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Young adults - Page 7

  • [Livre] Ma raison de respirer

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    Résumé : Deux ans après avoir brisé le cœur d'Evan, Emma ne parvient pas à l'effacer de sa mémoire. Quand un carton plein de souvenirs ressurgit, l'armure d'Emma se fissure. Toutes ses émotions passées reviennent l'assaillir. Pour oublier, elle devient accro à l'adrénaline. Soirées, alcool, garçons : rien ne semble pouvoir combler ce vide qui la consume. Jusqu'à une rencontre décisive, qui bouleversera toutes ses certitudes...

     

    Auteur : Rebecca Donovan

     

    Edition : Pocket

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 19 Mai 2016

     

    Prix moyen : 19€

     

    Mon avis : Cette fois ci, ce ne sera pas un coup de cœur. J’ai beaucoup aimé ce livre, mais j’ai été très dérangée par le choix de l’auteur d’alterner les points de vue d’Emma et d’Evan.
    S’il y avait eu un chapitre Emma, un chapitre Evan, pourquoi pas. Mais là, les points de vue alternent d’un paragraphe à l’autre, sans aucune indication, et, Emma comme Evan s’exprimant à la première personne, on en sait pas qui parle tant qu’on n’a pas eu un pronom personnel, un accord de participe passé, ou le nom de l’autre protagoniste prononcé. En ce qui me concerne, j’ai trouvé ça très désagréable.
    Pourtant, avant qu’Evan débarque et que cette alternance s’installe, le roman était bien parti pour être un coup de cœur.

    Meg, la colocataire d’Emma, m’a beaucoup plu dans son « remplacement » de Sara auprès d’Emma. Sara et elle communiquent beaucoup pour faire en sorte de soutenir Emma en toute circonstance.
    Peyton, la seconde colocataire, est un peu pénible : elle est sans gêne, se moque visiblement de l’avis de ses copines et quand elle décide quelque chose, peu importe si cela dérange, elle fait ce qu’elle veut.

    J’ai beaucoup aimé Cole. Il ne prend pas la tête d’Emma pour savoir en permanence ce qu’elle pense, pour connaitre son passé, il est là, il ne lui en demande pas plus que ce qu’elle est capable de donner. Je ne sais pas si leur histoire peut déboucher sur quelque chose, mais il aura au moins le mérite d’avoir ramené Emma dans le monde des vivants.
    En revanche Evan m’a vraiment énervée et déçue lorsqu’il arrive. Il passe son temps à lui forcer la main. Elle ne veut pas le voir, elle ne veut pas lui parler, il s’impose et quand on le met face au fait qu’il ne lui a pas demandé son avis, il clame le droit qu’il croit avoir, au prétexte qu’ils sont longtemps sortis ensemble. Doit-elle lui donner sa vie entière parce qu’il a été là à un moment difficile ? J’espère qu’il va se rendre compte que son attitude laisse à désirer et qu’il va changer son fusil d’épaule et arrêter d’essayer de forcer les choses.
    C’est un peu une habitude dans l’entourage d’Emma : sous prétexte de la protéger, beaucoup de personnes tentent de décider de sa vie à sa place et mériterait de se faire un peu remettre à leur place.
    Et puis il y a Jonathan. Même si on ne le voit pas vraiment, son ombre plane au-dessus d’Emma. Elle porte seule le secret de ce qu’il a fait et n’en a parlé à personne, pas même à Sara, à qui elle confie tout d’ordinaire. On se rend vite compte qu’elle ne pourra pas revivre totalement tant qu’elle n’aura pas dévoilé cette affaire.

    Pour la fin, je m’y attendais. Je n’imaginais pas que l’histoire puisse finir différemment jusque dans ses moindres détails. Mais ce n’est pas un livre qui demande une fin extraordinaire et imprévue. Je suis contente que l’histoire se finisse ainsi.
    Même si le premier tome reste mon préféré, j’ai beaucoup aimé cette trilogie et je la conseille fortement.

    Un extrait : — Je me demande pourquoi j’ai décroché… Je te reparlerai quand tu seras moins con.

    J’ai entendu Sara pousser un soupir exaspéré. J’étais sur le palier, près de la chambre, une pile de cahiers dans les bras. J’ai supposé qu’elle avait raccroché. Pour lui signaler ma présence, j’ai fait un peu de bruit devant la porte.

    Elle m’avait fait part de sa décision de mettre fin à sa relation avec Jared. Je l’avais écoutée, même si je me sentais incapable de l’aider. Ces derniers temps, Sara se confiait peu à moi. Elle craignait de me perturber davantage.

    — C’est bon ? a-t-elle demandé avec un sourire en me voyant entrer.

    Malgré ses efforts, elle ne parvenait pas à masquer la lueur de tristesse dans ses yeux.

    — Tu peux m’en parler, tu sais, ai-je tenté d’un air peu convaincu.

    — Non, ça va.

    Puis, contemplant les nombreux cartons qui l’entouraient, elle a ajouté :

    — Comment on va ranger tout ça… Cette pièce est minuscule.

    Visiblement, elle préférait changer de sujet. J’ai respecté son choix.

    — Je n’ai besoin de rien, je t’assure, ai-je insisté.

    — Tu me l’as déjà dit. C’est pour ça que je n’ai apporté qu’une chose pour décorer ta chambre.

    Elle a attrapé son sac à main – presque aussi grand qu’un sac de voyage – et en a sorti un cadre. C’était une photo de nous deux, devant la grande baie vitrée qui donnait sur le jardin de sa maison. Anna, sa mère, l’avait prise durant l’été où j’habitais chez eux. Nous avions les yeux brillants et rieurs.

    — Non, j’y crois pas ! s’est-elle exclamée. Je rêve ou tu as souri ? Je me demandais si je reverrais ça un jour.

    Ignorant sa remarque, je me suis tournée vers l’espace bureau aménagé dans un coin de la chambre.

    — Parfait ! a-t-elle commenté en admirant la photo après l’avoir posée sur la commode.

    — Bon, on va déballer tes affaires, maintenant. C’est cool que tu n’habites plus le dortoir du campus. En plus, j’adore Meg. Et Serena, même si elle refuse de suivre mes conseils vestimentaires. Cela dit, je ne désespère pas… Et Peyton, qu’est-ce qui se passe avec elle ?

    — Juste une embrouille. Mais elle n’est pas méchante.

    — Il y a toujours un psychodrame, dans une maison, a-t-elle conclu en rangeant une pile de chemises dans un tiroir. Et tant que ça ne concerne que Peyton, ça me va.

    — C’est aussi ce que je pense, ai-je confirmé en accrochant des vêtements dans le placard.

    Sara a posé une grande boîte à chaussures noire sur le lit.

    — Est-ce qu’on laisse les bottes dedans ? a-t-elle questionné en soulevant le couvercle.

    D’un geste rapide, je l’ai refermé. Elle m’a dévisagée d’un air perplexe.

    — Ce ne sont pas des bottes, ai-je glissé d’une voix sourde.

    — OK, pas de problème, a-t-elle conclu devant mon air sombre. Où veux-tu que je la mette ?

    — Je m’en fiche. Ça m’arrangerait même de ne pas savoir. Je vais aller chercher un truc à boire. Tu veux quelque chose ?

    — De l’eau, s’il te plaît.

    Lorsque je suis revenue, Sara était en train de faire le lit et la boîte avait disparu. Je me suis assise sur la chaise à roulettes tandis qu’elle s’allongeait sur le matelas.

    — J’ai rompu parce que je n’arrivais pas à gérer la relation à distance, a-t-elle lancé.

    J’ai haussé les sourcils d’un air surpris. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle aborde le sujet.

    — Tu as toujours eu du mal avec ça.

    Elle avait connu la même situation lorsque nous étions au lycée, dans le Connecticut, et que Jared était à l’université, à New York. Elle avait tenu le coup en lui rendant visite presque chaque week-end durant la fin de notre année de terminale.

    — Mais quand je serai en France, ça va être pire. Je ne peux pas l’obliger à m’attendre.

    — Et ça ne te pose pas de problème s’il voit une autre fille quand tu seras à Paris ? Parce que, en rompant, tu lui donnes la permission de le faire. Mais qu’est-ce qui se passera à ton retour ?

    Le menton entre les mains, Sara a laissé flotter son regard. Elle semblait calme.

    — S’il sort avec une autre, je préfère ne pas le savoir. De la même manière, si je rencontre quelqu’un à Paris, il n’a pas besoin d’être au courant. En fin de compte, je sais que nous sommes faits l’un pour l’autre. Mais je ne sais pas si nous sommes prêts à l’admettre, lui comme moi.

    J’avais un peu de mal à suivre sa logique, mais ça n’était pas le moment de poser des questions. Elle s’est avancée au bord du lit et a lâché, d’une voix hésitante :

    — Est-ce que tu crois que… comme je m’en vais… je pourrais dire quelques trucs sur toi à Meg ? Pas tout, juste assez pour que je puisse compter sur elle pendant mon absence. Je déteste l’idée d’être si loin avec personne pour…

    — S’occuper de moi, ai-je achevé.

    — Ouais…, a-t-elle acquiescé avec un sourire. Parfois tu te fermes comme une huître pendant des semaines, et je n’aime pas ça. Évidemment, je t’appellerai tous les jours, mais ça m’angoisse de te laisser seule… au cas où…

    Elle a baissé les yeux, incapable de finir sa phrase.

    — Ne t’inquiète pas pour moi, Sara, ça va aller, ai-je promis d’une voix faible.

    — Facile à dire…

     

  • [Lire] The revolution of Ivy

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    Résumé : Ce serait si facile de capituler, de fermer les yeux et d’attendre que la faim et la soif aient raison de moi. Ou bien qu’une bête sauvage me trouve. Ou même un autre survivant… Mais je refuse d’abandonner. J’en ai terminé avec la lâcheté. Il est temps pour moi d’agir, enfin.
    Bishop me l’avait bien dit, cet univers hostile ne pardonne pas la moindre erreur. Et au-delà de la barrière, c’est encore pire. L’hiver approche, et si je veux survivre, il va me falloir trouver de l’eau, des vivres, un abri. D’autres condamnés avec lesquels m’allier. Mais surtout, je vais devoir faire un choix : dois-je oublier ma vie d’avant, me venger de ceux qui m’ont trahie… ou mener, purement et simplement, la révolution ?
    Car je ne suis plus une Westfall, ni une Lattimer. Simplement Ivy. Et je suis enfin libre.

