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Livres - Page 68

  • [Livre] Mansfield Park

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    Résumé : Fanny Price est issue d'une famille pauvre qu'elle quitte à l'âge de dix ans pour vivre avec son oncle et sa tante, Sir Thomas et Lady Bertram, à Mansfield Park. Sir Thomas désire en effet aider Mrs. Price, la mère de Fanny et la sœur de Lady Bertram, en prenant en charge l'éducation de Fanny.

    Celle-ci est donc élevée avec ses cousins, légèrement plus âgés qu'elle, Tom, Edmund, Maria et Julia, mais il lui est presque constamment rappelé qu'elle leur est inférieure. Seul Edmund fait preuve de gentillesse à son égard; Maria et Julia la méprisent, Tom ne lui prête pas attention. Fanny maintient une correspondance régulière avec son frère William, officier de la Royal Navy. Elle acquiert en grandissant, notamment au contact d'Edmond, un sens moral qui lui sert de guide pour toute chose. La gratitude et l'affection qu'elle éprouve à l'égard de son cousin se transforment au fil des ans en un amour qu'elle garde secret.

    Les jours passent calmement à Mansfield Park, jusqu'au jour où Lord Bertram part aux Caraïbes et que de nouveaux jeunes gens font leur arrivée dans les environs : Mr. et Miss Crawford, frère et sœur de la femme du nouveau pasteur. Leur arrivée bouleverse la vie austère de Mansfield Park, sous les yeux de Fanny...

     

    Auteur : Jane Austen

     

    Edition : 10/18

     

    Genre : Classique étranger

     

    Date de parution : 2012

     

    Prix moyen : 6€

     

    Mon avis : J’ai eu plus de mal à entrer dans l’histoire de ce Jane Austen que dans orgueil et préjugés ou dans raison et sentiments. L’écriture est pourtant toujours aussi belle et addictive, typique de l’époque de Jane Austen. Mais je ne sais pas, peut-être parce que l’histoire est plus lente à se mettre en place (on est quand même sur un beau petit pavé de 646 pages).
    L’histoire reste très classique avec une jeune fille de condition modeste (bon ici c’est la seule à l’être, alors que dans les autres livres que j’ai lu, toute la famille l’est).
    Pourtant j’ai apprécié les personnages. Enfin j’ai surtout apprécié les détester parce qu’il faut bien avouer, ils ne sont pas très sympathiques.
    Commençons par notre héroïne Fanny Price. Fanny est la fille de la plus jeune sœur de Lady Bertram et Mme Norris. Celle-ci a fait un mariage assez désastreux en terme de finance et très productif en terme d’enfants. Mme Norris décide donc de convaincre Sir Thomas, son beau-frère, d’accueillir l’ainée des filles Price pour l’élever « convenablement ». Ainsi arrive Fanny à Mansfield Park.
    Fanny est douce, un peu craintive, très très timide mais dotée d’un sens moral irréprochable. Trop peut-être même, car, si elle n’avait pas eu la crainte de mettre certaines personnes dans l’embarras et qu’elle avait dit clairement à son oncle pourquoi elle refusait son prétendant, il aurait non seulement surement compris, mais se serait méfié de bonhomme comme de la peste.
    Alors qu’il était prévu qu’elle soit élevée comme ses cousins, elle est nettement considérée comme inférieure, notamment par sa tante Norris qui, malheureusement, à une influence considérable sur ses deux nièces Maria et Julia. Les deux cousines la méprisent donc un peu, elles ne sont pas particulièrement méchantes avec elle, mais elles la considèrent comme quantité négligeable. Mme Norris, elle, en revanche, est vraiment méchante, elle n’aime pas Fanny, même si on ne sait pas trop pourquoi. Alors que l’idée de l’accueillir vient d’elle, on dirait qu’elle est indisposée par la présence de la petite puis jeune fille.
    Tom l’ainé de la famille n’est ni gentil, ni méchant. C’est le plus âgé, il a 17 ans quand Fanny débarque, il a des fréquentation pas toujours très recommandable et il pense plus à ses plaisirs qu’à autre chose.
    Enfin parmi les cousins, il y a Edmond qui est plus intègre, plus droit dans ses bottes. Il aime beaucoup Fanny mais parfois se confie à elle sans se rendre compte que ce qu’il lui dit peut la toucher voire la peiner. Il reste quand même le personnage le plus gentil et le plus honnête avec son père Sir Thomas.
    Le problème de Sir Thomas, en dehors du fait qu’il doit partir à l’étranger pendant plusieurs mois, est qu’il est d’un abord froid et austère. Il fait plein de petites choses pour Fanny mais il la terrifie. Il est aussi très conservateur et a du mal à s’adapter aux évolutions de la société. Je me rappelle avoir été très marquée à un moment quand il dit à Fanny qu’elle l’a déçue parce « vous avez montré que vous pouvez et voulez décider par vous-même sans aucune considération ou déférence envers ceux qui ont certainement quelques droits à vous guider ». Voilà, clairement, pour lui, une femme n’a aucune décision à prendre, elle doit s’en remettre à ses parents masculins. Et pourtant, plus tard dans le livre, on voit clairement que le bonheur de ses filles dans le mariage l’emporte nettement sur le statut social de leur conjoint.
    J’ai eu du mal à cerner Lady Bertram. Elle a l’air de n’être capable de rien, même pas de penser par elle-même. Mais elle est surement la seule à pourvoir montrer de l’affection.
    Quant au frère et à la sœur de Mme Grant, la femme du pasteur, c’est un peu eux qui vont venir dérégler la machine bien huilée de Mansfield Park. Ce n’est pas qu’ils soient méchants, mais les lacunes de leur éducation se font clairement sentir tout au long du livre, surtout du point de vue de la moralité.
    J’ai un peu regretté la fin, que j’ai trouvée expédiée, même si c’est là une volonté de l’auteur qu’elle annonce en début de chapitre.
    Même si c’est le plus long et le moins rythmé des romans de Jane Austen, Cela reste un livre à lire, surtout si on aime cet auteur.

    Un extrait : Il y a de cela à peu près trente ans, Mlle Maria Ward d’Huntingdon, n’ayant pour toute fortune que sept cents livres, eut la chance de conquérir le cœur de Sir Thomas Bertram de Mansfield Park, dans le comté de Northampton. De ce fait elle fut élevée au rang de femme de baronnet avec tout le luxe et tout le confort que lui apportait une maison bien montée et digne de sa situation.

    Tout Huntingdon applaudit à ce mariage magnifique et son oncle l’avocat, l’autorisa à user de ses talents jusqu’à concurrence de trois mille livres. Ses deux sœurs devaient bénéficier de son changement de situation et leurs amis et connaissances n’avaient aucun scrupule à prédire que Mlle Ward et Mlle Frances, aussi jolies que Mlle Maria, feraient certes d’aussi beaux mariages. Mais il n’y a pas, dans le monde, autant d’hommes possédant une grosse fortune qu’il y a de jolies femmes pour les mériter.

    Six ans plus tard, Mlle Ward se crut obligée de s’éprendre du Rév. A. Norris, un ami de son beau-frère, qui n’avait pratiquement aucune fortune et Mlle Frances fit encore pire.

    L’union de Mlle Ward n’était pas à dédaigner et Sir Thomas avait heureusement les moyens de donner l’hospitalité à son ami, à Mansfield, de sorte que M. et Mme Norris commencèrent leur vie conjugale avec moins de mille livres par an.

    Mais Mlle Frances désobligea toute sa famille en s’éprenant d’un lieutenant de marine, sans éducation, sans fortune et sans avenir. Elle aurait difficilement pu s’arrêter à un choix plus malencontreux. Sir Thomas Bertram avait tout intérêt, autant par principe que par fierté, à souhaiter que tous ceux de sa famille aient une situation respectable et aurait aidé de bon cœur la sœur de Lady Bertram dans ce sens. Mais la profession du mari de celle-ci était si peu intéressante qu’avant qu’il n’ait eu le temps de trouver le moyen de les aider, une mésintelligence profonde intervint entre les deux sœurs. C’était ce qui devait naturellement arriver à la suite d’un mariage aussi désastreux. Pour éviter des reproches inutiles, Mme Price n’avait jamais écrit à sa famille à ce sujet, jusqu’à ce qu’elle fût mariée. Lady Bertram, qui était une femme de caractère froid et indolent, se serait très bien accommodée d’abandonner sa sœur et de ne plus penser à elle.

    Mais Mme Norris était moins passive et ne fut satisfaite que lorsqu’elle eut écrit une longue lettre furieuse à Fanny, où elle lui montrait l’indignité de sa conduite et l’injuriait en conséquence. À son tour, Mme Price se froissa et se fâcha. Il y eut un échange de lettres désagréables entre elles, dans lesquelles Sir Thomas ne fut pas épargné, tant et si bien qu’il en résulta une brouille qui dura un temps considérable.

