon, prétextant la négligence et les traitements cruels.

    En 1876, Ann Eliza a publié une autobiographie intitulée « Wife n° 19 ».

    Elle explique la raison de son écriture : « Si j’entreprends la rédaction de cet ouvrage, c’est pour montrer au monde le véritable visage du mormonisme et dénoncer les pitoyables conditions de vie de ses femmes, réduites au pire esclavage qui soit. Ce n’est pas seulement leur corps qui leur est ravi, mais également leur âme. »

    Son autobiographie est un document poignant révélant comment Brigham Young, président de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, et d’autres hommes mormons vivaient à la tête de nombreux ménages, visitant leurs femmes tour à tour, devenues de véritables servantes.

    Ann Eliza Young a parcouru les États-Unis pour expliquer la dégradation de la polygamie et du mormonisme, mais aussi pour révéler la véritable personnalité de Brigham Young lui-même. Elle a témoigné devant le Congrès américain en 1875. Ses remarques ont contribué à un passage de la loi qui a réorganisé le système judiciaire du territoire de l’Utah, aidant le gouvernement fédéral à poursuivre les polygames.

     

    Auteur : Ann Eliza Young

     

    Edition : Jourdan

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 13 juillet 2016

     

    Prix moyen : 19€

     

    Mon avis : Avant de commencer mon avis, il convient de préciser que l’église de Jésus Christ des Saints des Derniers Jours n’est pas considéré comme une secte et rassemble près de 15 millions de membres dont un peu plus de 6 millions aux USA ce qui en fait la quatrième confession chrétienne la plus importante des Etats-Unis.
    Il faut aussi noter que la polygamie a été interdite par l’Eglise en 1889 et qu’aujourd’hui celle-ci prône, comme la plupart des religions chrétienne l’abstinence en dehors du mariage et la fidélité absolue à un seul et unique époux.
    Le mariage plural ou polygamie est toujours pratiqué par une minorité dissidente qui a refusé l’évolution de l’Eglise et se qui se fait appeler l’église fondamentaliste de Jesus-Christ des Saints des derniers jours. L’Eglise officielle ne les reconnaît pas comme des mormons.
    A l’époque où Ann Eliza a écrit son témoignage, du vivant de Brigham Young, la pratique de la polygamie battait son plein.

    Ann Eliza est fortement opposée au mormonisme et à la polygamie et on ne peut pas ne pas le savoir tant elle est virulente sur le sujet.
    Elle veut tellement convaincre du bien fondé de son point de vue, qu’elle en perd toute objectivité et se contredit régulièrement. Elle dit à plusieurs reprises que les mormons sont manipulés par leur leader, Brigham Young, qui n’est ni plus ni moins qu’un malfrat entouré d’hommes de main faisant régner la terreur, puis quelques pages plus loin fait des généralités en disant que tous les mormons sont des êtres vils et violents.
    Concernant la polygamie, elle refuse de concevoir ou d’accepter que d’autres femmes puissent trouver un équilibre dans cette pratique. D’ailleurs elle dénigre non seulement celles qui lui disent y trouver leur compte, mais aussi celles qui déclarent que la polygamie en elle-même n’est pas en cause, mais que c’est la manière de la mettre en œuvre qui est lamentable (mariages forcés, mariages d’adolescentes avec des hommes plus âgés, abandon des épouses plurales par leurs époux qui ne subviennent pas à leurs besoins…). J’ai effectivement eu l’impression qu’au lieu de se serrer les coudes entre elles, les femmes passaient leur temps à s’opposer les unes aux autres sans se préoccuper que certaines d’entre elles avaient été contraintes au mariage.
    Ce trait de caractère entier et manquant d’objectivité apparaît également quand elle parle des indiens. Pour elle les indiens sont des monstres qui ne sont là que pour s’approprier les biens d’autrui par ruse voire violence pouvant aller jusqu’au meurtre. Quand on la voit parler des indiens de la manière dont elle reproche à Brigham Young de parler des non-mormons, on a du mal à lui accorder du crédit sur le reste de son histoire.
    Ann Eliza reproche à l’Eglise mormone beaucoup de chose, certes réelles, mais qu’elle semble croire réservées aux membres de cette religion. Je pense qu’elle a du finir par se rendre compte que quelque soit la religion, il y a des hommes qui abandonnent leurs femmes (la différence est qu’ils divorcent, les laissant sans ressources, pour en épouser une autre), d’autres qui les maltraitent, il y a des pères qui ne s’occupent pas de leurs enfants et des escrocs… je ne crois pas qu’elle réalise que le problème ne vient pas de la religion, mais des hommes en eux même. Quand au fait que les femmes sont considérées comme inférieures… c’est le cas dans la majorité des religions et si aujourd’hui la plupart d’entre elles ont évoluées, à l’époque ou Ann Eliza a écrit son livre, les femmes étaient loin d’être les égales des hommes, quelque soit leur religion.

    Ann Eliza est si pressée de faire valoir son point de vue que son texte, au fil des chapitre, perd en clarté et en cohérence : mots manquants ou au contraire deux mots côte à côte (de toute évidence, elle a voulu mettre un autre mot en oubliant de rayer le premier qu’elle avait choisi), répétition de phrases presque identiques à la suite l’une de l’autre, inversion de termes (ses compagnons et lui de voyage)…
    De toute évidence le traducteur et l’éditeur ont souhaité laisser le texte en l’état, mais je doute du bien fondé de ce choix car le texte est plus difficile à suivre et toutes ces erreurs rendent la lecture fastidieuse. Ca n’aurait pas été dénaturer le texte d’en corriger les coquilles. N’est ce pas là le travail de l’éditeur, même si l’auteur est décédé ?

    Le titre du livre est peut être mal choisi parce que je l’ai terminé et j’attends toujours de voir « la vie d’esclave » qu’elle a mené. De tout le livre, l’auteur ne nous livre que quelques anecdotes de sa vie personnelle au milieu d’un procès général de la religion mormone qui va de sa création par Joseph Smith à son apostasie.

    Puisqu’elle nous livre là un témoignage, j’aurais préféré en savoir plus sur son mariage et sur le traitement cruel qu’elle reproche à Brigham Young (et que vu le personnage je ne remets pas en doute) plutôt que de nous présenter les cas des dizaines de personnes dont elle nous parle.
    Je ne vois pas en quoi les massacres des Gentils (les non mormons) ou des apostats alors qu’elle n’était qu’une enfant, les missions à l’étranger, l’organisation interne de l’Eglise ont à voir avec sa prétendue vie d’esclave.
    Ici j’ai l’impression qu’on nous a promis un documentaire sur la révolution française et que après avoir retracé toute l’histoire de la royauté en France, le documentaire se termine par : « Et puis un jour le peuple a craqué et la révolution française a eu lieu et a mis fin à la monarchie ».
    En gros on reste un peu sur notre faim.

