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  • Le tiercé du samedi #87

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    Rappel du principe: Chaque semaine, le samedi comme son nom l’indique, il conviendra de choisir les trois livres, le trio gagnant, correspondant au thème proposé.

    A la fin de chacun de ces Rendez-vous, j’indiquerai le thème de la semaine suivante.

    Ce Rendez-Vous Livresque a été inspiré de « The Saturday Awards Book » créé par l’Echos de mots, et qui n'existe plus aujourd'hui.

    Comme annoncé la semaine dernière, le thème d'aujourd'hui est:

    Vos trois challenges livresques préférés

     

    Alors pour ma part, le trio gagnant est:

     

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    Des pavés sur la plage

     

     

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    Celui ci, je crois qu'il n'existe que sur le forum lecture ou je suis inscrite :L’âme du livre. Ce challenge d'été consiste à livre des livres de poche faisant plus de 500 pages, des grands formats faisant plus de 350p ou des ebook faisant plus de 300p

     

     

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    Le Week en à 1000

     

     

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    Est ce qu'on le présente encore? Créé par Lili Bouquine, ce challenge consiste à lire 1000 pages entre le vendredi 19h et le dimanche 23h59.

     

     

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    Le Challenge d'automne: Si j'étais un livre

     

     

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    On le trouve à la fois sur l'âme du livre et sur livraddict. Le but est de lire 33 livres en trois mois avec des contraintes appelées conditions (un livre par condition). Des conditions comme "je serais un polar", "mon titre ne comporterais qu'un seul mot" ou encore "je serais un livre qui a reçu un prix littéraire"...



    Pour la semaine prochaine, le thème sera: Les trois livres pour lesquels vous avez fait ou feriez le planton devant la librairie une heure avant son ouverture le jour de leur sortie pour être sûr de les avoir en premier

    Et n'hésitez pas à laissez en commentaire le lien vers votre propre tiercé du samedi!

     

  • [Livre] Miss Peregrine et les enfants particuliers

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    Résumé : Jacob Portman, 16 ans, écoute depuis son enfance les récits fabuleux de son grand-père. Ce dernier, un juif polonais, a passé une partie de sa vie sur une minuscule île du pays de Galles, où ses parents l'avaient envoyé pour le protéger de la menace nazie. Le jeune Abe Portman y a été recueilli par Miss Peregrine Faucon, la directrice d'un orphelinat pour enfants « particuliers ». Selon ses dires, Abe y côtoyait une ribambelle d'enfants doués de capacités surnaturelles, censées les protéger des « Monstres ».Un soir, Jacob trouve son grand-père mortellement blessé par une créature qui s'enfuit sous ses yeux. Bouleversé, Jacob part en quête de vérité sur l'île si chère à son grand-père. En découvrant le pensionnat en ruines, il n’a plus aucun doute : les enfants particuliers ont réellement existé. Mais étaient-ils dangereux ? Pourquoi vivaient-ils ainsi reclus, cachés de tous ? Et s'ils étaient toujours en vie, aussi étrange que cela puisse paraître…

     

    Auteur : Ransom Riggs

     

    Edition : Bayard Jeunesse

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 31 Mai 2012

     

    Prix moyen : 16€

     

    Mon avis : J’avais la trilogie de Miss Peregrine et les enfants particuliers dans ma PAL depuis des mois, mais ce n’est qu’en voyant la bande annonce de l’adaptation cinéma que je me suis enfin décidée à l’en sortir avec ce premier tome.
    Le début est assez lent mais ce n'est pas frustrant parce qu'on sent bien que l'auteur prend le temps de poser les jalons de son histoire et de nous faire faire connaissance avec Jacob. C'est en effet nécessaire car dès qu'on rentre dans le vif du sujet on a une multitude de personnages à découvrir et on n’aurait pas eu le temps de découvrir correctement Jacob.
    J'ai beaucoup aimé Jacob qui, même s'il ne croit pas trop aux histoires de son grand père le laisse les lui raconter contrairement à son père qui a fiche le plus grand mépris envers le vieil homme.

    D'ailleurs quand sa tante trouve un livre dédicacé par le grand père a l'intention de Jacob et qu'elle le lui donne on sent bien que ça agace son père.  Comme s'il voulait gommer tout souvenir du vieil homme.

    Les parents de Jacob sont agaçants. Le père plus que la mère d'ailleurs. La mère est d'une famille riche elle n'a jamais connu rien d'autre et si sa manière de vouloir que son fils pense argent avant tout est pénible on se dit que c'est le mode de vie qu'elle a toujours connu.

    Le père lui c'est différent. Son argent c'est celui de sa femme. Il est incapable de faire quoi que ce soit. Au moindre obstacle il abandonne ses projets ce qu'il peut se permettre vu que sa femme l'entretien. Mais il ne montre aucune modestie comme s'il avait gagné et mérité cet argent.
    En faisant des recherches sur le passé de son grand-père, Jacob va découvrir la vérité sur les enfants particuliers et leurs ennemis petit à petit. D'ailleurs miss Peregrine a été un peu fatigante avec sa tendance à faire de la rétention d'informations. Je comprends qu’elle veuille protéger le secret des enfants particuliers, mais à un moment donné, dès lors qu’elle dit à Jacob qu’il est des leurs, qu’elle lui dise une bonne fois pour toute à quoi il s’expose au lieu de lâcher les données par bribes et d’interdire à tous de parler.
    J'ai beaucoup aimé les passages de 1940 à aujourd'hui ainsi que toutes les explications de miss Peregrine sur les contraintes de la boucle temporelle. On est moins dans le « on fait ce qu’on veut sans la moindre conséquence » comme on peut le voir parfois. Ici non seulement il y a des conséquences et pas des moindres.
    Les explications sur la création des creux et des estres sont captivante et j'ai été bluffée par tout ce dont on se rend compte quand Jacob parle avec l'estre à la presque fin. Je ne m'attendais vraiment pas à ce que ça aille si loin. Vu comment se termine ce tome, ça promet pour les suivants dans lesquels on sera vraiment au cœur de l’action !