    Leurs habitations étaient si éloignées et leurs cercles de relations si différents, qu’ils entendirent à peine parler les uns des autres pendant les onze années qui suivirent et que ce fut par hasard que Sir Thomas apprit par Mme Norris, qui était toujours au courant de tout, que Fanny allait avoir un autre enfant. Après ce long laps de temps, Mme Price ne put supporter plus longtemps son ressentiment vis-à-vis de quelqu’un qui aurait pu l’aider et ne l’aidait pas. Une famille s’accroissant toujours, un mari inapte au service actif, mais aimant la bonne compagnie et les liqueurs fines, et un très petit revenu pour combler tous ces désirs la décidèrent à reconquérir les amis qu’elle avait si sottement sacrifiés. Elle adressa à Lady Bertram une lettre pleine de contrition et de désespoir, parlant avec émotion de ses enfants à qui il manquait le strict nécessaire et demandant la réconciliation. Elle attendait son neuvième enfant et après avoir exposé sa situation demandait à Lady Bertram d’être la marraine en la suppliant de s’occuper des huit autres. Son aîné était un garçon de dix ans plein d’esprit et qui désirait faire son chemin dans la vie, mais comment pouvait-elle l’aider ? Ne pourrait-il être utile à quelque chose dans une des propriétés que Sir Thomas avait dans les Indes ? Tout serait bon pour lui. Que pensait Sir Thomas de Woolwich ? Ou bien ne pouvait-on l’envoyer dans l’Est…

    La lettre produisit son effet. Elle rétablit la paix et ramena la bonté. Sir Thomas envoya des conseils et des recommandations. Lady Bertram de l’argent et une layette et Mme Norris écrivit des lettres.

    Tels furent les résultats immédiats, mais durant ces douze mois Mme Price obtint un autre avantage. Mme Norris déclara souvent à ses amis et connaissances qu’elle ne pouvait laisser sa pauvre sœur dans le besoin et quoique ayant déjà fait beaucoup pour elle, elle sentait qu’elle devait faire encore davantage. Elle émit l’idée de soulager Mme Price de la charge de l’un de ses enfants.

     

  • [Livre] Red Hill

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    Résumé : Scarlet est divorcée et mère de deux petites filles. Les élever seule est un combat quotidien qu'elle mène avec ténacité.

    Marié depuis plusieurs années à une femme de plus en plus distante, Nathan n'a qu'un vague souvenir de ce qu'est l'amour. En revanche, sa petite Zoe le comble de bonheur tous les jours.

    Miranda, elle, n'a qu'une préoccupation : l'organisation d'un week-end à la campagne avec sa soeur Ashley et leurs copains respectifs.

    Lorsque leur monde s'effondre, ces personnages ordinaires vont devoir affronter l'extraordinaire. Il leur faudra prendre en main leur destin pour avoir une chance de survie. Mais qu'arrive-t-il quand ceux pour qui vous êtes prêt à mourir sont aussi ceux qui peuvent vous détruire...?

     

    Auteur : Jamie McGuire

     

    Edition : J'ai lu

     

    Genre : Fantastique

     

    Date de parution : 23 Septembre 2015

     

    Prix moyen : 10€

     

    Mon avis : D’habitude, je ne suis pas une grande fan des zombies. J’ai du mal à leur trouver un intérêt (je ne supporte pas la série walking dead, par exemple). Mais ici, ça fonctionne. Alors certes, les zombies sont très présents, mais on ne les voit qu’au travers des yeux de quelques personnes. Après la trame de l’histoire reste très classique : des zombies, des humains les fuyant, et le moyen pour les seconds de survivre aux premiers.
    Rien, dans le quatrième de couverture, ne laisse supposer qu’on va se retrouver dans une histoire de zombies. C’est un choix, mais ça peut rebuter parce que ces histoires-là sont assez particulières, et ça peut vraiment énerver de tomber sur des zombies au détour d’une page quand on ne supporte pas ça.
    J’ai beaucoup aimé l’idée de suivre alternativement l’un des trois personnages, à savoir Scarlett, qui est séparée de ses deux filles, lesquelles étaient avec leur père au moment du début de l’épidémie ; Nathan qui est père célibataire (depuis peu) d’une toute petite fille et Miranda, qui avec son copain, sa sœur Ashley et le petit-ami de celle-ci était sur le chemin pour aller passer le week-end chez son père.
    Comme je le disais, je n’aime pas particulièrement les histoires de zombies (sauf quand c’est humoristique) mais ici, et je pense que c’est ça qui m’a fait apprécier l’histoire, j’ai bien aimé l’idée que tout parte de l’expérience scientifique d’un homme qui n’a pas voulu se contenter de prolonger la vie humaine en cherchant à soigner des maladies, mais a voulu ramener les morts à la vie. J’ai bien aimé aussi que les gens n’y croient pas tout de suite et puis qu’une fois qu’il leur est impossible de continuer à se voiler la face, qu’ils se retrouvent démunis, n’ayant comme repère que les nombreux films sur le sujet. D’ailleurs un des personnages va pointer la grande faiblesse de ces films qui est de ne pas « prévenir » de l’impact psychologique d’une telle catastrophe.
    Au niveau des personnages, Scarlett est sans doute celle qui m’a le plus énervée alors que je l’aimais bien au début du livre.
    Autant je comprends son besoin désespéré de retrouver ses filles, autant j’ai trouvé anormal qu’elle mette en danger tout le groupe, sans même leur demander ni avis ni permission (après tout elle n’est pas chez elle et j’ai trouvé que Miranda et Ashley avaient eu beaucoup de patience de ne pas lui dire d’aller chercher ses filles ailleurs).
    Bryce aussi était pénible, dans une moindre mesure. Son côté petit-copain jaloux, ça allait 5 minutes, mais au bout d’un moment on a juste envie de lui coller de grandes baffes et de lui rappeler que même s’il n’aime pas Joey, parce qu’il est efficace, charmant et qu’il ne laisse pas les filles de marbre, ils sont quand même en danger de mort et que Joey est un militaire qui revient à peine d’Afganistan et qui est donc probablement le plus qualifié question survie.
    J’ai aussi beaucoup aimé que les histoires de chacun des protagonistes s’entremêlent sans qu’ils en aient forcément conscience et sans que ce soit forcément de manière poussée.
    J’ai lu beaucoup de chroniques parlant d’un tome 2, et sur les bases comme booknode, Red Hill est noté comme étant un tome 1, cependant, rien, ni dans mes recherches, ni dans la fin du livre ne laisse supposer qu’il y aura un tome 2. En revanche, l’auteur a écrit une nouvelle qui nous raconte ce qu’on fait les filles de Scarlett pendant que leur mère se demandait si elles étaient ou non en vie (alors bien sûr, une fois lu Red Hill, on saura si elles se retrouvent ou non, mais dans tous les cas, l’idée est sympa, d’avoir ce côté-là du récit.)

    Un extrait : L’avertissement était bref – presque lâché en passant. « Les dépouilles ont été rassemblées et éliminées. » Puis les animateurs radio firent quelques plaisanteries, et cela en resta là. Il me fallut un moment pour prendre la mesure de ce que la journaliste avait annoncé à travers les haut-parleurs de ma Suburban : Enfin. Un savant zurichois avait enfin réussi à créer ce qui – jusqu’alors – n’était que pure fiction. Pendant des années, au mépris de toute déontologie scientifique, Elias Klein s’était échiné vainement à ranimer un cadavre. Autrefois considéré parmi les génies de ce monde, il était désormais la risée de tous. Et ce jour-là, il serait devenu un criminel, s’il n’avait pas été mort.

    À cet instant, je surveillais dans le rétroviseur mes filles qui se disputaient sur la banquette arrière, et les deux mots qui auraient dû tout changer avaient traversé mon cerveau sans trop m’interpeller. Deux mots qui, si je n’avais pas été en train de rappeler à Halle de donner l’autorisation de sortie à son professeur, m’auraient fait repartir pied au plancher.

    Dépouilles. Rassemblées.

    Mais j’étais trop occupée à rabâcher pour la troisième fois que le père des petites, Andrew, viendrait les chercher à l’école ce soir-là. Ils feraient ensuite une heure de route jusqu’à Anderson, la ville que nous appelions naguère notre chez-nous, où ils écouteraient le gouverneur Bellmon s’adresser aux collègues pompiers d’Andrew devant un parterre de journalistes locaux. Andrew pensait que cela plairait aux filles, et j’étais bien d’accord avec lui – peut-être pour la première fois depuis notre divorce.

    Même s’il manquait la plupart du temps de sensibilité, mon ex était un homme de devoir. S’il emmenait nos filles – Jenna, tout juste treize ans, à qui sa beauté (et sa bêtise) risquait de jouer des tours, et Halle, sept ans – au bowling, au restaurant, voire au cinéma, c’était uniquement parce qu’il s’y sentait obligé. Pour lui, passer du temps avec ses enfants faisait partie d’un boulot qu’il accomplissait sans plaisir.

    Quand Halle me saisit la tête et la fit brusquement pivoter pour me déposer de force des baisers mouillés sur les joues, j’en profitai pour remonter sur son nez ses lunettes à épaisse monture noire. Sans savourer l’instant, sans me douter que tant d’obstacles ce jour-là allaient se mettre entre nous pour nous séparer. Halle sautilla en chantonnant bruyamment tout au long du chemin menant à l’entrée de l’école. Elle était la seule personne de ma connaissance à être capable de se montrer à la fois aussi horripilante et attendrissante.