     

    Auteur : Amy Engel

     

    Edition : Lumen

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 5 mars 2015

     

    Prix moyen : 15€

     

    Mon avis : J’ai beaucoup aimé sortir du système de la trilogie avec ce livre. En effet, depuis quelques temps, la trilogie semble être la forme imposée de la plupart des romans ayant pour thème la dystopie. Ici, l’auteur a décidé de boucler son histoire en 2 tomes, ce qui n’est pas facile. Aller à l’essentiel sans donner l’impression de bâcler, d’aller trop vite, est certainement plus difficile que meubler et rajouter des scènes inutiles pour remplir trois livres.
    Au niveau des personnages on retrouve, à divers stades du roman, ceux du premier tome mais on en découvre de nouveaux : Caleb et Ash, deux personnes ayant toujours vécu « à l’extérieur » et s’en sortant d’ailleurs très bien. Ash est adorable, très ouverte et amicale, un vrai remède sur patte pour Ivy. Caleb est plus réservé mais tout aussi indispensable et attachant à sa manière.
    On retrouve aussi un personnage moins agréable : Mark, celui pour lequel, dans le premier tome, Ivy avait eu de la peine en apprenant son expulsion avant d’apprendre les raisons de sa condamnation : le viol et la mutilation d’une petite fille. Pervers un jour, pervers toujours, Mark va poser quelques problèmes à Ivy.
    Bishop va apparaître moins lisse dans ce tome, toujours avec le même mental, mais sans doute moins englué par les aspirations de ses parents et l’image qu’il doit donner auprès des habitants de la ville, selon son père. Dans ce tome, il est plus libre, plus lui-même.
    Souvent entre deux tomes, je suis inquiète de comment va commencer le second, s’il ne va pas être abrupt ou si on ne va pas être perdu, en ayant oublié ce qu’il y avait dans le premier tome. Mais ici, pas de soucis, le tome 2 reprend là où s’arrêtait le tome 1 et sans la moindre incohérence. On voit que l’auteur a écrit le tome 2 en gardant le tome 1 à portée de main pour vérifier les détails et que la relecture a été rigoureuse.
    Dans ce tome 2 il y a plus d’action car la vie à l’extérieur est plus dure que dans la ville. Ivy va devoir apprendre à chasser, dépecer des animaux, se défendre et pour cela, elle a de bons professeurs.
    La fin est assez rapide, mais on n’a pas cette impression de « j’en termine vite fait et je passe à autre chose » qu’on peut avoir dans d’autres livres. Tout est extrêmement logique, et après l’avoir lu, on se dit que ça n’aurait pas pu finir autrement.
    L’épilogue nous offre une vraie coupure avec le reste des deux tomes, comme pour nous détacher clairement de l’univers de Westfall tout en ouvrant sur un avenir qu’il nous appartient d’imaginer.
    La couverture est toujours aussi belle, bien que mettant toujours en scène cette improbable robe blanche.
    Cette saga en deux tomes n’est pas un coup de cœur, mais pas loin.

    Un extrait : Au début, je crois être en train de rêver du chien qui m’avait mordu. Celui que Callie avait étranglé avec sa propre chaîne. J’entends ses grognements, je perçois l’odeur de son pelage mouillé et son haleine putride. Je m’agite en tous sens et mes doigts rencontrent une surface dure et lisse. J’ouvre les yeux en catastrophe, vois l’intérieur de la voiture, ma main sur la banquette de cuir… Mon corps commence déjà à se recroqueviller, percevant la menace avant que mon esprit ne puisse l’enregistrer. Dans l’embrasure qui recevait autrefois l’une des portières du véhicule se trouve un coyote. Il est gris-brun, la fourrure emmêlée et incrustée de boue, et de la bave coule de sa gueule. Il découvre des crocs jaunâtres et se remet à grogner. C’est la première fois que je me retrouve nez à nez avec un coyote – que j’en vois un tout court, même – mais, d’après mon père, ces bêtes rôdent en meute de ce côté-ci de la barrière. Pour l’instant, il semble seul, mais ses congénères ne doivent pas être bien loin. Je donne des coups de pied vers lui et crie :

    — Va-t’en !

    Gagnée par la panique, je me dis que je dois me calmer, réfléchir, mais je n’ai qu’une seule envie : prendre mes jambes à mon cou. Mon pied finit par atteindre le coyote à la tête, et il recule – mais pas pour longtemps. Il revient, pose cette fois les pattes avant sur la banquette et me scrute de ses yeux de prédateur. J’ignore s’il est assez fort pour me tuer, mais il peut sans conteste m’infliger de graves blessures.

    Je plie la jambe pour prendre un nouvel élan et le chien s’élance en avant. Il referme les mâchoires à quelques millimètres seulement de mes orteils. Avec un hurlement, je recule en battant des bras et je me mets à chercher du regard un objet qui puisse me servir d’arme. L’espace d’une seconde, j’envisage de me jeter par-dessus le coyote pour sortir de la voiture, mais je sais qu’à terrain découvert, il me rattrapera en un éclair. Je jette des coups d’œil désespérés autour de moi et je finis par m’arrêter sur le pare-brise. Une partie de l’encadrement en métal, presque coupée en deux morceaux aux extrémités acérées, pend vers l’intérieur. Les yeux rivés sur l’animal, je me déplace doucement vers l’avant. Je n’ose pas donner un nouveau coup de pied, car s’il parvient à s’emparer de mon membre, il le réduira en bouillie en un rien de temps. Je respire un grand coup puis bondis vers le siège avant et hurle de nouveau quand la bête s’introduit dans la voiture. Son souffle chaud vient effleurer ma nuque.

     

  • [Livre] The book of Ivy

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    Résumé : Voilà cinquante ans qu’une guerre nucléaire a décimé la population mondiale. Un groupe de survivants d’une dizaine de milliers de personnes a fini par se former, et ce qui reste des États-Unis d’Amérique s’est choisi un président. Mais des deux familles qui se sont affrontées pour obtenir le pouvoir, la mienne a perdu. Aujourd’hui, les fils et les filles des adversaires d’autrefois sont contraints de s’épouser, chaque année, lors d’une cérémonie censée assurer l’unité du peuple.
    J’ai seize ans cette année, et mon tour est venu.
    Je m’appelle Ivy Westfall, et je n’ai qu’une seule et unique mission dans la vie : tuer le garçon qu’on me destine, Bishop, le fils du président. Depuis ma plus tendre enfance, je me prépare pour ce moment. Peu importent mes sentiments, mes désirs, mes doutes. Les espoirs de toute une communauté reposent sur moi. Le temps de la rébellion approche…
    Bishop doit mourir. Et je serai celle qui le tuera.


    Auteur : Amy Engel

     

    Edition : Lumen

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 5 mars 2015

     

    Prix moyen : 11€

     

    Mon avis : Depuis le temps qu’on me parle de cette dystopie, il était temps que je la sorte de ma PAL.
    Au vue du résumé (toujours trop détaillé, comme d’habitude) et du genre, je n’en attendais pas grand-chose et ce malgré les commentaires plus que positifs.
    J’ai été agréablement surprise. Même si une grande partie de l’histoire est cousue de fil blanc, j’ai quand même été surprise par une partie de la fin parce que je ne m’attendais pas à ce qu’Ivy fasse ce choix là précisément.
    Au niveau des personnages, j’ai beaucoup aimé Ivy, cette jeune fille révoltée par bon nombres de lois de leur société et clairement manipulée par son père et sa sœur aînée. D’ailleurs, une fois soustraite à leur influence, elle commence à se poser des questions.
    Je suis plus mitigée vis-à-vis du Président, j’ai du mal à le cerner. Il se livre peu et du coup on ne sait pas grand-chose de la force de ses convictions personnelles : agit-il uniquement pour poursuivre l’œuvre de son père sans trop se poser de question ou agit-il vraiment selon ses convictions ?
    Mme Lattimer est odieuse et semble oublier qu’elle vient du même côté de la ville qu’Ivy.
    S’il y a bien deux personnes opposées, c’est bien Bishop, qui est compatissant, intelligent et à clairement envie de faire bouger les choses même s’il ne sait pas vraiment comment, et Claire, la sœur d’Ivy, qui est obnubilée par la « cause » mais en réalité simplement avide de pouvoir à mon avis.
    Les personnages secondaires sont également bien décrits, même lorsque ce n’est que succinct : Victoria, David, Meredith, Dylan, pour ne citer qu’eux.
    L’écriture est facile à lire, le style de l’auteur est vraiment agréable et il est difficile de lâcher le livre avant la fin. D’ailleurs, à peine le premier tome achevée, j’ai entamé le second tome, ne m’interrompant que le temps d’écrire cet avis.
    Le roman reste une dystopie, donc rien de très original on reste dans le schéma : une société injuste mais censée être parfaite, une héroïne (oui dans les dystopie ce sont souvent les demoiselles qui jettent un pavé dans la mare) qui se rebelle contre le destin tracé pour elle, un beau mec responsable du changement de comportement ou de la prise de conscience de la demoiselle, une rébellion qui couve… mais au travers de cette société, l’auteur essaie de sortir du lot en abordant des sujets rarement abordé dans ce genre comme la violence conjugale, l’égalité entre les hommes et les femmes ou encore la place des femmes dans la société.
    La fin est frustrante, même si on a aimé que moyennement le livre (ce n’est pas mon cas, j’ai beaucoup aimé ce livre), si on est curieuse comme moi, impossible de ne pas lire la suite.
    Si j’ai une chose à reprocher, curieusement, c’est la couverture. Entendons nous bien, elle est superbe. Mais elle montre une femme en robe de mariée blanche alors que la première phrase du livre est « De nos jours, plus personne ne porte de robe blanche à son mariage. » 
    Alors, aussi belle que soit cette couverture, on a l’impression que celui qui s’est chargé de la choisir n’a même pas pris la peine de lire un minimum le livre.
    Mais bon, comme je ne suis pas obnubilée par les couvertures, ce n’est qu’anecdotique (et elle n’en demeure pas moins magnifique).
    Si vous aimez les dystopies, n’hésitez pas et si vous ne connaissez pas ce genre, ce livre est un moyen de s’y initier.


    Un extrait : De nos jours, plus personne ne porte de robe blanche à son mariage. Trop difficile de trouver du tissu de cette couleur, trop coûteux et compliqué de s'en procurer assez pour fabriquer des robes par dizaines. Y compris pour la cérémonie d'aujourd'hui — à laquelle participe pourtant le fils de notre leader, puisqu'il est l'un des futurs mariés. Mais même lui ne sort pas assez du lot pour se permettre d'épouser une fille vêtue de blanc.

    — Tiens-toi tranquille ! râle ma sœur derrière moi.