    Un extrait : Les mormons se retrouvèrent dans un pétrin sans nom lorsqu’ils intégrèrent la polygamie à leur mode de vie.
    Si notre famille, qui ne comptait alors que deux épouses, s’en sortait relativement bien, ce n’était malheureusement pas le cas de toutes les familles. Dans celles de mon oncle, par exemple, la transition ne se fit pas si facilement.
    En Illinois, Milo Webb, un des frères de mon père, avait épousé une femme charmante à bien des égards. Elle vouait à son mari un amour absolu et ce dernier le lui rendait au centuple. Tous deux membres de l’Eglise mormone, ils vécurent en parfaite harmonie jusqu’en 1846, date de la construction du Temple de Nauvoo.
    Les hommes que les autorités jugeaient dignes de pénétrer dans l’édifice pour y recevoir les dotations sacrées se virent confier que la polygamie faisait à présent partie intégrante de leur religion. Ils ne devaient pas se déshonorer en se présentant pour la cérémonie de Dotation avec une seule épouse à leur bras. Cette première femme, l’élue de leur cœur, la mère de leurs enfants, leur partenaire et âme sœur, qui ne reculait devant aucun sacrifice, qui s’était liée à eux pour le meilleur et surtout pour le pire, qui croyait que seule la mort pouvait les séparer et qui avait fait sien le Dieu et les proches de son mari, ne suffisait plus désormais. Si un homme avait l’audace de s’en tenir aux dictats de sa conscience et se présentait à la cérémonie accompagné de sa seule épouse, les autorités s’empressaient de le couvrir de ridicule. Brigham et Kimball ne manquaient d’ailleurs jamais une occasion, ni de se moquer, ni de mettre en garde les fidèles qui s’y risquaient : seuls les hommes polygames pourraient entrer dans le royaume de Dieu.
    A l’instar de mon père, mon oncle était un homme consciencieux et fidèle à sa religion. Si c’était là la volonté du Seigneur, il lui fallait obéir sans plus attendre. Il demanda donc en mariage une jeune fille du nom de Jane Matthews. La jeune fille demanda conseil aux autorités de l’Eglise et, comme celles-ci lui confièrent que le salut de son âme en dépendait, elle accepta. Sous le regard de sa première femme, mon oncle et Jane Matthews reçurent donc leurs dotations et furent scellés l’un à l’autre.
    Sa première femme lui avait donné son consentement à contrecœur. Elle ne toléra l’idée de se retrouver dans une relation polygame que par devoir religieux. Ni elle, ni son mari n’avaient mesuré toute l’ampleur du malheur qui allait s’abattre sur leur famille. S’ils avaient su dans quelle impasse ils s’apprêtaient à s’engouffrer, je pense qu’ils y auraient songé à deux fois.
    La nouvelle Mme Webb s’installa dans son nouveau foyer et y demeura jusqu’au départ de Nauvoo. Pendant ce court laps de temps, cette famille jadis heureuse, était devenue méconnaissable ! L’amour et la félicité n’étaient plus ; la discorde et la haine régnaient à présent en maîtres.
    La première épouse se rendit compte très vite que la polygamie n’était pas une mince affaire. Contrairement à ce qu’on lui avait pourtant affirmé, le temps n’arrangeait rien. Elle en vint à détester cordialement la nouvelle venue : elles avaient beau partager le même toit, elle refusait obstinément d’adresser la parole à sa rivale. La jalousie eut presque raison de sa santé mentale ; elle était devenue d’une violence sans nom.

     

  • [Livre] Ma part de Gaulois

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    Résumé : C’est l’année du baccalauréat pour Magyd, petit Beur de la rue Raphaël, quartiers nord de Toulouse. Une formalité pour les Français, un événement sismique pour l’“indigène”. Pensez donc, le premier bac arabe de la cité. Le bout d’un tunnel, l’apogée d’un long bras de fer avec la fatalité, sous l’incessante pression énamourée de la toute-puissante mère et les quolibets goguenards de la bande. Parce qu’il ne fait pas bon passer pour un “intello” après l’école, dans la périphérie du “vivre ensemble” – Magyd et ses inséparables, Samir le militant et Momo l’artiste de la tchatche, en font l’expérience au quotidien.
    Entre soutien scolaire aux plus jeunes et soutien moral aux filles cadenassées, une génération joue les grands frères et les ambassadeurs entre familles et société, tout en se cherchant des perspectives d’avenir exaltantes. Avec en fond sonore les rumeurs accompagnant l’arrivée au pouvoir de Mitterrand, cette chronique pas dupe d’un triomphe annoncé à l’arrière-goût doux-amer capture un rendez-vous manqué, celui de la France et de ses banlieues.
    Avec gravité et autodérision, Ma part de Gaulois raconte les chantiers permanents de l’identité et les impasses de la république. Souvenir vif et brûlant d’une réalité qui persiste, boite, bégaie, incarné par une voix unique, énergie et lucidité intactes. Mix solaire de rage et de jubilation, Magyd Cherfi est ce produit made in France authentique et hors normes : nos quatre vérités à lui tout seul !

     

    Auteur : Magyd Cherfi

     

    Edition : Actes Sud

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 17 août 2016

     

    Prix moyen : 20€

     

    Mon avis : Quand j’ai reçu ce livre et que je me suis renseignée sur l’auteur, la seule chose que l’on m’a dite sur lui est qu’il était le parolier de Zebda. On ne peut pas dire que cette information, donnée avec presque des étoiles dans les yeux, m’ait donné envie de le lire dans la mesure où je trouve les chansons de ce groupe très médiocres.
    Concernant « Ma part de Gaulois », l’écriture en soi n’est pas mauvaise, même si, à plusieurs reprises j’ai eu l’impression qu’il manquait des mots pour que la phrase soit correcte et que j’ai regretté qu’il délaisse souvent une écriture simple comme pour montrer que Lui, il sait écrire.
    Au final l’ensemble est brouillon, le récit a beau être chronologique on a une impression de décousue qui n’est pas agréable et qui rend la lecture pénible.
    Du coté des personnages, il n’y en a pas uns pour rattraper l’autre et on se demande si Magyd Cherfi ne grossi pas le trait et ne caricature pas un peu ses anciens camarades tant il y a de hargne, de mépris dans chaque paroles, dans chaque actes. Beaucoup d’insultes aussi, ça, ça m’a gênée. Parce que je veux bien croire qu’il ait été insulté plus souvent qu’à son tour, mais était-il obligé de les écrire noir sur blanc à chaque page ?
    Si on l’en croit, la cité cultive la haine du blanc, du français. La France ils la veulent bien, avec les allocs, le salaire minimum, les soins gratuits, mais surtout sans les français.
    Alors je crois volontiers qu’il y ait des personnes qui agissent et réagissent comme ça, aujourd’hui encore on voit ce genre de comportement et de pensées chez certaines personnes, mais je ne peux pas croire qu’à l’intérieur d’une cité, les habitants soient TOUS dans cet état d’esprit.
    J’ai lu une réaction d’une personne qui vit dans cette cité et qui a très mal pris non seulement le bouquin mais aussi les choses que Magyd Cherfi aurait dites pour en faire la promo. Cela ne m’étonne pas car il fait un amalgame. Après tout, il cite quelques personnes nominativement, puis déclare que tous sont comme ça dans la cité. J’ai eu le sentiment que ce livre relevait plus de la vengeance que du témoignage.
    Pas convaincue du tout !