     

  • [Livre] Nos étoiles contraires

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    Résumé : Hazel, 16 ans, est atteinte d'un cancer. Son dernier traitement semble avoir arrêté l'évolution de la maladie, mais elle se sait condamnée. Bien qu'elle s'y ennuie passablement, elle intègre un groupe de soutien, fréquenté par d'autres jeunes malades.

    C'est là qu'elle rencontre Augustus, un garçon en rémission, qui partage son humour et son goût de la littérature. Entre les deux adolescents, l'attirance est immédiate.

    Et malgré les réticences d'Hazel, qui a peur de s'impliquer dans une relation dont le temps est compté, leur histoire d'amour commence... les entraînant vite dans un projet un peu fou, ambitieux, drôle et surtout plein de vie.

     

    Auteur : John Green

     

    Edition : Nathan

     

    Genre : Classique étranger

     

    Date de parution : 21 Février 2013

     

    Prix moyen : 20€

     

    Mon avis : C’est difficile de chroniquer ce livre sans trop en dire, car les évènements dont on a envie de parler sont justement ceux qui sont le plus inattendus et on n’a pas envie de gâcher la surprise pour les autres (vous voyez un peu le dilemme ?).

    La mère de Hazel qui la trouve déprimée (remarquez avec des métastases dans les poumons qui l'obligent à se trimballer partout avec une bonbonne d'oxygène on peut comprendre qu’elle le soit un peu), l'inscrit dans un groupe de soutien que personnellement je trouve presque plus déprimant que la maladie elle-même.
    Hazel est assez dure et cynique concernant sa maladie. Elle semble ne pas avoir d'espoir quant à son issue, mais je me demande si c'est vraiment ce qu'elle pense ou si elle a juste peur d'espérer. Elle a aussi tendance à avoir du mal à se laisser approcher de peur de faire souffrir les autres.
    Ses parents sont très présents, peut-être un peu trop mais comme dit Hazel: "la seule chose qui craint plus que de mourir d'un cancer à 16 ans, c'est d'avoir un gosse qui meurt d'un cancer"

    Augustus essaie de mettre de l'humour dans toute cette noirceur et il y arrive très bien. Son ami Isaac est un peu de la même trempe mais sa situation ne lui permet pas d'être aussi détaché que son ami.

    Hazel adore un livre qui se fini de manière abrupte et rêve de savoir ce que les personnages deviennent après la fin du livre. Mais ce rêve de savoir ce qu’il « se passe après » qu’on a tous plus ou moins eu concernant les personnages de nos livres préférés, tourne presqu’à l’obsession pour elle.

    L'auteur, cependant, refuse de lui raconter « la suite » autrement qu'en face à face. Or il habite en Hollande et un voyage d'Amérique vers la Hollande quand on dépend d'une bombonne d'oxygène, ce n'est pas si simple.

    On se demande surtout pourquoi cette question à cette importance pour Hazel? Pourquoi elle ne peut pas simplement accepter que les personnages de fictions cessent d'exister après la dernière page de leur livre ?

    Croit-elle qu'elle cessera d'être malade si elle a les réponses à toutes ses questions?

    Ou que l'idée de sa mort aura moins d'importance?

    Ce que j'ai le plus aimé c'est que ce livre n'est pas larmoyant (ne vous faites pas d'illusions,  si vous n'avez pas un cœur en granit, sortez les mouchoirs), mais même si la situation en elle-même est triste, l'auteur n'en rajoute pas.

    Un extrait : L'année de mes dix-sept ans, vers la fin de l’hiver, ma mère a décrété que je faisais une dépression. Tout ça parce que je ne sortais quasiment pas de la maison, que je traînais au lit à longueur de journée, que je relisais le même livre en boucle, que je sautais des repas et que je passais le plus clair de mon immense temps libre à penser à la mort.

    Quoi qu’on lise sur le cancer (brochures, sites Internet ou autres), on trouvera toujours la dépression parmi les effets secondaires. Pourtant, la dépression n’est pas un effet secondaire du cancer. C’est mourir qui provoque la dépression (et le cancer, et à peu près tout, d’ailleurs). Mais ma mère, persuadée que je devais être soignée, a pris rendez-vous chez mon médecin, le docteur Jim, qui a confirmé que je nageais en pleine dépression, une dépression tétanisante et tout ce qu’il y a de plus clinique. Conclusion : il fallait modifier mon traitement, et je devais m’inscrire à un groupe de soutien hebdomadaire.

    Le groupe mettait en scène des personnages plus ou moins mal en point et sa composition changeait régulièrement. Pourquoi changeait-elle ? C’était un effet secondaire de mourir.

    Inutile de préciser que ces séances étaient déprimantes au possible. Elles avaient lieu tous les mercredis dans la crypte en forme de croix d’une église épiscopale aux murs de pierre. On s’asseyait en cercle au centre de la croix, là où les deux morceaux de bois auraient dû se croiser : pile où le cœur de Jésus aurait dû se trouver.

    Je le savais parce que Patrick, l’animateur, qui était aussi la seule personne du groupe à avoir plus de dix-huit ans, nous bassinait à chaque réunion avec le cœur de Jésus, au centre duquel nous, jeunes survivants du cancer, étions littéralement réunis.

    Voilà comment ça se passait au cœur du cœur de Dieu : notre groupe de six, sept ou dix arrivait à pied ou en chaise roulante, piochait dans un malheureux assortiment de biscuits et se servait un verre de limonade, avant de prendre place dans le cercle de la vérité et d’écouter Patrick débiter pour la millième fois le récit déprimant de sa vie – comment il avait eu un cancer des testicules et aurait dû en mourir, sauf qu’il n’était pas mort et que maintenant il était même un adulte bien vivant qui se tenait devant nous dans la crypte d’une église de la 137e ville d’Amérique la plus agréable à vivre, divorcé, accro aux jeux vidéo, seul, vivotant du maigre revenu que lui rapportait l’exploitation de son passé de super-cancéreux, futur détenteur d’un master ne risquant pas d’améliorer ses perspectives de carrière, et qui attendait, comme nous tous, que l’épée de Damoclès lui procure le soulagement auquel il avait échappé des années plus tôt quand le cancer lui avait pris ses couilles, mais avait épargné ce que seule une âme charitable aurait pu appeler « sa vie ».

    ET TOI AUSSI, TU PEUX AVOIR CETTE CHANCE !

    Après quoi, chacun se présentait : nom, âge, diagnostic et humeur du jour. Je m’appelle Hazel, avais-je dit quand mon tour était arrivé. J’ai seize ans. Cancer de la thyroïde à l’origine, mais mes poumons sont truffés de métastases depuis longtemps. Sinon ça va.

     

  • [Livre] Tu tueras le père

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    Résumé : Sous un soleil de plomb, un homme court, désorienté, le long d'une route qui mène à Rome. Luca, son jeune fils, a disparu lors d'un pique-nique familial dans le Pratoni del Vivaro, un parc naturel à quelques kilomètres de là. Les enquêteurs dépêchés sur place découvrent bientôt la mère dans une clairière, décapitée.
    A la demande de son patron, Colomba Caselli, en congé après une affaire qu’elle nomme « le désastre », vient jeter un œil sur les lieux…et comprend aussitôt que quelque chose ne tourne pas rond.
    Le commissaire Rovere lui demande comme une faveur de mener l'enquête pour lui, en toute discrétion, et d'aller consulter un expert du rapt et de la maltraitance infantile, Dante Torre. Surnommé « l’enfant du silo » celui-ci a vécut 11 ans en captivité. Pendant ces années, son seul contact avec l'extérieur a été son mystérieux geôlier, qu'il appelle « le Père ».

    Colomba va confronter Dante à son pire cauchemar : dans cette affaire, il reconnaît la signature de ce Père jamais identifié, jamais arrêté...

    Auteur : Sandrone Dazieri

     

    Edition : Robert Laffont

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 8 octobre 2015

     

    Prix moyen : 21€

     

