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Policiers/Thrillers - Page 21

  • [Livre] Je ne suis pas un serial killer

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    Résumé : 1) Ne pas regarder les gens trop longtemps.
    2) Ne pas éviscérer les animaux.
    3) Ne nourrir que des pensées positives.
    Son psy en convient, John Wayne Cleaver est sociopathe.
    À 15 ans, le charmant jeune homme fait de son mieux pour contrôler ses pulsions homicides, règles à l'appui. Ce qui n'a rien d'évident : sa mère tient le funérarium local. Là justement où finissent les victimes du «démon», serial killer décomplexé en pleine furie meurtrière dans sa ville. 
    John est peut-être le mieux placé - et pour cause ! - pour l'arrêter...

     

    Auteur : Dan Wells

     

    Edition : Pocket

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 14 avril 2011

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : J’ai beaucoup aimé ce thriller raconté du point de vue d’un adolescent qui se sait sociopathe, qui sait qu’il a tout pour devenir un tueur en série mais qui fait tout pour que cela n’arrive pas en suivant des règles de vie très strictes.
    A la place de John, je pense que j’aurais déjà pété un plomb avec la mère qu’il a : elle est intrusive, limite méchante dans ses remarques, elle semble manquer clairement d’intelligence… Elle demande quand même à son fils de faire un effort et d’arrêter d’être un sociopathe… et lui, comme son psy, ont beau lui expliquer qu’on ne choisit pas d’être sociopathe, elle ne veut rien entendre. A 15 ans, John n’a pas le droit de choisir ses déguisements pour Halloween, ni le droit de ne pas aller à une fête du lycée. Elle le harcèle littéralement, ce qui rend très difficile pour lui le respect de ses règles destinées à l’empêcher de plonger dans la psychose (et quand on sait que la sœur de John est partie de la maison à 17 ans et n’adresse quasiment plus la parole à sa mère, on se dit que ce n’est pas d’hier que cette dernière est ainsi).
    Ce qui dérange, que ce soit sa mère ou les autres personnes qu’il côtoie, c’est que John est fasciné par les serials killer : il les étudie, se documente, est quasiment incollable sur eux. Il explique d’ailleurs à son psy que son obsession pour eux n’a d’autre but que de lui montrer le comportement à ne pas suivre. Etudier les tueurs lui permet d’éviter d’en devenir un.
    Quand un tueur en série commence à faire des ravages dans la minuscule ville de John, il ne peut s’empêcher de l’étudier…et de le chercher…
    J’ai un peu regretté que l’histoire bascule dans le fantastique, je pense que l’histoire aurait été tout aussi exaltante et la situation dangereuse pour John s’il avait eu affaire à un tueur particulièrement tordu. Le recours au fantastique m’a donc un peu déçue, mais je comprends ce choix.
    On peut dire que l’enquête est en deux parties : d’abord John doit identifier le tueur, puis une fois cela fait, il doit trouver comment le mettre hors d’état de nuire.
    Les évènements s’enchainent assez vite et on n’a pas le temps de s’ennuyer. En parallèle à la traque du tueur qui sévit en ville, on se demande sans cesse si John va réussir à contenir celui qui sommeille en lui ou s’il va basculer.
    Lorsqu’on referme la dernière page, on n’a qu’une envie, se jeter sur la suite !

    Un extrait : Mrs Anderson était morte.

    Rien de spectaculaire, la vieillesse, voilà tout : un soir, elle était allée se coucher et ne s’était jamais réveillée. Aux infos, ils avaient parlé d’une mort paisible et digne, ce qui, certes, techniquement n’était pas faux, toutefois les trois jours qu’il avait fallu pour se rendre compte qu’on ne la voyait plus depuis un bout de temps retiraient beaucoup de dignité à la situation. Après s’être enfin décidée à lui rendre visite, la fille de Mrs Anderson avait trouvé son cadavre qui pourrissait et puait la charogne. Mais le pire, ce n’est pas le pourrissement, c’est les trois jours : trois jours pleins avant que quelqu’un finisse par se demander : «Au fait, elle est passée où, la vieille dame qui habite au bout de la rue, près du canal ? »

    Pour la dignité, on repassera.

    Paisible, en revanche… Sans aucun doute. D’après le coroner, elle était morte doucement dans son sommeil, le 30 août, autrement dit deux jours avant que le démon ne laisse Jeb Jolley les tripes à l’air dans une flaque derrière la laverie. À ce moment-là, on ne le savait pas encore, mais sur une période de près de six mois, cela faisait de Mrs Anderson la dernière personne de Clayton County à mourir de causes naturelles. Le démon se chargea de toutes les autres.

    Toutes… à une exception près.

    Nous réceptionnâmes le corps de la vieille dame le samedi 2 septembre, quand le médecin légiste en eut fini avec elle. Enfin, je devrais plutôt dire que c’est ma mère et tante Margaret qui réceptionnèrent le corps, pas moi. Ce sont elles qui dirigent le funérarium ; moi je n’ai que quinze ans. Après avoir passé presque toute la journée en ville à regarder la police nettoyer le merdier laissé par Jeb, je revins à la tombée de la nuit et rentrai discrètement par l’arrière au cas où ma mère se serait trouvée à l’entrée : je n’avais pas vraiment envie de la voir.

    Personne n’était encore arrivé dans la chambre mortuaire, il n’y avait que moi et le cadavre de Mrs Anderson. Il gisait, parfaitement immobile sur la table, recouvert d’un drap. Ça sentait la viande pourrie et l’insecticide ; l’unique ventilateur à hélices qui tournait furieusement au plafond n’aidait pas beaucoup. Sans bruit, je me lavai les mains à l’évier tout en m’interrogeant sur le temps dont je disposais, puis, doucement, je me mis à toucher le corps. La vieille peau, c’était ma préférée : sèche et ridée, avec la texture d’un parchemin. L’équipe de légistes ne s’était pas foulée pour nettoyer, sûrement trop occupée par Jeb, mais à l’odeur je savais qu’ils avaient au moins pensé à tuer les insectes. Après trois jours dans une chaleur de fin d’été, il devait y en avoir eu un paquet.

    Une femme ouvrit à la volée la porte de devant et entra, toute de vert vêtue, comme un chirurgien, avec sa blouse et son masque. Je me raidis, croyant qu’il s’agissait de ma mère, mais la femme se contenta de me jeter un regard avant de se diriger vers une table.

    « Salut, John », dit-elle en rassemblant quelques compresses stériles.

    Ce n’était pas ma mère, mais sa sœur Margaret  – elles étaient jumelles et lorsqu’elles portaient un masque, j’arrivais à peine à les distinguer.

     

    Cependant ma tante avait une voix un peu plus claire, un peu plus… tonique. Peut-être parce qu’elle n’avait jamais été mariée.

     

  • [Livre] Nymphéas noirs

    Une fois n'est pas coutume, voici ici l'avis de ma très chère Yas sur ce livre. Moi, ça m'a donné envie de le lire!

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    Résumé : Tout n'est qu'illusion, surtout quand un jeu de miroirs multiplie les indices et brouille les pistes. Pourtant les meurtres qui troublent la quiétude de Giverny, le village cher à Claude Monet, sont bien réels. Au coeur de l'intrigue, trois femmes : une fillette de onze ans douée pour la peinture, une institutrice redoutablement séduisante et une vieille femme aux yeux de hibou qui voit et sait tout. Et puis, bien sûr, une passion dévastatrice. Le tout sur fond de rumeur de toiles perdues ou volées, dont les fameux Nymphéas noirs. Perdues ou volées, telles les illusions quand passé et présent se confondent et que jeunesse et mort défient le temps.

