Je remercie les éditions Sarbacane pour cette lecture
Résumé : Ils sont trois à s'évader d'un hôpital psychiatrique.
Trois "Pieds-Nickelés" qui s'unissent pour contrer le complot mondial qu'ils sont certains d'avoir découvert.
Évidemment, ils sont quand même bien allumés.
Évidemment, ils sont gavés de médocs depuis des années.
Évidemment, leur cavalcade n'est peut-être qu'une gigantesque farce loufoque.
N'empêche : et s'ils avaient raison ?...
Auteur : Bruno Lonchampt
Edition : Sarbacane
Genre : Jeunesse
Date de parution : 7 septembre 2016
Prix moyen : 15,50€
Mon avis : Il est évident que Yves, Lisa et Sandro sont bien atteints. J’ai d’ailleurs été incapable de m’attacher à eux, tout en appréciant beaucoup leur épopée.
Leur psy ne m’a pas du tout plu. Sandro est certainement schizophrène, Lisa a très clairement de très gros problèmes (c’est celle qui m’a le plus énervée) et Yves est peut être paranoïaque, mais qu’il le soit ou pas (après tout, on a aucune preuve) le psy n’est pas clair du tout.
L’écriture de Bruno Lonchampt est rythmée, dès l’instant où nos trois larrons s’échappent de l’hôpital psychiatrique, on n’a plus une seconde de répit, tout s’enchaîne à une vitesse folle.
J’ai été outrée par l’attitude des services de sécurité de l’hôtel où se tient le congrès sur le traité transatlantique. On sent bien qu’ils se sentent protégés et clairement au dessus des lois. Ce qui m’énerve le plus c’est que Lisa, Yves et Sandro, sous prétexte qu’ils sont internés, semblent n’avoir aucun droit.
Au milieu de tous leurs délires, on se demande s’ils n’ont pas mis le doigt sur une vérité dérangeante. Parce qu’au final, peut importe que le psy soit coupable ou non de ce que les trois comparses l’accusent, parce que ces actes existent bel et bien, et ce dans l’indifférence générale.
J’ai apprécié le fait qu’au fil du roman, on ait des chapitres « interludes » permettant de savoir ce qui a conduit chacun des personnages en hôpital psychiatrique.
Parsèment également le roman des poèmes de rue, graffitis écrits par un artiste qui signe Messiah et dont le nombre d’« œuvres » laisse à penser qu’il ne s’agit pas d’une seule personne mais plutôt d’un groupe unis derrière une sorte de leader (probablement le graffeur d’origine). Ces poèmes dénoncent tout ce contre quoi Yves se bat et semblent justifier son attitude. Peut être a-t-il des raisons d’être paranoïaque ? Comme ils l’ont dit dans X’files « Ce n’est pas parce que vous êtes paranoïaque que personne ne vous suit ».
La fin m’a déçue. Pas parce qu’elle est mal écrite, bien au contrainte, c’est une fin à laquelle j’aurais du m’attendre et qui est d’une grande justesse. Mais j’aurais espéré autre chose. C’est mon côté disney…
Un extrait : Ils l’ont vaincu, c’est clair et net. Cachetonné à la truelle, Sandro n’existe plus ; il s’enfonce dans son fauteuil, l’esprit écrabouillé par les médocs, la vie en fond sonore. Les blouses blanches des soignants quasi fantomatiques errent dans la grand-salle. Dans son coin, le vieux Yves bave sa surdose de neuroleptique, l’air bovin, face à la fenêtre, remâchant le vide de l’existence. Moussa, lui, psalmodie des incantations mystérieuses censées lui « rendre son âme d’origine », pendant qu’à côté on joue au Pictionnary délesté de toute forme d’imagination. Bienvenue…
Lisa semble moins chargée, elle. Elle chante. Sa voix nasillarde envahit l’air, belle malgré les failles et les petits couacs, et peu à peu, le charme opère. Bientôt, les neurones les moins entravés cherchent la source, les lèvres hésitant à sourire.
Lisa. Lisa et ses magnifiques boucles brunes qui lui tombent jusque sous les épaules, ses yeux d’un bleu glacé sur sa peau mate, son naturel déglingue…Lisa réveille les comateux. Oui : un à un, ils cèdent. D’abord les malades pas très loin du départ, ceux dont les traitements ont pris leur rythme de croisière, puis tous les autres – même les plus atteints : ils écoutent, regardent… Dans la salle commune, il n’y a plus que la télévision qui parle, et elle parle toute seule. Les yeux fixent autre chose.
Eclair brun, Lisa vient se promener entre les trois tables rondes et le canapé en sky vert face à l’écran. Elle se déhanche tranquillement, interprétant « Rehab » d’Amy Winehouse avec pas mal de classe.
Les infirmiers s’arrêtent, hésitant entre amusement et admiration – ils n’ont pas encore compris que Lisa n’en est qu’à l’échauffement. Pourtant elle, dans sa tête, ça fait un moment qu’elle est prête à foncer. Sa voix gagne en puissance, la douceur n’y est plus vraiment, son visage se crispe, ses mains s’agrippent à ses vêtements, les tiraillant, comme gênées par ce tissus qui lui colle à la peau.
Et ça démarre.
Le geste est rapide : un débardeur Dolce Gabana danse dans les airs, le soutien-gorge le suit très vite. Moussa en a la bouche qui pend, il a même oublié son âme paumée et ses débats avec le Diable. A côté de lui, Sandro entame un dialogue avec son sexe pour empêcher un craquage de caleçon. Chacun salive sur la suite…
…mais le strip-tease est stoppé net. Juste au moment où le jean laissait apercevoir un string ultra-minimaliste ! Et le rêve s’arrête brutalement, pendant que la réalité refait surface, molle et fadasse.
La suite réelle, du coup, c’est les soignants qui rament pour ramener Lisa à l’écart, même à quatre. Ce n’est pas qu’elle résiste ou qu’elle fasse de grosses difficultés, seulement elle minaude, caresse sans arrêt, et se glisse tout en finesse en dehors des mains qui l’empoignent, perturbant des infirmiers pas franchement formés à gérer leurs propres hormones. Mais pour Sandro et les autres, ça n’a plus aucun intérêt, le meilleur est passé, autant dormir maintenant.