    Un extrait : Voilà donc qu’un jour je suis sorti sans cacher l’objet de tous les délits. Je me suis assis, sûr de mon fait. Pour une fois sans trembler j’ai ouvert mon livre et tranquillement j’ai basculé dans les jabots, les hauts-de-forme, les gilets de soie, les robes à taille haute remontées sous les seins et largement décolletées du roman « Une vie » de Maupassant. C’est là qu’étaient les miens, ces héros du XIXème, fardés romantiques et sans muscles.
    Je lisais depuis quelques minutes quand trois lascars, Mounir, Saïd et Fred le Gitan se sont approchés de moi…

    - Qu’est ce que tu fais ?
    - Heu…je lis.
    - T’es un pédé ou quoi ? Pourquoi tu fais ça ?
    - Non mais c’est pour l’école.
    - Qu’est ce qu’on s’en fout de l’école, tu veux des bonnes notes, c’est ça ?
    - Non, non…
    - T’as qu’à lui dire à ton prof qu’on est pas des pédés !
    - D’accord
    - D’accord… !? T’es français, c’est ça, tu veux sucer les Français ?
    - Non.
    - Et ça c’est quoi ? Montre !
    - Il m’a arraché le livre des mains, a lu :
    - Une vie…de Mau…passant, c’est un pédé lui aussi !
    - Mais non c’est pas un pédé.
    - C’est quoi alors ?
    - Un écrivain.
    - C’est ça, c’est un pédé.

    Saïd a jeté le livre non sans l’avoir éclaté de la pointe de sa chaussure, j’ai pas bougé et une deuxième coup de pied circulaire me coucha dessus. Le temps de quelques étoiles tournoyantes, je ne savais plus s’il s’agissait de mes rêves récurrents ou d’une banale réalité orchestrée par mes soins. Enfin il était là, le coup de pompe tant attendu. Enfin je le tenais, le prétexte de la rupture.

     

  • [Livre] Les filles de Mr Darcy

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    Résumé : Vingt années après Orgueil et Préjugés, nous faisons la connaissance des cinq filles d’Elizabeth et Darcy. Alors que leurs parents sont en voyage à Constantinople, les demoiselles viennent passer quelques mois à Londres chez leur cousin Fitzwilliam. La découverte de la vie citadine, des plaisirs et des disgrâces qu’elle offre, associée au caractère fort différent de ces jeunes personnes, va mener à des aventures, et des amours, inattendues, dans un cadre particulièrement mondain. De la tante Lydia - toujours aussi frivole - à Caroline Bingley - devenue lady Warren - on retrouve avec joie certains personnages créés par Jane Austen.

     

    Auteur : Elizabeth Aston

     

    Edition : Milady

     

    Genre : Romance

     

    Date de parution : 18 Mai 2012

     

    Prix moyen : 9€

     

    Mon avis : Dans ce livre j’ai apprécié que les personnages principaux d’orgueil et préjugés soient absents. Même âgés de 20 ans de plus, trop de personnes ont imaginé comment serait la vie future d’Elizabeth et Darcy ou de Jane et Bingley pour ne pas chercher la petite bête en voyant cette vie relatée d’une manière qui pourrait différer de ce qu’on a pu imaginer.
    Ici, donc, on ne s’attache qu’à des personnages nouveaux, et plus particulièrement les filles d’Elizabeth et Darcy, ou à des personnages secondaires tels que Lydia, Caroline Bingley, les Gardiner ou encore le colonel Fitzwillian, cousin de Darcy.
    Ce dernier n’a pas évolué dans le bon sens. Quand Elizabeth l’a rencontré, 20 ans plus tôt, c’était un homme ouvert d’esprit et sympathique. Aujourd’hui, à 50 ans, c’est un hypocrite rétrograde, considérant que les femmes ne sont là que pour servir les intérêts des hommes. Autant dire que les conflits entre lui et les filles de Darcy sont légions. D’autant plus qu’il se permet des décisions que jamais Darcy ne lui a laissé la latitude de prendre.
    Letty, l’ainée des filles Darcy est insupportable. C’est celle que j’ai le moins appréciée. Je l’ai trouvée négative et d’une grande hypocrisie. J’ai été incapable de ressentir de l’empathie pour elle, quelques soit les mésaventures qui aient pu lui arriver.
    Belle et Georgina m’ont rappelées leur tante Lydia. Mais contrairement à Lydia, c’est la répression permanente exercée sur elles par leur sœur Letty et par leur cousin Fitwilliam qui les pousse à se conduire de manière de plus en plus scandaleuse.
    Alethea est encore très jeune, et les quelques « infractions » qu’elle commet sont plus dues à son insouciance qu’à un désir de choquer le bonne société. C’est une jeune fille volontaire, peu intéressée par les bals, les soupirants et tout ce qui fait vibrer ses sœurs, mais qui est prête à tout pour la musique, un art qu’elle pratique avec talent et qui, bien entendu, n’a pas la faveur de sa sœur et de son cousin qui trouvent qu’une jeune fille ne doit rien faire d’autre que broder, chanter de vieilles chansons anglaises et toutes autres activités sans intérêt pour une adolescente pleine de vie.
    Camilla, la seconde des filles Darcy, est celle que j’ai préférée. Elle n’a pas l’orgueil et les préjugés qu’on eut ses parents à son âge mais a leur spiritualité, leur intelligence et leur sons de la répartie. Elle ne se lamente pas devant l’adversité, n’écrit pas à son père à tort et à travers pour se plaindre, fait ce qu’il faut pour garder son indépendance et ne se laisse certainement pas impressionner par les colères de son cousin. La seule chose qui la perturbe c’est l’attitude parfois déplacée et souvent désinvolte de ses jeunes sœurs et celle insupportable de Letty.
    On devine sans mal comment va se finir le roman pour Camilla et Alethea, mais le sort de ses sœurs est plus surprenant.
    L’ambiance rappelle bien celle d’orgueil et préjugés tout en montrant que les mœurs ont évolués pendant ces vingt années, au grand dam de certains anciens comme Fitzwilliam ou Mr Gardiner.
    Un petit bémol : à trop vouloir faire ressortir les traits de caractères de leur famille chez les sœurs (les jumelles ressemblent à leur tante Lydia, Letty a le caractère négatif de leur tante Mary, Camilla est un mélange parfait de ses deux parents et Alethea ressemble beaucoup à son père), on finit par se retrouver avec une histoire quasi identique sur certains points (Pourquoi y-a-t-il 5 filles Darcy comme il y avait 5 filles Bennet ? Ou encore l’histoire de Georgina qui ressemble à s’y méprendre à celle d’une de ses tantes). Les détails qui ont été modifiés ne sont pas assez importants pour que cette impression de déjà-vu s’estompe.
    Finalement, j’ai bien aimé ce livre, mais dans la mesure où il est le premier tome d’une série consacrée à l’entourage des Darcy, que ce soit ses filles ou d’autres parents. J’ai considéré ce tome comme une sorte d’introduction, permettant de présenter les personnages et de planter le décor, surtout pour ceux qui ne connaissent pas Orgueil et préjugés.