     

    Auteur : Miche Bussi

     

    Edition : Pocket

     

    Genre : Thriller

     

    Date de parution : 20 janvier 2011

     

    Prix moyen : 8€

     

    L’avis de Yas : Commençons par le commencement : je n'avais pas l'intention de lire ce livre. J'avais déjà dévoré et adoré trois autres livres de Michel Bussi, mais, pour celui-ci, j'avais eu des échos selon lesquels il fallait être calé en peinture et en histoire de l'art pour le comprendre. Et puis on m'a assuré que non, et puis on me l'a proposé alors que je n'avais plus rien à lire… Et puis je l'ai dévoré en trois jours.

    Il y a beaucoup de personnages, mais on en suit trois en particulier : Fanette, 11 ans, déjà considérée par son entourage comme une grande artiste, qui rêve de faire un tableau suffisamment impressionnant pour remporter un concours de jeunes talents et partir dans une grande école d'arts à l'autre bout du monde. Stéphanie, institutrice du village, mariée sans être heureuse, qui rêve de s'enfuir loin avec un homme dont elle tomberait éperdument amoureuse. Et enfin, la narratrice, une vieille femme toujours habillée en noir, qui répond parfaitement au stéréotype de la personne âgée qui espionne tout, voit tout, entend tout, sait tout et se fond dans le paysage tellement bien que personne ne la voit. Puis, au milieu de tout ça, il y a un meurtre, celui de Jérôme Morval, un homme marié mais infidèle qui avait deux grandes passions : les femmes et les tableaux de Monet.

    On suit donc la vie de ces trois personnages ainsi que l'enquête concernant le meurtre de Jérôme. Celle-ci avance à pas hésitants, les enquêteurs essayant toutes les pistes possibles, en privilégiant certaines par instinct, d'autres grâce à de minces preuves. En bon lecteur, nous aussi, on enquête ! On recoupe les éléments, on se pose des questions, on fait des déductions et on tombe la tête la première dans les quelques fausses pistes et impasses que l'auteur s'est amusé à glisser dans cette enquête, tout fier que l'on est de penser avoir tout compris avant tout le monde. Pour la première fois dans un livre de Bussi, j'avais trouvé qui était le meurtrier, et je peux vous assurer que j'étais sacrément fière de moi ! Sauf qu'il y a autre chose à comprendre, un élément clé qui bouleverse toute l'histoire et qui, lorsqu'il nous est révélé, nous donne l'envie d'arrêter de lire pour recommencer depuis le début en ayant connaissance de cet élément. Sur cet élément clé, les indices sont relativement minces : quelques incohérences auxquelles on trouve rapidement une explication un peu bancale, une remarque ou deux qui nous font tiquer, puis hausser les épaules en nous disant "je vais continuer à lire, on verra si c'est fait exprès…". Sur ce point là, je me suis complètement fait avoir, je ne l'avais pas vu venir et suis restée sciée pendant un moment en le découvrant. Était-il possible de le deviner par soi-même ? Peut-être. C'est uniquement sur ce point là que je rejoins l'avis qu'on m'avait donné avant que je commence à le lire : être calé en histoire de l'art nous permet d'avoir les connaissances nécessaires pour repérer le plus gros indice de cet élément. Pour le reste, je ne suis pas d'accord, il n'y a pas besoin d'avoir une bonne culture générale pour lire, comprendre et apprécier ce livre.

    En conclusion, c'est un policier exactement comme je les aime : Une enquête hésitante qui avance tout doucement et permet au lecteur d'avancer en même temps, un meurtrier et un dénouement pas simples à trouver sans pour autant être impossibles et des personnages attachants pour lesquels on espère de toutes nos forces qu'ils arriveront au bout de leur rêve. Le contexte est magnifique et la précision, dès le début, que tous les lieux cités sont bien réels, nous donne envie de nous ruer à Giverny pour voir le moulin de la sorcière, la rivière, l'école, puis de filer au musée Marmottant à Paris pour admirer les fameux "Nymphéas" de Monet qui y sont exposés. Un policier poignant et attachant que l'on referme le cœur un peu serré et qui, mine de rien, nous trotte dans la tête pendant plusieurs jours après l'avoir reposé.


    Un extrait
     : Trois femmes vivaient dans un village.

    La première était méchante, la deuxième était menteuse, la troisième était égoïste.

    Leur village portait un joli nom de jardin. Giverny.

    La première habitait dans un grand moulin au bord d’un ruisseau, sur le chemin du Roy ; la deuxième occupait un appartement mansardé au-dessus de l’école, rue Blanche-Hoschedé-Monet ; la troisième vivait chez sa mère, une petite maison dont la peinture aux murs se décollait, rue du Château-d’Eau.

    Elles n’avaient pas non plus le même âge. Pas du tout. La première avait plus de quatre-vingts ans et était veuve. Ou presque. La deuxième avait trente-six ans et n’avait jamais trompé son mari. Pour l’instant. La troisième avait onze ans bientôt et tous les garçons de son école voulaient d’elle pour amoureuse. La première s’habillait toujours de noir, la deuxième se maquillait pour son amant, la troisième tressait ses cheveux pour qu’ils volent au vent.

    Vous avez compris. Toutes les trois étaient assez différentes. Elles possédaient pourtant un point commun, un secret, en quelque sorte : toutes les trois rêvaient de partir. Oui, de quitter Giverny, ce si fameux village dont le seul nom donne envie à une foule de gens de traverser le monde entier juste pour s’y promener quelques heures.

    Vous savez bien pourquoi. A cause des peintres impressionnistes.

    La première, la plus vieille, possédait un joli tableau, la deuxième s’intéressait beaucoup aux artistes, la troisième, la plus jeune, savait bien peindre. Très bien, même.

    C’est étrange, vouloir quitter Giverny. Vous ne trouvez pas ? Toutes les trois pensaient que le village était une prison, un grand et beau jardin, mais grillagé. Comme le parc d’un asile. Un trompe-l’œil. Un tableau dont il serait impossible de déborder du cadre. En réalité, la troisième, la plus jeune, cherchait un père. Ailleurs. La deuxième cherchait l’amour. La première, la plus vieille, savait des choses sur les deux autres.

    Une fois pourtant, pendant treize jours, pendant treize jours seulement, les grilles du parc s’ouvrirent. Très précisément, du 13 mai au 25 mai 2010. Les grilles de Giverny se levèrent pour elles ! Pour elles seules, c’est ce qu’elles pensaient. Mais la règle était cruelle, une seule d’entre elles pouvait s’échapper. Les deux autres devaient mourir. C’était ainsi.

    Ces treize jours défilèrent comme une parenthèse dans leur vie. Trop brève. Cruelle, aussi. Cette parenthèse s’ouvrit par un meurtre, le premier jour, et se termina par un autre, le dernier jour. Bizarrement, les policiers ne s’intéressèrent qu’à la deuxième femme, la plus belle ; la troisième, la plus innocente, dut enquêter toute seule. La première, la plus discrète, put tranquillement surveiller tout le monde. Et même tuer !

    Cela dura treize jours. Le temps d’une évasion.

    Trois femmes vivaient dans un village.

    La troisième était la plus douée, la deuxième était la plus rusée, la première était la plus déterminée.

    A votre avis, laquelle parvint à s’échapper ? 

    La troisième, la plus jeune, s’appelait Fanette Morelle ; la deuxième s’appelait Stéphanie Dupain ; la première, la plus vieille, c’était moi.

     

     

  • [Livre] Petits goûters entre amies

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    Résumé : Callie élève seule sa fille de six ans. Elle est heureuse de pouvoir compter sur le soutien de Suzie, sa voisine et meilleure amie, mère modèle de trois garçons. Mais une nouvelle habitante au comportement étrange s’installe dans leur rue. Leur vie aux apparences bien tranquilles va basculer... 