    De ses mains glacées, elle tente de boucler le laçage récalcitrant au dos de ma robe bleu pâle. Confectionné pour le mariage auquel elle n'a jamais eu droit, le vêtement est un peu serré pour moi.

    — Voilà ! conclut-elle lorsqu'elle parvient enfin à le fermer jusqu'en haut. Retourne-toi.

    Je m'exécute à contrecœur en tapotant du bout des doigts le tissu soyeux. Je n'ai pas l'habitude de porter des robes. J'ai l'impression d'être presque nue en dessous et, déjà, je n'ai plus qu'une envie : remettre un pantalon et me débarrasser du corsage trop étroit qui m'empêche de respirer normalement. Comme si elle lisait dans mes pensées, ma sœur baisse les yeux sur le corset.

    — Tu as des formes plus généreuses que les miennes, constate-t-elle avec une moue amusée. Mais ça m'étonnerait qu'il s'en plaigne...

    — C'est bon, Callie... Tes remarques, tu peux te les garder.

    Ma réponse manque cruellement de conviction. Je n'aurais jamais cru être aussi nerveuse. Ce n'est pas comme si cette journée était inattendue, en plus ! J'ai su toute ma vie qu'elle s'annonçait à l'horizon — j'ai même passé chaque minute des deux dernières années à m'y préparer. Et à présent que le grand jour est arrivé, je ne parviens ni à maîtriser le tremblement de mes mains, ni à dompter mon estomac révulsé. Serai-je capable d'accomplir mon devoir ? Je n'ai pas le choix, je le sais.

    Callie rabat une mèche de cheveux rebelle derrière mon oreille.

    — Tout va bien se passer, me promet-elle d'un ton ferme. D'accord ? Tu sais quoi faire.

    Je relève la tête et je réponds simplement :

    — Je sais, oui.

    Ses paroles me font me sentir plus forte : elle a raison, je n'ai pas besoin d'être traitée comme une enfant.

    Elle me regarde un long moment, les lèvres pincées. Est-elle mécontente que je prenne la place qui lui revenait de droit, ou se sent-elle au contraire libérée de son fardeau ? Soulagée de ne plus être celle sur qui reposent tant d'espoirs ?

    — Les filles ! appelle mon père depuis le rez-de-chaussée. C'est l'heure !

    — Vas-y, dis-je à ma sœur. Je te suis...

    J'ai besoin d'un dernier instant de calme, d'une dernière occasion de contempler la chambre qui ne sera plus jamais la mienne. Callie sort, mais laisse la porte entrouverte. J'entends mon père qui s'impatiente en bas, elle qui le rassure à voix basse.

    Sur mon lit se trouve une valise usée aux roulettes cassées depuis longtemps — je vais devoir la porter. Je la soulève et je fais lentement un tour sur moi-même. Je sais que je ne dormirai plus jamais dans ce lit étroit, ne me brosserai plus jamais les cheveux devant la coiffeuse, ne m'endormirai plus jamais au son de la pluie contre cette vitre. Je respire un grand coup et je ferme les yeux pour retenir les larmes que je sens monter. Quand je les rouvre, ils sont secs. Je sors de la pièce sans un regard en arrière.

     

  • [Livre] Absences

    Ma vie livresque et moi-même participons à un challenge.
    Ce challenge consiste à sélectionner trois livres dans la PAL de notre binôme. Celui-ci choisi lequel des trois il lira et chroniquera. Ma vie livresque et moi avons choisi de lire les trois livres que chacune à choisi pour l'autre (c'est qu'on a une PAL assez conséquente à faire descendre!)

    Ce livre est le premier que m'a choisi Ma vie livresque dans le cadre du challenge Livra'deux sur livraddict
    Pour sa part je lui avais choisi "Si tu m'entends" de Sharon Dogar dont vous trouverez la chronique ICI

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    Résumé : Nick et Dara ont à peine deux ans d’écart et se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Pour le reste, ces deux sœurs sont très différentes. Nick, l’aînée, est aussi discrète et responsable que Dara, la cadette, est excentrique et délurée. En quelques mois leur vie bascule : le divorce de leurs parents, un amour sur fond d’amitié trahie et surtout un mémorable accident de voiture… Ce jour-là, Nick était au volant. Depuis, elle a presque tout oublié du drame dont sa petite sœur, elle, a gardé de nombreuses séquelles. Ce dont Nick se souvient en revanche, c’est que sa sœur et elle s’étaient insensiblement éloignées avant l’accident. Alors pour renouer les liens, Nick décide de préparer à sa Dara une surprise pour son anniversaire. Mais Dara disparaît, laissant un message énigmatique. Il est temps de comprendre, de combler les trous de mémoire et de faire parler les siennes : Nick décide de mener l’enquête.

     

    Auteur : Lauren Oliver

     

    Edition : Hachette

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 1 Juillet 2015

     

    Prix moyen : 19€

     

    Mon avis : Ma première impression, après avoir lu environ ¼ du livre, est que la plupart des personnages sont odieux. Que ce soit le père, qui se débarrasse des problèmes en vitesse, la mère, qui se traîne et n’est pas foutu de contrôler sa gamine, la policière qui menace d’arrêter Nick sous le seul prétexte qu’elle a retrouvé un sweat-shirt sur les lieux d’une fête, le propriétaire d’un parc miteux qui croit réellement que des ados sont enthousiastes de bosser chez lui et surtout Dara.
    Dara est pour moi l’exemple même de la petite conne qui pense que tout lui est du et qui est prête à faire n’importe quoi pour arriver à ses fins.
    Nick n’ayant plus tous ses souvenirs autour de l’accident, elle n’est surement pas blanche comme neige, mais je trouve que son entourage lui en demande trop : comme si, en lui demandant d’être parfaite en toute circonstances, cela allait atténuer le comportement désastreux de sa sœur. Comportement qui est induit par ses parents qui semblent ne lui avoir jamais posé la moindre limite, comme si le bon comportement de Nick suffisait à annuler celui de sa sœur.

    On oscille entre passé, avec le journal de Dara et présent avec le fil de l’histoire.
    Mais j’ai le sentiment, depuis quelques chapitres, que quelque chose cloche dans le récit qu’on nous livre. Qu’il manque un élément, quelque chose d’important. Qu’on ne peut pas comprendre l’ensemble du tableau tant qu’on n’en sait pas plus sur l’accident. Je commence à me poser certaines questions qui remettent en cause tout ce que je pense depuis le début de ce livre.
    Une théorie commence à se dégager dans mon esprit, et plus les pages défilent, plus je suis sûre de moi, mais il me manque encore des détails pour tout comprendre.
    En revanche, je ne vois pas de rapport avec la disparition de la fillette dont tout le monde parle en filigrane de l’histoire. Je ne sais pas si j’ai manqué un indice, si d’autres révélations vont venir éclairer cet aspect de l’histoire, ou encore s’il s’agit d’un leurre chargé de nous cacher le plus important.

    Chaque aspect de l’affaire est bien expliqué et logique, à aucun moment on a l’impression qu’un élément tombe comme un cheveu sur la soupe.
    J’avais compris plusieurs choses, bien que pas forcément très longtemps avant d’en avoir la preuve écrite mais à chaque fois, il me manquait des détails.
    Concernant la gamine disparue, je n’avais pas réussi à comprendre le rapport qu’il y avait et, si son affaire peut presque paraître inutile, elle permet d’amener le personnage principal exactement où on a besoin qu’il soit pour que l’histoire garde non seulement sa cohérence mais son rythme.
    Vu la vitesse à laquelle j’ai terminé ce roman et le fait qu’il m’a été très difficile de le lâcher, on peut dire qu’il s’agit d’un coup de cœur !

    Un extrait : — En sous-vêtements, Nicole ?

    Il y a beaucoup de mots, ou expressions, que l’on aimerait ne jamais entendre dans la bouche de son père. Lavement. Orgasme. Déception.

    « En sous-vêtements » figure en bonne position sur cette liste, surtout à 3 heures du matin, après avoir quitté un commissariat vêtue d’un pantalon de la police et d’un sweat-shirt qui appartenait selon toute vraisemblance à un sans-abri ou à un serial-killer potentiel, parce qu’on s’est fait piquer ses fringues et son sac – contenant papiers d’identité et liquide.

    — C’était une blague, dis-je pour me justifier, ce qui est complètement débile.

    Se faire arrêter, quasiment nue, au milieu de la nuit, à l’heure où on devrait être dans son lit, n’a rien d’une blague. Les phares partagent la nationale en taches de lumière et d’obscurité. Je me félicite d’une chose au moins : le visage de mon père est plongé dans le noir.

    — À quoi est-ce que tu pensais, Nicole ? Je ne m’attendais pas à ça de ta part. Et ce garçon, Mike…

    — Mark.

    — Peu importe son prénom. Quel âge a-t-il ?

    Je conserve le silence, cette fois. Je sais qu’il vaut mieux garder la réponse pour moi. Vingt ans. Mon père cherche quelqu’un à qui faire porter le chapeau. Autant le laisser croire qu’on m’a forcée la main, qu’un mec exerçant une mauvaise influence sur moi m’a convaincue d’enjamber le grillage de la piscine, de me mettre en sous-vêtements et de sauter dans le grand bain. De faire un énorme plat dans une eau si glaciale que j’en ai eu le souffle coupé, que je suis remontée à la surface dans un éclat de rire, aspirant l’air à grandes goulées, pensant à Dara. Dara qui aurait dû être là avec moi, qui aurait compris.

    Il me semble voir surgir des ténèbres un énorme bloc de roche, un mur de pierre en accordéon, et je ferme les paupières un instant avant de les rouvrir. Il n’y a rien d’autre que la chaussée lisse à perte de vue et les deux entonnoirs découpés par les phares.

    — Écoute, Nick. Ta mère et moi, on s’inquiète pour toi.

    — Je ne savais pas que vous vous parliez encore, dis-je en baissant ma vitre de quelques centimètres, en partie parce que la climatisation crache à peine un filet d’air froid et en partie parce que le bruit du vent noie la voix de mon père.

    Il ne se laisse pas perturber.

    — Je suis sérieux, Nick. Depuis cet accident…

    — Par pitié, l’interromps-je pour l’empêcher d’aller au bout de sa phrase. Pas ça.

    Il soupire et se frotte les yeux derrière ses lunettes. Il a gardé l’odeur de ces bandelettes mentholées qu’il place sur son nez, la nuit, pour ne pas ronfler, et il porte le pantalon de pyjama ultralarge que j’ai toujours connu, celui avec des rennes. L’espace d’une seconde, une terrible culpabilité m’envahit.

    Puis je repense à la nouvelle copine de papa et à l’expression crispée, muette, de maman, qui évoque une marionnette aux mouvements empêtrés.

