Résumé : Kai et Jem sont inséparables. Jem aime secrètement son meilleur ami, qui serait l'homme idéal s'il ne préférait pas les garçons... A la fin d'une soirée d'ivresse chez des amis communs, Jem rentre seule chez elle, Kai demeurant étonnamment introuvable.
C'est le lendemain que tout bascule : la jeune fille reçoit un email de la part de ce dernier, avec en pièce jointe une vidéo de lui en compagnie d'un garçon qu'il a trouvée postée sur internet. Cette vidéo compromettante est très vite partagée par tout le lycée et Kai reçoit une salve de mails agressifs qu'il ne peut bientôt plus supporter. Lui qui n'avait pas encore fait son coming out finit par craquer et se suicide...
A la suite de ce drame, Jem prend alors trois résolutions : découvrir la vérité, venger son ami et se suicider elle aussi. Les tiendra-t-elle ?
Auteur : Cat Clarke
Edition : Robert Laffont
Genre : Young Adult
Date de parution : 17 octobre 2013
Prix moyen : 18€
Mon avis : Un livre très bien écrit (ce qui ne m’étonne pas de la part de Cat Clarke) sur le sujet très difficile du suicide adolescent et de la réaction des proches.
Même si Kay se suicide au début du roman, il reste très présent tout au long du livre à travers les yeux de Jem et des lettres qu’il lui a laissées.
Jem m’a paru un peu obsédée par le groupe des « populaires » : elle les observe, parle d’eux tout le temps, comme si elle ne pouvait pas s’empêcher d’analyser chacun de leurs gestes.
Dans son choix de découvrir la vérité, j’ai trouvé Jem un peu légère : elle se fie aux apparences, et lance son opération de vengeance sans même imaginer une seconde qu’elle puisse se tromper, sans même chercher à savoir si son intuition est la bonne.
Même lorsqu’elle se rapproche du groupe des « populaires », elle semble refuser de les voir tels qu’ils sont. Or, même si Stu reste un gros lourd bien pénible, on voit très vite que les autres ne sont pas comme il le lui paraissait de loin. Mais elle rejette chaque information qui pourrait les lui faire voir différemment de comme elle les avait imaginés, tout en étant parfaitement consciente que Kay le lui aurait reproché et qu’il n’aurait pas apprécié qu’elle se lance dans une opération de vengeance.
Au fil du déroulement, on se pose pas mal de questions. Si pour certains, on écarte immédiatement la possibilité de leur responsabilité dans la vidéo de Kay envoyée à tout le lycée, pour d’autres on doute jusqu’au bout (pas forcément pour les mêmes raisons que Jem d’ailleurs).
En revanche, j’ai été étonnée qu’elle laisse toute sa colère éclater contre ceux qui ont pris et diffusé cette vidéo mais qu’elle ne réagisse pas devant les mails de haine que reçoit Kay de la part des élèves du lycée. Si la plupart s’était dit : ouais bon, il est gay, et alors ? Ou n’avait envoyé que des messages sur le fait d’être filmé en position compromettante comme ils l’auraient fait pour un couple hétéro, Kay n’aurait pas été poussé au suicide.
La dernière partie du roman m’a surprise et choquée. La révélation du ou de la coupable de l’envoi de cette vidéo, je ne l’avais vraiment pas vu venir. J’avais bien pensé que cette personne savait qui était responsable, mais je n’aurais pas imaginé que c’était elle. Et encore moins les raisons de son geste et la manière dont elle a réagi ensuite.
Cette dernière partie nous éclaire aussi sur le comportement de certaines personnes que l’on comprend de suite mieux, et on se sent presque coupable d’avoir porté des jugements sans avoir eu tous les éléments.
Les dernières pages n’atténuent ni la surprise ni le choc, bien au contraire. D’un coté, j’étais presque sûre que le livre finirait comme ça car j’avais du mal à imaginer une autre fin, vu le déroulement des évènements, et d’un autre coté, même en ayant « deviné » la fin, il y a un élément que je n’avais absolument pas prévu et qui est venu, disons, perturber l’image que j’avais de la conclusion.