     

    Auteur : Louise Millar

     

    Edition : France Loisirs

     

    Genre : Suspense

     

    Date de parution : 19 mars 2015

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Dans le premier chapitre on se dit que franchement, si le plus gros problème de Callie est d’annoncer à sa meilleure amie qu’elle a l’intention de retourner travailler après 5 ans d’arrêt pour raison médicale (sa petite fille avait une malformation cardiaque à la naissance), et bien, nous, sa vie, on la veut bien.
    Quant à Suzie que dire de sa vie parfaite : trois adorables petits garçons, un mari issu de la haute société britannique…Bon les grands espaces de son Amérique natale lui manquent bien un peu, mais à part ça…
    en revanche cette nouvelle voisine, qui vient de s’installer et de trouver du travail à l’école des tous petits est franchement bizarre : paranoïaque, ne supportant pas le moindre bruit, on a envie de lui dire d’aller s’installer dans un igloo en Alaska et de faire attention sur quel ton elle demande aux ours polaires de grogner moins fort.
    Et puis au fil des chapitres, il semblerait que tout s’effrite : La vie de Suzie n’est pas si parfaite que ça : son petit garçon, l’ainé, n’est pas si mignon mais plutôt une vraie petite terreur, son mari la délaisse, il semble avoir l’intention de mettre ses petits anges dans l’horrible internat qu’il a pourtant lui-même tant détesté…
    Callie de son coté semble étouffer littéralement dans cet univers où il n’y a que sa fille et son amie. Son ex mari, Tom, bien que souvent odieux avec elle, prend en charge toutes les factures pour qu’elle puisse rester au foyer s’occuper de leur fille et n’apprécie pas qu’elle envisage de reprendre un travail (pendant que lui voyage aux 4 coins du monde pour effectuer des reportages). Et puis il y a aussi les autres mamans du quartier qui l’ont mise à l’écart sans qu’elle comprenne pourquoi.
    Quand les ennuis s’accumulent, l’évidence saute aux yeux de Callie : la nouvelle voisine est folle et tout est de sa faute.
    Après tout n’a-t-elle pas un passé douteux ?
    Mais au fil des incidents le doute s’installe. Chaque chapitre est raconté du point de vue de l’une des protagonistes : Callie, Suzie, et la nouvelle voisine : Debs. Et s’il est évident pour le lecteur que l’une d’elle est effectivement folle, impossible de savoir laquelle des trois. Chacune raconte l’histoire comme elle la perçoit et on se pose sans cesse des questions :
    - Les incidents sont-ils réels ou seulement dans la tête de Debs ?
    - Les incidents sont-ils réels ou bien Suzie les exagèrent-elle parce qu’elle se sent seule ?
    - Les incidents sont-ils réels ou exagérés par Callie, qui vit dans la peur que quelque chose n’arrive à sa fille ?
    Au fur et à mesure que les indices nous sont révélés, on cerne un peu plus chacune de ces trois personnalités. Mais ce n’est vraiment que dans les derniers chapitres que l’on est enfin face à la vérité. Une vérité qui force un peu trop sur les coïncidences, à laquelle on s’attendait un peu, sans avoir imaginer l’ampleur qu’elle revêtait.

     

    Un extrait : Le soleil chaud me picote le visage, ce qui m’est légèrement désagréable. Je tâche de me détendre en me focalisant sur les sons qui m’entourent. J’ai pris l’habitude de relever les bruits intéressants et de les garder pour plus tard, en cas de nécessité. Ils sont tous répertoriés dans ma tête, du plus faible fredonnement au plus charmant murmure du vent. Aujourd’hui, j’enregistre le chant d’un pinson, le bruissement des brasses de Suzy dans l’eau, le craquement d’une branche sous un écureuil. 

    Rien à faire. J’ai beau étirer mes jambes le plus possible, la tension qui noue mes fesses et mes hanches ne se relâche pas. Mon esprit mouline à toute vitesse. Il faut que j’en parle à Suzy. Je ne peux pas garder le silence plus longtemps; je lui cache déjà suffisamment de choses. Je me redresse une nouvelle fois et la cherche du regard. Elle a traversé l’étang et revient vers la rive.
    Oh, et merde ! Maintenant que je suis là… Je me lève et me dirige vers les marches, puis descends avec précaution dans les eaux sombres. Un panneau indique qu’il y a des tortues d’eau douce et des écrevisses là-dessous.

    — Bravo, c’est bien ! lance Suzy en applaudissant pour m’encourager.

    Je manifeste mon scepticisme en roulant des yeux. L’eau est froide et boueuse. Je frissonne, sentant le froid m’encercler au fur et à mesure que mon corps s’immerge.

    — Arrête d’hésiter et nage ! hurle mon amie.

    Son fort accent américain ricoche sur l’eau, si bien que la femme maître-nageur se tourne de son côté.
    Je m’élance loin du bord. La natation n’a jamais été mon fort. Suzy se rapproche de moi en dos crawlé, les yeux braqués vers le ciel et la cime des arbres.

    — C’est tellement agréable ! La semaine prochaine, je nous réserve une journée au spa dont tu m’as parlé à Covent Garden.

    Mes jambes sont attirées par le fond, je bois la tasse et tousse en me débattant.

    Je n’ai pas pied.

     

  • [Livre] Hanna était seule à la maison

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    Résumé : En très peu de temps, deux affaires de meurtre échouent sur le bureau du commissaire Conny Sjöberg. Une jeune fille, issue d'une famille à problèmes, est étranglée sur un ferry qui fait la liaison entre Stockholm et la Finlande. En faisant son jogging, l'inspectrice criminelle Petra Westman découvre au milieu des buissons un nourrisson dans un état d'épuisement avancé, à proximité du cadavre d'une femme sans aucun papier d'identité. Au même moment, une petite fille de 3 ans se réveille et découvre qu'elle est seule chez elle. Son papa est en voyage à l'étranger et sa maman est sortie avec son petit frère. Hanna se retrouve sans personne, enfermée à clé dans l'appartement familial. Et le temps s'écoule...