    Un extrait : La salle de repos des employés était une pièce aveugle, froide et humide. Linda, l’assistante en pharmacie, grignotait un sandwich sans croûte dans la lumière criarde du distributeur de sodas. Elle m’a indiqué du menton le téléphone fixé au mur.

    — Un type te demande sur la deux. Il a l’air complètement flippé.

    J’ai récupéré le récepteur qui pendouillait au bout de son fil.

    — Yakob ? C’est toi ?

    — Salut, Grandpa.

    — Yakob, Dieu soit loué ! J’ai besoin de ma clé. Ou est ma clé ?

    Il était essoufflé et paraissait inquiet.

    — Quelle clé ?

    — Ne te moque pas de moi, a-t-il rétorque sèchement. Tu sais parfaitement laquelle.

    — Tu as dû la ranger au mauvais endroit.

    — Tu es de mèche avec ton père. Dis-le-moi. Il n’en saura rien.

    — Je ne suis de mèche avec personne.

    Puis, pour changer de sujet :

    — Tu as pris tes médicaments, ce matin ?

    — Ils viennent me chercher ! Je ne sais pas comment ils m’ont retrouvé après toutes ces années, mais ils sont là. Avec quoi je vais les combattre ? Avec un couteau à beurre ?

    Ce n’était pas la première fois que j’entendais mon grand-père tenir ce genre de discours. Il vieillissait et, franchement, il commençait à perdre la boule. Au début, les signes de son déclin étaient presque imperceptibles : il oubliait de faire ses courses, donnait à ma mère le prénom de ma tante… Mais pendant l’été sa confusion mentale était devenue cruellement évidente. Les histoires qu’il avait inventées sur sa vie pendant la guerre – les monstres, l’île enchantée – l’obsédaient. Il semblait convaincu de leur réalité. Il était particulièrement agité depuis quelques semaines, et mes parents, craignant qu’il ne se mette en danger, envisageaient sérieusement de le placer dans une maison de retraite. Pour une raison mystérieuse, j’étais le seul à recevoir ses coups de fil apocalyptiques.

    Comme d’habitude, j’ai fait mon possible pour le calmer :

    — Tu ne crains rien. Tout va bien. Je passerai te voir tout à l’heure avec un DVD. On le regardera ensemble. D’accord ?

    — Non ! Reste où tu es ! C’est dangereux, ici !

    — Grandpa, il n’y a plus de monstres : tu les as tous tués pendant la guerre, souviens-toi.

    Par souci de discrétion, j’ai tourné le dos à Linda, qui lorgnait d’un air curieux par-dessus son magazine de mode.

    — Pas tous ! a protesté mon grand-père. J’en ai tué beaucoup, c’est vrai, mais il y en a toujours plus.

    Je l’entendais ouvrir des tiroirs, claquer des portes, se cogner partout… Il était en pleine crise de démence.

    — Je t’interdis de venir, tu m’entends ? Je vais me débrouiller : leur couper la langue et les poignarder dans les yeux. C’est la meilleure méthode ! Si seulement je trouvais cette maudite clé !

    La clé en question ouvrait une armoire métallique dans son garage, où il stockait assez de fusils et de couteaux pour armer une petite milice. Grandpa avait consacré la moitié de sa vie à collectionner ces armes, achetées dans des expositions aux quatre coins du pays. En semaine, il partait pour d’interminables parties de chasse et, le dimanche, il traînait ses enfants dans des concours de tir pour leur apprendre le maniement des armes. Il aimait tellement ses fusils qu’il dormait avec. Pour preuve, un vieux cliché que mon père me montrait parfois. On y voyait Grandpa Portman assoupi, un revolver à la main.

    Quand j’ai demandé à mon père pourquoi Grandpa était fasciné par les armes à feu, il m’a expliqué que c’était souvent le cas des anciens soldats, ou des personnes victimes de traumatismes. Avec tout ce que mon grand-père avait vécu, on pouvait comprendre qu’il ne se sente en sécurité nulle part, même pas chez lui. Et, par une triste ironie du sort, maintenant que les illusions et la paranoïa l’emportaient sur sa raison, il n’était effectivement plus en sécurité chez lui, avec tous ces pistolets. C’est pourquoi mon père lui avait subtilisé sa clé.

    J’ai répété que j’ignorais où elle était. Grandpa a proféré de nouveaux jurons et claqué encore quelques portes, signe qu’il reprenait ses recherches.

    Après quelque temps, il a renoncé :

    — Bah ! Ton père n’a qu’à garder cette clé si ça lui chante. Il aura mon cadavre sur la conscience !

     

     

  • [Livre] Madeleine Project

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    Résumé : "On appellerait cela un « docutweet », ou un récit d’ordre documentaire construit avec les outils – et la grammaire – de Twitter. C’est l’exercice inédit, périlleux mais jubilatoire, auquel s’est livré Clara Beaudoux il y a quelques mois, à partir des trésors retrouvés dans la cave de son nouvel appartement. Les souvenirs d’une vie, ceux de Madeleine, que ses héritiers ont accepté de divulguer par l’intermédiaire de la jeune réalisatrice. Deux séries de tweets disséminés tout au long d’une semaine allaient permettre aux internautes de découvrir ces histoires, celle de Madeleine et celle que Clara a nourrie avec son personnage. « Madeleine Project », un récit très réussi qui devient aujourd’hui un livre."