    Mon avis : Quand on voit une photo de l’auteur, Sandrone Dazieri, on ne dirait vraiment pas que c’est un psychopathe. Mais une fois qu’on a lu ce livre, on se pose la question.
    L’écriture est addictive. Le récit de l’enquête en cours est entrecoupé de scènes du passé.
    L’enquête en elle-même est assez lente : Colomba et Dante ne disposent pas toujours de tout l’arsenal judiciaire et doivent suivre de nombreuses pistes qui ne mènent à rien. Mais cette lenteur, qui a tendance à m’agacer en général, est ici un atout. On ne voit pas passer les 552 pages du livre car, si l’enquête est lente et laborieuse, le rythme général, lui, ne l’est pas une seconde. Car même si Colomba et Dante ne trouvent pas tout, tout de suite, comme on peut le voir dans certains thrillers, ils se démènent, cherchent, réfléchissent, courent partout… Et doivent gérer leurs démons : Colomba est encore très affectée par cette affaire dans son passé qu’elle appelle « le désastre » et pour laquelle ses anciens collègues semblent lui garder rancœur. Dante, lui, est bourré de phobies : vertige, claustrophobe (peut être aussi un poil agoraphobe), maniaque à l’extrême… Ce qui n’est pas des plus pratiques pour enquêter, il faut bien l’admettre.
    Sandrone Dazieri a travaillé ses personnages dans les moindres détails. Pour les personnages principaux, il les dévoile lentement, on en apprend un peu plus sur eux à chaque page. Mais même pour un personnage aussi insignifiant, et qui apparaît à peine, que la mère de Colomba, il arrive, en quelques lignes et quelques phrases de dialogue à nous faire cerner sa personnalité.
    J’ai beaucoup aimé Colomba, même si elle est parfois un peu trop dans le « tout est noir ou tout est blanc ». Dante me rendrait dingue au quotidien entre ses névroses et sa brusquerie lorsqu’il parle aux familles des victimes, mais le personnage est si bien construit qu’on ne pourrait pas l’imaginer se comporter autrement.
    On voit la plupart des autres personnages à travers le prisme des yeux de Colomba et Dante et donc on ne sait pas tout d’eux. Le procureur semble être un salopard et un incompétent, mais de par sa fonction, c’est surtout un politique et on ne le voit pas en dehors de cette fonction.
    Santini apparaît tout d’abord comme un flic arriviste qui veut être au centre de l’attention, mais au fil des pages, l’opinion qu’on a de lui se nuance un peu.
    Pendant la moitié du livre j’ai soupçonné tout le monde tour à tour. Pas forcément d’être le tueur lui-même, mais d’être au moins un complice.
    Finalement j’ai fini par avoir le fameux « Satori », une illumination comme le dit Dante, et, en regroupant tous les indices qu’on avait, j’ai trouvé le tueur (bon, ok, trois pages avant qu’il ne soit dévoilé, et encore je compte large mais quand même !).
    La fin laisse sur l’impression dérangeante que tout n’est pas totalement fini et qu’il reste des choses à découvrir. Y aura-t-il une suite ? Ou une autre enquête du duo ? Pas si sûr…

    Un extrait : L'HORREUR A COMMENCÉ À CINQ HEURES de l'après-midi, un samedi du début septembre : un homme en short faisait de grands gestes pour arrêter les voitures. Il portait un tee-shirt sur la tête pour se protéger du soleil et, aux pieds, une paire de tongs hors d'usage.

    Rien qu'à le regarder, l'agent qui rangea la voiture de patrouille sur le bas-côté de la départementale le classa dans la catégorie de « ceux qui ont perdu la boule ». Après dix-sept ans de service et quelques centaines d'alcooliques et de personnes en phase de délire, calmées avec ou sans égards, les « perdu la boule », il savait les reconnaître du premier coup d'œil. Et celui-ci en faisait partie, sans le moindre doute.

    Les deux agents descendirent du véhicule et l'homme en short s'approcha, bredouillant quelque chose. Il était épuisé et déshydraté, et l'agent le plus jeune lui donna un peu d'eau de la petite bouteille qu'il rangeait dans la portière, sans prêter attention au regard dégoûté de son collègue.

    Après quelques gorgées, les mots de l'homme en short devinrent plus compréhensibles. « J'ai perdu ma femme, dit-il. Et mon fils. » Il s'appelait Stefano Maugeri et, ce matin-là, il était parti pique-niquer avec sa famille non loin de là, dans la vallée des Pratoni del Vivaro. Ils avaient déjeuné de bonne heure et lui s'était assoupi, bercé par la brise. Quand il s'était réveillé, sa femme et son fils avaient disparu.

    Pendant trois heures, il avait arpenté les lieux, décrivant des cercles et cherchant en vain, jusqu'au moment où il s'était retrouvé à marcher sur le bas-côté de la route, frisant l'insolation et complètement désorienté. L'agent le plus âgé, qui commençait à voir vaciller ses certitudes, lui demanda pour quelle raison il n'avait pas appelé sa femme sur son portable : Maugeri lui répondit qu'il l'avait fait, mais que chaque fois il était tombé sur le répondeur ; puis son portable avait fini par se décharger complètement.

    L'agent le plus âgé regarda Maugeri, un peu moins sceptique. Les femmes qui disparaissaient en prenant les enfants avec elles, il en avait fait une sacrée collection au cours des interventions d'urgence, mais aucune n'avait jamais planté son conjoint au milieu des prés. Pas vivant, en tout cas.

    Les agents reconduisirent Maugeri sur les lieux du pique-nique. Il n'y avait personne. Les autres promeneurs étaient partis et sa Bravo grise était restée toute seule sur la petite route, non loin d'une nappe couleur magenta où se trouvaient encore des traces du déjeuner et une figurine de Ben 10, jeune héros ayant le pouvoir de se transformer en une quantité de monstres aliens.

    Quand ils arrivèrent, Ben 10 aurait dû se transformer en une espèce d'énorme mouche bleue qui aurait survolé les Pratoni à la recherche des disparus. Mais les deux policiers n'eurent d'autre choix que de donner l'alerte et d'appeler le Bureau d'enquêtes, lançant l'une des opérations de recherche les plus spectaculaires qui s'étaient déroulées dans les Pratoni ces dernières années.

    C'est alors que Colomba entra en scène. C'était son premier jour de travail après une longue pause, et ça allait devenir, de toute évidence, l'un des pires de sa carrière.

     

  • [Livre] Tant que dure ta colère

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    Résumé : Au nord de la Suède, à la fonte des glaces, le cadavre d'une jeune fille remonte à la surface du lac de Vittangijärvi. Est-ce son fantôme qui trouble les nuits du procureur Rebecka Martinsson ? Alors que l'enquête réveille d'anciennes rumeurs sur la mystérieuse disparition en 1943 d'un avion allemand dans la région de Kiruna, un tueur rôde, prêt à tout pour que la vérité reste enterrée sous un demi-siècle de neige ...

     

    Auteur : Asa Larsson

     

    Edition : Albin Michel

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 01 septembre 2016

     

    Prix moyen : 20€

     

    Mon avis : Cette histoire est la quatrième affaire sur laquelle travaille Rebecka Martinsson. Même si le livre peut être lu indépendamment des autres, j’ai regretté de ne pas avoir lu les trois précédents à cause des multiples références, anecdotiques, certes, qui y sont faites. Je pense donc me procurer ces trois premiers tomes pour remédier à tout ça.
    Dès le départ, dès le prologue, on sait que Wilma et son petit ami Simon on été assassiné. Quand, à la fonte des glaces, Wilma remonte à la surface, on sait donc qu’elle ne réapparait pas du tout où elle est morte.

    Wilma, d’ailleurs, ne va pas très loin, son esprit est là et commente régulièrement ce qu’il voit. Oh elle ne dit rien de direct (elle ne dit pas le nom de son assassin par exemple) mais combiné à ce que l’on sait déjà et à l’enquête que l’on suit, sa présence fait qu’on a souvent un temps d’avance sur les enquêteurs et le procureur.
    Assez vite, on comprend qui est le tueur. Parce que ce qui est important dans ce livre ce n’est pas tellement le qui. Enfin pour nous lecteurs, pour les enquêteurs, évidemment, c’est une question primordiale.
    Mais pour nous, donc, le plus important c’est d’une part, comment ils vont le coincer (on va l’appeler « ça », ça rappellera des souvenirs) et d’autre part pourquoi ? C’est vraiment la question que je me suis posée tout au long de ce roman : Pourquoi ? Qu’est ce qu’il y a dans cet avion pour que cela justifie de prendre deux vies d’une telle manière (d’ailleurs j’ai encore des frissons dans le dos en pensant à la description par Wilma de sa propre mort).
    Le texte est généralement écrit à la troisième personne que l’on suive le procureur ou l’un ou l’autre des inspecteurs. Il ne passe à la première personne que lorsque c’est Wilma qui s’exprime, ce qui ajoute encore à l’effet surnaturel et omniscient que la présence de l’adolescente provoque.
    Ce que j’ai beaucoup aimé aussi, c’est que tous les personnages, du chien à l’inspecteur en passant pas les voisins, tous ont une importance dans l’histoire.
    J’ai été un peu frustrée par la fin.
    Pas par son écriture car elle est très bien menée. Mais l’auteur, contrairement à beaucoup d’auteurs de thriller, a pris le parti de faire une fin vraiment réaliste. On n’est pas dans du : « tous les coupables sont punis proportionnellement à leurs crimes, justice est faite, tous les « gentils » obtiennent ce qu’ils méritent, les inspecteurs et le procureur se retrouve devant un verre pour fêter ça »
    La vérité éclate, certes, mais il y a une certaine frustration vis-à-vis de certains personnages.
    Le seul bémol, j’aurais aimé qu’il y ait une scène sur une sorte de plongée judiciaire dans cette épave d’avion, histoire de clore définitivement le sujet.
    J’ai découvert Asa Larsson avec ce roman et je ne le regrette absolument pas. Je l’ai dévoré en deux jours seulement et j’ai immédiatement noté ses trois autres polars en espérant qu’elle en écrira d’autres !


    Un extrait : J’ai réussi à percer un trou dans la glace avec mon couteau de plongée. Je me bats pour l’agrandir. Je pique mon couteau, je le tourne dans le trou. Quand il a la taille de ma main, je regarde mon manomètre. Plus que vingt bars.
    Il ne faut pas que je respire si vite. Il faut que je me calme. Mais je ne peux pas remonter. Je suis coincée sous la glace.
    Je glisse la main par le trou. Sans réfléchir. C’est ma main, d’elle-même, qui appelle à l’aide.