J’ai eu un peu de mal à entrer dans l’histoire, plus par fatigue que par manque d’intérêt d’ailleurs, mais, dès l’histoire vraiment lancée, je n’ai plus pu lâcher le livre jusqu’à la fin.
Un extrait : Groupe Populaire était le surnom (totalement dépourvu d’imagination) que j’avais donné à notre soi-disant groupe de branchés. Il comptait six membres – désormais sept avec Max. Je n’arrêtais pas de les observer, de parler d’eux, de les analyser. Kai me suivait toujours dans ces cas-là, sauf quand je passais à Louise ; parce que aussi incroyable que cela puisse paraître, elle faisait partie de cette troupe.
À la fin de la troisième, je m’étais concocté une nouvelle théorie : Allander Park était un zoo, et chaque élève incarnait un représentant du règne animal. J’avais pris le plus grand soin à classer chaque membre du Groupe Populaire par espèce. (Kai avait beau dire que j’avais vraiment du temps à perdre, il mettait toujours son grain de sel.)
Lucas Mahoney était le plus facile à répertorier. Il était clairement un lion. Il en avait même la crinière – bon, d’accord, avec plus de gel qu’un lion. Blond et baraqué, il passait son temps à se pavaner comme le roi de la putain de savane. Toutes les minettes du bahut craquaient pour lui à un moment ou à un autre. Sauf moi. Et les lesbiennes planquées parmi nous.
Kai trouvait que Sasha Evans était la lionne du groupe – elle sortait avec Lucas, après tout. Mais c’était mon délire, alors c’était à moi d’en décider. Cette nana m’évoquait plus un léopard – ondulant et sexy. Elle avait des cheveux colorés brun chaud, et un corps parfait. Je la détestais.
Stu Hicks était le bouffon officiel d’Allander Park. Il aimait jouer avec la nourriture. Oui, il était ce genre de gars – le genre à fourrer des frites dans son nez pour faire marrer les filles. Et elles riaient, comme si elles l’avaient trouvé super drôle… Il était plus petit que les autres mecs, mais maigre et musculeux, sans doute à cause des arts martiaux. J’ai fini par opter pour un chimpanzé… Les chimpanzés dégagent tous quelque chose d’un peu sinistre.
Bugs était le mec spé du groupe. Gigantesque et roux, il évoquait une grosse tranche de viande avec du moisi orange dessus. Il était l’une des stars de l’équipe de rugby, ce qui ne suffisait pas à faire de vous quelqu’un de populaire, en général. Peut-être était-il l’exception qui confirmait la règle ? Il avait tout le temps une fille pelotonnée dans ses bras, en tout cas, ce dont les autres mecs semblaient se contrefoutre. Tous savaient qu’il ne serait jamais un rival – pas vraiment. Bugs entrait dans la catégorie des ours. Un ours super inutile dont la race aurait dû s’éteindre depuis des siècles.
Et Amber Sheldon… Des cheveux roux teints, des seins énormes, et un rire idiot haut perché qui me donnait des envies de meurtre : un perroquet coloré et bruyant. Un du genre à s’arracher ses propres plumes sans s’en rendre compte.
J’avais secrètement décrété que Louise était un serpent, mais sans le dire à Kai, bien sûr. Ce choix n’avait aucune justification, en dehors du fait que je détestais vraiment les serpents. Et que ça aurait en partie expliqué comment elle avait fait pour intégrer la bande des branchés alors qu’elle était dans la classe d’en dessous.
Voilà ce à quoi le Groupe Populaire ressemblait. On aurait dit des extraterrestres venus envahir la Terre avec un plan diabolique visant à dominer le monde – et avec des cheveux brillants et des blagues pour initiés en option.