     

    Auteur : Clara Beaudoux

     

    Edition : Sous-sol

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 26 mai 2016

     

    Prix moyen : 18€

     

    Mon avis : J’ai été très déçue par ce « livre ». Pour moi il n'a rien à faire dans un prix littéraire parce que la compilation de tweets n'a rien d'un travail d'écriture.
    Même si, avant même de le lire, j’étais assez réticente devant le projet, je me disais qu’il devait y avoir au moins un point positif : dans la mesure où, sur twitter, chaque tweet est limité à 140 caractères, je me suis dit que la personne qui a initié le projet avait certainement dû faire preuve d’imagination et de vocabulaire pour réussi à commenter ses trouvailles en si peu de mots.
    Mais finalement ça a été une nouvelle déception car soit elle a fait des tweet très long simplement en les numérotant sur le mode : 1/3 ; 2/3 ; 3/3 ; soit elle a fait des tweets très basiques, sans aucune recherche et souvent dignes d’ados commentant Closer.
    Ex : 1er tweet sous une photo d’un objet apparemment plat enveloppé de papier kraft : « Un Picasso dans ce paquet ? »
    2nd tweet sous une photo d’une tableau : « Euh non..
    Je pensais aussi que la vie de Madeleine avait dû comporter quelque chose de fascinant pour qu’on en fasse ainsi l’étalage. Genre une héroïne méconnue de la résistance comme il y en a tant eu. Mais non. Tout ce que l'on a c'est la vie entière et intime livrée aux regards d'inconnus d'une pauvre femme qui n'avait rien demandé et qui n'avait pas de descendant pour empêcher une arriviste de faire le buzz, pour commencer, puis du pognon (18€ le recueil quand même) sur son dos.

    J'ai trouvé ça choquant. Du vrai voyeurisme. Avec en plus des photos de qualités médiocres.

    J'ai honte pour « l'auteur » et pour la maison d'édition qui porte bien son nom d'éditions du sous-sol.

    Un extrait : 

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  • [Livre] Syrli - T01

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    Résumé : Dans un monde normal, Syrli pourrait être une jeune fille comme les autres. Aller au lycée. Tomber amoureuse. Se disputer avec ses parents… Mais Syrli ne vit pas dans ce monde-là. Son monde est en lambeaux, l’humanité ne tient qu’à un fil. Une seule ville a réchappé de la destruction, protégée du chaos extérieur par une barrière d’énergie. Pour fonctionner, elle est alimentée par l’énergie vitale dégagée par certains adolescents aux pouvoirs particuliers : les renouvelables. Syrli serait des leurs, mais refuse d’être réduite à une simple batterie humaine. Une seule issue : la fuite.

     

    Auteur : Meagan Spooner

     

    Edition : Milan Jeunesse

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 16 Janvier 2013

     

    Prix moyen : 11€

     

    Mon avis : Il y a longtemps que cette dystopie attendait dans ma PAL. Le fait que le 3ème tome ne soit pas traduit et ne le sera pas (cela a été confirmé par les éditions Milan, encore une fois, saluons le professionnalisme de cette maison d’édition qui ne fait pas traduire le troisième tome d’une trilogie…Super respect pour les lecteurs…) m’avait clairement freiné. Et puis bon, la curiosité l’a emportée (éventuellement j’essaierais de lire le troisième tome en anglais…j’ai bien dis éventuellement !). La curiosité et aussi une consigne dans un challenge : choisir un livre par sa couverture. Et il faut bien dire que la couverture de Syrli est superbe (même si je ne m’attache pas vraiment à ce genre de détails).
    L’écriture de Meagan Spooner est agréable. J’ai beaucoup aimé l’univers qu’elle a créé même si, au début j’ai eu un peu de mal à m’y retrouver. En effet, on nous parle de réajustement, de collecte, de pixies…comme si on était supposé savoir ce que c’était, et ce n’est qu’au fil des pages que l’on découvre peu à peu ce qu’il en est.
    C’est un univers très riche et on a vraiment l’impression d’en apprendre quasiment à chaque page. Il faut dire que l’on suit l’histoire du point de vue de Syrli et que, étant donné que des choses aussi familières pour nous que la pluie ou le ciel, sont d’immenses découvertes pour nous, on voit tout sous un jour nouveau.
    Concernant les personnages, j’aime beaucoup Syrli parce que ce n’est pas vraiment une héroïne : elle se plante, elle tâtonne, elle n’est pas toujours très douée…ce n’est même pas le courage qui la pousse à poursuivre sa route, mais la peur. J’ai un peu regretté qu’on n’explore pas un peu plus les personnages secondaires. A part Oren, ils passent de manière si superficielle dans la vie de Syrli qu’on n’a pas vraiment le temps de les apprécier ou non.
    Autant pour l’un d’entre eux, j’ai vu clair en lui dès le début, autant les révélations vers la fin du tome sur Oren m’ont vraiment laissée sur le …hmmm, m’ont vraiment surprise. Sérieux je ne m’attendais pas à ça, mais en même temps, je me suis traitée de quiche, de tanche et de cruchon en bois parce qu’il y avait une centaine d’indice, au moins, qui pointait dans cette direction. Mais pour ma défense, Syrli non plus n’a rien vu venir (oui c’est un personnage, et alors ?).
    Nixe aussi est un personnage particulier parce qu’il n’est pas à proprement parlé vivant et il est difficile de savoir s’il ressent de vrais sentiments ou s’il ne répond qu’à une programmation. Même après la fin du tome, j’ai encore du mal à le cerner.
    J’ai trouvé que la fin était un peu rapide, j’aurais aimé plus de détails, plus de « lenteur », de descriptions dans l’action (oui je sais, d’habitude c’est le contraire). Là j’ai eu l’impression que tout était fini sans qu’on sache vraiment ce qu’il s’était passé.
    Je suis quand même impatiente de lire le tome 2 dont le résumé est prometteur.

    Un extrait : La trappe s’ouvrait dans le local du concierge. Après l’avoir refermée soigneusement derrière moi, je dirigeai mon attention sur la porte : fermée à clé, comme toujours. Mais Basil m’avait appris quoi faire dans ces cas-là. J’avais maintenant plusieurs années de pratique. Saisir la poignée, tirer, et donner un coup de hanche dans le panneau en laminé.

    Clic ! Les tambours de la serrure se mirent en place.

    La porte s’ouvrit sans résistance, et je me faufilai dans l’école.