    Un extrait : Un grand et beau valet en livrée du matin promenait deux Cavaliers King Charles. Remuant leurs queues duveteuses, les chiens sautillaient et poussaient de légers jappements. Une vendeuse d’huîtres vantait sa marchandise d’une voix braillarde, et, de l’autre côté de la place, un rémouleur criait pour demander de l’ouvrage. Un petit livreur flânait le long des grilles en sifflant, un paquet sous un bras, et un autre qu’il faisait tournoyer au bout d’une ficelle.

    — Il y a des gens pour qui le chant du coq, le roulement de la charrette du fermier et les bêlements des moutons sont insupportables, fit-elle remarquer sans détourner les yeux de l’animation de la rue.

    — Camilla, comment pouvez-vous dire une chose pareille ? La tranquillité, la douce sérénité de la campagne, la beauté silencieuse de nos bois et de nos rivières… Comme tout cela me manque !

    Camilla n’écouta Letty que d’une oreille tandis que celle-ci se lançait dans sa complainte favorite : combien la situation était injuste, et comme leurs parents avaient fait preuve d’inconscience, de les avoir arrachées ainsi à la paix et à la félicité du Derbyshire pour les traîner dans une maison londonienne.

    — C’est surtout pour Belle et Georgina que cela va être dur : elles vont détester leur séjour ici.

    Camilla, prudente, se garda bien de lui faire part de son avis et éclata de rire en voyant les deux épagneuls emmêler leurs laisses autour des beaux mollets du domestique, menaçant de le faire tomber à la renverse.

    — Éloignez-vous de cette fenêtre ; vous ne devez pas vous asseoir là, à la vue de n’importe qui.

    — Quel mal y a-t-il à ce que l’on me voie ? Je ne suis pas en train de lorgner le valet ; je ne fais qu’admirer le spectacle.

    — Lorgner le valet, vraiment ! Camilla, ne dites pas des choses pareilles. Je sais que vous plaisantez, mais les autres ne comprendront pas votre sens de l’humour et pourraient vous prendre au sérieux.

    — Il faudrait être idiot pour me prendre au sérieux, et depuis quand l’avis des idiots nous importe-t-il ? De plus, ce valet est vraiment très beau.

    Letty s’exprima avec une gravité non feinte :

    — Parler avec tant de liberté risque de vous attirer de gros ennuis ! Mr Fitzwilliam ne verrait pas cela d’un bon œil.

    Camilla le savait bien. Mr Fitzwilliam, leur cousin, un homme gentil et coquet âgé de cinquante ans, avait quitté l’armée et était désormais député au Parlement. Il tenait la bienséance en haute estime, et attendait des femmes de sa famille qu’elles observent le décorum. Il avait assurément un autre visage qu’il réservait à ses amis intimes et compagnons de longue date, au club et lors de manifestations sportives – une facette bien plus grossière de sa personnalité, qui le poussait à s’encanailler avec des demi-mondaines. Toutefois, c’était un aspect de sa vie qu’il n’aurait jamais dévoilé à Aubrey Square.

    Elle savait aussi que, parmi les cinq sœurs, Letty avait la préférence de Mr Fitzwilliam et ce depuis toujours.

    Camilla n’en prenait pas ombrage : elle se savait totalement opposée à l’idéal féminin de son cousin. En plus d’avoir hérité de son père sa force de caractère, elle était dotée d’un sens de l’humour trop aiguisé, d’un esprit trop brillant et d’une repartie trop spirituelle. Elle n’était pas une beauté classique comme Letty, et avait parfaitement conscience de mettre son cousin mal à l’aise : elle le voyait souvent se demander avec crainte à quoi elle pouvait bien penser.

     

  • [Livre] Les belles vies

     

    Je remercie les éditions Sarbacane pour cette lecture

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    Résumé : Vasco et Djib sont inséparables depuis leur naissance. Turbulents, pas vraiment délinquants, ils cumulent les bêtises plus ou moins graves, les rires et les bleus. Vasco est en CFA BTP, Djib passe en première S.

    Leur dernière rixe est pourtant celle de trop… Afin de leur mettre du plomb dans la tête, leurs parents décident d’employer les grands moyens : ils envoient les deux ados dans la Nièvre, le temps d’un été chez un ami du père de Vasco, entrepreneur local qui propose ses services comme famille d’accueil pour la DDASS. C’est dans cette campagne éloignée de tout, France profonde dont on parle peu, qu’ils vont rencontrer et se confronter à une autre forme de jeunesse : celle des enfants élevés par celle que tous surnomment « Tata », une femme qui accueille des enfants placés et donne sa vie aux autres.

     

    Auteur : Benoît Minville

     

    Edition : Sarbacane

     

    Genre : Jeunesse

     

    Date de parution : 5 octobre 2016

     

    Prix moyen : 15,50€

     

    Mon avis : Au début du livre, je n’ai pas aimé Vasco. C’est le type même de gars des cités qui joue des poings pour imposer sa vision de la vie. Et qui ne réfléchit pas une seconde non plus aux ennuis qu’il peut s’attirer, ou pire attirer aux autres. Quand lui et Djib sont chez les parents de Vasco après que leurs familles aient dû aller les récupérer au commissariat, il prend à la légère ce qu’il vient de faire, il balaie les inquiétudes de Djib, qui n’avait rien demandé, d’un revers de la main.