    — Tu vas bien devoir en parler un jour, Nick.

    Cette fois le ton est plus doux, soucieux.

    — Sinon avec moi, reprend-il, avec le Dr Lichme. Ou avec tante Jackie. N’importe qui.

    — Non, m’entêté-je en baissant la vitre complètement pour que le vent, qui tonne à présent, emporte le son de ma propre voix. Non.

     

  • [Livre] Little sister

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    Résumé : Du haut de ses seize ans, Lena fait preuve d'une assurance étonnante. Pourtant sa vie est loin d'être simple. Lena Rodriguez, c'était son nom avant. Sa nouvelle identité, elle ne peut la révéler à personne... Lena a convaincu ses parents de la laisser partir seule quelques jours à Cadaquès, chez son oncle et sa tante catalans. Elle ne leur a pas tout dit. Là-bas, elle a rendez-vous avec Ivan, son grand frère que personne n'a vu depuis quatre ans... depuis qu'il est parti, sans explication, faire le djihad en Syrie.

     

    Auteur : Benoît Séverac

     

    Edition : Syros

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 3 Mars 2016

     

    Prix moyen : 14€

     

    Mon avis : Je m’attendais à ce qui allait se passer car une grande intelligente a raconté les éléments clefs du roman dans sa critique sur Babelio. J’ai donc perdu une bonne partie de ce qui donne envie de tourner les pages plus vite, à savoir : pourquoi Ivan veut-il voir Lena ?
    L’auteur a daté la lettre de Théo pour Lena du 09 avril 2016 alors que le livre est sorti en mars. Je trouve que c’est une bonne idée car, du moins lorsqu’on lit le livre peu de temps après sa sortie, on a vraiment l’impression de vivre l’histoire en même temps que les personnages.
    L’auteur décrit parfaitement ce qu’à put ressentir cette famille qui croyait leur fils en stage en Angleterre (pas de spoiler, c’est dit dans les 1ère pages, vous inquiétez pas) et qui découvre à la TV qu’il a rejoint un groupe terroriste. Il parle un peu de l’enquête, des interrogatoires mais s’attarde surtout sur la honte ressentie par la famille, l’incompréhension, le sentiment de trahison, et surtout les réactions de l’entourage, des voisins, des camarades d’écoles, tous ses gens sans aucune compassion qui, au lieu de réconforter une famille qui vit un drame, les harcèlent, les insultent, au point de provoquer leur fuite.
    On ressent très bien les sentiments de Lena qui est partagée entre l’amour qu’elle porte encore à son frère et sa colère contre lui pour l’avoir trahie, pour être parti sans un mot. Même si elle a du mal à préciser ce qu’elle ressent, on se rend compte sans mal qu’elle espère que son frère n’est pas là-bas de son plein gré, qu’il est retenu contre sa volonté, qu’on l’a obligé à poser sur les photos vues à la télévision pour l’incriminer, qu’il a subi un lavage de cerveau et va se « réveiller » à un moment et revenir auprès d’elle.
    L’auteur fait le choix de changer de narrateur par deux fois : d’abord Lena, puis Théo, l’ancien meilleur ami de son frère et enfin Joan, un catalan, membre d’un groupe anarchique ayant, en son temps, combattu Franco.
    J’ai apprécié d’avoir le point de vue de différents personnages, mais quand on entre dans l’action, j’aurais aimé qu’on revienne régulièrement sur le point de vue de Lena, ne serait-ce que le temps d’un chapitre ou deux au milieu des parties consacrées aux autres narrateurs.
    Une dernière partie, plus courte que les autres, est racontée du point de vue d’un quatrième narrateur. C’est cette partie qui m’a le plus déçue et qui fait, en partie, que ce roman n’est pas un coup de cœur. Pour moi, sur cette dernière partie, tout va trop vite. On a presque l’impression de lire les notes prises sur le vif et transcrite comme ça, sans de réel travail dessus. Je n’ai plus eu l’impression d’être dans un livre et ça m’a laissé un peu sur ma faim.
    J’aurais bien aimé que ce soit Lena qui conclue le roman, qui nous fasse un épilogue digne de ce nom.
    Sur l’ensemble du roman, j’ai trouvé que l’auteur n’allait pas assez au fond des choses, qu’il restait toujours plus ou moins à distance de son sujet.
    Et, même si ce livre reste un excellent roman, j’ai eu une petite sensation de manque, de trop peu et d’inachevé.

    Un extrait : Avant, je m’appelais Lena Rodriguez. Mes parents avaient choisi un prénom moderne – il parait que Lena n’était pas très courant quand je suis née, il y a seize ans – mais qui sonnait un peu espagnol pour faire plaisir à mes grands-parents, et surtout aux parents de mes grands-parents qui avaient connu l’Espagne, eux. Ils y ont vécu jusqu’à ce que Franco chasse tous les républicains en 1939. Ils se sont réfugiés en France, et ils y sont restés. Dans tous les sens du terme. Je veux dire par là qu’ils sont morts de ce côté des Pyrénées sans être jamais retournés dans leur pays.
    Mes parents évoquaient peu ces histoires, mais mon papi et ma mamie, qui étaient petits lorsqu’ils ont traversé les Pyrénées à pied, emmitouflés dans des couvertures offertes par la Croix-Rouge, eux en parlaient souvent.
    De toute façon, ça n’a plus aucune importance à présent, nous ne nous appelons plus Rodriguez.
    Mon faux nom, mon nouveau vrai nom, je ne peux le révéler à personne. C’est trop dangereux.
    Nous avons dû changer d’adresse également, changer de ville, de région même.

    Tout ça à cause de mon frère Ivan, de cinq ans mon aîné.
    C’est difficile d’en vouloir à un grand frère qu’on aime ; difficile aussi d’aimer un frère à qui on en veut autant.
    Quand on est enfant, on grandit à ses côtés en se disant que c’est pour toujours, qu’il sera tout le temps là pour vous, qu’il viendra vous chercher à la sortie de l’école même quand on aura quitté les bancs de l’école depuis belle lurette, qu’il continuera encore longtemps à vous défendre. Et puis, en vieillissant, on comprend qu’on ne vivra pas avec lui, ni comme lui, mais on continue à partager ce qu’il y a de plus précieux, de plus beau, ce qui nous a fondé : l’enfance. Quelque chose nous unit, un lien indestructible… C’est ce lien qu’Ivan a détruit.

    C’est arrivé quand j’avais douze ans, je commençais à peine à voir se profiler mon avenir, à faire des choix par moi-même, parfois contre l’avis de mes parents. Je travaillais dur à l’école parce que j’avais compris que c’était la condition pour réussir. Quelque chose vibrait à l’intérieur de moi, qui ne demandait qu’à sortir, un frémissement. Je ne comprenais pas vraiment ce que c’était, mais je me souviens parfaitement de cette période où j’en ai pris conscience. Je n’étais plus le bébé à ses parents, j’étais moi, et je me faisais des promesses que j’écrivais dans mon journal intime pour ne pas être tentée de les oublier ou de les trahir.

    Rien de tout cela n’a pu éclore. Mon frère l’en a empêché. Il m’a condamnée, il NOUS a condamnés, mes parents et moi, à vivre dans l’espace clos où il nous a enfermés. A l’intérieur de sa folie.

    Moi qui rêvais d’être une star, me voilà contrainte de désirer l’anonymat plus que tout. Quand j’étais en sixième ou en cinquième, je n’avais qu’un désir, un peu futile peut-être, mais c’était ce que je souhaitais le plus ardemment : participer à The Voice ! Chanter devant des millions de téléspectateurs et devenir célèbre. Je me voyais déjà sur les plateaux de télévision, entourée d’une maquilleuse et d’une coiffeuse, réclamée par mes fans, adorée par les garçons qui se presseraient à la porte de ma loge, couverte de bouquets de fleurs envoyés par des admirateurs, courtisée par les présentateurs télé, les journalistes et le Tout-Paris. J’aurais été une people !
    Au lieu de cela…
    Célèbres, nous le sommes devenus. Toute la famille. En l’espace de quelques heures. Et pas seulement à Toulouse où nous habitions. Au-delà de la Haute-Garonne et des Midi-Pyrénées, dans tout le pays ! Nous n’avons pas eu à passer par un casting pour entrer sous les projecteurs.
    Nous avons été sélectionnés pour la finale dès le premier tour et déclaré vainqueurs. Champions toutes catégories !
    Tout cela à cause de mon frère.

    Lorsque le lundi 22 janvier 2012, son visage radieux s’est affiché à la une de tous les journaux, il m’a damé le pion. J’ai compris ce jour-là que je ne serais jamais une star de la chanson.
    Il portait une barbe longue de plusieurs semaines, il était coiffé d’un keffieh de moudjahid, il avait une kalachnikov en bandoulière, sa poitrine était bardée de munitions et de grenades, et il était avec d’autres comme lui, aux côtés d’un islamiste qui brandissait la tête d’un otage décapité.
    Nous le croyions en stage en Angleterre. Nous avons compris plus tard que les cartes postales que nous recevions avaient été pré écrites et postées par un complice depuis Londres. Il n’appelait pas au téléphone, soi-disant parce que son forfait ne le lui permettait pas. J’avais trouvé bizarre qu’il refuse la proposition de mes parents de lui payer un abonnement international.
    La victime était un journaliste français qui avait disparu depuis des semaines ; il avait été kidnappé au cours d’un reportage pour le Figaro Magazine. Mon frère avait participé à l’assassinat d’un autre français, là-bas, en Syrie, dans un pays que je n’aurais même pas pu situer sur une carte.
    Ça a été comme si quelqu’un avait lancé une bombe au milieu du salon. Ma mère s’est mise à hurler, mon père se tenait la tête et pleurait. Le téléphone a sonné quasi instantanément. Moi, je me demandais ce qu’il se passait parce que je n’ai pas reconnu mon frère tout de suite.

     

  • [Livre] U4 Yannis

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    Résumé : Yannis, Stéphane, Jules, Koridwen ont entre 15 et 18 ans. Ils ont survécu au virus U4, qui a décimé 90 % de la population mondiale. Ils ne se connaissent pas, mais ils se rendent pourtant au même rendez-vous.
    "Je m'appelle Yannis. Mes parents et ma sœur sont morts sous mes yeux. Depuis, leurs fantômes m'accompagnent partout. Il faut que je quitte Marseille avec mon chien, sinon je vais devenir fou. Je n'ai plus qu'un espoir : arriver à temps au rendez-vous à Paris."