    Même si j’avais fait ça chaque jour de la Collecte depuis les cinq dernières années, en priant pour être la prochaine à figurer sur la liste, voir mon école déserte et sombre me donnait toujours froid dans le dos. Je descendis le couloir plongé dans la pénombre. Mes pieds se décollaient du sol avec un bruit de succion, laissant des empreintes humides sur le carrelage immaculé. Quel que soit le groupe que j’avais entendu en bas, j’étais arrivée la première. J’en éprouvai une étrange fierté. Basil m’avait bien formée.

    Le bureau du directeur se trouvait juste après les salles de classe. Son mécanisme de verrouillage souffrait du même défaut que celui du local du concierge, et après un clic sonore, je me faufilai à l’intérieur. Le petit matin s’infiltrait par les fenêtres et jetait une clarté diffuse sur le mobilier.

    Une chemise en cuir traînait sur le bureau. Tout le reste disparut tout à coup ; la pièce parut se rétrécir. Le sang grondait à mes oreilles. Rien ne comptait plus sinon le contenu de cette chemise – mon billet de sortie.

    Je savais que cette fois, mon nom serait inscrit sur le papier. C’était obligé. Obligé. Comme si mon regard avait pu transpercer le cuir et voir les lettres imprimées, nettes et claires. Ainsley, Syrli.

    J’avais les mains tremblantes en soulevant la chemise. Mes doigts mouillés allaient laisser des traces sur le cuir et sur le papier mais je m’en fichais. Ma vue se brouillait. Les lettres, pourtant inscrites en bon ordre, se confondaient devant moi en un charabia incompréhensible jusqu’à ce que je me force à les déchiffrer.

    Baker, Zekiel, lus-je, les oreilles bourdonnantes. Dalton, Margaret. Kennedy, Tam. Smithson, James.

    Je ne m’étais pas rendu compte que les noms étaient classés par ordre alphabétique. J’aurais dû comprendre dès le premier. Je les relus deux fois. Je retournai la feuille, mais le verso était vierge. Vide.

    Quelques gouttes tombèrent sur le papier, formant des taches translucides qui diluaient les noms. Un bref instant, je me demandai avec détachement si je ne me serais pas mise à pleurer. Puis je compris que cette eau gouttait de mes cheveux.

    Quand je repris mon sang-froid, je remarquai un bruit dans le calme presque surnaturel de l’école déserte. D’abord léger, comme le ronronnement de mon propre sang contre mes tympans. Puis je reconnus ce bourdonnement, presque mécanique, qui augmentait et diminuait de manière régulière. Je perdis un temps précieux à l’écouter, n’en croyant pas mes oreilles.

    Des pixies.

     

  • [Livre] N’oublier jamais

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    Résumé : Il court vite, Jamal, très vite. A cause de sa prothèse à la jambe et autres coups du sort, il a un destin à rattraper. A Yport, parti s’entraîner sur la plus haute falaise d’Europe, il a d’abord remarqué l’écharpe, rouge, accrochée à une clôture, puis la femme brune, incroyablement belle, la robe déchirée, le dos face au vide, les yeux rivés aux siens. Ils sont seuls au monde ; Jamal lui tend l’écharpe comme on lance une bouée.

    Quelques secondes plus tard, sur les galets glacés de la plage déserte, gît sous les yeux effarés de Jamal le corps inerte de l’inconnue.

    A son cou, l’écharpe rouge.

     

    Auteur : Michel Bussi

     

    Edition : Presses de la Cité

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 7 Mai 2014

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Bon on ne va pas se voiler la face, pendant la moitié du livre on se dit que le personnage principal est fou, pendant l’autre moitié on se dit que peut être qu’en fait c’est nous qui le sommes. C’est du Bussi quoi.
    On ne sait jamais d’où va venir la prochaine baffe, seulement qu’il va y en avoir, et pas qu’une.
    Ici le personnage principal est Jamal. Sportif de haut niveau, malgré sa jambe artificielle, Jamal court tous les jours le long de la falaise pour atteindre son rêve, participer à une course très difficile sur le Mont Blanc. Quand il voit une jeune femme sur le point de se jeter dans le vide, il essaie immédiatement de la dissuader, en vain, sans se douter que sa vie va devenir un véritable enfer.
    Autant le dire j’ai changé d’avis sur Jamal toutes les 15 pages, un coup il était innocent, un coup il était coupable, un coup il était fou…
    Soupçonné par la police d’avoir en fait assassiné la « suicidée », il clame son innocence. Mais j’ai eu beaucoup de mal à le croire puisqu’il prend la fuite. Pour moi, s’il était vraiment innocent il aurait dû se ruer chez un avocat.
    Et puis il y a le fait que pas un journal ne parle de ce suicide. Là je me suis demandé si Jamal n’était pas fou et si le flic qui le poursuit n’essaie pas juste de le protéger de lui-même. Je me suis même demandé si les personnages secondaires existaient ou n’étaient que des produits de l’imagination de Jamal, ou des souvenirs…

    C’est ce que j’aime avec Bussi, c’est qu’on n’est sûr de rien, et que, quand enfin on pense avoir tout compris, quand enfin on se dit qu’on tient le coupable, tout bascule ! On n’a pas forcément tort, c’est ça qui fait la force de cet auteur. On n’est pas dans la situation où on se dit untel est le coupable et en fait non c’était un autre qu’on aurait jamais soupçonné. Non ici, c’est plus subtil. On peut découvrir le coupable, mais il nous manque toujours quelque chose. Untel est le coupable…mais pas que…
    Tout au long du livre, chaque personnage a une importance et justement, il y avait une donnée que je n’arrivais pas à rattacher à l’histoire, c’était ce par quoi elle commence, la découverte de trois squelettes après un éboulement de falaise. Impossible de savoir comment ces morts, anciennes, et n’ayant apparemment pas eu lieu en même temps, avait comme impact sur l’affaire de Jamal.
    Ce n’est qu’à la fin qu’on le découvrira. Et comme souvent, le dénouement coupe le souffle tant on ne s’attendait pas à ça !

    Un extrait : Elle avait beaucoup pleuré, mais la fontaine semblait tarie. Le maquillage autour de ses yeux avait coulé, puis séché. Jamal eut du mal à ordonner les signes contradictoires qui se bousculaient dans sa tête.

