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[Livre] Les belles vies

 

Je remercie les éditions Sarbacane pour cette lecture

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Résumé : Vasco et Djib sont inséparables depuis leur naissance. Turbulents, pas vraiment délinquants, ils cumulent les bêtises plus ou moins graves, les rires et les bleus. Vasco est en CFA BTP, Djib passe en première S.

Leur dernière rixe est pourtant celle de trop… Afin de leur mettre du plomb dans la tête, leurs parents décident d’employer les grands moyens : ils envoient les deux ados dans la Nièvre, le temps d’un été chez un ami du père de Vasco, entrepreneur local qui propose ses services comme famille d’accueil pour la DDASS. C’est dans cette campagne éloignée de tout, France profonde dont on parle peu, qu’ils vont rencontrer et se confronter à une autre forme de jeunesse : celle des enfants élevés par celle que tous surnomment « Tata », une femme qui accueille des enfants placés et donne sa vie aux autres.

 

Auteur : Benoît Minville

 

Edition : Sarbacane

 

Genre : Jeunesse

 

Date de parution : 5 octobre 2016

 

Prix moyen : 15,50€

 

Mon avis : Au début du livre, je n’ai pas aimé Vasco. C’est le type même de gars des cités qui joue des poings pour imposer sa vision de la vie. Et qui ne réfléchit pas une seconde non plus aux ennuis qu’il peut s’attirer, ou pire attirer aux autres. Quand lui et Djib sont chez les parents de Vasco après que leurs familles aient dû aller les récupérer au commissariat, il prend à la légère ce qu’il vient de faire, il balaie les inquiétudes de Djib, qui n’avait rien demandé, d’un revers de la main.

Mais au fil des pages, il laisse un peu tomber son masque de caïd et révèle une grande sensibilité.
Djib est plus posé, plus mature. Les ennuis que les garçons se sont attirés, il ne les a pas cherchés, même si c’est pour le défendre que Vasco s’est emporté et que c’est pour ne pas laisser tomber son pote que Djib est entré dans la mêlée. Il a un certain effet apaisant sur son copain.
La mère de Vasco a l’idée de les envoyer chez une connaissance d’un ami, une personne qui s’occupe d’enfants de la DDASS dans un petit village perdu au fond de la Nièvre.

Là-bas, Vasco et Djib vont vivre comme dans une colonie de vacances entre pêche, soirée DVD, baignade au lac et bon petits plats, mais ils vont surtout voir la chance qu’ils ont d’avoir des parents qui les aiment, qui se préoccupent d’eux, même si la vie n’est pas idéale et qu’ils ne roulent pas dur l’or.
Benoit Minville n’enjolive pas. Dans son histoire, on n’est pas dans le « et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». A travers ses personnages, il dénoncent un peu le système qui broient les gosses à force de ne voir en eux que des numéros de dossier, comme Gwen et Gaétan, maltraités par leurs parents mais qui pourraient leur être rendus à tout instant, la mère de Dylan et Jessica, immature et volage qui pourrait également récupérer ses enfants dès lors qu’elle remplirait les conditions fixées par le juge, et peu importe si Dylan est en apprentissage, peu importe si toutes ses chances de s’en sortir sont détruites par cette décision de justice qui serait prise sans qu’il soit consulté.
Les amitiés se créent, mais avec toujours le pincement au cœur quand on se rappelle que cela ne durera que le temps d’un été.
Il n’y a pas de grande leçon de morale, on ne fait pas des sermons à n’en plus finir à Vasco et Djib, on les laisse grandir, s’épanouir au contact de Tata, Tonton et les enfants qu’ils accueillent. Tout n’est pas rose, loin de là, ils sont confrontés à la suspicion des villageois, à l’animosité de certains jeunes du village, aux rivalités et à l’angoisse concernant l’avenir, mais ils avancent, à leur rythme, prennent des décisions. Tonton et Tata guident, sans imposer, sans culpabiliser. Peut-être parce qu’ils ont plus de distance que les parents de Vasco et Djib, ils leur mettent moins la pression.
On referme le livre sans certitudes : Vasco et Djib vont-ils vraiment conserver l’attitude qu’ils ont adoptée ou vont-ils retomber dans leurs travers avec la routine ? Et les enfants que Tata et Tonton ont en garde : Dylan, Jessica, Chloé, Gwen et Gaëtan, Farah, Sirine et Kamel ? On ne sait rien de ce qui va finalement se passer pour eux. Et personnellement, je n’espère même pas une suite pour le découvrir.
Ils vont vivre leur vie, tout simplement, et on peut imaginer chaque décision qui peut mener à tant de destin différent pour chacun d’eux.
A-t-on vraiment besoin de certitudes ?

