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[Livre] La reine des quatre royaumes

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Résumé : Décembre 1400. La ravissante princesse Yolande d’Aragon, dix-neuf ans, va pour la première fois rencontrer son promis, le jeune Louis duc d’Anjou, pour l’épouser en Arles. Ils se sont écrit pendant une décennie et se découvrent enfin. Par ce mariage, Yolande devient reine des quatre royaumes : Naples, Sicile, Chypre et Jérusalem.
Au cœur des guerres de cent ans qui déchirent l’Angleterre et la France, elle sera bientôt l’une des plus remarquables femmes d’influence qui marqueront le siècle. Mentor attentif de son gendre, le futur roi Charles VII et de Jeanne d’Arc, son rôle dans la construction du royaume sera déterminant. Plus tard, son petit-fils, le roi Louis XI, dira d’elle qu’elle avait «
un cœur d’homme dans un corps de femme».
Souvent décrite comme la «
plus belle femme du royaume», Yolande d’Aragon est une figure politique d’une extraordinaire intuition, méconnue à ce jour.

 

Auteur : Princesse Michael de Kent

 

Edition : Télémaque

 

Genre : Historique

 

Date de parution : 09 octobre 2014

 

Prix moyen : 22€

 

Mon avis : Ce livre est la preuve qu’il ne fait jamais condamner un livre sur une première impression. J’ai essayé de le lire il y a quelques mois et, rien à faire, je n’arrivais pas à entrer dans l’histoire.
A la faveur d’un challenge, je l’ai repris et là, je n’ai quasiment plus pu le poser, au point d’en avoir lu les 500p en deux jours seulement.
Au début, j’ai été un peu rebuté par le récit au présent de l’indicatif. Pour moi un livre s’écrit au passé, qui est le temps du récit. J’ai beaucoup de mal à me faire au présent. Alors pour un roman historique qui se situe dans les années 1400, c’était encore plus dur.
Et puis, finalement, l’histoire en elle-même l’a emporté sur le temps utilisé.
On suit Yolande D’Aragon depuis son mariage avec Louis d’Anjou (elle n’a alors qu’environ 19 ans) jusqu’à sa dernière lettre, écrite à l’intention de ses enfants et petits enfants alors qu’elle sent la mort arriver (vers 62 ans).
Toute sa vie, Yolande d’Aragon se consacre au royaume de France. Appréciée du Roi Charles VI, qui la réclame dans ses moments de lucidité, amie de Valentine Visconti, épouse du duc d’Orléans, et parfois confidente d’Isabeau de Bavière qui voit en elle une femme de son rang qui ne la dénigre pas, Yolande est sur tous les fronts.
Sur les conseils avisés de sa mère, elle place de nombreux espions dans les maisons ennemies comme dans les maisons amies, très tôt conscience que le pouvoir passe par la connaissance.
Veuve à 36 ans, elle va exercer un pouvoir sans contexte sur les duchés d’Anjou et de Provence, les deux principales possessions dont hérite son fils aîné et aura le cœur brisé de voir successivement son époux et ses deux fils mettre leur vie et leur santé en danger pour le royaume de Naples dont ils sont les souverains titulaires et qui leur est disputé par le cousin de Yolande, Alphonse d’Aragon.
Par le biais des fiançailles, ainsi que des amitiés, elle va élever le fils bâtard de Louis d’Orléans, qui lui sera toujours fidèle et attaché et le dernier fils de Charles VI, prénommé également Charles que son ordre de naissance rend insignifiant. Elle va marier celui-ci à sa fille Marie.
Par le hasard des complots et des batailles, les deux frères aînés de Charles décèdent l’un après l’autre et Yolande réalise qu’elle a ainsi élevé le futur roi de France, Charles VII.
Mais il y a loin du titre au trône. Celui-ci, avec la complicité des bourgognes, est usurpé par le roi d’Angleterre et le comportement de Charles la déçoit profondément à plusieurs reprises.
Yolande d’Aragon va dépasser le rôle auquel la confine son statut de femme. La seule chose qu’elle ne fera pas est de prendre elle-même les armes. Pour le reste, elle n’hésite pas à intriguer, à forger puis à défaire des alliances, à sacrifier certains pions, bien qu’avec beaucoup de regrets.
C’est encore elle qui introduit une certaine Jeanne d’Arc auprès de Charles VII (et qui échouera à la sauver).
Sans elle, il n’y aurait pas eu de successeur français au roi fou, Charles VI et la France serait, peut être aujourd’hui encore, anglaise.
A noter que dans sa postface, l’auteur certifie que, si le livre est romancé, tous les évènements historiques rapportés ont eu lieu, du moins pour autant que l’on sache, l’histoire ayant toujours été racontée du point de vue des vainqueurs.