    Quelqu’un, là-haut, l’attrape fermement. D’abord, je suis soulagée. Quelqu’un va me sortir de l’eau. Me sauver.
    Puis cette personne commence à tirer vraiment trop fort sur ma main, la tord d’une côté et de l’autre. Alors je comprends que je suis prise. Je suis bloquée là. Je veux me libérer, mais à chaque fois que je tente d’arracher ma main, je me heurte le visage contre la glace. Un voile rose sur fond bleu clair.
    Une pensée engourdie me traverse l’esprit : je saigne.
    Là-haut, la personne change de prise. Serre ma main prisonnière entre ses jambes. Alors je tire. Et je me libère. Ma main glisse hors du gant de plongée. Eau froide. Main froide. Aïe.
    Je m’enfouie sous la glace. Loin. Loin de ça.
    Me voilà à nouveau sous la porte verte. Je tape dessus. Cogne. Griffe.
    Il doit y avoir une autre sortie. Un endroit où la glace est plus fine, où je peux la briser. Je m’enfuis encore.
    Il me court après. Est-ce un homme ? Je vois une silhouette floue à travers la glace. Toujours au-dessus de moi. Entre chaque respiration, quand les bulles d’air que je rejette ne grondent pas à mes oreilles, j’entends ses pas assourdis.

    L’air que je souffle est prisonnier. Il forme une grande bulle plate sous la glace dans laquelle j’aperçois mon reflet. Déformé, comme dans un miroir de fête foraine. L’image varie. Quand j’inspire, je vois la personne là-haut, quand je souffle, je me vois moi-même.
    Puis le détendeur gèle. L’air fuit par l’embout. J’arrête de nager, entièrement occupée à essayer de respirer. Les bouteilles se vident en quelques minutes.
    Puis c’est fini. Mes poumons pompent, pompent. Je lutte. Ne pas respirer de l’eau. J’explose.
    J’agite les bras. Je cogne la glace en vain. Mon dernier geste en cette vie est d’arracher le détendeur et le masque. Puis je meurs. Il n’y a plus d’air entre moi et la glace. Mon reflet n’est plus. Mes yeux sont grands ouverts dans l’eau.
    Maintenant, je vois la personne, là-haut.
    Un visage qui se colle à la glace et me regarde. Mais je ne comprends pas ce que je vois. Ma conscience se retire comme la marée.

     

  • [Livre] Les insatiables

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    Résumé : Dix-sept lignes – c’est tout ce que son rédacteur en chef demande à Marc Rappaport au sujet du meurtre d’une prostituée perpétré vingt-sept ans auparavant à Paris et considéré aujourd’hui comme résolu grâce à l’obtention de l’ADN du meurtrier présumé. Suivant son intuition, le journaliste cherche à en savoir davantage sur le destin de cette jeune femme. Son enquête fiévreuse le confronte aux manquements graves d’une usine chimique, responsable de la mort d’une quarantaine d’ouvriers. Des Insatiables, tout en haut de l’échelle sociale, œuvrent dans l’ombre ; les révéler expose à tous les dangers. Une fiction belle et haletante qui explore avec virtuosité les pistes politiques, économiques, historiques et émotionnelles menant au véritable meurtrier.

     

    Auteur : Gila Lustiger

     

    Edition : Actes sud

     

    Genre : roman contemporain

     

    Date de parution : 07 septembre 2016

     

    Prix moyen : 23€

     

    Mon avis : « Il y avait trop d’informations contradictoires. Trop de points de départ. Trop d’histoires. »

    Chapitre 24

    Cette phrase, qui commence le chapitre 24, résume parfaitement mon ressenti sur ce livre.
    Ce roman est affiché comme roman contemporain mais est davantage un polar. Le problème est, qu’étant à cheval sur deux genres, il n’arrive pas à s’intégrer à l’un d’eux.
    Il est trop centré sur la recherche d’un coupable pour être un simple roman contemporain et part trop dans tous les sens sur un problème de société pour être vraiment un polar.
    Au final, il ne trouve réellement sa place nulle part, et si l’écriture est agréable, il est difficile de conserver son intérêt pour l’histoire.
    En effet, celle-ci s’essouffle à force de trop de détails. Etait-il vraiment nécessaire d’expliquer chacune des actions des protagonistes ? Non, ce sont des paragraphes entiers qu’on finit par lire en diagonale pour enfin renouer avec le fil directeur de l’histoire.
    Les errances sentimentales du journaliste apportent-elles quoi que ce soit à l’histoire ? Non, pas même un peu de légèreté, ce qui est généralement le rôle de ces « intrigues » secondaires dans un roman au sujet un peu lourd.
    Le désir de Gila Lustiger de dénoncer la société actuelle où les bénéfices d’une minorité prime sur la sécurité même de la masse, à grand renfort de corruption et de magouille politique, était une bonne idée de sujet, mais il est mal amené. On ne sait pas bien comment on passe du meurtre d’une escort girl à un scandale politico-financier. Et arrivé à la fin du livre, on n’en sait guère davantage.
    J’aurais préféré une fin plus claire. Ici j’ai refermé le livre avec l’impression qu’il manquait un paragraphe pour clore l’histoire.

    Un extrait : La prostituée s’appelait Emilie Thevenin. Marc avait passé une bonne demi-heure à téléphoner ici et là pour dénicher une information qu’il n’était même pas certain d’utiliser. Après tout, qui voulait vraiment connaître le nom d’une pute étranglée presque trente ans auparavant ? D’autres se seraient contentés d’appeler Emilie « la victime », mais ceux-là n’avaient pas son talent.
    Elle n’avait même pas fêté ses vingt ans. Il ne savait presque rien d’elle – seulement qu’elle venait d’une petite ville de province et qu’elle était partie à Paris à dix-huit ans pour étudier l’histoire à la Sorbonne -, mais il aurait pu retracer dans les moindres détails la façon dont les choses s’étaient déroulées. Il l’imaginait, en plus de ses études, tenter de gagner sa vie comme vendeuse (ou comme serveuse). Et puis, un week-end ou un autre, dans une discothèque ou une autre, rencontrer une vieille amie. Se laisser convaincre d’essayer – Allez, rien qu’une fois, pour voir. Pas de quoi en faire toute une histoire, hein, il faut envisager les choses calmement.
    Subir les lubies d’un chef toute la sainte journée, c’est vraiment ce qu’elle veut ? Quelle idée de se tuer comme ça à la tâche pour un salaire de misère ! Où est le mal, pourquoi ne pas faire jouir quelques hommes d’affaires friqués et savourer en plus (bonus de l’escort) bons vins et bonne chère ? Elle ne va quand même pas rester vierge pour le seul et l’unique ? Ah ! Alors… - et, pour finir, se convaincre elle-même d’être fière de son choix. Non, elle n’est pas de ces femmes à la dérive qu’on force à la prostitution. Pas elle. Elle couche de son plein gré, contre un dédommagement qu’on peut qualifier de significatif. Car elle est jeune, cultivée (en première année d’histoire), française, jolie. Et si quelqu’un trouve quelque chose à y redire, c’est par mesquinerie, voilà tout. Avec un corps sans défauts, une fraîcheur et une naïveté toutes juvéniles, elle a accès au monde de l’argent facile, sans parler de la liberté de pouvoir choisir ses horaires : oui, elle peut s’y faire. El l’expérience aurait même pu durer encore un an ou deux, peut-être plus, si au mois de mai, en fin d’après-midi, Gilles Neuhart, employé de banque, ne l’avait pas étranglée. Frappée, attachée, violée, étranglée. 
    Assassinée.

     

  • [Livre] Extinction

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    Résumé : Alors qu'une gigantesque tempête de neige s'abat sur Manhattan, Internet s'effondre, entraînant dans sa chute les infrastructures municipales : l'électricité, l'eau courante... Le black-out est total, les vivres viennent à manquer. Dehors, c'est la loi de la jungle, entre pillages et épidémies. On accuse les Chinois, les cyberpirates. La faim, le froid, la soif guettent à chaque coin de rue – mais l'ennemi le plus redoutable partage sans doute votre palier...

    Dans la résidence de Chelsea ou, hier encore, les voisins se pressaient joyeusement autour d'un barbecue, confiance et solidarité s'érodent peu à peu. Mike Mitchell, jeune père et ingénieur aisé, sait que la menace peut surgir de partout. Aucune barricade ne peut garantir contre la trahison, l'égoïsme, la paranoïa... Sa vie, celle de sa femme et de son fils ne dépendent que de son jugement. À mesure que la communauté se disloque, l'extinction opère son effroyable sélection naturelle...