    Auteur : Carin Gerhardsen

    Edition : Fleuve noir

    Genre : Thriller

    Date de parution : 09 février 2012

    Prix moyen : 8€

    Mon avis : On est ici en présence d’un thriller haletant. Au début de la lecture, il ne semble y avoir aucun lien ou presque entre la plupart des événements. Le lien entre Hanna et l’un des meurtres se devine assez vite, bien qu’il n’y ait aucune certitude, mais il ne semble pas y en avoir entre les deux meurtres, ni entre les meurtres et les actes d’Elise, la petite sœur de la victime du Ferry, d’autant plus qu’elle n’était pas à bord.
    Ce que j’ai apprécié dans ce livre, c’est que le lecteur découvre les indices en même temps que la police. Aucun des deux n’en sait plus que l’autre. A chaque indice qui est découvert, il se passe assez de temps, avant que la police ne comprenne ce qu’il signifie pour que le lecteur puisse se faire sa propre opinion.
    L’enquête avance relativement lentement, ce qui est plus réaliste que certains livres où les enquêteurs ont des soudaines illuminations et trouvent la solution en deux coups de cuillère à pot.
    Et au fur et à mesure des enquêtes qui sont menées en parallèle, les indices se recoupent, des noms apparaissent dans les deux affaires, des trajets sont similaires… Mais comme il s’agit de deux enquêtes bien distinctes, il va encore falloir du temps aux enquêteurs pour se rendre compte qu’elles sont peut être liées : mais comment ?
    En parallèle des enquêtes policières, on suit Hanna, qui s’est réveillée seule, enfermée chez elle et qui, à 3 ans, est persuadée que sa maman l’a abandonnée pour aller vivre ailleurs avec ce nouveau petit frère qui ne fait que pleurer. Bien qu’elle soit très dégourdie, les petits accidents s’accumulent et à chaque fois on se dit que le prochain sera le bon, qu’Hanna ne sera pas retrouvée assez vite. Mais pour être retrouvée, il faut être cherchée. Or personne ne sait qu’une petite fille est seule dans un appartement. Personne à part la vieille femme qu’Hanna a appelée en appuyant au hasard sur les touches du téléphone. Mais si c’est déjà un miracle que cette personne prenne l’enfant au sérieux, ce n’est pas le cas de la police, qui pense ne pas avoir de temps à perdre avec une retraitée hystérique qui leur raconte une histoire invraisemblable : car qui laisserait une enfant si jeune toute seule ?
    La vieille dame est vraiment tenace, et la police a de la chance que l’histoire se passe en Suède, parce qu’aux Etats-Unis, elle aurait déjà alerté la presse sur le refus de la police de venir en aide à un enfant en danger.
    A coté des ces affaires strictement professionnelles, nous avons un petit aperçu de la vie privée des enquêteurs, mais qui ne prend pas le pas sur le reste du récit.
    En revanche je suis restée sur ma faim sur un point : une des enquêtrices, Petra, a été violée plusieurs mois auparavant semble-t-il. Son agresseur a été arrêté mais tout laisse à penser qu’ils étaient 2. Elle reçoit des appels anonymes etc… A un moment, son supérieur, suite à un ensemble d’événements récents, en déduit que le 2nd homme fait parti de la police. Petra a un doute dont elle ne fait part à personne et qu’elle essaie de vérifier… et ça s’arrête là : on ne sait pas si son doute est confirmé, on ne sait pas si des recherches sont engagées par son supérieur, on ne connaît pas l’aboutissement des événements qui les ont poussés à soupçonner un flic… bref… j’aurais aimé qu’il y ait un terme à cette histoire.
    Mais en dehors de ce détail, ce livre est vraiment bien construit et on essaie de lire le plus vite possible, comme pour essayer de choper le tueur plus vite !

    Un extrait : — Tu fais quoi, ce soir ?

    Elise est presque obligée de crier pour se faire entendre à cause du brouhaha général.

    — J’en sais rien, lance Jennifer. Je vais peut-être voir Jocke. Ou pas. En fait, je m’en fous.

    Jennifer a un mec. Elise sort avec des garçons de temps en temps, mais Jennifer, elle, a un vrai mec. Un homme.

    Jocke a vingt-quatre ans et une barbe. Les copains d’Elise ont à peine mué. Ils ont quelques poils de barbe par-ci, par-là, mais ils sont ridicules et infantiles. Jennifer, elle, a un vrai mec, et elle ne sait même pas si elle a envie de le voir ! En plus, il est gentil et attentionné. Elise n’a jamais rencontré un type pareil. Une fois, elle les a vus tous les deux ensemble, de loin. Jocke la tenait par la taille, comme si Jennifer lui appartenait. Comme pour dire : c’est ma nana et j’en suis fier. Et puis il l’a regardée dans les yeux, longtemps, en lui passant la main sur la joue, tout doucement, comme si elle était aussi fragile que de la porcelaine. Elise aurait bien voulu avoir quelqu’un comme lui.

    — Comment ça, tu t’en fous ? Qu’est-ce que tu veux dire ?

    Jennifer finit son verre cul sec et Elise s’empresse de faire de même.

    — Je sais pas.

    — Vous êtes plus ensemble ?

    — Peut-être ou peut-être pas… Il est trop… Laisse tomber. T’en veux un autre ?

    — Ouais. Je veux bien une clope aussi.

    Jennifer se lève et se fraie un chemin jusqu’à la table entre les chaises et les corps qui se balancent. Dagge étire ses grands bras et la saisit fermement par les hanches avant de l’asseoir sur ses genoux. Mais elle se relève d’un bond, attrape une bouteille et un paquet de cigarettes avant de regagner sa place près du réfrigérateur.

    — Minute papillon ! tu vas pas t’en tirer comme ça, grogne Dagge. Tu me piques mon pinard et j’ai même pas droit à un petit bisou ?

    Dagge est blond, un peu rougeaud, il a les yeux injectés de sang et de grandes oreilles poilues. Bizarrement, il porte une chemise à carreaux plutôt mode, mais son jean est plein de taches de peinture et pue la vieille crasse incrustée. Elise peut le sentir de l’autre bout de la cuisine.

    — Je t’en ferai peut-être un si tu es sage, rétorque Jennifer pendant qu’elle remplit son verre et celui de sa sœur de vin blanc tiède.

    Elise frissonne de dégoût à la seule idée d’avoir à effleurer ce jean dégueulasse.

    — C’est moi qui mérite un bisou, c’est mon vin, merde ! braille la mère.

    La honte, comme toujours. Plus facile de la gérer quand elle est à moitié déprimée. Ce soir, elle est d’humeur positive et joyeuse. Elle a envie de se faire remarquer. Elise essaie d’oublier qu’elle est là.

    — Je te rappelle que tu me devais une bouteille, lance Dagge.

    Et la conversation se met à tourner sur les dettes, l’injustice, et soudain, tout le monde autour de la table se retrouve à faire les comptes.

    Jennifer propose une cigarette à Elise et en prend une pour elle, avant de glisser le paquet dans son décolleté puisque personne ne l’a réclamé pour l’instant. Elise allume sa cigarette avec la précédente et la tend à sa sœur.

    — Tu sors, ce soir ? l’interroge Jennifer.

    Elise vide la moitié de son verre en grimaçant.

    — Carrément, confirme-t-elle. Avec Nina. Tu peux me prêter du fric ?

    — Dans tes rêves, j’ai pas une thune, moi. T’as qu’à leur demander. Apparemment, ils ont les poches pleines ce soir.

    Jennifer pointe le menton en direction de la table. Elle vide son verre et se lève, visiblement prête à partir. Elise sent qu’elle a les joues qui chauffent. Le vin lui donne le sourire. Et du courage.

    — Jennifer, attends !

    — Quoi ?

    — Tu veux pas me prêter ta veste ?

    — Quelle veste ?

    — Ta veste en cuir. La Gina Tricot.

    — Et je vais mettre quoi, moi ?

    — Je sais pas, autre chose. S’il te plaît, juste pour ce soir.

    Jennifer, peut-être ivre elle aussi, cède sans plus de discussion.

    — Ça marche. Mais tu me la rends demain.

    — Je te le promets. T’es trop sympa. 

    — Elle est dans l’entrée, précise Jennifer. J’y vais.

     

  • [Livre] Un avion sans elle

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    Résumé : 23 décembre 1980. Un crash d'avion dans le Jura. Une petite libellule de 3 mois tombe du ciel, orpheline. Deux familles que tout oppose se la disputent. La justice tranche : elle sera Émilie Vitral. Aujourd'hui, elle a 18 ans, la vie devant elle mais des questions plein la tête. Qui est-elle vraiment ? 
    Dix-huit ans que Crédule Grand-Duc, détective privé, se pose la même question. Alors qu'il s'apprête à abandonner, la vérité surgit devant ses yeux, qu'il referme aussitôt, assassiné. 
    Il ne reste plus qu'un vieux carnet de notes, des souvenirs, et Marc, son frère, pour découvrir la vérité...