    Mais au fil des pages, il laisse un peu tomber son masque de caïd et révèle une grande sensibilité.
    Djib est plus posé, plus mature. Les ennuis que les garçons se sont attirés, il ne les a pas cherchés, même si c’est pour le défendre que Vasco s’est emporté et que c’est pour ne pas laisser tomber son pote que Djib est entré dans la mêlée. Il a un certain effet apaisant sur son copain.
    La mère de Vasco a l’idée de les envoyer chez une connaissance d’un ami, une personne qui s’occupe d’enfants de la DDASS dans un petit village perdu au fond de la Nièvre.

    Là-bas, Vasco et Djib vont vivre comme dans une colonie de vacances entre pêche, soirée DVD, baignade au lac et bon petits plats, mais ils vont surtout voir la chance qu’ils ont d’avoir des parents qui les aiment, qui se préoccupent d’eux, même si la vie n’est pas idéale et qu’ils ne roulent pas dur l’or.
    Benoit Minville n’enjolive pas. Dans son histoire, on n’est pas dans le « et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». A travers ses personnages, il dénoncent un peu le système qui broient les gosses à force de ne voir en eux que des numéros de dossier, comme Gwen et Gaétan, maltraités par leurs parents mais qui pourraient leur être rendus à tout instant, la mère de Dylan et Jessica, immature et volage qui pourrait également récupérer ses enfants dès lors qu’elle remplirait les conditions fixées par le juge, et peu importe si Dylan est en apprentissage, peu importe si toutes ses chances de s’en sortir sont détruites par cette décision de justice qui serait prise sans qu’il soit consulté.
    Les amitiés se créent, mais avec toujours le pincement au cœur quand on se rappelle que cela ne durera que le temps d’un été.
    Il n’y a pas de grande leçon de morale, on ne fait pas des sermons à n’en plus finir à Vasco et Djib, on les laisse grandir, s’épanouir au contact de Tata, Tonton et les enfants qu’ils accueillent. Tout n’est pas rose, loin de là, ils sont confrontés à la suspicion des villageois, à l’animosité de certains jeunes du village, aux rivalités et à l’angoisse concernant l’avenir, mais ils avancent, à leur rythme, prennent des décisions. Tonton et Tata guident, sans imposer, sans culpabiliser. Peut-être parce qu’ils ont plus de distance que les parents de Vasco et Djib, ils leur mettent moins la pression.
    On referme le livre sans certitudes : Vasco et Djib vont-ils vraiment conserver l’attitude qu’ils ont adoptée ou vont-ils retomber dans leurs travers avec la routine ? Et les enfants que Tata et Tonton ont en garde : Dylan, Jessica, Chloé, Gwen et Gaëtan, Farah, Sirine et Kamel ? On ne sait rien de ce qui va finalement se passer pour eux. Et personnellement, je n’espère même pas une suite pour le découvrir.
    Ils vont vivre leur vie, tout simplement, et on peut imaginer chaque décision qui peut mener à tant de destin différent pour chacun d’eux.
    A-t-on vraiment besoin de certitudes ?

    Un extrait : Vasco et Djib se demandent si ça ne va pas être plus grave qu’ils le pensaient.
    Fesses vissées sur son banc, les mains dans les poches de son jean, Vasco tente de se vider la tête en suivant le parcours d’une araignée sur le mur blanc blindé d’affiches de prévention. Djib a la trouille au ventre ; il n’a qu’à fermer les yeux et ceux de sa mère apparaissent, la nausée n’est pas loin.
    Un policier passe devant eux. Les bras chargés de paperasses, il rentre dans le bureau d’à côté.

    Le commissariat est calme. Vasco glisse ses mains dans ses cheveux gavés aux Pento et tente un coup d’œil à son meilleur pote, son frère de cœur… Djib se contente de hausser les épaules. Le silence est interminable, interrompu parfois par des bruits de doigts sur les claviers, des éclats de voix, une machine à café qui vrombit.
    Un autre agent arrive – il marche d’un pas décidé, suivi d’une vieille dame qui peine à tenir la distance. Vasco s’attarde sur le bandage qu’elle porte au front, soupire et se penche vers Djib.

    - Tu vas la rappeler, Samia ?
    - Je t’ai dit d’oublier mon nom.
    - Putain, je t’ai dis que j’étais désolé !...Tu crois que je m’en veux pas ?
    - Me soûle pas, Vasco.

    Du fond de sa colère, Djib ne comprend toujours pas comment tout ça a pu déraper si vite.
    Enfin, si. Il  a toujours une fille dans l’histoire, avec Vasco, quand ça tourne mal. Une fille. Un autre mec. Et Vasco… A chaque fois, Vasco – le poing dressé et les neurones en cale sèche. Déjà, tout môme, au parc en bas de la cité, il s’attaquait à ceux qui voulaient piquer son goûter à Djib…
    Et voilà, encore une fois. Il a fallut que ça arrive aujourd’hui, dernier jour de bahut.

    Comme toujours, ça commençait bien, pourtant. Vasco était déjà en vacances, sa première année de CFA sous le bras, celle-ci ayant oscillé entre « médiocre » et « progrès mais peut mieux faire ». Il était venu chercher son pote à la sortie. Au programme de la soirée : tournoi de FIFA et du son.
    Djib, lui, terminait l’année sur les rotules, après une histoire stressante avec une fille « chouette mais caractérielle » et un passage en première S obtenu à la sueur du front. Et pour tout dynamiter : ce gars de première STMG, Malik, un chaud, beau gosse, le genre qui n’hésite pas à tenter sa chance avec les filles casées.
    Le dernier jour de l’année…Celui qui libère. Dans sa classe, peu avaient tenu jusqu’au bout de la journée – occasion trop belle de s’offrir un aprem de vacances avec un peu d’avance, surtout que la plupart des potes restaient convaincus que la seconde était « la dernière année tranquille, avant les choses sérieuses ».
    Pour Djib, pas question de sécher : il devait bien ça à sa prof de maths, elle ne l’avait jamais lâché et sa mère l’aurait fait culpabiliser… « Il ne faut jamais décevoir ceux qui croient en toi ». Encore raté, pour le coup…
    Tout est allé très vite.
    Le soleil bien haut, les grilles ouvertes…Enfin la quille !
    Deux-trois cahiers voltigeaient, partout des sourires, on se parlait de ce qu’on allait faire de l’été, qui s’annonçait étouffant sur toute la France.
    Et, du côté des platanes… il y avait Malik – qui draguait Samia ouvertement. Logique, Djib est intervenu. Il avait attendu les lèvres de sa nana toute la journée, elle devait partir au bled d’ici deux jours et il était à cran.
    Très vite, un cercle s’est formé autour d’eux et les sacs à dos sont tombés au sol.
    Il ne faisait pas le poids, Djibril, avec ses petits muscles secs ; Malik avait presque une tête de plus, et son nez cassé trahissait l’habitué de la castagne. Malik a envoyé une bonne secousse à Djib. Samia gardait les mains crispées sur sa bouche, ses copines piaillaient, ça criait de partout.
    Et bien sûr, c’est là que Vasco a débarqué, la clope coincée au bord des lèvres, les poings déjà serrés – des poings furieux, dont les jointures se sont mises à cogner Malik avant même un « qu’est ce qui se passe ? »
    Vasco, il tape fort. Sauf que Malik savait se défendre… et surtout, que Djib ne pouvait pas décemment laisser son pote lui sauver la mise devant Samia. Qu’est ce qu’elle en penserait ?
    Un copain de Malik est entré dans la danse – Vasco lui a fait regretter l’idée. Et ensuite, avec Djib, ils se sont concentrés sur le Don Juan. Ils ne lui ont pas fait de cadeaux.
    Le gardien a appelé les flics.