     

    Auteur : Matthew Mather

     

    Edition : Fleuve Noir

     

    Genre : SF/Thriller

     

    Date de parution : 12 Novembre 2015

     

    Prix moyen : 21€

     

    Mon avis : Ce livre est un roman apocalyptique mais pas dans le sens où on l’entend habituellement.
    Déjà, je dis apocalyptique, parce qu’on est vraiment au cœur de l’action, on n’arrive pas après la bataille, quand les survivants d’une catastrophe naturelle/guerre nucléaire/épidémie/attaque de zombie (rayer la mention inutile) ont déjà commencé à s’organiser pour survivre. Ici le livre commence sous les meilleurs auspices. Il fait beau, bien qu’on soit proche de noël, le temps est suffisamment doux pour faire un barbecue sur le toit, les voisins s’entendent plus ou moins bien. Bref tout va bien.
    Le personnage principal a bien quelques petits ennuis de couple, mais bon, qui n’en a pas…
    Les discussions vont bon train, et notre « héros », appelons-le comme ça pour faire simple, s’amuse à provoquer son meilleur ami, un survivaliste adepte de la théorie du complot.
    Et puis il y a des petites choses qui commencent à se dérègler. Rien de bien méchant, vraiment : un réseau téléphonique saturé, internet qui rame (que celui qui n’a jamais pesté devant une page internet qui met des plombes à s’ouvrir jette la première pierre à ces personnages qui n’ont rien vu venir).
    Une tempête de neige s’annonce. Mais à New York, ce n’est pas la première.
    Et c’est là que les choses vont commencer à déraper.
    Ce que j’ai aimé dans ce roman, c’est qu’on est pas confronté à une épidémie concoctée par un savant fou, à une attaque extraterrestre ou à tout autre catastrophe qui ne peux arriver que dans les bouquins ou les films.
    Ici la cause de la débandade est plus que plausible. Notre monde est tellement dépendant de la technologie qu’on peut effectivement se demander ce qu’il se passerait si on n’était plus capable de faire fonctionner les centrales électriques, les distributions d’eau, les réseaux de communications…Comment obtenir du secours si on ne peut joindre personne ? Comment soigner les gens si les hôpitaux sont paralysés ?
    Mais ce qui fait la force de ce roman, c’est l’analyse de la réaction des gens. Combien de temps avant que certains ne décident d’employer la force pour avoir plus de nourriture que les autres ? Combien de temps avant de décider de tuer pour une bouteille d’eau ?
    J’avais classé ce livre en SF mais c’est également un thriller, un thriller psychologique qui prend aux tripes.
    Le « héros » comme je l’ai appelé tout à l’heure, Mike, n’a justement rien d’un héros. C’est un homme sans histoire, qui a des doutes quant à son couple au moment où tout commence, qui ne sait pas comment réagir, qui n’est pas sûr de réussir à protéger sa femme enceinte et son fils de 2 ans.

    Ce qui fait le plus peur dans ce livre, c’est que ce n’est pas un roman de fiction, mais que ce pourrait bien être un roman d’anticipation.

    Un extrait : — Nous vivons une époque incroyable !

    Dépité, j’ai examiné la saucisse carbonisée piquée sur ma fourche, avant de la reposer à l’écart, sur le bord du gril.

    — Incroyablement dangereuse, oui ! s’est esclaffé Chuck, mon voisin de palier et meilleur ami. Beau travail ! Je te parie qu’elle est encore congelée, à l’intérieur.

    Les températures étant depuis plusieurs jours inhabituellement douces pour une fin novembre, le mercredi, veille de Thanksgiving, j’avais décidé au débotté d’organiser un barbecue sur le toit-terrasse de notre immeuble, un ancien entrepôt de Chelsea converti en résidence. La plupart de nos voisins n’avaient pas encore quitté la ville pour le long week-end férié et, en compagnie de Luke, mon fils de deux ans, j’avais consacré la matinée à frapper de porte en porte, pour les convier à notre barbecue.

    — Ne dénigre pas mes talents de cuisinier, et ne te lance pas sur ce sujet – s’il te plaît.

    C’était une superbe fin de journée, avec un coucher de soleil spectaculaire. Notre perchoir, au septième étage, nous offrait une vue imprenable : le ruban de feuillages rouges et dorés qui ourlait les rives de l’Hudson d’un côté, le skyline de Manhattan de l’autre. J’avais beau vivre depuis deux ans à New York, je m’émerveillais toujours autant de la vitalité qui faisait battre le cœur de cette ville. J’ai contemplé avec satisfaction la trentaine de voisins rassemblés sur le toit, pas peu fier qu’ils aient répondu aussi nombreux à mon invitation.

    — Selon toi, il y a donc peu de chances qu’une éruption solaire anéantisse la planète ? a repris Chuck, un pétillement malicieux dans ses yeux noisette.

    Avec son timbre nasillard de gars du Sud, même l’évocation d’un cataclysme ressemblait aux paroles d’une ballade. Ce soir-là, d’ailleurs, dans son jean déchiré et son T-shirt des Ramones, à voir ses cheveux blonds coiffés au pétard à mèche et sa barbe de deux jours, on aurait dit une rock star en train de décompresser sur une chaise longue, une canette de bière à la main.

    — C’est exactement ce sur quoi je veux éviter de te lancer…

    — Je pointe juste du doigt que…

    — Ce que tu pointes du doigt, c’est une catastrophe, l’ai-je coupé en levant les yeux au ciel. Comme d’habitude. Alors que l’humanité vit, justement en ce moment, une des transitions les plus incroyables de toute son histoire !

     

  • [Livre] Bondrée

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    Résumé : Été 67. Le soleil brille sur Boundary Pond, un lac frontalier rebaptisé Bondrée par Pierre Landry, un trappeur canuck dont le lointain souvenir ne sera bientôt plus que légende. Le temps est au rire et à l'insouciance. Zara Mulligan et Sissy Morgan dansent le hula hoop sur le sable chaud, les enfants courent sur la plage et la radio grésille les succès de l'heure dans l'odeur des barbecues. On croit presque au bonheur, puis les pièges de Landry ressurgissent de la terre, et Zara disparaît, et le ciel s'ennuage.

     

    Auteur : Andrée A. Michaud

     

    Edition : Rivages

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 21 septembre 2016

     

    Prix moyen : 18,50€

     

    Mon avis : Dès le départ une chose m’a profondément agacée : le franglais. Toutes les deux lignes, on a des expressions moitié anglaises-moitié françaises, des mots anglais, des titres de chansons en anglais… Un peu pourquoi pas, mais là il y en a trop. On a bien compris que Bondrée est à cheval sur les Etats-Unis et le canada francophone, mais au bout d’un moment, soit l’auteur écrit en français, soit elle écrit en anglais, mais les deux à la fois, c’est vraiment pénible.
    L’absence totale de dialogues est assez perturbante et enlève un certain rythme, une certaine structure au texte.
    L’écriture est très poétique mais j’ai trouvé que ça ne se prêtait pas au genre du polar.
    J’ai passé plus de la moitié du livre à attendre qu’il se passe quelque chose pour me rendre compte qu’en fait, des choses, il s’en passait, mais que, noyées dans les descriptions bucolique de la région et du temps qui passe, elles n’avaient eu aucun impact sur moi.
    Ce n’est qu’après 200/250 pages que j’ai commencé à trouver un certain intérêt à l’histoire mais malgré tout, ça n’a pas réussi à rattraper le sentiment que j’ai eu depuis le début : celui de l’ennui.
    Je n’ai pas compris ce que l’auteur a cherché à faire en donnant son prénom à une petite fille, seul personnage dont le point de vue est à la première personne, et son nom de famille à l’inspecteur qui est un peu le personnage central du roman. S’il y avait une signification, un message particulier, je ne l’ai pas vu.
    L’histoire est pourtant assez bien trouvé et le dénouement surprenant sans pour autant manquer de logique, mais qu’un thriller démarre à seulement 1/3 de la fin, et vous pouvez être sûr que quelque soit l’originalité de la fin, mon opinion du roman ne gagnera pas plus que quelques points.
    Le style d’écriture aurait été plus adapté à une romance ou à un roman contemporain.
    Un bon point, même si l’auteur est canadienne et émaille son texte de tournures et expressions québécoise, celles-ci sont bien dosées et, contrairement à ce que l’on peut trouver dans de nombreux romans canadiens, ne gênent pas la compréhension du texte d’un francophone non canadien.
    Je sors donc de cette lecture assez mitigée. D’un côté l’histoire, l’intrigue et le dénouement sont bien ficelés ; d’un autre le coté poétique et les trop nombreuses phrases en anglais empêchent de se plonger complètement dans une ambiance propice à la lecture d’un thriller.

    Un extrait : Les enfants étaient depuis longtemps couchés quand Zaza Mulligan, le vendredi 21 juillet, s’était engagée dans l’allée menant au chalet de ses parents en fredonnant A Whiter Shade of Pale, propulsé par Procol Harum aux côtés de Lucy in the Sky with Diamonds dans les feux étincelants de l’été 67. Elle avait trop bu, mais elle s’en fichait. Elle aimait voir les objets danser avec elle et les arbres onduler dans la nuit. Elle aimait la langueur de l’alcool, les étranges inclinaisons du sol instable, qui l’obligeaient à lever les bras comme un oiseau déploie ses ailes pour suivre les vents ascendants. Bird, bird, sweet bird, chantait-elle sur un air qui n’avait aucun sens, un air de jeune fille soûle, ses longs bras mimant l’albatros, les oiseaux d’autres cieux tanguant au-dessus des mers déferlantes. Tout bougeait autour d’elle, tout s’animait d’une vie molle, jusqu’à la serrure de la porte d’entrée, dans laquelle elle ne parvenait pas à introduire sa clé. Never mind, car elle n’avait pas vraiment envie de rentrer. La nuit était trop belle, les étoiles trop lumineuses. Elle avait donc rebroussé chemin, retraversé l’allée bordée de cèdres, puis elle avait marché sans autre but que de s’enivrer de son ivresse.