    Auteur : Michel Bussi

    Edition : Pockett

    Genre : Thriller

    Date de parution : 12 janvier 2012

    Prix moyen : 8€

    Mon avis : Ce livre est à déconseiller aux inconditionnels de Columbo. En effet, pas question ici de connaître la solution avant les dernières pages. Difficile aussi de la deviner, puisque l’indice principal, primordial, connu de certains protagonistes, ne nous est dévoilé qu’à la presque toute fin. Un peu plus Poirot que Columbo donc.
    J’avoue que c’est parfois un peu agaçant de n’avoir pas les indices nécessaires pour essayer de comprendre, comme si l’auteur ne se pensait pas capable de distiller des indices susceptibles de résoudre l’intrigue mais sans trop de facilité non plus. Alors il préfère attendre les dernières pages pour sortir l’As de sa poche, l’indice, qui est tellement éclairant qu’on ne peut même plus, en fait, l’appeler un indice.
    Pour ceux qui aiment résoudre les énigmes en lisant, c’est frustrant.
    Cependant, l’écriture de Michel Bussi fait que, malgré cela, le roman devient très vite addictif.
    Au fil de la lecture, on passe de certitudes en incertitudes. La justice s’est trompée, le bébé est Lyse-Rose ; Ah oui mais non, finalement c’est bien Emilie… Quoi que…
    Et ainsi de suite…

    On suit l’enquête de Marc avec impatience, on n’arrive pas à tourner les pages assez vite pour assouvir notre soif de vérité, de réponses.
    Nos sentiments pour les personnages balancent entre compassion, indignation, espoir…
    Je suis incapable de parler vraiment du style d’écriture ce qui veut dire qu’il est bon : Je n’aurais pas pu me plonger aussi profondément dans un roman s’il avait été truffé de fautes de syntaxe, si les dialogues n’avaient pas été crédibles, si le style avait été lourd… C’est comme ça, je ne remarque vraiment le style que s’il ne me plait pas.
    Bussi a décidé de faire dans la caricature : les riches sont odieux, les pauvres sont humbles, vaillants et gentils, le détective est limite obsessionnel, et Lylie « la libellule » est limite parfaite… Avec un auteur moins doué, cet étalage de stéréotypes aurait été rédhibitoire… Mais ici, ça passe comme une lettre à la poste.

    Lylie, même si elle est au centre de l’intrigue est quasi absente du livre : d’elle, on n’a que quelques messages, de très brefs passages, des souvenirs… Elle est quasi absente mais omniprésente.

    Au final c’est un roman dont le point fort est le style prenant mais j’ai regretté de ne pas avoir les indices nécessaires pour résoudre l’enquête et le coté caricatural des personnages.

    Un extrait : 23 décembre 1980, 00 h 33

    L’Airbus 5403 Istanbul-Paris décrocha. Un plongeon de près de mille mètres en moins de dix secondes, presque à la verticale, avant de se stabiliser à nouveau. La plupart des passagers dormaient. Ils se réveillèrent brusquement, avec la sensation terrifiante de s’être assoupis sur le fauteuil d’un manège de foire.

    Ce furent les hurlements qui brisèrent net le fragile sommeil d’Izel, pas les soubresauts de l’avion. Les bourrasques, les trous d’air, elle en avait l’habitude, depuis presque trois ans qu’elle enchaînait les tours du monde pour Turkish Airlines. C’était son heure de pause. Elle dormait depuis moins de vingt minutes. Elle avait à peine ouvert les yeux que sa collègue de garde, Meliha, une vieille, penchait déjà vers elle son décolleté boudiné.

    — Izel ? Izel ? Fonce ! C’est chaud. C’est la tempête, dehors, il paraît. Zéro visibilité, d’après le commandant. Tu prends ton allée ?

    Izel afficha l’air lassé de l’hôtesse expérimentée qui ne panique pas pour si peu. Elle se leva de son siège, réajusta son tailleur, tira un peu sur sa jupe, admira un instant le reflet de son joli corps de poupée turque dans l’écran éteint devant elle et avança vers l’allée de droite.

    Les passagers réveillés ne hurlaient plus, mais ouvraient des yeux plus étonnés qu’inquiets. L’avion continuait de tanguer. Izel entreprit de se pencher avec calme sur chacun d’entre eux.

    — Tout va bien. Aucun souci. On traverse simplement une tempête de neige au-dessus du Jura. On sera à Paris dans moins d’une heure.

    Le sourire d’Izel n’était pas forcé. Son esprit vagabondait déjà vers Paris. Elle devait y rester trois jours, jusqu’à Noël. Elle était excitée comme une gamine à l’idée de jouer les Stambouliotes libérées dans la capitale française.

    Ses attentions rassurantes se posèrent successivement sur un garçon de dix ans qui s’accrochait à la main de sa grand-mère, sur un jeune cadre à la chemise froissée qu’elle aurait volontiers recroisé le lendemain sur les Champs-Elysées, sur une femme turque dont le voile, sans doute mal ajusté à cause du réveil brutal, lui barrait la moitié des yeux, sur un vieil homme recroquevillé sur lui-même, les mains coincées entre ses genoux, qui lui jetait un regard implorant…

    — Tout va bien. Je vous assure.

    Izel progressait calmement dans l’allée quand l’Airbus pencha à nouveau sur le côté. Quelques cris fusèrent. Un jeune type assis sur la droite d’Izel, qui tenait à deux mains un baladeur-cassette, cria d’un air faussement enjoué :

    — C’est pour quand, le looping ?

    Quelques rires timides lui répondirent, immédiatement couverts par les cris d’un nourrisson. L’enfant était allongé dans un cosy juste devant Izel. A quelques mètres. Le regard de l’hôtesse de l’air se posa sur la petite fille âgée à peine de quelques mois, elle portait une robe blanche à fleurs orange qui dépassait d’un pull de laine écru en jacquard.

    — Non, madame, intervint Izel. Non !

    La mère, assise juste à côté, détachait sa ceinture pour se pencher vers sa fille.

    — Non, madame, insista Izel. Vous devez rester attachée. C’est impératif. C’est…

    La mère ne se donna même pas la peine de se retourner, encore moins de répondre à l’hôtesse. Ses longs cheveux dénoués tombaient dans le cosy. Le bébé hurla, plus fort encore.

    Izel hésita sur la conduite à tenir, se rapprocha.

    L’avion décrocha encore. Trois secondes, mille nouveaux mètres, peut-être.

    De brefs cris explosèrent, mais la plupart des passagers gardèrent le silence. Muets. Conscients que le mouvement de l’avion n’était plus simplement provoqué par de simples rafales hivernales. Sous l’effet de la secousse, Izel tomba sur le côté. Son coude enfonça le baladeur-cassette dans la poitrine de son propriétaire, sur sa droite, lui coupant le souffle. Elle ne prit même pas le temps de s’excuser, se redressa. Juste devant elle, la fillette de trois mois pleurait toujours. Sa mère se penchait à nouveau vers elle, commençait à détacher la ceinture de sécurité de l’enfant…

    — Non, madame ! Non…

    Izel pesta. Elle tira machinalement sa jupe relevée sur son bas filé. Quelle galère ! Elle les aurait bien mérités, ses trois jours et deux nuits de plaisirs à Paris !

    Tout alla alors très vite.

    Un bref instant, Izel crut entendre, en écho, un autre cri de nourrisson, quelque part dans l’avion, un peu plus loin sur sa gauche. La main troublée du type au baladeur frôla le nylon gris de ses cuisses. Le vieil homme turc avait passé une main autour de l’épaule de la femme voilée et levait l’autre vers Izel, suppliante. La mère, juste devant elle, debout, tendait les bras pour serrer sa fille libérée des sangles de son cosy.

    Ce furent les dernières images avant la collision, avant que l’Airbus ne défie la montagne.

    Le choc propulsa Izel dix mètres plus loin, contre l’issue de secours. Ses deux adorables petites jambes gainées de noir se tordirent comme les membres d’une poupée de plastique entre les mains d’une fillette sadique ; sa mince poitrine s’écrasa contre le fer-blanc ; sa tempe gauche explosa contre l’angle de la portière.

    Izel fut tuée sur le coup. En cela, elle fut la plus chanceuse.