     

    Auteur : Florence Hinckel

     

    Edition : Nathan Syros

     

    Genre : Young adult

     

    Date de parution : 27 août 2015

     

    Prix moyen : 17€

     

    Mon avis : D’emblée ce tome m’énerve car l’auteur entretient la mauvaise réputation de Marseille. Sur les 4 lieux, dans les 4 tomes, aucun ne connait autant de problèmes que Marseille avec les « gangs ». Je vis depuis toujours dans cette ville et si c’est vrai qu’il y a quelques quartiers difficile, j’en ai un peu marre de voir cette exagération permanente vis-à-vis de la criminalité des jeunes. Bref, je n’ai pas commencé ce tome dans de très bonnes dispositions.
    A beaucoup d’égard, Yannis semble plus gamins que les trois autres : alors que le monde tombe en ruine, il se charge de mangas, cherche un ordinateur avec de la batterie pour pouvoir regarder un film, bref il n’a pas trop le sens des priorités ni des réalités. Il a quitté Marseille sur un coup de tête, sans vêtements chauds, sans trousse de secours ni rien de ce qui pourrait lui être utile dehors. Il trouve l’essentiel à chaque fois par hasard, par un énorme coup de chance et c’est quand il voit les objets nécessaires qu’il se dit que ce serait une bonne idée d’en avoir. Il semble totalement incapable de la moindre organisation (et que l’auteur arrête de rabâcher que c’est parce que c’est un gosse des villes, pas besoin d’être un scout pour savoir que pour survivre il faut des vêtements chauds, des piles, des allumettes, des bougies, un réchaud, des ustensiles…bref un minimum quoi…et que les mangas ne servent à rien)

    J’ai l’impression que Yannis est incapable de faire la différence entre le jeu et la réalité. Enfin, si il fait une différence mais pour lui Adrial, son avatar dans le jeu, est aussi réel que Yannis et prend parfois le contrôle. C’est limite de la schizophrénie (et encore « limite » je suis gentille). Remarquez que ça lui sert ! Sans ses délires sur Adrial, il serait mort avant de sortir de Marseille.
    J’ai commencé à apprécier ce tome à partir du moment où Yannis rencontre Stephane, une fois qu’on se retrouve à revivre leur fuite vers Paris à travers ses yeux à lui. Comme lui, je suis indignée par l’attitude des militaires.
    D’ailleurs, il résume très bien ma pensée : « Les adultes craignent-ils qu’on leur échappe, et qu’à cause de notre nombre on les écrase ? Ont-ils peur de nous ? Je trouve ça absurde ! Ils devraient nous considérer comme la relève de l’humanité, plutôt que comme des ennemis à mater… »
    Comme moi, Yannis ne croit pas une seconde que les actions de l’armée ont pour but d’assurer la sécurité des ados. C’est une dictature qui se met en place, profitant de la catastrophe pour s’imposer.
    Je remarque que Yannis à également la même réaction que moi devant l’attitude de Jérôme.

    Pour faire un petit bilan de ces quatre tomes, je dirais que mon préféré a été Stephane et que j’ai bien aimé les trois autres, même Yannis qui a été plus long a démarrer pour moi.
    J’aurais bien aimé que les militaires en prennent pour leur grade (peut être une intervention des pays voisins). Enfin je suis un peu déçue de l’impunité totale qui semble être attachée à toutes leurs actions.
    Rien que le tutoiement sur les tracts montre à quel point ils méprisent les survivants du fait de leur jeune âge.
    Bref j’aurais apprécié qu’ils payent pour tout ce qu’ils ont fait, qu’ils comprennent, contraints et forcés que ce monde ne leur appartient plus.

    Je ne suis pas d’accord non plus sur le fait qu’on dise qu’on peut lire ses livres dans n’importe quel ordre. Je pense qu’il faut vraiment lire Jules puis Koridwen et Stephane puis Yannis. A la limite, les deux « couples » peuvent être lus l’un après l’autre dans l’ordre qu’on veut, mais à l’intérieur de chaque duo, il faut respecter la « chronologie » car Koridwen va un peu plus loin que Jules et l’épilogue de Yannis a lieu un jour plus tard que celui de Stephane. De plus je trouve que l’épilogue de Yannis donne une meilleure impression de clôture de la série.

     

    Un extrait : Une nuée de goélands vole au-dessus de moi. Ici, à Marseille, on les appelle des gabians. Je n’ai jamais vraiment aimé ces bestioles, qui se nourrissent dans les poubelles, et sont capables de déchiqueter le corps de leurs propres congénères. Ils bouffent n’importe quoi. Deux d’entre eux fondent sur le cadavre. Ils se posent sur sa veste gonflée d’eau et commencent à lui piquer la nuque à coups de becs. Révolté, je leur balance des cailloux pour les chasser. Happy m’imite et leur aboie dessus.

    – Fichez le camp, saletés d’oiseaux de malheur !

    Je me laisse retomber sur le banc. Les autres gabians continuent à tourner au-dessus de moi, dans l’attente de me lacérer, une fois mon heure venue. Sales crevures de bestioles.

    Je me sens soudain en danger, ainsi à découvert. Jusque-là, j’étais resté caché chez moi, seulement informé par les quelques derniers flashs d’information d’il y a déjà quatre jours ou à peu près, quand la radio fonctionnait encore. Les dernières consignes − ne pas paniquer, et ne pas quitter les villes afin de ne pas propager le virus − avaient provoqué tout le contraire : panique et tentatives de désertion en masse. C’était tout ce que je savais du dehors. Je n’en sais toujours pas plus.

    La Grande Roue du quai tourne à vide sous le mistral, devant l’avenue de la Canebière qui ouvre une tranchée dans la ville déserte et silencieuse. Que s’est-il passé dans la cité, ces derniers jours ? Où sont les autres ?

    – Hé, toi, là-bas !

    De l’autre côté du port, un groupe d’une dizaine de garçons et de filles sorti d’une ruelle sombre me fait des signes. Ce sont les premiers survivants que je vois. Eux ne sont pas restés terrés chez eux comme les autres.

    – Hé !

    Pourquoi eux ne se cachent-ils pas ? J’esquisse un mouvement de recul.

    – Hééé, bouge pas !

    Ils courent vers moi, longeant le quai bordé de mer d’un côté et de voitures en vrac de l’autre, comme un embouteillage habituel par ici, mais sans insultes ni klaxon. Happy se redresse et moi aussi. Je distingue d’abord une casquette rouge à la visière placée de côté sur chacune des têtes. Bizarre qu’ils la portent tous pareil. Puis quelque chose dans leurs mains accroche les rayons du soleil, et une détonation retentit. Le dossier du banc vole en éclats de bois.

    – Happy, cours !

    Ils sont tarés ! Je distingue maintenant des couteaux, des fusils ou des pistolets entre les mains de chacun d’eux. Je détale dans la direction opposée. Je ne peux pas rester ici, sur le bord de mer trop exposé. J’escalade les carcasses des voitures qui encombrent le quai, avec l’espoir de les semer dans les ruelles tortueuses du Panier. C’est comme une course poursuite de WOT, sauf que j’entends les jurons de mes poursuivants derrière moi. Sans réfléchir, je pique un sprint dans la rue Caisserie. Quel crétin ! Dans cette rue longue et large, les balles pourraient m’atteindre facilement. Cours, Happy ! Deux vitres explosent. Je traverse la place de Lenche, avale quatre par quatre les marches de l’escalier des Accoules avec mes grandes jambes. J’ai pris quelques longueurs d’avance.

    Soudain, je réalise que je suis à deux pas de la place des Moulins où habite mon pote RV. J’ignore s’il est dans le coin, ou même s’il est vivant, mais je fonce. La porte d’entrée de son immeuble ne ferme plus depuis des mois : c’est mon salut. Je pousse cette porte, fais basculer une poubelle devant l’entrée pour faire croire que l’accès est bloqué, referme précipitamment derrière Happy et m’engouffre dans la cage d’escalier. Je cours me réfugier dans la cave où il rangeait son scooter.

    Je tente de réguler mon souffle en silence. Avais-je assez d’avance sur eux pour qu’ils ne voient pas la poubelle tomber ?

    Une lucarne s’ouvre au niveau du trottoir. Bientôt, cinq paires de chaussures de sport courent, freinent leur course, puis reviennent sur leurs pas. Piétinent. Je prie pour que Happy ne grogne pas ; je le caresse pour le calmer.

    – Où il est, bordel ? crie le propriétaire d’une paire d’Adidas.

    Un coup de feu éclate et le bruit ricoche sur toutes les parois des maisons qui bordent la place.

    – Reste tranquille, mec. Ça sert à rien de tirer dans le vide. On l’a perdu, de toute façon…

    – Sale enflure ! Encore un qui est resté terré comme un rat et qui ne sort que pour vider les magasins sans penser aux autres.

    – T’inquiète, il n’échappera pas à nos patrouilles. Et il paiera.

    Des rires mauvais.

    – Ouais, ils paieront tous. C’est l’heure du Grand Retournement !

    Les chaussures piétinent encore un peu, les rires explosent comme les détonations brèves de leurs armes, puis le silence… Je reste là un long moment, enlaçant mon chien, l’incompréhension tournoyant dans ma tête.

    Dans la pénombre, le scooter de RV renversé sur le côté ressemble à un cheval terrassé. La tête me tourne et, l’espace d’une seconde, je vois un cheval ensanglanté, à l’œil vide et blanc. Mon cœur bondit : la folie rôde certainement au coude à coude avec la mort. Je dois me méfier des images et des pensées qui s’éloigneraient un peu trop de la réalité. Même si cette réalité est ce qu’elle est : un putain de chaos.

     

  • [Livre] Risk

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    Résumé : Taylor et Sierra sont meilleures amies depuis toujours. Même si Taylor en a parfois un peu marre : pourquoi est-ce toujours Sierra qui obtient tout ce qu'elle veut ? Notamment ce Jacob Jones, qu'elles ont rencontré ensemble sur un chat en ligne. Évidemment, c'est Sierra qui, encore une fois, décroche un rendez-vous ! Mais le lendemain, Sierra ne rentre pas. Le jour suivant, toujours pas de nouvelles... Son amie a une fâcheuse tendance à vivre comme bon lui semble, sans forcément penser à prévenir les autres. Est-ce que Taylor ne s'inquiète pas pour rien ? Seulement au bout de trois jours, Taylor doit tout avouer aux parents inquiets, et les deux familles se retrouvent plongées dans un monde qu'elles n'auraient jamais cru connaître. Celui des enquêtes policières, des témoignages, des indices, de la recherche d'un ravisseur... ou d'un tueur ?