    Le danger.

    L’urgence.

    L’émotion surtout. L’émotion qui le submergeait. Jamais il n’avait vu de femme aussi belle. Sa mémoire enregistra pour l’éternité l’ovale parfait du visage face à lui, comme arrondi par la caresse de deux cascades de cheveux de jais, les deux yeux charbon plantés dans une peau de neige, le dessin des sourcils et de la bouche, fin et vif, comme trois traits guerriers tracés par un doigt plongé dans le sang et la suie. Il essaya par la suite d’évaluer si la surprise avait eu une influence sur son jugement, la situation aussi, la détresse de cette inconnue, la nécessité de lui saisir la main, sans trouver de réponse.

    — Mademoiselle…

    Jamal tendit la main.

    — N’approchez pas, fit la fille.

    Une prière plus qu’un ordre. Les braises semblaient s’être définitivement éteintes dans ses iris charbon.

    — D’accord, balbutia Jamal. D’accord. Ne bougez pas non plus, on a tout le temps.

    Le regard de Jamal glissa sur la robe impudique. Il imagina que la fille sortait du casino, cent mètres plus bas. Le soir, ils transformaient la salle de spectacle du Sea View en discothèque.

    Une sortie de boîte qui aurait mal tourné ? Grande, fine, sexy, la fille avait de quoi aiguiser les convoitises. Les boîtes étaient pleines de gars qui ne venaient que pour ça, mater la bombe de la soirée.

    Jamal s’exprima de la voix la plus calme qu’il put.

    — Je vais avancer lentement, je vais vous donner la main.

    La fille baissa les yeux pour la première fois et s’arrêta un instant sur la prothèse de carbone. Elle ne put retenir un mouvement de surprise, qu’elle contrôla presque aussitôt.

    — Si vous faites le moindre pas, je saute…

    — OK, OK, je ne bouge pas…

    Jamal se statufia, bloquant même sa respiration. Seuls ses yeux couraient, de cette fille sortie de nulle part à dix pas de lui jusqu’à l’aube orange tout au bout de l’horizon.

    Des gars bourrés qui se rincent l’œil en suivant chaque déhanchement de la reine de la piste de danse, repensa Jamal. Et parmi eux, au moins un malade, peut-être plusieurs, suffisamment vicieux pour suivre la fille à la sortie. La coincer. La violer.

    — On… on vous a fait du mal ?

    Les boules de charbon fondirent en larmes de glace.

    — Vous ne pouvez pas comprendre. Continuez votre route. Partez ! Partez vite.

    Une idée…

    Jamal passa les mains autour de son cou. Lentement. Pas assez pourtant. La fille recula d’un coup, un pied presque dans le vide.

    Jamal se figea. Cette fille était un moineau apeuré à attraper au creux de la main. Un oiseau tombé du nid, incapable de voler.

    — Je ne vais pas bouger, mademoiselle. Je vais juste vous lancer mon écharpe. Je vais tenir une extrémité. Attrapez l’autre, simplement. Vous déciderez ou non de lâcher.

    La fille hésita, une nouvelle fois surprise. Jamal en profita pour jeter le pan de cachemire rouge. Deux mètres le séparaient de la jeune suicidaire.

    L’étoffe tomba à ses pieds.

    Elle se pencha délicatement, colla par pudeur dérisoire un lambeau de robe sur son sein dénudé, puis se releva, agrippant l’écharpe offerte par Jamal.

    — Doucement, fit Jamal. Je vais tirer sur le tissu, l’enrouler autour de mes mains. Laissez-vous entraîner jusqu’à moi, deux mètres, seulement deux mètres plus loin du vide.

    La fille serra plus fort l’étoffe.

    Jamal comprit alors qu’il avait gagné, qu’il avait exécuté le geste juste, lancer cette écharpe comme un marin lance une bouée au noyé, la ramener à la surface en douceur, centimètre par centimètre, avec une infinie précaution pour ne pas briser le fil.

    — Doucement, répéta-t-il. Venez vers moi.

    Il réalisa un bref instant qu’il venait de croiser la plus belle fille qu’il ait jamais vue. Et qu’il venait de lui sauver la vie.

    Cela suffit à le déconcentrer, une infime seconde.

    Soudain, la fille tira sur l’écharpe. Jamal s’attendait à toutes les réactions sauf à celle-ci. Un mouvement sec, rapide.

    L’écharpe lui glissa des mains.

    La suite dura moins d’une seconde.

    Le regard de la fille se planta en lui, indélébile, celui d’une fille à la fenêtre d’un train qui part. Celui de la fatalité.

    — Nooon ! hurla Jamal.

    La dernière chose qu’il vit fut l’écharpe de cachemire rouge flotter entre les doigts de la fille. L’instant d’après, elle bascula dans le vide.

    La vie de Jamal aussi, mais cela, il ne le savait pas encore.

     

  • C'est lundi que lisez vous? #88

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    Rendez-vous initié par Mallou qui s'est inspirée de It's Monday, What are you reading ? de One Person’s Journey Through a World of Books. Le récapitulatif des liens se fait maintenant sur le blog de Galleane.

     

    Il s'agit de répondre à trois questions:

    Qu'ai-je lu la semaine passée?
    Que suis-je en train de lire?
    Que lirai-je après?

     

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    Et vous, que lisez vous?

     

     

  • Le tiercé du samedi #86

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    Rappel du principe: Chaque semaine, le samedi comme son nom l’indique, il conviendra de choisir les trois livres, le trio gagnant, correspondant au thème proposé.

    A la fin de chacun de ces Rendez-vous, j’indiquerai le thème de la semaine suivante.

    Ce Rendez-Vous Livresque a été inspiré de « The Saturday Awards Book » créé par l’Echos de mots, et qui n'existe plus aujourd'hui.