    Elle ne vit pas les lumières s’éteindre. Elle ne vit pas l’avion se tordre comme une vulgaire canette de soda au contact d’une forêt d’arbres qui semblaient un à un se sacrifier pour ralentir la course folle de l’Airbus.

    Quand tout s’arrêta, enfin, elle ne sentit pas l’odeur de kérosène se répandre. Elle ne ressentit aucune douleur lorsque l’explosion déchiqueta son corps, ainsi que ceux des vingt-trois passagers les plus proches. 

    Elle ne hurla pas lorsque les flammes envahirent l’habitacle, piégeant les cent quarante-cinq survivants.

     

  • [Livre] 48h pour mourir

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    Résumé : Le téléphone sonne: une voix étrange vous pose une devinette. Vous avez 48h pour trouver la réponse, sinon quelqu'un mourra...
    Une série de meurtres abominables est perpétrée : un maniaque fait subir à des femmes les plus terribles tortures puis les tue après 48 heures... si personne n'apporte de réponse à l'énigme qu'il a posée. 
    La jeune inspectrice Sabine Nemez se retrouve cruellement mêlée à l'affaire : sa mère est une des victimes du tueur fou. Sneijder, un profiler aussi génial qu'insupportable, l'associe à l'enquête. Quel esprit dérangé, s'interrogent-ils, est capable de commettre de tels crimes ? 
    C'est alors que Sabine découvre qu'un livre pour enfants sert de modèle aux crimes...


    Auteur : Andreas Gruber

    Edition : France loisirs

    Genre : Thriller

    Date de parution : 2014

    Prix moyen : 21€

    Mon avis : Ce bouquin est flippant ! Sérieusement ! Après avoir lu le prologue, j’ai fais le tour de la maison pour vérifier que le tueur ne s’était pas introduit chez moi (et j’exagère à peine).
    L’intrigue est bien menée et des indices disséminés dans tout le bouquin. On sait assez vite qui est le tueur, quasiment dès le début, ce qui nous maintient en haleine est sa motivation, l’élément déclencheur de sa violence…
    Malgré les indices, je n’ai pas compris la relation entre deux personnages, Anne et Rose, avant d’avoir le nez dessus et à ce moment là, je me suis dit qu’en fait c’était évident et que l’auteur nous avait mis des indices gros comme une maison, mais à ce moment là, on se pose tellement de questions sur un autre aspect de l’intrigue qu’on ne fait absolument pas attention… Enfin, moi en tout cas !
    L’angoisse monte au fil du roman encore plus une fois que les enquêteurs connaissent l’identité du tueur, ce qui se comprend, quoi de plus frustrant que de connaître l’identité du meurtrier, de savoir pourquoi il fait cela, et de ne pas réussir à lui mettre la main dessus parce qu’on a « raté » un élément ?

    J’ai beaucoup aimé Sabine, la flic et Sneijder, le profiler, même s’il déteste ce titre qu’il juge bon pour les séries TV américaines et qu’il est plein de névroses et d’arrogance.
    Je ne peux pas en dire plus sur les personnages sans en dévoiler plus sur l’intrigue mais disons qu’au moins une des victimes n’a eu, à mon sens, que ce qu’elle méritait.
    Une chose est sure, si ce livre est le premier de l’auteur à être traduit en français, je n’hésiterais pas à lire d’autres titres si on a la chance de les voir traduits à leur tour.


    Un extrait : Le miroir tourna, si bien qu’elle aperçut son propre visage un instant.
    Et elle ne voyait…que son visage !
    La peur, la panique et la folie montèrent en elle.

    - Non ! cria-t-elle. Non, je vous en prie…Oh mon Dieu, non !

    Ses pensées s’entrechoquèrent. Soudain, tout prenait sens : ce qu’il avait dit à propos de sa peau, de ses reins, de sa colonne vertébrale, de la claustrophobie et de l’accès à ses veines. On n’avait effectivement plus accès à ses veines.
    Elle voyait, dans le miroir devant elle, un coffrage en bois, haut de deux mètres et large de soixante centimètres environ, à l’intérieur duquel avait été coulé du béton. Seul son visage émergeait de la surface grise, du front jusqu’au menton…plus deux tuyaux à hauteur des hanches.

    - Non ! hurla-t-elle. Non, je vous en prie !

    Elle se mit à pleurer. Ses muscles se contractèrent involontairement, comme pour faire sauter le béton, mais plus elle essayait de bouger, plus elle s’essoufflait. Elle était dans l’incapacité de faire bouger sa cage thoracique.

    - Au secours !

    Il fallait que quelqu’un vienne casser le bloc de béton à coups de marteau avant qu’elle ne perde la raison.

    - Au secours ! cria-t-elle le plus fort possible, cherchant à reprendre haleine. Je vous en prie, libérez-moi. S’il vous plait !

    Elle ne lui ferait rien. Elle lui promit que, s’il la libérait tout de suite, elle ne le dénoncerait même pas. Elle oublierait et pardonnerait tout.

    - Je vous en prie !

    Il revint devant elle. Elle remarqua, à la lueur de la lampe frontale, qu’il hochait la tête.

    - A titre préventif, je t’ai injecté un antibiotique à large spectre. Et puis, à l’occasion, je t’apporterai des cachets de vitamines, mais ça ne t’empêchera pas de souffrir de rachitisme. (Il lui éclaira la figure) Et tes yeux vont être atteints de photophobie.

    Elle ne comprit tout d’abord pas ce qu’il voulait dire, car elle n’entendait que son propre halètement et, en pensée, ne cessait de contempler son visage. Mais il répéta ce qu’il venait de dire.
    Carence en vitamines et photosensibilité ? Ces deux phénomènes ne se manifesteraient qu’au bout de plusieurs semaines. Combien de temps comptait-il la tenir prisonnière de ce bloc de béton ?

  • [Livre] Maman a tort

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    Résumé : Quand Malone, du haut de ses trois ans et demi, affirme que sa maman n’est pas sa vraie maman, même si cela semble impossible, Vasile, psychologue scolaire, le croit.
    Il est le seul… Il doit agir vite. Découvrir la vérité cachée. Trouver de l’aide.
    Celle de la commandante Marianne Augresse par exemple. Car déjà les souvenirs de Malone s’effacent.
    Ils ne tiennent plus qu’à un fil, qu’à des bouts de souvenirs, qu’aux conversations qu’il entretient avec Gouti, sa peluche.
    Le compte à rebours a commencé.
    Avant que tout bascule. Que l’engrenage se déclenche. Que les masques tombent.
    Qui est Malone ?