Un extrait : Mariée au chef de la maison d’Anjou, Yolande devient reine de quatre royaumes : Naples, la Sicile, Chypre et Jérusalem. Chypre avait été conquise par son père tandis que celui de Louis avait racheté le titre honorifique de roi de Jérusalem à la petite-fille d’un des derniers occupants du trône. Cela fait trop de couronnes, d’autant qu’elle ne règne nulle part réellement. Plus encore que d’être reine, elle s’éblouit d’être l’épouse de ce jeune homme. Mon Dieu, songe-t-elle, faites que je sois digne de lui !

Quand le banquet, les discours et les toasts sont enfin terminés, on les mène dans leurs appartements au château. Seule avec son mari dans la vaste chambre, elle se sent à nouveau fébrile. Que doit-elle lui dire ? La force des sentiments est une chose, mais comment procéder pour apprendre à connaître ce mari qui la subjugue ? Louis pose les mains sur ses épaules et rompt le silence.

  — Noble dame, vous qui êtes désormais mon épouse, j’ai un aveu à vous faire.

Elle imagine un instant que quelque épouvantable révélation va faire éclater la bulle de bonheur dans laquelle elle flotte, mais elle s’oblige à rester calme.
 — J’avais certes entendu parler de votre beauté, mais comme tous les moyens sont bons pour appâter un prince en vue d’un mariage d’intérêt, j’ai préféré en avoir le cœur net. Je confesse que j’ai devancé mon entourage afin d’assister à votre arrivée.

Yolande en reste bouche bée de surprise et note avec plaisir l’expression dans le regard de Louis.

 — Je me suis glissé parmi la foule et j’ai écouté les commentaires des gens, sur vous et votre entourage. Toutes les voix louaient votre beauté, l’émerveillement était unanime. Comme le cortège s’approchait, je vous ai vue rire gaiement et encourager votre jument nerveuse à caracoler pour les badauds. Avant même que votre visage n’émerge de l’ombre des bâtiments, j’ai remarqué votre pur-sang arabe… Quelle monture fougueuse… que vous meniez avec beaucoup d’aisance et de courage ! Je me suis dit : Si elle est capable de maîtriser cette monture, elle saura faire face à tout ! Et soudain vous avez été baignée de soleil, une vision lumineuse, avec votre robe qui volait à chaque bond. Puis j’ai bu la beauté de vos yeux… (Elle retient son souffle.) Alors j’ai posé un genou à terre et je me suis signé en remerciant le Seigneur et ma mère infiniment sage de m’avoir adressé un tel parangon de beauté ! Puis je me suis éclipsé afin d’attendre votre arrivée officielle. Me le pardonnez-vous ? demande-t-il d’une voix angoissée.

 Elle dépose deux tendres baisers sur ses paupières qui se referment sur son regard bleu interrogateur. Elle sait désormais que cet homme emplira son cœur d’amour chaque jour, qu’ils soient près l’un de l’autre ou séparés. Alors qu’il la porte vers le lit nuptial, elle se jure en elle-même que jamais elle n’aimera aucun autre homme.