    Comme annoncé la semaine dernière, le thème d'aujourd'hui est:

    Les trois endroits principaux où vous achetez vos livres

     

    Alors pour ma part, le trio gagnant est:

     

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    Cultura

     

     

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    Je n'y vais qu'une fois par an, munie des chèques cadeaux du boulot... Mais là, je fais le plein!

     

     

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    France Loisirs

     

     

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    Je suis abonnée depuis des années et, comme je n'achète que lors de mes achats du trimestres, je trouve toujours au moins un livre qui me tente...et ma PAL monte, monte, monte...

     

     

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    Amazon

     

     

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    C'est là que j'achète la plupart de mes livres. Je ne suis pas motorisée et ma santé ne me permet pas de passer beaucoup de temps dans les transports. Alors, comme je n'ai pas de librairie à proximité...



    Pour la semaine prochaine, le thème sera: Vos trois challenges livresques préférés

    Et n'hésitez pas à laissez en commentaire le lien vers votre propre tiercé du samedi!

     

     

  • [Livre] Mansfield Park

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    Résumé : Fanny Price est issue d'une famille pauvre qu'elle quitte à l'âge de dix ans pour vivre avec son oncle et sa tante, Sir Thomas et Lady Bertram, à Mansfield Park. Sir Thomas désire en effet aider Mrs. Price, la mère de Fanny et la sœur de Lady Bertram, en prenant en charge l'éducation de Fanny.

    Celle-ci est donc élevée avec ses cousins, légèrement plus âgés qu'elle, Tom, Edmund, Maria et Julia, mais il lui est presque constamment rappelé qu'elle leur est inférieure. Seul Edmund fait preuve de gentillesse à son égard; Maria et Julia la méprisent, Tom ne lui prête pas attention. Fanny maintient une correspondance régulière avec son frère William, officier de la Royal Navy. Elle acquiert en grandissant, notamment au contact d'Edmond, un sens moral qui lui sert de guide pour toute chose. La gratitude et l'affection qu'elle éprouve à l'égard de son cousin se transforment au fil des ans en un amour qu'elle garde secret.

    Les jours passent calmement à Mansfield Park, jusqu'au jour où Lord Bertram part aux Caraïbes et que de nouveaux jeunes gens font leur arrivée dans les environs : Mr. et Miss Crawford, frère et sœur de la femme du nouveau pasteur. Leur arrivée bouleverse la vie austère de Mansfield Park, sous les yeux de Fanny...

     

    Auteur : Jane Austen

     

    Edition : 10/18

     

    Genre : Classique étranger

     

    Date de parution : 2012

     

    Prix moyen : 6€

     

    Mon avis : J’ai eu plus de mal à entrer dans l’histoire de ce Jane Austen que dans orgueil et préjugés ou dans raison et sentiments. L’écriture est pourtant toujours aussi belle et addictive, typique de l’époque de Jane Austen. Mais je ne sais pas, peut-être parce que l’histoire est plus lente à se mettre en place (on est quand même sur un beau petit pavé de 646 pages).
    L’histoire reste très classique avec une jeune fille de condition modeste (bon ici c’est la seule à l’être, alors que dans les autres livres que j’ai lu, toute la famille l’est).
    Pourtant j’ai apprécié les personnages. Enfin j’ai surtout apprécié les détester parce qu’il faut bien avouer, ils ne sont pas très sympathiques.
    Commençons par notre héroïne Fanny Price. Fanny est la fille de la plus jeune sœur de Lady Bertram et Mme Norris. Celle-ci a fait un mariage assez désastreux en terme de finance et très productif en terme d’enfants. Mme Norris décide donc de convaincre Sir Thomas, son beau-frère, d’accueillir l’ainée des filles Price pour l’élever « convenablement ». Ainsi arrive Fanny à Mansfield Park.
    Fanny est douce, un peu craintive, très très timide mais dotée d’un sens moral irréprochable. Trop peut-être même, car, si elle n’avait pas eu la crainte de mettre certaines personnes dans l’embarras et qu’elle avait dit clairement à son oncle pourquoi elle refusait son prétendant, il aurait non seulement surement compris, mais se serait méfié de bonhomme comme de la peste.
    Alors qu’il était prévu qu’elle soit élevée comme ses cousins, elle est nettement considérée comme inférieure, notamment par sa tante Norris qui, malheureusement, à une influence considérable sur ses deux nièces Maria et Julia. Les deux cousines la méprisent donc un peu, elles ne sont pas particulièrement méchantes avec elle, mais elles la considèrent comme quantité négligeable. Mme Norris, elle, en revanche, est vraiment méchante, elle n’aime pas Fanny, même si on ne sait pas trop pourquoi. Alors que l’idée de l’accueillir vient d’elle, on dirait qu’elle est indisposée par la présence de la petite puis jeune fille.
    Tom l’ainé de la famille n’est ni gentil, ni méchant. C’est le plus âgé, il a 17 ans quand Fanny débarque, il a des fréquentation pas toujours très recommandable et il pense plus à ses plaisirs qu’à autre chose.
    Enfin parmi les cousins, il y a Edmond qui est plus intègre, plus droit dans ses bottes. Il aime beaucoup Fanny mais parfois se confie à elle sans se rendre compte que ce qu’il lui dit peut la toucher voire la peiner. Il reste quand même le personnage le plus gentil et le plus honnête avec son père Sir Thomas.
    Le problème de Sir Thomas, en dehors du fait qu’il doit partir à l’étranger pendant plusieurs mois, est qu’il est d’un abord froid et austère. Il fait plein de petites choses pour Fanny mais il la terrifie. Il est aussi très conservateur et a du mal à s’adapter aux évolutions de la société. Je me rappelle avoir été très marquée à un moment quand il dit à Fanny qu’elle l’a déçue parce « vous avez montré que vous pouvez et voulez décider par vous-même sans aucune considération ou déférence envers ceux qui ont certainement quelques droits à vous guider ». Voilà, clairement, pour lui, une femme n’a aucune décision à prendre, elle doit s’en remettre à ses parents masculins. Et pourtant, plus tard dans le livre, on voit clairement que le bonheur de ses filles dans le mariage l’emporte nettement sur le statut social de leur conjoint.
    J’ai eu du mal à cerner Lady Bertram. Elle a l’air de n’être capable de rien, même pas de penser par elle-même. Mais elle est surement la seule à pourvoir montrer de l’affection.
    Quant au frère et à la sœur de Mme Grant, la femme du pasteur, c’est un peu eux qui vont venir dérégler la machine bien huilée de Mansfield Park. Ce n’est pas qu’ils soient méchants, mais les lacunes de leur éducation se font clairement sentir tout au long du livre, surtout du point de vue de la moralité.
    J’ai un peu regretté la fin, que j’ai trouvée expédiée, même si c’est là une volonté de l’auteur qu’elle annonce en début de chapitre.
    Même si c’est le plus long et le moins rythmé des romans de Jane Austen, Cela reste un livre à lire, surtout si on aime cet auteur.

