Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

[Livre] Tu tueras le père

tu tueras le pere.jpg

Résumé : Sous un soleil de plomb, un homme court, désorienté, le long d'une route qui mène à Rome. Luca, son jeune fils, a disparu lors d'un pique-nique familial dans le Pratoni del Vivaro, un parc naturel à quelques kilomètres de là. Les enquêteurs dépêchés sur place découvrent bientôt la mère dans une clairière, décapitée.
A la demande de son patron, Colomba Caselli, en congé après une affaire qu’elle nomme « le désastre », vient jeter un œil sur les lieux…et comprend aussitôt que quelque chose ne tourne pas rond.
Le commissaire Rovere lui demande comme une faveur de mener l'enquête pour lui, en toute discrétion, et d'aller consulter un expert du rapt et de la maltraitance infantile, Dante Torre. Surnommé « l’enfant du silo » celui-ci a vécut 11 ans en captivité. Pendant ces années, son seul contact avec l'extérieur a été son mystérieux geôlier, qu'il appelle « le Père ».

Colomba va confronter Dante à son pire cauchemar : dans cette affaire, il reconnaît la signature de ce Père jamais identifié, jamais arrêté...

Auteur : Sandrone Dazieri

 

Edition : Robert Laffont

 

Genre : Thriller

 

Date de parution : 8 octobre 2015

 

Prix moyen : 21€

 

Mon avis : Quand on voit une photo de l’auteur, Sandrone Dazieri, on ne dirait vraiment pas que c’est un psychopathe. Mais une fois qu’on a lu ce livre, on se pose la question.
L’écriture est addictive. Le récit de l’enquête en cours est entrecoupé de scènes du passé.
L’enquête en elle-même est assez lente : Colomba et Dante ne disposent pas toujours de tout l’arsenal judiciaire et doivent suivre de nombreuses pistes qui ne mènent à rien. Mais cette lenteur, qui a tendance à m’agacer en général, est ici un atout. On ne voit pas passer les 552 pages du livre car, si l’enquête est lente et laborieuse, le rythme général, lui, ne l’est pas une seconde. Car même si Colomba et Dante ne trouvent pas tout, tout de suite, comme on peut le voir dans certains thrillers, ils se démènent, cherchent, réfléchissent, courent partout… Et doivent gérer leurs démons : Colomba est encore très affectée par cette affaire dans son passé qu’elle appelle « le désastre » et pour laquelle ses anciens collègues semblent lui garder rancœur. Dante, lui, est bourré de phobies : vertige, claustrophobe (peut être aussi un poil agoraphobe), maniaque à l’extrême… Ce qui n’est pas des plus pratiques pour enquêter, il faut bien l’admettre.
Sandrone Dazieri a travaillé ses personnages dans les moindres détails. Pour les personnages principaux, il les dévoile lentement, on en apprend un peu plus sur eux à chaque page. Mais même pour un personnage aussi insignifiant, et qui apparaît à peine, que la mère de Colomba, il arrive, en quelques lignes et quelques phrases de dialogue à nous faire cerner sa personnalité.
J’ai beaucoup aimé Colomba, même si elle est parfois un peu trop dans le « tout est noir ou tout est blanc ». Dante me rendrait dingue au quotidien entre ses névroses et sa brusquerie lorsqu’il parle aux familles des victimes, mais le personnage est si bien construit qu’on ne pourrait pas l’imaginer se comporter autrement.
On voit la plupart des autres personnages à travers le prisme des yeux de Colomba et Dante et donc on ne sait pas tout d’eux. Le procureur semble être un salopard et un incompétent, mais de par sa fonction, c’est surtout un politique et on ne le voit pas en dehors de cette fonction.
Santini apparaît tout d’abord comme un flic arriviste qui veut être au centre de l’attention, mais au fil des pages, l’opinion qu’on a de lui se nuance un peu.
Pendant la moitié du livre j’ai soupçonné tout le monde tour à tour. Pas forcément d’être le tueur lui-même, mais d’être au moins un complice.
Finalement j’ai fini par avoir le fameux « Satori », une illumination comme le dit Dante, et, en regroupant tous les indices qu’on avait, j’ai trouvé le tueur (bon, ok, trois pages avant qu’il ne soit dévoilé, et encore je compte large mais quand même !).
La fin laisse sur l’impression dérangeante que tout n’est pas totalement fini et qu’il reste des choses à découvrir. Y aura-t-il une suite ? Ou une autre enquête du duo ? Pas si sûr…