     

    Auteur : Fleur Ferris

     

    Edition : Hugo Roman

     

    Genre : Young Adult

     

    Date de parution : 3 mars 2016

     

    Prix moyen : 17€

     

    Mon avis : Dès le début du roman on sait que Sierra est punie : privée d’internet, de téléphone et surveillée par une baby-sitter en l’absence de ses parents. On en apprend la raison plus tard : la jeune fille a envoyé une photo de ses seins à des garçons sur un Tchat.
    Je me pose quand même une question : Certes Sierra est inconsciente et égoïste, certes elle fait ce que bon lui semble sans s’inquiéter des autres et surtout pas de ses parents, mais Taylor qui a un peu plus la tête sur les épaules a la même réaction face à cette punition. Ma question est donc : quelqu’un a-t-il prit la peine d’informer ces jeunes filles du danger de ce que Sierra a fait ? De toute évidence non, ses parents se sont contentés de la punir et la mère de Taylor d’approuver cette punition face à sa fille.
    Comment peuvent réagir des adolescentes face à une punition qui leur semble injuste car elles ne comprennent pas les conséquences de leurs actions ?
    Il faut attendre la disparition de Sierra et l’intervention de la police pour que Taylor sache que son adresse IP peut permettre de la localiser, que quelqu’un qui passe par un serveur proxy est un fantôme sur internet. Il faut attendre cette disparition pour que quelqu’un prenne la peine d’alerter les adolescents sur les dangers que représentent les rencontres en ligne.
    On peut couper le roman en deux parties : La rencontre sur le Tchat avec Jacob Jones, la disparition de Sierra et les recherches effectuées constituent la première partie. La seconde se déroule après qu’on ait retrouvé la jeune fille, l’enquête pour retrouver « Jacob Jones » passe au second plan et l’envie de Taylor de prévenir les filles comme elle et Sierra des dangers qu’elles courent sans le savoir prend le dessus.
    Ce roman est à mettre entre les mains de toutes les adolescentes et préadolescentes. Il peut servir de base à une discussion sur les dangers d’internet et sur les précautions à prendre comme ne jamais donner de renseignements personnels comme le nom, l’adresse ou le nom de son école, ne pas accepter de rendez vous sans la présence d’un adulte (un rdv dans un café avec maman ou papa assis à la table d’à coté suffit à décourager les prédateurs) et surtout leur faire prendre conscience d’à quel point une histoire peut être sophistiquée, peut être préparée avec minutie pour faire tomber quelqu’un dans les filets. Non, il n’y a pas que les filles stupides qui se font avoir, ça peut arriver à n’importe qui pour peu que cette personne n’ait pas été suffisamment alertée sur les dangers encourus.
    J’ai lu ce livre en seulement deux ou trois heures car il était impossible de le poser sans savoir la suite.
    Non seulement l’écriture et fluide, agréable et traite d’un sujet important, mais il parle aussi de sujet qui en découle : la colère, le ressentiment, les disputes que provoquent ce genre de situation et qui n’a pas grand-chose à voir avec les autres mais avec ce que l’on ressent soit même et que l’on n’arrive pas à exprimer. Il parle aussi avec beaucoup de tact du deuil et de la culpabilité du survivant sans s’y attarder plus que cela car chaque cas peut être différent. Mais il permet de savoir que ces sentiments existent et qu’ils ne sont pas anormaux.

    Un extrait : Riley nous verse quatre verres d’eau glacée et coupe un citron vert, dont elle place des rondelles sur nos verres, puis le reste dans la carafe. Nous emportons le tout dehors. Nous nous allongeons dans les chaises longues et sirotons nos boissons en regardant les mecs délirer dans l’eau. Voyant Riley bien installée, Joel sort de la piscine et vient essayer de la prendre dans ses bras.

    - Me touche pas ! couine-t-elle.

    Avec un rire, il replonge.
    Callum sort aussi, il me regarde depuis le bord de l’eau et je lui renvoie un regard meurtrier.

    - T’as pas intérêt, dis-je en affectant de ne pas vouloir qu’il m’approche.

    Il rit et retourne dans l’eau avec un saut périlleux arrière qui m’offre une vue impeccable sur son corps bronzé et tonique. Je reste à regarder l’eau en imaginant combien sa peau serait fraîche sous mes doigts.
    Callum est la distraction parfaite, mais quand une heure se transforme en deux, je me remets à penser à Sierra.

    - Vous ne devez pas être chez toi pour six heurs, avec Sierra ? me demande Callum.

    J’ai le cœur serré chaque fois qu’il parle d’elle. Ils se sont embrassés, ou pas ?

    - Non, mais je dois prévenir ma mère si je rentre plus tard.

    - Dans ce cas, tu vas pouvoir sortir ton téléphone.

    Je regarde l’heure.

    - J’attends le coup de fil de Sierra. Elle a encore vingt minutes. Elle va pas tarder à m’appeler maintenant.

    - Mais bien sûr. Tout comme elle a passé la nuit chez moi, la fois où elle s’est barrée avec Matt, me rappelle Riley.

    A ce moment mon téléphone sonne. C’est elle. Un grand sourire aux lèvres, je tire la langue à Riley avant de répondre :

    - Coucou, Sier…

    Elle me coupe avant que je puisse rien dire d’autre.

    - Oh, mon Dieu ! Je plane complet ! Il est trop ! (Sa voix est partie dans les aigus, alors elle baisse d’un ton). Il a plus de dix-huit ans, c’est clair, mais bon, moi aussi j’ai menti sur mon âge, alors on est quittes. Et les mecs plus âgés, ils sont tellement plus sexy ! T’imagines, Tay, on s’est déjà embrassés !

    J’écarte le téléphone de mon oreille pour éviter de devenir sourde.

    - Pas besoin de t’inventer une excuse pour partir plus tôt, alors ?

    Je ris un peu trop fort. La jalousie est de retour, et je sens le rouge me monter aux joues. Je n’arrive pas à croire que j’ai vraiment envie qu’il soit nul et que ça ne marche pas entre eux.

    - Non, c’est l’inverse ! Je veux passer la nuit avec lui.

    - Quoi ? dis-je en panique.

    - Allez, Taylor ? Tu veux bien me couvrir ? Je le ferais, si c’était toi.

    - Ah non, Sierra. Pas question. Tu prévois ça pour une autre fois.

    - Je reviens demain matin, à la première heure ! Tout ira bien.

    - Et si ta mère appelle la mienne ? Ca suffit pour que tu te fasses choper.

    - Elle le fera pas, elle est au week-end caritatif. C’est elle qui organise la collecte de fonds. Allez, une nuit, c’est rien du tout. Je serais chez toi très tôt, demain matin. Promis !

    - Et quand ta mère saura que tu n’es pas restée chez moi ? Dès qu’elle aura parlé à la mienne, elle sera au courant.

    - Je lui dirai que finalement, je suis allée chez Izzy. Je te demande pas de mentir, juste de ne rien dire. Tout va bien se passer. C’est juste une nuit, pas de quoi en faire tout un plat. (Elle s’arrête) Ah, on y va. Je dois te laisser, je t’adore !

    Elle raccroche, me laissant abasourdie.

     

  • [Livre] U4: Stephane

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    Résumé : Stéphane, Yannis, Koridwen et Jules ont entre 15 et 18 ans. Ils ont survécu au virus U4, qui a décimé 90% de la population mondiale. Ils ne se connaissent pas, mais ils se rendent pourtant au même rendez-vous.

    "Je m'appelle Stéphane. Je vis à Lyon. C'est le chaos. Des bandes de jeunes commencent à piller les appartements vides. D'autres investissent les lycées désertés... Moi je préfère attendre mon père, chez nous. Et s'il ne revient pas, j'irai au rendez-vous. J'irai jusqu'à Paris pour le retrouver dans son bunker de l'armée."

     

    Auteur : Vincent Villeminot

     

    Edition : Nathan

     

    Genre : Young adult

     

    Date de parution : 27 Août 2015

     

    Prix moyen : 17€

     

    Mon avis : De tous les adolescents dont j’ai suivi l’histoire au travers de ces trois premiers tomes, Stephane me paraît être la plus froidement rationnelle. Fille de scientifique, elle analyse chaque fait en tentant de garder la tête froide. Mais là où elle arrive à se comporter en scientifique lorsqu’il s’agit de la maladie elle-même, quand on parle de rapports humains, ce n’est plus la même limonade. Stephane vit très mal les exactions des groupes de pillards et se montre complètement aveugle en ce qui concerne son père.
    Plus j’avance dans le livre et plus je me dis que cet homme n’a jamais eu l’intention de tenter de sauver sa fille. Il a été évacué par l’armée, et, en éminent scientifique qu’il est, il aurait pu demander à ce que l’armée lui ramène sa progéniture, mais cela ne semble pas le préoccuper tant que lui-même est en sécurité. Stephane espère qu’il a pu arriver à temps pour sauver sa mère, dont il est divorcé, et son petit frère, mais j’ai bien l’impression que l’idée même de tenter de sauver ses enfants ne l’a même pas effleuré. A force de se dire que son père a confiance en elle et que c’est parce qu’il sait qu’elle est capable de s’en sortir qu’il n’est pas venu la chercher, j’ai peur que Stephane n’aille au-devant de graves désillusion, et quand on voit ses réactions devant la cruauté humaine, elle risque de ne pas s’en remettre. J’espère que la suite du livre me donnera tort.
    Au début du livre, et pendant un long moment, Stephane est pro-armée : elle pense que chaque action de l’armée (les nettoyages de quartier au napalm, les prises de sang nominatives obligatoires…) a une bonne raison, une raison sanitaire et que le reste, à savoir essentiellement les traceurs implantés de force aux survivants ou l’obligation de rejoindre les R-points ne sont que des rumeurs lancées par ceux qui veulent discréditer l’armée.
    Quand même au fil du temps, il y a des choses qui la révoltent, comme la manière dont les « réfugiés » sont traités.
    Même si je n’ai pas encore la réponse à mes questions, je vois que certains personnages se les posent également : Qui décide ? Qui contrôle l’armée ? De quel droit est ce que les militaires agissent ainsi ?
    Dans ce tome, on voit pour la première fois l’organisation d’un R-Point de l’intérieur, on voit que les plus âgés des survivants sont prêts à tout pour conserver le pouvoir. Ce sont de petits chefaillons qui savent qu’ils peuvent agir comme ils le souhaitent vis-à-vis des survivants tant qu’ils se montrent dociles face à l’armée : tant qu’ils restent de bons moutons, ils peuvent se prendre pour des loups.
    C’est cette situation, ainsi que les insinuations de plus en plus ouverte de son ami Marco et la méfiance des « responsables » quand elle émet le souhait de contacter son père (comme si on avait peur qu’elle se plaigne), qui font évoluer la pensée de Stephane vis-à-vis des « autorités légales ».
    Je ne sais pas qui m’énerve le plus des militaires ou de Julien, le soi-disant responsable du R-point. Cette histoire, en tout cas, me conforte dans l’idée que, quoi qu’il arrive, l’armée ne doit avoir aucun pouvoir car elle en abusera toujours.
    Je ne m’attendais pas du tout aux décisions que va prendre Marco, même si, avec le recul, je me dis que j’aurais dû m’en douter.