    Un extrait : Il y a de cela à peu près trente ans, Mlle Maria Ward d’Huntingdon, n’ayant pour toute fortune que sept cents livres, eut la chance de conquérir le cœur de Sir Thomas Bertram de Mansfield Park, dans le comté de Northampton. De ce fait elle fut élevée au rang de femme de baronnet avec tout le luxe et tout le confort que lui apportait une maison bien montée et digne de sa situation.

    Tout Huntingdon applaudit à ce mariage magnifique et son oncle l’avocat, l’autorisa à user de ses talents jusqu’à concurrence de trois mille livres. Ses deux sœurs devaient bénéficier de son changement de situation et leurs amis et connaissances n’avaient aucun scrupule à prédire que Mlle Ward et Mlle Frances, aussi jolies que Mlle Maria, feraient certes d’aussi beaux mariages. Mais il n’y a pas, dans le monde, autant d’hommes possédant une grosse fortune qu’il y a de jolies femmes pour les mériter.

    Six ans plus tard, Mlle Ward se crut obligée de s’éprendre du Rév. A. Norris, un ami de son beau-frère, qui n’avait pratiquement aucune fortune et Mlle Frances fit encore pire.

    L’union de Mlle Ward n’était pas à dédaigner et Sir Thomas avait heureusement les moyens de donner l’hospitalité à son ami, à Mansfield, de sorte que M. et Mme Norris commencèrent leur vie conjugale avec moins de mille livres par an.

    Mais Mlle Frances désobligea toute sa famille en s’éprenant d’un lieutenant de marine, sans éducation, sans fortune et sans avenir. Elle aurait difficilement pu s’arrêter à un choix plus malencontreux. Sir Thomas Bertram avait tout intérêt, autant par principe que par fierté, à souhaiter que tous ceux de sa famille aient une situation respectable et aurait aidé de bon cœur la sœur de Lady Bertram dans ce sens. Mais la profession du mari de celle-ci était si peu intéressante qu’avant qu’il n’ait eu le temps de trouver le moyen de les aider, une mésintelligence profonde intervint entre les deux sœurs. C’était ce qui devait naturellement arriver à la suite d’un mariage aussi désastreux. Pour éviter des reproches inutiles, Mme Price n’avait jamais écrit à sa famille à ce sujet, jusqu’à ce qu’elle fût mariée. Lady Bertram, qui était une femme de caractère froid et indolent, se serait très bien accommodée d’abandonner sa sœur et de ne plus penser à elle.

    Mais Mme Norris était moins passive et ne fut satisfaite que lorsqu’elle eut écrit une longue lettre furieuse à Fanny, où elle lui montrait l’indignité de sa conduite et l’injuriait en conséquence. À son tour, Mme Price se froissa et se fâcha. Il y eut un échange de lettres désagréables entre elles, dans lesquelles Sir Thomas ne fut pas épargné, tant et si bien qu’il en résulta une brouille qui dura un temps considérable.

    Leurs habitations étaient si éloignées et leurs cercles de relations si différents, qu’ils entendirent à peine parler les uns des autres pendant les onze années qui suivirent et que ce fut par hasard que Sir Thomas apprit par Mme Norris, qui était toujours au courant de tout, que Fanny allait avoir un autre enfant. Après ce long laps de temps, Mme Price ne put supporter plus longtemps son ressentiment vis-à-vis de quelqu’un qui aurait pu l’aider et ne l’aidait pas. Une famille s’accroissant toujours, un mari inapte au service actif, mais aimant la bonne compagnie et les liqueurs fines, et un très petit revenu pour combler tous ces désirs la décidèrent à reconquérir les amis qu’elle avait si sottement sacrifiés. Elle adressa à Lady Bertram une lettre pleine de contrition et de désespoir, parlant avec émotion de ses enfants à qui il manquait le strict nécessaire et demandant la réconciliation. Elle attendait son neuvième enfant et après avoir exposé sa situation demandait à Lady Bertram d’être la marraine en la suppliant de s’occuper des huit autres. Son aîné était un garçon de dix ans plein d’esprit et qui désirait faire son chemin dans la vie, mais comment pouvait-elle l’aider ? Ne pourrait-il être utile à quelque chose dans une des propriétés que Sir Thomas avait dans les Indes ? Tout serait bon pour lui. Que pensait Sir Thomas de Woolwich ? Ou bien ne pouvait-on l’envoyer dans l’Est…

    La lettre produisit son effet. Elle rétablit la paix et ramena la bonté. Sir Thomas envoya des conseils et des recommandations. Lady Bertram de l’argent et une layette et Mme Norris écrivit des lettres.

    Tels furent les résultats immédiats, mais durant ces douze mois Mme Price obtint un autre avantage. Mme Norris déclara souvent à ses amis et connaissances qu’elle ne pouvait laisser sa pauvre sœur dans le besoin et quoique ayant déjà fait beaucoup pour elle, elle sentait qu’elle devait faire encore davantage. Elle émit l’idée de soulager Mme Price de la charge de l’un de ses enfants.