    À quelques dizaines de pieds du terrain de camping, elle s’était engagée dans Otter Trail, le sentier où elle avait embrassé Mark Meyer au début de l’été avant d’aller raconter à Sissy Morgan, son amie de toujours et pour toujours, à la vie à la mort, à la vie à l’éternité, que Meyer frenchait comme une limace. Le souvenir flasque de la langue molle cherchant la sienne en se tortillant avait fait monter un goût de bile acide dans sa gorge, qu’elle avait combattu en crachant, ratant de peu le bout de ses sandales neuves. Esquissant quelques pas maladroits qui lui avaient arraché un fou rire, elle s’était enfoncée dans la forêt. Les bois étaient calmes et aucun bruit n’altérait la quiétude des lieux, pas même celui de ses pieds sur le sol spongieux. Puis un léger souffle de vent avait effleuré ses genoux et elle avait entendu un craquement derrière elle. Le vent, s’était-elle dit, wind on my knees, wind in the trees, sans se soucier davantage de l’origine de ce bruit au sein du silence. Son cœur n’avait cependant fait qu’un bond quand un renard avait détalé devant elle et elle s’était remise à rire, un peu nerveusement, songeant que la nuit suscitait la peur parce que la nuit aimait la peur dans les yeux des enfants. Isn’t it, Sis ? avait-elle murmuré en se rappelant les jours lointains où elle tentait avec Sissy de provoquer les fantômes qui peuplaient la forêt, celui de Pete Landry, celui de Tangara, la femme dont les robes rouges avaient ensorcelé Landry, et celui de Sugar Baby, dont on entendait les jappements au sommet de Moose Trap. Tous ces fantômes avaient aujourd’hui disparu de l’esprit de Zaza, mais la noirceur du ciel sans lune ravivait le souvenir de la robe rouge qui s’enfuyait entre les arbres.

    Elle s’apprêtait à bifurquer dans un sentier coupant Otter Trail quand un autre craquement avait retenti derrière elle, plus fort que le premier. Le renard, s’était-elle dit, fox in the trees, refusant que l’obscurité gâche son plaisir en exhumant ses stupides peurs d’enfant. Elle était vivante, elle était ivre, et la forêt pouvait bien s’écrouler autour d’elle, elle ne flancherait ni devant la nuit ni devant les aboiements d’un chien mort et enterré depuis des siècles. Elle avait recommencé à fredonner A Whiter Shade of Pale parmi les arbres ondoyants, s’imaginant danser un slow torride dans les bras puissants d’un inconnu, puis elle s’était arrêtée net après avoir failli trébucher sur une racine tordue.

    Le craquement s’était rapproché et la peur, cette fois, était parvenue à se frayer un chemin sur sa peau moite. Who’s there ? avait-elle demandé, mais le silence était retombé sur la forêt. Who’s there ? avait-elle crié, puis une ombre avait traversé le sentier et Zaza Mulligan s’était mise à reculer.

     

  • [Livre] La dame de Kyoto

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    Résumé : Kyoto, 1904. Depuis l'assassinat de ses parents, riches industriels de la soie, Myako Matsuka subit la tutelle de son frère Naoki. Lorsque celui-ci part pour le front de la guerre russo-japonaise, elle doit gérer seule l'entreprise familiale. Myako découvre alors avec horreur les conditions de travail des ouvrières et n'hésite pas à transgresser les consignes de son frère, révélant un tempérament fier et indépendant.
    Mais l'amour trouble qu'elle porte à un diplomate anglais, Allan Pearson, de même que l'intrusion dans sa vie d'un jeune Français passionné d'estampes, Martin Fallières, vont brouiller les cartes. 
    Torturée par le mystère de la mort de ses parents, déchirée entre ses instincts amoureux, ses responsabilités professionnelles et la fidélité qu'elle doit à sa famille, Myako va devoir choisir. Des choix douloureux qui feront éclater une vérité non moins tragique sur son passé et orienteront son avenir dans un sens bien différent de celui qu'elle envisageait

     

    Auteur : Eric Le Nabour

     

    Edition : Calmann Levy

     

    Genre : Romance

     

    Date de parution : 2012

     

    Prix moyen : 20,50€

     

    Mon avis : Dans ce livre on est plongé dans le japon du début du XXème siècle, même si parfois j’ai eu des doutes quant aux définitions des termes comme les meiko qui seraient le nom donné au geisha à Kyoto, alors que, recherches faites, on les appelle les Geiko… erreur de l’auteur ? Coquille ?... du coup ça m’a rendu assez méfiante pour les autres termes que je ne connais pas (et je ne vais pas aller vérifier chaque terme non plus).
    Concernant les personnages, j’ai eu un peu de mal avec eux.
    Bizarrement, celui que j’ai le plus apprécié est Naoki alors qu’à première vue il est assez pénible. Mais son évolution au fil du roman (ou plutôt les révélations faites qui permettent de mieux le comprendre) fait qu’on s’attache à lui.
    Allan Pearson est insupportable, il n’a absolument rien pour lui, mais je pense que c’était le but.
    Mais je n’ai pas franchement apprécié Martin Fallière et Myako non plus.
    Le premier se comporte d’emblée comme si Myako était sa propriété et j’ai détesté son attitude. Il agit comme si Myako et son entourage avait des comptes à lui rendre.
    La vieille servante m’a agacée dans sa façon de traiter Myako comme une enfant alors qu’elle est sa maitresse mais d’un autre côté, quand on voit l’attitude de la jeune femme, on peut le comprendre un peu.
    Myako n’a aucune envie d’entrer dans le monde des adultes tout en ne supportant pas qu’on la traite en enfant. Pourtant, à 22 ans, il serait grand temps qu’elle se réveille un peu et qu’elle assume la conséquence de ses actes (et surtout qu’elle réfléchisse un peu avant de les commettre). Je n’ai ressenti aucune empathie envers elle.
    L’histoire est un peu cousue de fil blanc et le dénouement un peu trop rapide quand on songe au temps qu’il a fallu pour y arriver.
    Ça reste néanmoins une petite histoire légère et facile à lire, idéale pour reposer son esprit après des lectures plus intenses.

    Un extrait : Un nom et un visage lui étaient malgré tout venus immédiatement à l’esprit : Kodo Kobayashi, l’homme que son frère voulait lui faire épouser depuis plus d’un an déjà. Que pouvait-il y avoir de plus important la concernant aux yeux de Naoki ?

    Myako souffla doucement sur son thé brûlant.

    Épouser Kobayashi… Ce petit homme gras au sourire faux, aux manières apprêtées, aux doigts boudinés et aux ongles manucurés dont elle n’imaginait pas qu’ils puissent se poser un jour sur elle. « Plutôt travailler dans un bordel de Gion », songea Myako. Chacune de ses visites lui était un supplice. Le « gros Kodo », comme l’appelait Hiromi, venait régulièrement au ryôkan Matsuka. Une fois par mois environ. Il apportait toujours des présents inutiles et stupides. Il s’asseyait en face d’elle, replet et satisfait, les mains posées sur ses cuisses et la dévorait des yeux avec des airs de mangouste affamée.

    Aux yeux de Naoki, en revanche, Kodo Kobayashi présentait tous les avantages requis : petit-fils de samouraï, banquier et futur membre de la Diète impériale. Un parti inespéré tant sa fortune faisait des envieux dans les rangs les plus fermés de l’aristocratie japonaise. Pourtant, Myako ne parvenait pas à imaginer que le caractère inflexible de Naoki l’aveugle au point de vouloir faire consciemment son malheur.

    – Je sais à quoi ou à qui tu penses, glissa Hiromi. Je sais même que ça te tient éveillée la nuit. Tu crois sans doute que je ne t’entends pas dans ton sommeil…

    Myako feignit la surprise.

    – Que veux-tu dire ?

    – Tu le sais très bien. Ce n’est pas parce que je suis une vieille carne aujourd’hui que je n’ai pas été jeune moi aussi…

    – Je n’y peux rien, gémit Myako, je ne pense qu’à lui depuis des mois.

    Hiromi posa un doigt brun et tordu sur ses lèvres.

    – Eh bien, arrête ! Et même oublie-le, si tu peux ! Tu sais ce que je t’ai dit à son sujet. Un homme marié, n’y songe même pas, ma belle…

    – Mal marié !

    – Ce n’est pas ton affaire. Voudrais-tu faire honte à ton frère ?

    – Mais…

    Le doigt accentua sa pression et Myako en éprouva une sensation désagréable parce qu’il lui intimait l’ordre de se taire et qu’il sentait le vinaigre.

    – Il n’y a pas de mais… Allez, va voir Naoki, il doit s’impatienter…

    – Mais je ne suis pas encore…

    – Tu es fraîche comme une rose, il n’y verra que du feu. Et puis il préférera te voir sans apprêt plutôt que de faire le pied de grue dans son bureau. Je te l’ai dit, il est de mauvaise humeur.