    Un extrait : Dans la rue Saint-Michel, je croise deux nouveaux cadavres. Difficile de les ignorer, ceux-là, ils sont au beau milieu de la chaussée. Ils se tiennent par la main, deux amoureux tragiques dont la mort n’a pu séparer l’étreinte, fauchés là par les fièvres au pied de leur immeuble, peut-être, ou bien se sont-ils retrouvés à cet endroit pour en finir ? Avaient-ils vingt ou soixante ans ? Seuls leurs vêtements me font pencher pour la première hypothèse. Pour le reste, c’est impossible à dire : ils n’ont plus de visages, couverts de sang séché, leurs mains sont déjà travaillées par la putréfaction. Roméo + Juliette ?

    Ne compatis pas, ne brode pas.

    « Que sais-tu, Stéphane ? Que comprends-tu ? Analyse… »

    Le sang. Les croûtes de sang. Les fièvres.

    Des faits. Quels faits ? Les gens ont commencé à saigner il y a onze jours. Les symptômes ont été les mêmes pour chacun : céphalées, migraines ophtalmiques, hémorragies généralisées, externes et internes. Le sang suintait des yeux, des narines, des oreilles, des pores de la peau. Ils mouraient en moins de quarante heures. Fièvre hémorragique, filovirus nouveau, proche de la souche Ébola, mais infiniment plus virulent. Dénomination officielle : U4, pour « Utrecht 4e type », l’endroit où la pandémie a commencé. 90 % d’une population étaient atteints, et tous ceux qui étaient frappés mouraient – tous, sauf nous, les adolescents.

    Seuls les adolescents de quinze à dix-huit ans ont survécu. La grande majorité, du moins. C’est ce que j’ai pu lire sur les principaux sites d’information, au début. Puis les webjournalistes sont morts, comme tous les adultes, comme les enfants. Les sites sont devenus indisponibles les uns après les autres. Les coupures d’électricité ont fait sauter Internet de plus en plus souvent. Le site du ministère de l’Intérieur continuait d’afficher ses consignes dépassées : rester calme, ne pas paniquer, porter des gants et des masques respiratoires, éviter tout contact avec les contaminés, abandonner sans tarder les maisons ou les appartements touchés par le virus. Ne pas manipuler les cadavres. Rejoindre les « R-Points », les lieux de rassemblement organisés par les autorités.

    Ensuite, Internet s’est tu. Tout s’est tu.

    Je me répète pour la centième fois la chronologie des événements pour garder l’horreur à distance, tandis que je dépasse les corps des deux amants. Ma présence a dérangé les prédateurs habituels de cadavres-insectes, mouches, et rats, car des milliers de rats règnent maintenant sur la ville. Ça grouille, ça pue. Cette vermine se nourrit des morts, de ce que nous étions.

    Analyse, ne pense pas. Anticipe.

    Les rongeurs vont propager d’autres épidémies. Les rares survivants en mourront. Le choléra ou la peste semblent dérisoires à côté d’U4, mais ils tueront aussi.

    Mon père disait toujours : « Pendant les interventions, il faut se concentrer sur les informations scientifiques, ce que l’on sait et ce que l’on ignore, pour ne pas se laisser submerger par les émotions. » Il me le répétait pour m’apprendre à maîtriser le trac avant les examens. Où qu’il soit, se doute-t-il combien ses conseils me sont utiles, aujourd’hui, dans cette ville défunte ?

     

  • [Livre] U4 Koridwen

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    Résumé : Koridwen, Jules, Stéphane et Yannis ont entre 15 et 18 ans. Ils ont survécu au virus U4, qui a décimé 90% de la population mondiale. Ils ne se connaissent pas, mais ils se rendent pourtant au même rendez-vous.
    "Je m'appelle Koridwen. Je suis la dernière survivante du hameau de Menesguen. J'ai décidé de me rendre à Paris. 541 kilomètres en tracteur, c'est de la folie, mais toute seule ici je suis trop vulnérable. Ma grand-mère m'a toujours dit que j'aurais un destin exceptionnel. C'est le moment de le vérifier."

     

    Auteur : Yves Grevet

     

    Edition : Nathan Syros

     

    Genre : Young adult

     

    Date de parution : 27 août 2015

     

    Prix moyen : 17€

     

    Mon avis : C’est le second tome d’U4 que je lis et je le préfère à Jules. Koridwen est plus réaliste que lui sans pour autant avoir perdu tout espoir. Même si elle est sceptique quant aux dires de sa grand-mère, qu’elle a découvert dans une lettre que ses parents lui avaient dissimulée, nombres d’événements la font douter et la pousse à espérer que tout puisse être possible.
    Max m’énerve. Je sais bien que ce n’est pas sa faute et qu’il a un handicap mental, mais je serais incapable de montrer la patience de Koridwen devant ses crises et ses caprices.
    C’est intéressant de lire ce tome en retrouvant certains passages vus dans Jules mais d’un point de vu différent.
    Je m’étais rendu compte dans Jules qu’on passait directement de la partie 2 à la partie 4. Après vérification, c’est le cas dans chaque tome d’U4 mais je n’en comprends pas la raison.
    Autre chose dont je me suis rendu compte dans Jules, c’est le fait que l’histoire avec khronos retombe comme un soufflé : on n’a pas vraiment d’explications et on peut dire que beaucoup de bruit a été fait pour rien autour de cette histoire. J’attends d’avoir lu les 4 tomes pour me prononcer mais à part amener les personnages à Paris pour qu’ils se rencontrent, il n’a guère de présence.
    Dans ce tome, on n’en sait pas plus sur les motivations des militaires pour leur attitude et c’est un peu frustrant. Pas tellement de ne pas avoir les réponses dans ce tome ci, mais de se dire qu’on risque de ne pas avoir les réponses du tout. J’espère en comprendre un peu plus dans le tome Stephane qui est fille d’un scientifique travaillant pour l’armée d’après ce que j’ai pu comprendre.
    La fin de ce tome laisse un goût doux-amer car on peut l’interpréter de deux façons différentes à mon sens.

    Un extrait : Comme tous les autres jours, je me suis levée tôt pour nourrir les bêtes. Ce matin, c’était au prix d’un très gros effort. Je n’ai pratiquement pas fermé l’œil de la nuit. À mesure que le temps s’écoulait, mes pensées devenaient plus sombres et plus désespérées. Vers 4 ou 5 heures, j’ai débouché le flacon de poison et je l’ai porté à mes lèvres. Avant d’avaler la première gorgée, je me suis fixé un ultimatum : « Koridwen, si tu ne trouves pas dans la minute une seule raison de ne pas en finir, bois-le ! »

    Et là, au bout de longues secondes de noir complet, j’ai vu apparaître dans un coin de mon cerveau la grosse tête de la vieille Bergamote. Jamais elle ne parviendra à mettre bas sans mon aide. Je la connais. J’étais là la dernière fois et ça n’avait pas été une partie de plaisir. Si je ne suis pas à ses côtés, elle en crèvera, c’est sûr. Elle et son petit.

    Alors c’est pour cette vache que je suis encore vivante à cette heure. Après son vêlage, il faudra donc que je me repose la question. Depuis que je suis la seule survivante du hameau, je fonctionne comme un robot, sans jamais réfléchir. J’alterne les moments d’activité intense et les temps morts où, prostrée dans un coin, je ne fais que pleurer ou me laisser aller à de brefs instants de sommeil.

    Je continue à traire mes bêtes mais je répands le lait dans la rigole. Si j’arrêtais la traite, elles souffriraient quelque temps, puis leur production stopperait d’elle-même. Je continue à le faire parce que ça m’occupe l’esprit et me donne l’illusion que la vie suit un cours presque normal. Je change les litières. Je remplis la brouette avec la paille souillée. L’odeur est forte mais elle est rassurante. Le poids de la charge tire dans mes épaules. Ça m’épuise vite et, le soir, cela m’aide à trouver plus facilement le sommeil. C’est une tâche fastidieuse et pénible mais on voit le travail avancer et, à la fin, on a le sentiment du devoir accompli. Les bruits de la campagne ont changé depuis deux semaines. Le silence n’est plus troublé par le bourdonnement des voitures et des engins agricoles.

    Pourtant, il y a quelques minutes, j’ai cru entendre un véhicule approcher. Puis plus rien. Je suis sortie pour voir. Mais il n’y avait personne. Je commence peut-être à perdre la boule.

    J’étale maintenant de la paille propre sur tout le sol de l’étable. Les bêtes sont soudain nerveuses, comme avant un orage ou lorsque des taons les agressent l’été. Je sursaute en sentant une présence derrière mon dos. Ce sont deux gars à peine plus âgés que moi. Ils se ressemblent, peut-être sont-ils frères. Je reconnais l’un des deux. Je l’ai vu en ville plusieurs fois avant la catastrophe. Il traînait avec d’autres à l’entrée du mini-market du centre. Ils sirotaient des bières et faisaient la manche. Je ne suis donc pas la seule dans les parages à avoir survécu. J’en éprouve une sorte de soulagement. Mais ce n’est pas avec eux que je vais pouvoir rompre ma solitude. Le regard qu’ils posent sur moi me glace le sang. Je ressens leur hostilité et leur malveillance. C’est le plus vieux qui m’interpelle en grimaçant :

    – On a besoin d’outils du genre perceuse-visseuse, scie circulaire, marteau, hache, tronçonneuse. On a des portes et des volets à faire sauter dans le coin.

    – Vous n’êtes pas chez vous ici et vous n’avez aucun droit, dis-je en relevant la fourche pour les menacer.

    – Hé la gamine, reprend le gars en colère, tu vis sur une autre planète ou quoi ? C’est fini tout ça. Tout le monde est mort, sauf quelques jeunes de notre âge. Maintenant, plus rien n’appartient à personne. Si on veut survivre, on doit se servir. Ceux qui voudront rester honnêtes crèveront.

    – Pourquoi vous n’allez pas ailleurs ? Ce ne sont pas les hameaux désertés qui manquent dans les environs.