     

  • [Livre] La vieille dame qui avait vécu dans les nuages

     

    Je remercie Babelio et les éditions Harper Collins pour cette lecture

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    Résumé : A 87 ans, Mary Browning sent que le temps est venu pour elle de raconter son histoire et les secrets qu’elle garde enfouis depuis de si longues années. En fait, depuis le jour où un parachutiste est tombé dans le jardin de ses parents, faisant éclore son rêve : devenir aviatrice. Cette passion, Mary l’a vécue intensément, à chaque seconde de sa vie. Mais, en retour, elle a payé le prix fort, allant jusqu’à renier ses origines juives et sa famille pour suivre son destin.

    A qui confier et transmettre le récit de ce qui fut à la fois son feu sacré et sa grande faute ? La réponse arrive en la personne d’une très jeune fille. En elle, Mary croit retrouver les traits de Sarah, sa sœur adorée qu’elle a dû abandonner. Un signe du destin qui marque le début d’une amitié aussi belle qu’improbable, faite de confidences et de récits extraordinaires jusqu’à l’émouvante révélation finale...

     

    Auteur : Maggie Leffler

     

    Edition : Harper Collins

     

    Genre : roman contemporain

     

    Date de parution : 02 novembre 2016

     

    Prix moyen : 18€

     

    Mon avis : J’ai eu un immense coup de cœur pour ce livre qui sort début novembre.
    La structure du roman m’a rappelé celle du train des orphelins avec Christina Baker Kline : Deux voix, une vieille femme et une adolescente, deux vies parallèles, un passage de l’histoire américaine peu connu (les trains d’orphelins dans le livre de Christine Baker Kline et le WASP ou
    Women Airforce Service Pilots dans ce roman)…
    Du coté de Mary Browning, on voit sa vie actuelle, alors qu’elle est âgée de 87 ans et on voit également ce qu’a été sa vie, sa vie d’aviatrice sous la seconde guerre mondiale. Les parties concernant Elyse Strickler nous permettent de reprendre notre souffle dans l’histoire de Mary et de la rattacher au présent.

    On découvre la vie de Mary au travers de ses mémoires que tape Elyse. L’adolescente, fragilisée par une situation familiale difficile, trouve en la vieille dame une confidente, quelqu’un à qui elle peut tout dire sans être jugée et sans que cela ne revienne aux oreilles de sa mère.
    Dans le train des orphelins, les deux protagonistes étaient liées par leur statut d’orphelines, ici elles sont liées, même sans le savoir, par leurs mères.
    Que ce soit la mère de Mary ou la mère d’Elyse, les deux sont des femmes négatives, qui semblent ne pas supporter que quiconque autour d’elles soient heureux. Elles sont toutes les deux, à des niveaux différents, et l’exprimant de manière différentes, aigries et méchante, refusant de voir leur enfants évoluer et voler de leurs propres ailes. Cependant la mère d’Elyse semble capable de se remettre en question, ce que n’a pas fait celle de Mary.
    Dans la période se déroulant pendant la guerre, on assiste à l’apprentissage du pilotage de Mary et ses amies. Le programme est constamment remis en question tant les hommes sont réticents à laisser des femmes faire un travail qu’ils considèrent leur être réservé. Et il ne s’agit pas uniquement de mauvaise volonté, de mise à l’écart etc… les avions qu’elles pilotent sont sabotés, leurs vies mises en danger parce que ces messieurs sont atteints dans leur orgueil et leur virilité. C’est lamentable.
    Dès les première pages, on sait que Miriam (Miri) Lichtenstein et Mary Browning sont une seule et même personne. On va découvrir au fil des pages le pourquoi du comment de ce changement de nom et ses conséquences. Mary a du faire des choix difficiles dans sa vie, celui-ci en est un parmi d’autres.
    Au fur et à mesure du texte, on découvre certains éléments. Celui concernant Dave, le fils de Mary m’a surprise, je ne m’attendais pas à ça. La « révélation finale » annoncée par le résumé, elle, ne m’a pas surprise. Je m’y attendais depuis la fin du premier tiers du livre. Mais avoir deviné cette révélation ne m’a pas dérangée, au contraire, j’attendais avec une impatience encore plus grande que les personnages la découvrent également pour voir leurs réactions.
    C’est un roman dans lequel les émotions de bousculent, un roman qu’on peut difficilement lâcher quand on l’a commencé.

    Un extrait : Le jour de mon quatre-vingt-septième anniversaire, je vis Sarah, ma sœur, entrer dans la salle de réunion de la bibliothèque Carnegie. Pour une raison mystérieuse, c’était encore une jeune fille d’une quinzaine d’années, et une tresse de cheveux blond pâle lui pendait dans le dos, comme à l’époque où elle escaladait l’arbre dans le jardin, et me jetait des pommes, à moi qui restais en bas sur la terre ferme. Bien sûr, je compris que cette adolescente ne pouvait pas vraiment être ma sœur. Peut-être cette vision de Sarah était-elle un des multiples effets secondaires de l’âge. Après tout, plus je vieillissais, plus les gens que je rencontrais me rappelaient quelqu’un que j’avais aimé dans le passé. Je ne me doutais pas que cette jeune fille à la natte risquait de tout changer.
    La journée avait débuté comme toutes les autres, bien que ce fût mon anniversaire. Lorsque mon médecin avait appelé pour me communiquer les résultats de ma récente ostéodensitométrie, ce petit geste d’humanité m’avait touchée malgré l’objet de l’appel.
    - Alors c’est officiel, vous m’annoncez que je suis une petite vieille qui rapetisse, lui dis-je
    Elle rit, puis me refila de nouveaux comprimés – contre l’ostéoporose ceux-là – qui pouvaient à la fois éviter une fracture à la hanche et provoquer une cécité soudaine et irréversible chez certains sujets sensibles.
    - Honnêtement, à l’âge que j’ai, je veux bien me fracturer la hanche, du moment que j’y reste.
    - Seriez-vous déprimée, madame Browning ?