    Auteur : Michel Bussi

    Edition : Presse de la cité

    Genre : Thriller

    Date de parution : 7 mai 2015

    Prix moyen : 21€50

    Mon avis : Autant le dire de suite, je me suis complètement fait avoir. Enfin pas tout à fait mais presque.
    Disons que j’avais un soupçon sur l’identité de la maman de Malone, puis j’ai douté, puis j’ai soupçonné quelqu’un d’autre. Je n’avais pas tort, ni dans mon premier soupçon, ni dans le second. La vérité était juste plus complexe que je ne l’avais soupçonnée.
    En revanche, j’avais assez rapidement compris qu’il y avait un lien entre les diverses affaires que mène Marianne, mais il m’a fallu un moment pour comprendre exactement quel lien.
    Il y a eu des points que je n’avais pas du tout anticipés, mais, et ça fait partie d’un des seuls reproches que j’ai à faire à ce livre, les indices ne nous sont pas donnés au moment où les divers enquêteurs, professionnels ou non, les découvrent. On nous dit qu’un indice vient de leur faire comprendre quelque chose de fondamental et c’est au moment où ils révèlent ce quelque chose qu’on nous dit : ils avaient compris ça parce que à ce moment là, rappelez vous, ils avaient trouvé un indice et bien cet indice c’était ça ! Et je n’en démords pas, si j’avais connu l’indice, j’aurais compris aussi, non mais !
    Au début du livre, j’ai été un peu déroutée par le style d’écriture, d’autant plus qu’on commence (ou presque) par un long dialogue sans phrase narrative. Mais très vite, on se fait à l’écriture et une fois dans l’histoire, ce qui se produit très vite, une vingtaine de pages tout au plus, on ne fait plus attention au style (et puis il reprend un récit plus classique, passé ces premières pages qui ont pour but, je pense, de nous faire voir Malone par les yeux du psy).
    J’avais un soupçon, pas sur quelqu’un en particulier, qui ne s’est pas concrétisé, et je n’ai pas été satisfaite de l’explication donnée sur ce point. Pas parce qu’elle est mal tournée, mais parce que les indices qui ont éventuellement pu être semés étaient dans des passages qui semblaient être là pour meubler, pour donner du corps au personnage de Marianne. Alors pour les futurs lecteurs, retenez bien cela : tout, absolument tout, même la chose la plus insignifiante au premier abord, a une importance !
    Je pense qu’à l’occasion, je relirai ce livre avec ça à l’esprit…
    Au final, c’est un excellent polar, avec une tension qui monte doucement et qui est accentuée par le fait que l’on sait dès le départ que le livre débute 4 jours avant les événements du prologue… et le fait que Malone se repère grâce à la position des aiguilles sur la pendule accentue cette tension…
    Parfois on a l’impression que tout va trop lentement, on a envie de hurler aux flics, mais c’est là ! Allez-y ! N’attendez pas !!! Mais on est pas dans du fantastique, les preuves ne tombent pas du ciel, les enquêteurs doivent les trouver… Et si c’est très frustrant, c’est aussi ce qui fait qu’on ne peut pas lâcher ce livre avant les dernières lignes.


    Un extrait : Petite aiguille sur le 8, grande aiguille sur le 7

    — Maman marchait vite. Je lui tenais la main et ça me faisait mal au bras. Elle cherchait un coin pour qu’on se cache tous les deux. Elle criait mais je l’entendais pas, parce qu’il y avait trop de monde.

    — Il y avait trop de monde ? C’était qui, tous ces gens autour de vous ?

    — Bah… des gens qui faisaient les courses.

    — Il y avait des magasins autour de vous, alors ?

    — Oui. Plein. Mais nous, on n’avait pas de Caddie. Juste un grand sac. Mon grand sac Jack et les pirates.

    — Mais toi et ta maman, vous faisiez aussi les courses ?

    — Non. Non. Je partais en vacances. C’est ce que maman disait. Des grandes vacances. Mais moi je voulais pas. C’est pour ça que maman cherchait un coin pour se cacher avec moi. Pour pas que les gens me voient faire ma crise.

    — Comme tu l’as fait à l’école ? Comme celle dont Clotilde m’a parlé ? Pleurer. Te mettre en colère. Vouloir tout casser dans la classe. C’est ça, Malone ?

    — Oui.

    — Pourquoi ?

    — Parce que je voulais pas partir avec l’autre maman.

    — C’était juste ça ?

    — …

    — D’accord, on va en reparler après, de ton autre maman. Essaye d’abord de te rappeler le reste. Tu peux me décrire ce que tu voyais ? L’endroit où tu marchais vite avec ta maman.

    — Il y avait des magasins. Plein de magasins. Il y avait un McDo aussi, mais on y avait pas mangé. Maman voulait pas que je joue avec les autres enfants.

    — Tu te souviens de la rue ? Tu te souviens des autres magasins ?

    — C’était pas dans une rue.

    — Comment ça, pas dans une rue ?

    — Si, c’était comme une rue, mais on voyait pas le ciel !

     

  • [Livre] L'évangile selon Satan

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    Résumé : 2006, Hattiesburg, dans le Maine.
    Rachel, l’assistante du shérif du comté, enquête sur la disparition de quatre jeunes serveuses.
    Elle disparaît a son tour. Marie Parks, profileuse au FBI qui possède des dons de médium et s'est spécialisée dans la traque des cross-killers -les tueurs qui voyagent-, est chargée d'enquêter sur la disparition de Rachel. Elle retrouve son corps torturé et la dépouille des quatre disparues crucifiées dans une crypte. Le tueur, abattu par le FBI, est un moine qui porte les signes du Diable.
    Quelques jours plus tard, au Vatican, le cardinal Oscar Camano, patron de la congrégation des Miracles, apprend que les quatre jeunes femmes assassinées sont les religieuses qu'il avait envoyées aux États-Unis pour enquêter sur la vague de meurtres qui frappent l'ordre des Recluses, un ordre très ancien, chargé depuis le Moyen-âge de protéger et d'étudier les manuscrits interdits de la chrétienté. Il confie au meilleur de ses exorcistes, le père jésuite Carzo, le soin de retrouver la trace de cet évangile que l’Église a perdu six siècles plus tôt...
     

    Auteur : Patrick Graham

    Edition : France Loisirs

    Genre : Thriller

    Date de parution : 09 janvier 2008

    Prix moyen : 9€

    Mon avis : Qu’une chose soit claire : je ne relirai jamais un livre pareil la nuit !!! Parce qu’il y a vraiment des passages carrément flippants.
    En général je n’aime pas trop qu’il y ait du surnaturel dans les polars. J’aime les bouquins surnaturels avec des loups garous, des vampires, des fantômes, des démons etc… j’aime les thrillers qu’ils soient gores ou psychologiques… mais j’aime rarement le mélange des deux.
    Ici, le coté surnaturel ne m’a pas dérangé. Au contraire, il a apporté un surplus d’angoisse qui a fait que je ne pouvais plus lâcher le roman (et il fait plus de 700 pages).
    Je n’ai commencé à avoir des doutes sur l’identité du « grand maître », le grand méchant, celui qui orchestre tout ou presque qu’une centaines de pages avant la fin, mais on ne peut pas dire qu’il y ait eu des indices. Je me suis plutôt basée sur l’intuition découlant du classique « qui semble le moins susceptible d’être un salopart ? »
    Dans la deuxième parti du roman on part un peut en vrille avec le FBI, la mafia, le Vatican, les sociétés secrètes…j’ai trouvé que ça faisait peut être un peu trop….mais ça ne change pas la dynamique du roman et au final, même si certaines choses n’ont pas de vraies réponses, on y trouve quand même son compte.
     

    Concernant les dons de Marie Parks, on n’est pas vraiment dans le domaine surnaturel. Le principe est que son cerveau utilise des zones que le genre humain n’utilise pas, on revient sur la théorie selon laquelle nous n’utilisons que 10 % des capacités de notre cerveau. Alors fiction ou réelle possibilité scientifiques ? Je pense que la réponse à cette question ne cessera de changer au fil des découvertes scientifiques (après tout, on a bien pensé pendant des siècles que la terre était plate !).
    Je sais que l’auteur a écrit un autre roman mettant en scène Marie Parks mais les critiques sont unanimement mauvaise et font état de la déception des lecteurs. Alors je pense que je vais m’abstenir pour garder un bon souvenir de cet auteur grâce à ce roman vraiment excellent.


    Un extrait :
    Le pape lève son verre et avale un gorgée d’eau. Le goût de terre a disparu. Lorsqu’il se remet à parler, sa voix semble brisée de fatigue.

    - Quelques heures après que les disciples de Janus eurent volé le cadavre du Christ, un homme appelé Joseph d’Arimathie a retrouvé au pied de la croix un des clous qui avait servi au supplice. Un clou plein de sang qu’il a enveloppé dans un linge avant de le glisser dans sa tunique.

    Un silence.