Un extrait : L'HORREUR A COMMENCÉ À CINQ HEURES de l'après-midi, un samedi du début septembre : un homme en short faisait de grands gestes pour arrêter les voitures. Il portait un tee-shirt sur la tête pour se protéger du soleil et, aux pieds, une paire de tongs hors d'usage.

Rien qu'à le regarder, l'agent qui rangea la voiture de patrouille sur le bas-côté de la départementale le classa dans la catégorie de « ceux qui ont perdu la boule ». Après dix-sept ans de service et quelques centaines d'alcooliques et de personnes en phase de délire, calmées avec ou sans égards, les « perdu la boule », il savait les reconnaître du premier coup d'œil. Et celui-ci en faisait partie, sans le moindre doute.

Les deux agents descendirent du véhicule et l'homme en short s'approcha, bredouillant quelque chose. Il était épuisé et déshydraté, et l'agent le plus jeune lui donna un peu d'eau de la petite bouteille qu'il rangeait dans la portière, sans prêter attention au regard dégoûté de son collègue.

Après quelques gorgées, les mots de l'homme en short devinrent plus compréhensibles. « J'ai perdu ma femme, dit-il. Et mon fils. » Il s'appelait Stefano Maugeri et, ce matin-là, il était parti pique-niquer avec sa famille non loin de là, dans la vallée des Pratoni del Vivaro. Ils avaient déjeuné de bonne heure et lui s'était assoupi, bercé par la brise. Quand il s'était réveillé, sa femme et son fils avaient disparu.

Pendant trois heures, il avait arpenté les lieux, décrivant des cercles et cherchant en vain, jusqu'au moment où il s'était retrouvé à marcher sur le bas-côté de la route, frisant l'insolation et complètement désorienté. L'agent le plus âgé, qui commençait à voir vaciller ses certitudes, lui demanda pour quelle raison il n'avait pas appelé sa femme sur son portable : Maugeri lui répondit qu'il l'avait fait, mais que chaque fois il était tombé sur le répondeur ; puis son portable avait fini par se décharger complètement.

L'agent le plus âgé regarda Maugeri, un peu moins sceptique. Les femmes qui disparaissaient en prenant les enfants avec elles, il en avait fait une sacrée collection au cours des interventions d'urgence, mais aucune n'avait jamais planté son conjoint au milieu des prés. Pas vivant, en tout cas.

Les agents reconduisirent Maugeri sur les lieux du pique-nique. Il n'y avait personne. Les autres promeneurs étaient partis et sa Bravo grise était restée toute seule sur la petite route, non loin d'une nappe couleur magenta où se trouvaient encore des traces du déjeuner et une figurine de Ben 10, jeune héros ayant le pouvoir de se transformer en une quantité de monstres aliens.

Quand ils arrivèrent, Ben 10 aurait dû se transformer en une espèce d'énorme mouche bleue qui aurait survolé les Pratoni à la recherche des disparus. Mais les deux policiers n'eurent d'autre choix que de donner l'alerte et d'appeler le Bureau d'enquêtes, lançant l'une des opérations de recherche les plus spectaculaires qui s'étaient déroulées dans les Pratoni ces dernières années.

C'est alors que Colomba entra en scène. C'était son premier jour de travail après une longue pause, et ça allait devenir, de toute évidence, l'un des pires de sa carrière.

 

Écrire un commentaire

Optionnel