    – Ici, on savait qu’on trouverait de la compagnie, lance le plus jeune. Il paraît que sous ta salopette de paysanne se cache un corps de déesse.

    – Arrête tes conneries, Kev ! On n’est pas venus pour ça. Toi, la petite, magne-toi de répondre ou ça va chauffer !

    – La clé de l’appentis est sur la porte.

    – Merci ma belle.

    Le jeune Kevin m’adresse un regard qui signifie que je ne perds rien pour attendre. Je fais mine de reprendre ma tâche et je baisse les yeux. L’aîné est sorti et l’autre me surveille. Je m’approche pour répartir la paille à quelques mètres de lui. Il finit par se lasser de me contempler et se tourne vers la cour. Je me jette alors sur lui, la fourche en avant, et lui plante deux pointes dans la cuisse gauche. Ses genoux plient sous la douleur et il s’écroule à mes pieds. Il semble manquer d’air et ne parvient pas à crier. Je le contourne et cours jusqu’au râtelier planqué dans un placard de l’arrière-cuisine. J’attrape un des fusils de chasse avec lesquels mon père m’a initiée au tir. Je le charge avec des cartouches qui étaient cachées dans le bahut du salon. Je ressors, pénètre dans l’appentis et tire à deux reprises au-dessus de la tête du pillard qui lâche ce qu’il avait pris. Il a la trouille et son visage vire au gris.

    – Va récupérer ton frangin et barrez-vous d’ici. Sinon, je vous abats comme des lapins.

    Il a compris et se précipite dans l’étable pour ramasser son frère qui chiale maintenant comme un gamin. Il parvient à le relever et glisse son bras sous son épaule. Ils s’éloignent sur le chemin de terre pour rejoindre leur voiture qui était garée en contrebas de la départementale.

    Je ne peux me retenir de lancer un conseil :

    – Ne tarde pas trop à nettoyer sa plaie, sinon ça va s’infecter.

    Sans se retourner, l’aîné lève sa main gauche, le majeur pointé vers le ciel.

     

  • [Livre] U4 Jules

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    Résumé : Jules, Koridwen, Yannis et Stéphane ont entre 15 et 18 ans. Ils ont survécu au virus U4, qui a décimé 90 % de la population mondiale. Ils ne se connaissent pas, mais ils se rendent pourtant au même rendez-vous.
    "Je m'appelle Jules. Je vis à Paris. La ville que j'observe du haut de mon cinquième étage n'est plus la mienne. J'ai recueilli une petite fille, elle s'appelle Alicia, je ne sais pas quel âge elle a ni pourquoi elle a survécu. C'est pour elle que j'irai au rendez-vous. Parce qu'il nous reste peut-être une dernière chance de sauver le monde."

     

    Auteur : Carole Trebor

     

    Edition : Nathan Syros

     

    Genre : Young adult

     

    Date de parution : 27 août 2015

     

    Prix moyen : 17€

     

    Mon avis : J’ai l’impression que Jules a tendance à se déprécier. Peut être à force d’entendre les critiques de son entourage sur son addiction au jeu vidéo WOT. Bien sûr, en temps normal, ces critiques n’auraient pas eu d’incidence, à part convaincre le jeune homme de se décoller un peu de son écran, mais dans le monde apocalyptique qui est le sien maintenant que le virus U4 a fait ses ravages, Jules les perçoit différemment et plus négativement qu’elles n’ont du être formulées.
    Je ne sais pas trop à quoi joue l’armée. Au départ on peut se dire qu’ils cherchent juste à organiser les choses pour éviter une panique des survivants. Mais j’ai le sentiment qu’il y a plus. On est dans un pays où 90% de la population a été décimée, il ne reste que des militaires (qui ont dû pouvoir se protéger avec des équipements spécialisés) et des ados qui semblent mystérieusement immunisés contre le virus, et on a de plus en plus le sentiment que les militaires cachent quelque chose. Et c’est très énervant de les voir utiliser la force pour « prendre les choses en main » car ils ne se contentent pas d’organiser : ils exécutent, ils exploitent (ils font travailler les ados dans les rues), bref ils instaurent une vraie dictature, n’hésitant pas à monter les ados les uns contre les autres grâce à des avis de recherche pour des crimes montés de toutes pièces.
    J’ai vraiment du mal à comprendre leur attitude !
    Du coté des ados, on a bien sûr les délinquants qui tentent de profiter de la catastrophe, mais même pour ceux qui ne sont pas de « mauvais garçons », j’ai de sérieuses réserves. Je trouve que Jérôme et Vincent se prennent un peu trop pour des caïds. Ils exercent le contrôle sur leur communauté, comme s’ils étaient les nouveaux dirigeants du pays. Jérôme a d’ailleurs de plus en plus tendance à ordonner sans état d’âme la mise à mort de ceux qu’il considère comme des ennemis. Et Vincent porte bien son surnom : « le soldat », il obéit à son chef sans trop se poser de questions, n’hésitant pas à mettre ses copains en danger pour arriver à ses fins (même s’il pense toujours maîtriser la situation). Mais je ne crois pas qu’il agisse dans de mauvaises intentions, je pense qu’il s’est donné de trop grandes responsabilités et qu’il ne délègue pas pour que personne n’ait à porter le poids moral des décisions qu’il prend.
    Je me demande qui ou ce qui se cache réellement derrière Kronos parce que je trouve quand même aberrant qu’autant d’adolescents aient cru les yeux fermés à la possibilité de remonter dans le temps. Personnellement j’ai des doutes, je n’ai pas l’impression qu’on soit dans la fantasy, alors j’ai du mal à imaginer qu’on bascule comme ça dans une éventuelle remontée dans le temps. Je pense qu’il y a autre chose, mais je n’arrive pas à trouver quoi. Et j’essai de me rappeler que toutes les explications ne seront pas forcément dans ce tome !
    Dans la construction du livre, volonté de l’auteur ou erreur de typographie, on passe directement de la partie 2 à la partie 4… Il faudra que je voie si le même phénomène se reproduit dans les autres tomes !
    J’ai bien aimé ce tome et le style d’écriture de Carole Trebor, j’espère que les autres tomes me plairont tout autant !

    Un extrait : J’ai faim. Il n’y a plus rien à manger dans la cuisine.

    Plus d’eau courante depuis ce matin, plus de gaz depuis hier, plus d’électricité depuis trois jours. J’ai eu beau actionner tous les interrupteurs en tâtonnant sur le mur, à l’aveugle, essayer d’allumer les luminaires du séjour, pas de résultat, rien, aucune lumière. L’appartement est plongé dans l’obscurité dès la tombée de la nuit, vers 19 heures.

    J’ai heureusement retrouvé deux torches dans la commode de l’entrée. Il faut que je me procure d’urgence des piles pour les alimenter et des bougies pour compléter mon éclairage. Je dois aussi me faire une réserve de charbon de bois et d’allumettes pour entretenir le feu de la cheminée. Il commence à faire froid. Et j’ai besoin de vivres.

    Lego miaule sans arrêt. Il n’a plus de croquettes spéciales chatons. Il crève de faim lui aussi. Il déchiquette les fauteuils et les canapés pour se venger. Il lamine tout ce qui traîne, il m’a même piqué ma montre. Je me l’étais achetée avec mon argent de poche, par Internet. J’en avais fait un objet collector, en gravant moi-même au dos le sigle de WOT avec mon cutter. Impossible de remettre la main dessus.

    Il me faut donc aussi des piles pour le réveil, sinon je n’aurai même plus l’heure.

    J’ai tellement peur de sortir. Je dois affronter Paris avant que la nuit n’envahisse les rues.

    La ville que j’observe par la fenêtre n’est plus la mienne, cette ville est inacceptable.

    Hier, j’ai vu des hommes en combinaisons d’astronautes, avec des sortes de masques à gaz. Ils ramassaient les cadavres et les entreposaient dans leurs camions blindés. Tous ces corps, qu’ils entassent les uns sur les autres, où les emmènent-ils ? Vers les fosses communes ? Ou bien vont-ils les brûler ? Ces hommes, ils savent peut-être ce qui tue tout le monde. C’est quoi, ce putain de virus qui frappe et extermine en quelques heures ? Est-ce qu’ils pourraient me dire pourquoi moi, je ne suis pas mort ? J’ai eu envie de courir les rejoindre, mais je n’ai pas bougé de ma fenêtre, incapable de réagir. Leur demander secours, ça m’obligerait à admettre la réalité de ces morts, de ce silence, de cette odeur. Et ça, non, je ne le peux pas. Je ne le veux pas.

    Sortir.

    Il faut que je sorte, il faut que j’aille nous chercher à manger.

    Tant pis si j’attrape la maladie.

    Quitte à mourir, je préfère mourir de l’épidémie à l’extérieur que mourir de faim à l’intérieur.

    Mon grand-père m’avait dit de ne pas sortir. Mais peut-être suis-je immunisé contre le virus ? Peut-être suis-je en vie pour remplir la mission de Khronos avec les autres Experts ? Je dois tenir jusqu’au 24 décembre et me rendre sous la plus vieille horloge de Paris pour savoir si ce retour dans le passé est possible.

    C’est quoi, ce bruit dans le salon ?

    Merde, le grincement s’intensifie. J’y vais.

    C’est une nouvelle invasion de rats ! Ils sont énormes. Comment sont-ils entrés chez moi, ces saloperies de rongeurs ? Bon Dieu, quel cauchemar !

    – Cassez-vous, sales bêtes ! N’approchez pas !

    Mon timbre hystérique sonne bizarrement. Est-ce bien ma voix ? Ils sont hyper-agressifs, comme s’ils avaient muté génétiquement. Il y en a un qui s’agrippe à ma cheville, je balance la jambe pour qu’il me lâche. Un autre tente déjà de me mordre le pied. Ils me font trop flipper, je fonce vers la porte et je décampe hors de l’appartement.

    Je dévale les escaliers au milieu de bataillons de rats. Sur le palier du quatrième, je trébuche sur quelque chose de suintant, de visqueux, je glisse et me retrouve à quatre pattes sur le sol de marbre. Je ferme les yeux de toutes mes forces, horrifié par l’odeur de pourriture qui me pique la gorge et fait couler mes larmes, je n’ai jamais senti une odeur aussi atroce de ma vie. Respirer devient pénible. Je suis pris de tremblements violents qui m’empêchent de contrôler mes mouvements.

    Je sais contre quoi j’ai buté et je sais qu’il faut que je me relève d’urgence.

    Sinon je risque de mourir.

    La chose molle et spongieuse à laquelle je me suis heurté est un cadavre.

    Une victime du virus.

    Qui est peut-être déjà en train de me contaminer.