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[Livre] En quête de l'Etranger

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Résumé : La lecture de L’Étranger tient du rite d’initiation. Partout dans le monde, elle accompagne le passage à l’âge adulte et la découverte des grandes questions de la vie. L’histoire de Meursault, cet homme dont le nom même évoque un saut dans la mort, n’est simple qu’en apparence, elle demeure aussi impénétrable aujourd’hui qu’elle l’était en 1942, avec ses images à la fois ordinaires et inoubliables : la vue qui s’offre depuis un balcon par un dimanche d’indolence, les gémissements d’un chien battu, la lumière qui se reflète sur la lame d’un couteau, une vue sur la mer à travers les barreaux d’une prison. Et ces quatre coups de feu tirés en illégitime défense. Comment un jeune homme, qui n’a pas encore trente ans, a-t-il pu écrire dans un hôtel miteux de Montmartre un chef-d’œuvre qui, des décennies après, continue à captiver des millions de lecteurs? Alice Kaplan raconte cette histoire d’une réussite inattendue d’un auteur désœuvré, gravement malade, en temps d’occupation ennemie. «J’ai bien vu à la façon dont je l’écrivais qu’il était tout tracé en moi.» Le lecteur repère les premiers signes annonciateurs du roman dans les carnets et la correspondance de Camus, traverse les années de son élaboration progressive, observe d’abord l’écrivain au travail, puis les mots sur la page, accompagne l’auteur mois après mois, comme par-dessus son épaule, pour entendre l’histoire du roman de son point de vue. En quête de L’Étranger n’est pas une interprétation de plus : c’est la vie du roman.

 

Auteur : Alice Kaplan

 

Edition : Gallimard

 

Genre : Essai

 

Date de parution : 15 Septembre 2016

 

Prix moyen : 22€

 

Mon avis : Alice Kaplan nous livre une biographie de Camus avec comme ligne directrice la conception, la maturation, l’écriture et la publication de « l’Etranger », premier livre publié de l’auteur.
J’ai beaucoup aimé voir les doutes et les critiques qui ont poussé Camus à remiser son premier livre et à se plonger dans l’écriture de l’Etranger.
Le cheminement que va faire le manuscrit de l’Etranger pour être publié dans la France occupée, passer la censure allemande et collaboratrice est très intéressant à lire tout comme de voir les différentes critiques, positives ou négatives que ce manuscrit a inspiré aux proches de Camus et aux auteurs contemporains.
Néanmoins, je trouve que cet essai fait 50 à 70 pages de trop : à trop s’étaler sur la question, l’attention finie par s’émousser. J’ai eu beaucoup de mal avec les notes : d’abord je n’ai pas apprécié de devoir à chaque note me reporter à la fin du livre, plutôt que d’avoir les notes en bas de page ; ensuite j’ai trouvé ces notes la plupart du temps inadaptées. A chaque fois que je m’attendais à avoir une précision sur ce qui avait généré le renvoie à la note, je me suis retrouvée face au titre d’un livre et de son auteur. J’aurais préféré une explication, avant que la source ne soit citée car je ne vais pas lire 15 livres pour avoir des explications. Du coup, très vite, j’ai cessé d’aller voir les notes car ces deux défauts étaient pour moi trop gênants.
A plusieurs reprises, j’ai lu que « En quête de l’Etranger » était la biographie de l’œuvre. Je ne suis pas d’accord. D’une part parce que pour moi on explique une œuvre mais on n’en fait pas une biographie, d’autre part parce que j’en ai plus appris sur Camus, sur ses difficultés, ses aspirations, son caractère que sur l’œuvre en elle-même.
Pour autant, après avoir lu cet essai, je pense que je ne vais pas lire l’Etranger, en tout cas pas dans un avenir proche. Voir le livre ainsi résumé en long, en large et en travers, la fin dévoilée, les divers développements aussi, m’ont fait perdre l’envie de le lire. Et contrairement à ce que pense Alice Kaplan, tout le monde n’a pas lu ce livre dans le milieu scolaire. Peut-être aurai-je du le lire avant de me plonger dans cet essai.
La « vraie » identité de « l’arabe » m’a semblée de trop. Peut-être que Camus s’est effectivement inspiré de ce fait divers là pour créer le personnage de « l’arabe », mais s’il a décidé de ne pas lui donner de nom, de le réduire à sa nationalité, pourquoi dénaturer ses choix en cherchant à toute force à identifier l’homme ? Lui ou un autre, cela change-t-il le sens du roman et de l’acte commis ? A trop vouloir expliquer, analyser, on finit par obtenir l’effet inverse de celui recherché et, au lieu de donner envie de se plonger dans le roman, on en détache les lecteurs qui se retrouvent avec un livre vidé de sa substance à force d’être mâché et régurgité.

 

Un extrait : Si l’on veut bien comprendre ce jeune homme talentueux qui entreprend d’écrire l’Etranger durant l’été de 1939, il n’est pas inutile de revenir aux cinq années que Camus souhaitait rayer de son existence – une période de mutations vertigineuses qui commence par son mariage avec Simone Hié.
Quand il la rencontre, en 1933, Camus prépare sa licence à l’université d’Alger. Avec son fard à paupières bleu-mauve, ses faux cils et ses robes transparentes, Simone joue les vamps pour séduire Albert le coureur.
Ils se marient un an plus tard ; lui a vingt-et-un ans, elle en a vingt. Ses manières flamboyantes cachent une réalité plus sinistre : depuis que sa mère, une ophtalmologue de renom, lui a injecté de la morphine pour apaiser des règles douloureuses, Simone est devenue toxicomane. Les amis de Camus le mettent en garde : n’est ce pas seulement pour tenter de la guérir qu’il épouse Simone ? Louis Bénisti lui reproche de tomber dans l’angélisme, ou de jouer les saint-bernard. Yves Bourgeois, qui a voyagé en compagnie du couple, se rappelle avec amertume une « séductrice presque professionnelle » ayant une « vocation […] de femme fatale ».
Mais Camus n’y est pas pour rien : c’est la fiancée de son ami Max-Pol Fouchet qu’il séduit, et ce triomphe accroit encore sa ferveur amoureuse. Simone a le charme voluptueux d’un personnage de roman ; elle est la version camusienne de la Nadja de Breton, une âme errante. Pour un jeune homme bien décidé à devenir écrivain, elle apparaît comme l’épouse idéale : plus qu’une compagne, un mystère à contempler.
L’oncle de Camus, Gustave Acault, n’approuve nullement ce choix. Il lance un ultimatum à son neveu : soit il quitte cette femme, soit il renonce à toute aide financière. Dans les deux familles, seule la mère de Simone, Martha Sogler, parait enchantée par cette union qui constitue à ses yeux le salut de sa fille. Elle installe les jeunes mariés dans une petite villa curieusement baptisée Villa Frais Cottage, située dans la rue n°12 du parc d’Hydra, une résidence moderne du faubourg d’Hydra, sur les hauteurs d’Alger. C’est un quartier résidentiel européen où Camus a souvent rendu visite à son professeur de lycée Jean Grenier, qui habite une grande villa dans la rue n°9. Grenier sait que Camus a fait du chemin pour en arriver là. Au début de la longue maladie de son élève, il s’était rendu en taxi à l’adresse indiquée sur le dossier scolaire ; sidéré par le dénuement de l’appartement de Belcourt, il avait trouvé le jeune homme embarrassé et sans voix. La rue de Lyon, artère encombrée d’un quartier populaire, était pour l’élégant professeur un territoire inconnu.

 

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