    Elle ne plaisantait pas, la chère créature. C’est pourquoi je mentis un peu en répondant à cette jeune doctoresse qui devait avoir la moitié de l’âge de Dave, mon fils :
    - Mon petit, tout comme les jeunes gens attendent avec impatience leur anniversaire, je ne peux m’empêcher de me demander à quoi ressemblera ma mort. Vous pouvez peut-être vous offrir le luxe de penser à autre chose, mais moi, la mort est le prochain grand événement qui m’attend.
    Elle se tut et j’attendis qu’elle termine de consigner notre conversation sur son satané ordinateur, tout en guettant le moment où elle changerait de voix en s’apercevant qu’elle m’appelait le jour de mon anniversaire.
    - Avez-vous des idées suicidaires, madame Browning ?
    C’était si loin des vœux auxquels je m’attendais que je me mis à rire. A mes dépens. Je la rassurai : je n’avais pas la moindre intention de me priver de la surprise de la mort.

     

  • [Livre] Tornade

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    Résumé : Dans le Midwest, où Jersey vit avec sa mère, son beau-père et sa petite sœur Marine, on ne sait jamais ce que la météo réserve. Le jour où sa mère et Marine disparaissent, emportées par une tornade, Jersey se retrouve seule et sans maison. Son beau-père n’a pas la force de s’occuper d’elle et son père biologique la rejette. La jeune fille échoue chez ses grands-parents maternels, qu’elle n’a jamais connus. Ballottée d endroit en endroit, Jersey doit tenir bon, tout en apprenant des choses qu’elle ignorait sur sa mère...

     

    Auteur : Jennifer Brown

     

    Edition : Albin Michel

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 01 Avril 2015

     

    Prix moyen : 15€

     

    Mon avis : Jersey vit avec sa mère, son beau-père Ronnie et sa petite sœur de 5 ans. C’est là sa seule famille. Son père biologique a disparu dans la nature quand elle n’avait qu’un an et elle ne l’a jamais connu, pas plus que sa famille. Quant à sa famille maternelle, sa mère, reniée par ses parents, a coupé tous les ponts.
    A Elizabeth, Missouri, il est fréquent d’avoir des exercices pour savoir comment réagir en cas de tornades. Mais, bien que le temps soit capricieux et les orages violents, aucune tornade ne s’est jamais réellement abattue sur la petite ville.
    C’est pourquoi quand la sirène retentit, Jersey, qui est seule chez elle, son beau-père est au travail et sa mère a accompagné sa petite sœur à son cours de danse, ne s’inquiète pas vraiment.
    Elle a tort. Quand la tornade s’éloigne, Jersey prend la mesure de la phrase « avoir tout perdu ».
    J’ai passé un quart du livre folle de rage et une moitié en larmes…
    L’auteur écrit son livre à la première personne, nous faisant découvrir les évènements à travers les yeux de Jersey.
    L’écriture est simple, on a vraiment l’impression d’entendre s’exprimer une adolescente de 16 ans.
    Kolby est un jeune garçon attentionné qui cache ses sentiments sous l’humour. J’ai beaucoup apprécié ce personnage qui est un des seuls à sembler réellement concerné par Jersey, malgré le fait qu’il a souffert lui aussi.
    Dani, elle, m’a semblé simplement ne pas savoir comment réagir devant le drame qui touche Jersey. Tout comme sa mère, et, si je comprends la colère de Jersey devant ce qui lui semble être de l’indifférence, je ne peux que comprendre également celle-ci qui fait face à des attentes irréalisables de la part des adolescentes.
    Mais ma colère, elle, la grosse colère qui m’a tenue pendant un bon quart du roman, a été provoquée par l’attitude de Ronnie, le beau-père et de la famille paternelle de Jersey. Le premier est un lâche, il est immonde. Je comprends qu’il se sente dépassé, qu’il soit désespéré. Mais abandonner Jersey au milieu d’inconnus sans même se préoccuper qu’elle soit en sécurité, ça j’ai trouvé que c’était criminel. Et il a perdu toute excuse à mes yeux, pour ce qu’il fait à propos de l’enterrement.
    Quant à la famille paternelle, à part Terry, je n’ai pas de mots pour décrire l’horreur et la colère qu’ils m’ont inspirés.
    Jersey étant volontaire, malgré son désespoir, elle se rebelle et échoue chez ses grands-parents maternels, qu’elle n’a jamais rencontrés eux non plus. Et là, elle commence à apprendre des choses sur sa mère, des choses qu’on ne raconte pas forcément à sa fille, des anecdotes que seuls des grands-parents peuvent dévoiler. C’est une lueur d’espoir pour Jersey mais le plus important, plus important peut être que l’attitude que les autres peuvent avoir avec elle, c’est son combat intérieur : entre remords, culpabilité, désespoir, il faut que Jersey trouve le moyen d’avancer avec la perte qui l’a frappée. Et c’est que j’ai trouvé le plus impressionnant dans ce livre : ce cheminement intérieur de l’adolescente.
    Un vrai coup de cœur. Je ne tarderais pas à lire « hate list » l’autre titre de l’auteur. S’il est moitié aussi bon que celui-ci, il ne peut que me plaire.

    Un extrait : Ce soir-là, j’en avais assez, c’était toujours moi qui prenais le relais de maman, surtout depuis qu’elle avait épousé Ronnie, le père de Marine, quand j’avais dix ans. Jusque-là j’avais toujours vécu seule avec elle. Mon père était alcoolique et nous avait quittées quand j’avais à peine un an. À en croire maman, il passait son temps à entrer et sortir de prison pour des délits liés à l’alcool et il n’avait aucun sens des responsabilités. Elle avait l’impression d’élever deux enfants, mais elle le supportait parce qu’elle l’aimait. Jusqu’au jour où il était parti, pour ne jamais revenir. Elle avait essayé de le retrouver, disait-elle, mais il avait complètement disparu. Chaque fois que je lui demandais des nouvelles de mon père, elle me répondait que même s’il était vivant, il refuserait de nous voir.

    Je ne me souvenais même plus de son visage.

    Du côté maternel, je n’avais pas non plus de famille. Les parents de maman étaient des gens très rigides, et ils l’avaient mise à la porte quand elle était tombée enceinte, si bien que je ne les connaissais pas. Je n’avais aucune idée de l’endroit où ils vivaient. En tout cas ce n’était pas à Elizabeth.

    Ces dix ans de vie seule avec maman m’avaient rendue débrouillarde, et je prenais en charge une bonne part des corvées ménagères. Maman avait besoin d’aide parce qu’elle travaillait beaucoup et je lui rendais volontiers service. C’est vrai, je n’étais pas très gâtée, je n’avais jamais d’affaires de bonne qualité, je ne partais jamais très loin en vacances, mais je ne manquais de rien. Et j’adorais maman.