     

  • [Film] Les malheurs de Sophie

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    Titre original : Les malheurs de Sophie

     

    Réalisé par : Christophe Honoré

     

    Date de sortie : 20 avril 2016

     

    Genre : Jeunesse

     

    Pays d’origine : France

     

    Durée : 1h 46

     

    Casting : Anaïs Demoustier, Golshifteh Farahani, Muriel Robin, Caroline Grant…

     

    Résumé : Depuis son château, la petite Sophie ne peut résister à la tentation de l'interdit et ce qu'elle aime par-dessus tout, c'est faire des bêtises avec son cousin Paul. Lorsque ses parents décident de rejoindre l'Amérique, Sophie est enchantée. Un an plus tard, elle est de retour en France avec son horrible belle-mère, Madame Fichini. Mais Sophie va pouvoir compter sur l'aide de ses deux amies, les petites filles modèles, et de leur mère, Madame de Fleurville pour se sauver des griffes de cette femme.

     

    Mon avis : Dès le début, la première chose qui m’a choquée, c’est le format de diffusion. Celui-ci fait que nous avons deux grosses bandes noires sur les côtés de l’écran. Et on a beau modifier le format sur le téléviseur, ces bandes restent. Je trouve inadmissible qu’à une époque où les téléspectateurs sont obligé d’avoir des télé 16/9ème, puisqu’on ne trouve plus rien d’autre, et vu le prix des DVD, on soit obligé de supporter ces bandes disgracieuses qui gâchent tout le plaisir du visionnage. Qu’elles existent sur un vieux film est une chose, qu’on les trouve sur un film tourné en 2015 en est une autre.
    Les passages où les personnages s’adressent directement aux spectateurs m’ont laissé une impression mitigée. D’un côté c’était un moyen facile d’avancer dans l’histoire en racontant ce qu’on n’avait pas pu voir, d’un autre, j’ai trouvé que ça coupait un peu le rythme du film.
    Autre impression mitigée : les animaux en animation 2D plutôt qu’en image de synthèse. Le réalisateur a voulu retrouver la magie du classique Disney Peter et Elliott qui mélange dessin animé et image en prise de vue réelle mais ici on n’a pas du tout le même effet. On a l’impression que le film n’avait tout simplement pas le budget pour faire des animaux en images de synthèse.
    Je n’ai pas non plus compris non plus pourquoi l’époque à laquelle se déroulait l’histoire a été changée. Cela dit, j’ai cette impression à cause des tenues vestimentaires des femmes et des fillettes.

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    Peut-être que le réalisateur a tout simplement confondu les robes de style empire qui étaient à la mode pendant le 1er empire (entre 1795 et 1820) et la période du second empire durant laquelle se déroule l’histoire (entre 1852 – 1870) qui a été l’avènement de la robe à crinoline. On va laisser le bénéfice du doute à Christophe Honoré en se disant qu’il est réalisateur et non historien et qu’il n’a pas bien lu l’œuvre de la Comtesse de Ségur.

    D’ailleurs tant au niveau des personnages qu’au niveau de l’histoire, on se demande si le réalisateur a pris la peine de lire les œuvres concernées de la comtesse.
    Concernant les personnages, en premier lieu, j’ai trouvé que les enfants, malgré leurs jeunes âges, jouaient plutôt pas mal, même si leur jeu est parfois un peu hésitant.
    Cependant Sophie se montre particulièrement méchante et dissimulatrice alors que dans le livre elle est impatiente et ne prend conscience de ce qu’elle a fait de mal que lorsqu’il est trop tard.

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    L’actrice qui joue Mme de Réan n’est absolument pas crédible dans ce rôle. D’abord elle est iranienne et son accent, malgré ce qu’à essayer de faire croire le réalisateur, ne peut pas la faire passer pour une espagnole ou une italienne. On se demande donc comment une iranienne a pu épouser un aristocrate normand.

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    Pour le caractère du personnage, on est très loin de celui du livre. Mme de Réan est décrite par la comtesse de Ségur comme une femme aimante, juste mais très ferme, qui fait tourner la maison en l’absence de son mari, retenu à Paris pour ses affaires et qui n’a aucun mal à canaliser Sophie malgré les bêtises de cette dernière.
    Ici on a une femme démissionnaire, qui ne s’impose ni face à sa fille, ni face à ses domestiques, lesquels se permettent des attitudes qui leurs auraient couté leur place à l’époque où se situe l’histoire. Elle est totalement dépassée, presque maladive, allant jusqu’à laisser Mme de Fleurville gérer une dispute entre Sophie et Paul.
    On se demande à quoi sert l’introduction du personnage du curé un brin sadique, qui n’existe pas dans le roman et qui n’apporte rien à l’histoire. Ce personnage est ridicule et il y avait tant de bêtises de Sophie qui pouvaient être exploitée qu’il n’était nullement nécessaire d’introduire des personnages (ou des scènes) supplémentaires.
    Muriel Robin, elle, en revanche, est excellente dans son rôle de Mme Fichini, quoi qu’elle soit bien moins cruelle que dans le livre.

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    Sur près d’une heure de film, temps consacré aux malheurs de Sophie avant de passer aux petites filles modèles, on ne voit que très peu des bêtises de la gamine et aucune n’est fidèlement rapportée. Cela engendre un grand nombre de scènes superflues pour ne pas dire ridicule (la scène de la « fugue » de Sophie). Puis dans la seconde partie du film, qui est consacré aux petites filles modèles : rebelote, un grand nombre de scènes inventées fait qu’au final il n’y a quasiment rien de ce second livre dans le film.
    Au final, à vouloir réunir les deux livres en un seul film, le réalisateur a bâclé les deux et n’a adapté correctement aucun moment du livre.

    En soi le film n’est pas mal, mais dès lors qu’on connait les œuvres, dès lors qu’on les a lues dans notre enfance et qu’on les compare au film, il perd quasiment tout son intérêt, n’ayant rien du charme des romans de la Comtesse de Ségur.

    Finalement, malgré quelques scènes ajoutées, malgré quelques personnages disparus, j’ai préféré le dessin animé au film car il colle plus aux romans.