Un extrait : Vasco et Djib se demandent si ça ne va pas être plus grave qu’ils le pensaient.
Fesses vissées sur son banc, les mains dans les poches de son jean, Vasco tente de se vider la tête en suivant le parcours d’une araignée sur le mur blanc blindé d’affiches de prévention. Djib a la trouille au ventre ; il n’a qu’à fermer les yeux et ceux de sa mère apparaissent, la nausée n’est pas loin.
Un policier passe devant eux. Les bras chargés de paperasses, il rentre dans le bureau d’à côté.

Le commissariat est calme. Vasco glisse ses mains dans ses cheveux gavés aux Pento et tente un coup d’œil à son meilleur pote, son frère de cœur… Djib se contente de hausser les épaules. Le silence est interminable, interrompu parfois par des bruits de doigts sur les claviers, des éclats de voix, une machine à café qui vrombit.
Un autre agent arrive – il marche d’un pas décidé, suivi d’une vieille dame qui peine à tenir la distance. Vasco s’attarde sur le bandage qu’elle porte au front, soupire et se penche vers Djib.

- Tu vas la rappeler, Samia ?
- Je t’ai dit d’oublier mon nom.
- Putain, je t’ai dis que j’étais désolé !...Tu crois que je m’en veux pas ?
- Me soûle pas, Vasco.

Du fond de sa colère, Djib ne comprend toujours pas comment tout ça a pu déraper si vite.
Enfin, si. Il  a toujours une fille dans l’histoire, avec Vasco, quand ça tourne mal. Une fille. Un autre mec. Et Vasco… A chaque fois, Vasco – le poing dressé et les neurones en cale sèche. Déjà, tout môme, au parc en bas de la cité, il s’attaquait à ceux qui voulaient piquer son goûter à Djib…
Et voilà, encore une fois. Il a fallut que ça arrive aujourd’hui, dernier jour de bahut.

Comme toujours, ça commençait bien, pourtant. Vasco était déjà en vacances, sa première année de CFA sous le bras, celle-ci ayant oscillé entre « médiocre » et « progrès mais peut mieux faire ». Il était venu chercher son pote à la sortie. Au programme de la soirée : tournoi de FIFA et du son.
Djib, lui, terminait l’année sur les rotules, après une histoire stressante avec une fille « chouette mais caractérielle » et un passage en première S obtenu à la sueur du front. Et pour tout dynamiter : ce gars de première STMG, Malik, un chaud, beau gosse, le genre qui n’hésite pas à tenter sa chance avec les filles casées.
Le dernier jour de l’année…Celui qui libère. Dans sa classe, peu avaient tenu jusqu’au bout de la journée – occasion trop belle de s’offrir un aprem de vacances avec un peu d’avance, surtout que la plupart des potes restaient convaincus que la seconde était « la dernière année tranquille, avant les choses sérieuses ».
Pour Djib, pas question de sécher : il devait bien ça à sa prof de maths, elle ne l’avait jamais lâché et sa mère l’aurait fait culpabiliser… « Il ne faut jamais décevoir ceux qui croient en toi ». Encore raté, pour le coup…
Tout est allé très vite.
Le soleil bien haut, les grilles ouvertes…Enfin la quille !
Deux-trois cahiers voltigeaient, partout des sourires, on se parlait de ce qu’on allait faire de l’été, qui s’annonçait étouffant sur toute la France.
Et, du côté des platanes… il y avait Malik – qui draguait Samia ouvertement. Logique, Djib est intervenu. Il avait attendu les lèvres de sa nana toute la journée, elle devait partir au bled d’ici deux jours et il était à cran.
Très vite, un cercle s’est formé autour d’eux et les sacs à dos sont tombés au sol.
Il ne faisait pas le poids, Djibril, avec ses petits muscles secs ; Malik avait presque une tête de plus, et son nez cassé trahissait l’habitué de la castagne. Malik a envoyé une bonne secousse à Djib. Samia gardait les mains crispées sur sa bouche, ses copines piaillaient, ça criait de partout.
Et bien sûr, c’est là que Vasco a débarqué, la clope coincée au bord des lèvres, les poings déjà serrés – des poings furieux, dont les jointures se sont mises à cogner Malik avant même un « qu’est ce qui se passe ? »
Vasco, il tape fort. Sauf que Malik savait se défendre… et surtout, que Djib ne pouvait pas décemment laisser son pote lui sauver la mise devant Samia. Qu’est ce qu’elle en penserait ?
Un copain de Malik est entré dans la danse – Vasco lui a fait regretter l’idée. Et ensuite, avec Djib, ils se sont concentrés sur le Don Juan. Ils ne lui ont pas fait de cadeaux.
Le gardien a appelé les flics.

 

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