    Après son mariage avec Ronnie et la naissance de Marine, le nombre de corvées avait doublé et la vie quotidienne était devenue pénible. Parfois j’avais l’impression que maman n’était là que pour me rappeler ce que j’avais à faire…

    Maman et Marine continuaient à s’agiter. Marine entrait et sortait du salon en sautant, tournoyant, chantonnant, et j’avais la tête enfouie dans un coussin en attendant qu’elles partent. Jusqu’au moment où maman a demandé à Marine de passer aux toilettes avant d’enfiler les ballerines noires qu’elle avait laissées près de l’entrée. Elle-même s’était changée pour mettre un jeans et un T-shirt.

    – Allez, en route pour le cours de danse. On rentre dans une petite heure.

    – OK, ai-je répondu d’un ton las.

    Marine a suivi maman, tel son clone miniature, avec son sac à la main, une vieillerie noirâtre que maman lui avait donnée quand elle en avait eu marre. Marine en était folle et l’emportait partout où elle pouvait car elle y avait rangé tous ses petits trésors.

    – Non, laisse-le ici, a dit maman en ouvrant la porte-moustiquaire.

    – Si, je veux le prendre.

    – Non, tu vas l’oublier, comme la dernière fois, et je n’ai aucune envie de faire un nouvel aller-retour chez Miss Janice.

    – Nooooon ! a hurlé Marine avec sa voix-Débâcle.

    Maman lui a jeté son regard comminatoire que je connaissais par cœur.

    – Vite, tu vas être en retard et tu vas rater la danse d’entrée.

    Elle a déposé son sac au pied de la porte et suivi maman dans ses petites ballerines brillantes soudain tristounettes sous le ciel nuageux.

    – N’oublie pas le linge !

    – Oui, oui, ai-je chantonné en roulant des yeux.

    J’étais tellement sûre de moi, sûre de ce que j’avais à faire – le linge –, sûre du moment où maman et Marine rentreraient, de la soirée qui m’attendait.

    Je ne me doutais de rien.

    Rien du tout.

     

  • [Livre] Les pieds sur le bureau

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    Résumé : Pénélope vient de trouver son premier emploi comme secrétaire dans une maison d’édition. Toute à sa joie, elle découvre très rapidement la vie cocasse et remplie de cancans des employés de bureau…

     

    Auteur : Nicole De Buron

     

    Edition : Libra Diffusio

     

    Genre : Humour

     

    Date de parution : 2010

     

    Prix moyen : 12€

     

    Mon avis : Nicole de Buron nous entraîne dans les joies et les petits tracas de la vie de bureau. Chicaneries entre deux chefs de service ennemies, standardiste indispensable, secrétaire du grand patron qui fait la pluie et le beau temps dans l’entreprise, petits coups bas et grands services, tout y passe.
    On s’identifie aussi bien à Pénélope qui entre dans le monde du travail et passe sans transition de sa vie d’adolescente oisive à celle de petite secrétaire qui n’a jamais tapé à la machine de sa vie mais parle très bien anglais (tout à l’inverse de la secrétaire qu’elle doit remplacer), qu’aux dactylos plus anciennes dans la maison qui cherchent à grappiller un peu de temps libre sur une journée de travail peu stimulante.
    Et qui n’a pas connu des chefs de services ou des patrons qui partent à 11h pour un déjeuner d’affaire et ne reviennent pas avant 14 ou 15h en titubant légèrement ?
    On voit également les grandes discussions qui entourent les dates des congés, discussion qui défient le passage du temps et qu’on voit encore aujourd’hui : je prends juillet, moi août, moi à cheval, comment ça, ça coince ? Qui doit changer ses dates ?
    A côté de ces petites tracasseries de bureau, on voit un peu de la vie personnelle de Pénélope, ses parents, ses amoureux…
    On a ici un petit livre facile à lire, où l’humour habituel de Nicole de Buron est présent à chaque page.

    Un extrait : « Ce sont les femmes qui mènent le monde » aimait à proclamer mon père qui en savait quelque chose puisqu’il avait épousé ma mère. Il ajoutait : « Ainsi dans une affaire, la personne la plus importante est la secrétaire du patron ».

    Aussi, lorsqu’une amie m’apprit incidemment que le directeur de la maison où elle travaillait cherchait une secrétaire, je décidai de me présenter. J’avais dix-huit ans. Il était temps que je dirige une entreprise française. Le fait qu’il ne s’agissait que d’un remplacement de quatre mois ne m’arrêta pas. Ni le fait que j’ignorais tout de la dactylographie. Je devais me présenter le lundi suivant à neuf heures. J’empruntai une vieille Underwood à une cousine et passai mon samedi et mon dimanche à en tapoter les touches. Avec deux doigts. Toc, toc-toc, toc.

    Le lundi, à sept heures, j’étais debout. Je n’avais pratiquement pas dormi. On dit que la nuit porte conseil. Aux autres, pas à moi. Au cours de ma longue insomnie, je n’avais même pas pu décider comment j’allais m’habiller. La robe rouge en jersey ? Elle était bien collante. Si c’était une femme qui examinait ma candidature, elle la trouverait peut-être un peu suggestive. Les femmes sont si vite jalouses. Alors, mon tailleur gris ? Un peu strict et ennuyeux. Et mettrais-je du rouge à lèvres ? Pour une fois ? Si c’était le Directeur lui-même qui me recevait, il ne fallait laisser aucune chance de côté. Finalement, j’optai pour la robe rouge, un chignon (au lieu de mes tresses) mais pas de rouge à lèvres. Bon.

    J’arrivai à l’adresse indiquée à huit heures et demie. On ne se présente pas avec une demi-heure d’avance. J’entrai dans le bistro d’en face et demandai un café noir. Cela me donnerait du courage. Cela ne m’en donna pas. Je sentis au contraire mes forces m’abandonner, et ma nervosité grandir. Papa, maman, où étiez-vous ? Je ne leur avais pas parlé de ma démarche. Si c’était un échec, autant que personne ne soit au courant. Et ce serait un échec... Voyons : je ne savais pas taper à la machine, je n’avais jamais travaillé dans un bureau, je rougissais dès que je devais parler à quelqu’un. C’était une folie de me présenter comme secrétaire. J’éprouvai la tentation irrésistible de rentrer à la maison me blottir dans l’abri tiède et sûr de mon lit.

    Pour m’aider à surmonter cette panique, je décidai de commander un cognac. Un grand. Comme les condamnés à mort. Je n’avais jamais bu de cognac auparavant. Je me sentis brûlante de la tête aux pieds. Mais aussi pleine d’enthousiasme, de gaieté, d’assurance.

    Et c’est d’une démarche ailée que je traversai la rue.