 À en juger d’après ses ardeurs, lui aussi est comblé.

— Très chère épouse, nous partagerons des nuits semblables chaque jour de notre existence, lui confie-t-il au matin, avec un baiser délicat.

Et elle le croit.

Yolande a vite fait de jauger le caractère de son mari. Louis est une âme généreuse, un être bon, à la fois doux et solide, ambitieux, au jugement sûr et avisé. Elle aussi ne cesse de rendre grâce à leurs deux mères pour avoir arrangé leur union. Et elle n’a qu’à penser à ses caresses pour se pâmer. Dès leur nuit de noces, elle a su qu’il l’aimait.

Au fil des jours et des semaines, elle s’aperçoit néanmoins qu’il garde certaines choses jalousement, refusant de les partager même avec elle : ses vrais sentiments sur la défaite à Naples, ses ambitions pour l’avenir. Elle juge préférable de ne pas insister, d’autant qu’il a son caractère. En proie à l’ivresse de l’amour des premiers temps, elle n’en conçoit aucune appréhension. Elle a confiance en elle, sait qu’elle finira par se repérer dans le labyrinthe intérieur de son mari et apprendre ce qui lui permettra de devenir une partenaire et une conseillère indispensable. Elle lui sera toujours obéissante, mais n’a jamais été d’un tempérament naïf.

Après plusieurs jours de cérémonies et de festivités, le couple royal quitte Arles pour se rendre par voie fluviale à Tarascon où Louis a presque achevé la construction de ce qui sera sa résidence principale en Provence. La forteresse de pierre blanche est érigée sur un emplacement où plusieurs châteaux se sont succédé depuis l’époque romaine, dans une vallée au bord du Rhône. Située au sud d’Avignon et au nord d’Arles, Tarascon occupe un lacet stratégique du fleuve procurant une vue panoramique sur la campagne environnante. Le Rhône marque la frontière naturelle de leur province souveraine, l’autre berge étant en France.

Yolande tombe tout de suite sous le charme du château avec ses hauts remparts et ses tours crénelées, un édifice qui semble surgir tout droit des rochers à sa base. Un escalier permet d’accéder à un embarcadère conçu pour de petits bateaux. Louis emmène Yolande faire un tour en barque. Le Rhône est peu large à cet endroit, rien ne les empêcherait d’aller en France s’ils le voulaient.

  Malgré l’extérieur austère, Marie de Blois s’est employée à transformer l’intérieur en un cadre de vie confortable et élégant, avec autant d’ingéniosité, dit-on, que dans ses fabuleux châteaux d’Anjou. Les plafonds sont de bois, ornés par endroits d’animaux extraordinaires découpés dans du plomb et fixés aux poutres. Chaque chambre dispose de sa cheminée dans laquelle brûle un beau feu. Les fenêtres à meneaux procurent une grande luminosité et de belles vues sur le Rhône. Yolande regrette vivement que sa mère ne soit pas là pour admirer sa première résidence. Toutefois, elle ne doute pas que Marie de Blois l’aidera et lui apprendra à gérer une si vaste demeure.

Après leur arrivée, alors qu’on leur a servi des rafraîchissements dans la grande salle, la duchesse prend Yolande par la main et l’entraîne doucement vers l’âtre. Elle se réchauffe les mains au feu et s’adresse à sa bru avec un charmant sourire.

— Chère enfant, maintenant que vous avez épousé mon fils, je vous considère comme ma fille, si vous m’accordez ce privilège.

Yolande sent que sa belle-mère ne s’exprime pas à la légère.

— Par votre mariage, reprend-elle, vous êtes désormais duchesse d’Anjou, de Maine et de Guyenne, ainsi que comtesse de Provence. Mais dorénavant, on vous désignera toujours comme la reine de Sicile, le plus ancien de vos titres, et moi je serai la reine douairière.

Sur ce, la vieille femme s’incline gracieusement devant Yolande qui n’en revient pas, puis s’éclipse.

 

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