    Le doigt se retira. La bouilloire siffla sur le fourneau. Myako émit un soupir de désolation, se resservit du thé d’orge grillé, puis avala le contenu de son bol avec une lenteur exaspérante. Quand elle ne put reculer davantage l’échéance, elle se dirigea enfin vers le bureau de son frère d’un pas glissant sous les regards lourds de sous-entendus de la vieille femme.

     

  • [Livre] Les règles d'usage

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    Résumé : Wendy, treize ans, vit à Brooklyn. Le 11 septembre 2001, son monde est complètement chamboulé : sa mère part travailler et ne revient pas. L’espoir s’amenuise jour après jour et, à mesure que les affichettes DISPARUE se décollent, fait place à la sidération. Le lecteur suit la lente et terrible prise de conscience de Wendy et de sa famille, ainsi que leurs tentatives pour continuer à vivre. Le chemin de la jeune fille la mène bientôt en Californie chez son père biologique qu’elle connaît à peine – et idéalise. Son beau-père et son petit frère la laissent partir le coeur lourd, mais avec l’espoir que cette expérience lui sera salutaire. Assaillie par les souvenirs, Wendy est tiraillée entre cette vie inédite et son foyer new-yorkais qui lui manque. Elle délaisse les bancs de son nouveau collège et, chaque matin, part à la découverte de ce qui l’entoure, faisant d’étonnantes rencontres : une adolescente tout juste devenue mère, un libraire clairvoyant et son fils autiste, un jeune à la marge qui recherche son grand frère à travers tout le pays. Wendy lit beaucoup, découvre Le Journal d’Anne Frank et Frankie Addams, apprend à connaître son père, se lie d’amitié avec sa belle-mère éleveuse de cactus, comprend peu à peu le couple que formaient ses parents – et les raisons de leur séparation. Ces semaines californiennes la prépareront-elles à aborder la nouvelle étape de sa vie ? Retournera-t-elle à Brooklyn auprès de ceux qui l’ont vue grandir ?

     

    Auteur : Joyce Maynard

     

    Edition : Philippe Rey

     

    Genre : roman contemporain

     

    Date de parution : 01 septembre 2016

     

    Prix moyen : 22€

     

    Mon avis : Au début du roman, j’ai été très gênée dans ma lecture par le non respect des règles typographiques du dialogue. Il est difficile de distinguer les dialogues du récit et ça a considérablement ralenti ma lecture, même quand je m’y suis un peu habitué.
    C’est un point qui fera que je ne relirais pas ce roman et que je ne le conseillerais qu’avec quelques réserves et en mettant bien en garde de cette construction difficile.
    J’ai beaucoup aimé Josh et Carolyn. Les « pièces rapportées » de la famille sont aussi celles qui sont les plus attachantes.
    Garrett, le père de Wendy, reste un peu insouciant, même s’il semble s’être amélioré depuis l’époque où il était avec son ex femme.
    Pour Janet, c’est plus difficile, car on ne la connaît qu’à travers les souvenirs qu’en a Wendy. Et avec la culpabilité qu’elle ressent de ne pas avoir dit au revoir à sa mère ce matin là, elle a tendance à revoir leurs disputes plus que leurs bons moments. Ainsi on voit une femme qui m’a parut amère et vindicative, désireuse de voir sa fille en vouloir à son père autant qu’elle-même lui en veut. A chaque fois que Wendy repense aux moments où sa mère et elle parlaient de son père, elle se souvient de la hargne de Janet à l’encontre de Garrett.
    Kate, après la mort de Janet, se fait un peu le relais de cette colère. Et, alors que Josh décide de laisser partir Wendy, parce qu’il se dit qu’elle a peut être besoin de faire cette expérience pour surmonter la perte de sa mère, elle n’hésite pas à culpabiliser l’adolescente. J’ai trouvé qu’elle était un peu intrusive. Le fait d’avoir été la meilleure amie de Janet ne lui donne aucun droit de regard sur la vie de Wendy.
    Garrett a été agaçant au début. Cette manière de débarquer après plusieurs années d’absence pour récupérer sa fille en occultant presque l’existence de Josh et de Louis, le petit frère, en disant qu’il ne lui reste que lui, est particulièrement énervante, parce que Josh était là, lui, pendant tout ce temps où Garrett était absent. Mais on se rend vite compte que c’est plus de la maladresse qu’autre chose et son attitude, par la suite, le rachète largement à mes yeux.
    On croise beaucoup de personnages, Violet, Todd, Alan… qui vont aider Wendy à se reconstruire, chacun à leur niveau.
    L’auteur a réussi à nous faire ressentir toute l’angoisse de l’attente insupportable, le chagrin, le refus de regarder la réalité en face, que beaucoup de famille des victimes du 11 septembre ont du ressentir. Le fait que, n’ayant pas de corps à enterrer, certaines personnes ont eu du mal à faire leur deuil car, comment ne pas garder un infime espoir ?
    Le roman montre la reconstruction de Wendy, on la voit grandir aussi, pas seulement en âge, car il se déroule sur moins d’une année, mais aussi mentalement. Elle grandit, elle mûrit, elle avance, coûte que coûte.
    Pour moi, il n’y avait pas de « bonne » fin. Que Wendy décide de rester en Californie avec son père et Carolyn, ou de rentrer à New York avec Josh et Louis, dans un certain sens, une des parties sera toujours lésée. Que ce soit sa famille et ses amis en Californie ou son autre famille et ses autres amis à New York, elle manquera cruellement à quelqu’un. D’autant plus qu’il ne s’agit pas là seulement de vivre dans une ville ou une autre, mais dans l’un ou l’autre d’Etats qui ne peuvent pas être plus éloignés.
    Finalement, Wendy va devoir faire preuve d’un peu d’égoïsme, et choisir ce qui est le mieux pour elle.

    Même si Joyce Maynard nous offre un roman résolument optimiste, puisqu’il est question avant tout de reconstruction, j’ai été au bord des larmes pendant la majorité du roman, parce que, même si je ne suis pas américaine, que je n’étais pas à New York le 11 septembre et que je n’ai perdu personne dans la catastrophe, l’auteur nous a fait ressentir toutes ses émotions, presque comme si on y était. Mais seulement presque, heureusement.

     

    Un extrait : Plus tard, Wendy se repasserait ce matin-là pour tenter d’en graver le moindre détail dans sa mémoire. Elle n’oublierait jamais l’odeur du beurre chaud dans la poêle, ni la voix de Josh qui accompagnait Madonna. Ni le soleil doré qui tombait sur le toit de l’église de l’autre côté de la rue, en face de leur appartement, ni la femme qui était montée dans le bus à la même station qu’elle et déblatérait sur la liaison amoureuse d’un représentant du Congrès américain. Elle avait dû refaire trois fois la combinaison de son casier avant de réussir à en ouvrir le verrou. Le chef d’orchestre lui avait lancé : Je parie que tu es la seule clarinettiste à avoir travaillé ton instrument cet été, ce qui était vrai.
    Elle établirait la liste de tous les trucs qu’elle était prête à faire – se couper les cheveux, se couper un bras, les deux jambes, prendre vingt-cinq, cent kilos, ne jamais rencontrer quelqu’un qui tombe amoureux d’elle pour la vie, se mettre nue devant toute la classe en cours d’EPS – si seulement elle pouvait retourner en arrière.
    Pause, aimait dire Louis quand il se levait du canapé pour aller aux toilettes ou prendre un cookie et qu’il ne voulait pas qu’on fasse quoi que ce soit avant son retour. Rembobine, ordonnait-il quand il revenait en courant dans la pièce et croyait que le film avait continué sans lui. Parfois ils regardaient une vidéo, mais il le disait aussi quand on lui lisait un livre, quand ils jouaient au jeu des sept familles ou aux dames. Il pensait qu’on pouvait arrêter le temps dans la vraie vie comme dans les vidéos.
    Si on ne pouvait pas rembobiner, alors on se mettait sur pause. On s’immobilisait pour toujours à cet instant sans jamais passer au suivant, et c’était encore un million de fois plus supportable que ce qui arrivait quand on laissait tourner.

    Plus tard, elle reconstituerait ce qu’elle était en train de faire à la seconde exacte où c’était arrivé. Elle s’approchait du taille-crayon près du bureau de la classe et se demandait en aiguisant sa mine si les autres la trouvaient grosse. Griffonnait au dos de son cahier de textes une fille en combinaison orange style manga japonais avec une coupe punk et un ghetto-blaster sur l’épaule, un dessin qu’elle ne finirait jamais. Entrouvrait son classeur pour jeter un nouveau regard à la photo de la cabane aux cactus que son père lui avait envoyée. Les belles-de-jour, le pick-up vert funky et son papa adoré serrant le chiot contre sa poitrine.

    Je parie qu’ils ont encore déréglé la sonnerie car elle aurait dû déjà retentir, leur dit Mrs Volt. Si elle n’a pas encore sonné dans une ou deux minutes, je vais vous envoyer à votre premier cours.
    A cet instant précis, la voix du principal résonna dans le haut-parleur.
    Je vous prie tous de garder votre calme. Nous cherchons encore des informations. Il y a eu un accident.