    - Nous savons que Joseph d’Arimathie a remis ce linge à Pierre, le chef des apôtres, qui avait reçu du Christ le titre de premier pape de la chrétienté. C’est comme ça que le clou a rejoint Rome et qu’il a traversé les siècles, de pape en pape.

    - Mon Dieu, vous voulez dire que ce clou est encore en votre possession ?

    - Il est en lieu sûr avec d’autres reliques secrètes récupérées par Marie et l’apôtre Jean, qui se tenaient au pied de la croix au moment de l’agonie du Christ. Nous avons fait analyser dans le plus grand secret l’ADN qui se trouvait sur ce clou.
     Quelques fibres de chair solidifiée et du sang très ancien. Puis nous avons comparé ces résultats à l’ADN du squelette de Janus.

    - Alors ?

  • [Livre] Mémoire d'une nuit d'orage

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    Résumé : Jody n’était qu’une enfant lorsque ses parents furent assassinés. Vingt-trois ans plus tard, c’est pour elle un choc d’une grande violence quand elle apprend que leur meurtrier est libéré. Tandis que ses vieilles blessures se rouvrent, de nouvelles questions l’assaillent : Que s’est-il vraiment passé le soir du meurtre ? Pourquoi n’a-t-on jamais retrouvé le corps de sa mère ? Et si la vérité n’était pas celle qu’elle avait toujours crue ?

    Auteur : Nancy Pickard

    Edition : France loisirs

    Genre : Thriller

    Date de parution : 7 juin 2012

    Prix moyen : 15€

    Mon avis : Ce roman est un assez bon thriller. On alterne entre ce qui s’est passé 23 ans plus tôt (mais sans savoir la vérité avant la fin bien entendue) et le présent.
    Pendant tout le bouquin, j’en suis venu à soupçonner trois personnes. Dans les trois cas, j’avais raison sur une partie de la vérité seulement mais la révélation de ce qu’il s’était réellement passé a été une vraie surprise. J’ai toutefois trouvé la fin un peu rapide et facile.
    Coté personnages, la famille a eu tendance à m’énerver avec le patriarche qui se croit plus ou moins tout permis et qui n’imagine même pas qu’on puisse lui tenir tête, les oncles qui débarquent chez Jody, l’héroïne et qui entrent chez elle sans s’annoncer, sans frapper, comme s’ils étaient chez eux, qui la somment de retourner s’installer chez ses grands parents alors qu’elle a 26 ans et une vie à elle. Elle aussi est agaçante parce qu’à cet âge là, si on est pas capable de dire à sa famille qu’on a besoin d’espace pour vivre sa vie, quand est-ce que cela arrivera ?
    Les habitants de la ville sont du même genre : certains doutent de la culpabilité de Billy, l’homme condamné pour le meurtre du père de Jody, mais ils n’ont rien dit, certains parce qu’ils pensaient que la place de cet homme était de toute façon en prison, d’autre pour ne pas contrarier la toute puissante famille Linder ; quant aux autres, de vrais moutons : si m’sieur Linder a dit ça, ben alors c’est qu’c’est vrai. Voilà à peu près leur seule capacité de réflexion. Leur attitude face à la femme et au fils de Billy est lamentable : avant le meurtre, ils les plaignaient (sans jamais rien faire pour eux), après le meurtre, il aurait presque fallu que la jeune femme et le gamin de sept ans aillent en prison avec leur mari et père.
    En gros, on a droit à tous les clichés que l’on imagine dans un petit village de campagne : le notable tout puissant, le mauvais garçon, le sheriff dévoué audit notable et les voisins qui bavent devant lui, parce que financièrement, il fait plus ou moins vivre le village.
    En dehors de ce travers, l’écriture reste fluide et agréable et le polar se lit rapidement tant on veut la réponse aux deux questions cruciales : Qui a tué Hugh-Jay Linder ? Qu’est-il advenu de sa femme, Laurie Jo ?
    Même si le dénouement m’a laissé un peu sur ma faim, j’ai passé un bon moment (et une nuit très courte…) avec ce polar.


    Un extrait : Certains affirmaient que le meurtre du père de Jody était la conséquence d’un incident isolé, une histoire déplaisante qui avait dégénéré jusqu’à atteindre des proportions inimaginables. Personne n’aurait pu le prévoir, soupiraient-ils. Mais d’autres prétendaient que le conflit fermentait depuis longtemps, que le grand-père de Jody aurait dû se méfier, bref qu’il l’avait bien cherché, pour dire la vérité crûment. Voilà ce qui arrivait quand on essayait de réformer des gens qui n’avaient aucune envie de changer, concluaient-ils. Enfin, c’était dans la nature de Hugh Linder senior, ajoutaient-ils aussitôt : un homme bon, intelligent, honnête et intransigeant, mais un tantinet trop sûr de lui. S’il avait fait preuve d’un peu plus d’humilité, peut-être le cours des choses aurait-il été différent…

    Quelle que fût la vérité – un soudain accès de fureur ou un ressentiment de longue date – tous s’accordaient sur un point : le dernier acte sanglant de cette tragédie s’était joué en ce jour fatidique où l’éleveur, en faisant le tour d’un enclos où les bêtes se bousculaient, avait surpris Billy Crosby en train de déchaîner sa rage contre une vache.

    C’était un mardi, en début d’après-midi.

    Les ouvriers de High Rock Ranch rassemblaient le bétail dans l’enclos au bord de la grand-route, afin de séparer de leurs mères les veaux âgés de six mois et de les vacciner contre les maladies qui pouvaient survenir au cours de la période si difficile du sevrage, avant de les transporter vers les parcs d’engraissement. Les bêtes adultes, de nouveau gravides, recevaient quant à elles des piqûres de rappel contre la fièvre charbonneuse.

    La vache en question était une énorme vieille bête habituée à ces manipulations et qui aurait donc dû savoir comment se comporter. Elle avait été une excellente reproductrice et une bonne mère pendant des années, mais peut-être était-elle devenue légèrement sénile et son cerveau s’était-il ramolli, sous ce long crâne dur. C’était relativement fréquent, chez les animaux comme chez les humains. Ce jour-là, elle refusait d’avancer, se tournait sans cesse dans la mauvaise direction, bloquant la progression des autres bestiaux à l’intérieur de l’enclos circulaire. Elle mugissait pour appeler son petit, en roulant des yeux fous, l’écume à la bouche. La chaleur, en cet après-midi du mois de septembre 1986, était infernale ; hommes et bêtes cuisaient sous le soleil comme dans un barbecue géant, et les deux espèces étaient énervées, malheureuses et irritées l’une contre l’autre. L’odeur de bouse fraîche et celle des bovins eux-mêmes saturaient l’air d’une moiteur animale. Le bruit des sabots sur le sol, les beuglements des veaux réclamant leurs mères, les hurlements des hommes tentant de les maîtriser, emplissaient d’un grondement de tonnerre le ciel sans nuages.

    « Avance, saloperie ! »

    Hugh senior vit son employé à mi-temps piquer à plusieurs reprises le flanc de l’animal avec son aiguillon électrique. Billy était l’un des « protégés » de l’éleveur, le dernier en date des innombrables gars du coin qu’il avait embauchés au fil des années, parce qu’il croyait qu’il n’y avait rien de tel qu’un dur labeur pour remettre dans le droit chemin ceux qui semblaient mal partis.

    Billy s’était révélé être plus difficile à « sauver » que tous ses prédécesseurs.

    Peut-être parce que ses parents étaient tous les deux alcooliques, et pas seulement l’un d’entre eux, comme c’était le cas pour deux ou trois des gamins qui avaient assez bien réussi dans la vie après avoir été pris en main par Hugh et Annabelle Linder. Peut-être parce que Billy n’était pas le plus intelligent des taurillons du troupeau, ou qu’il avait un tempérament tellement irascible qu’un rien pouvait l’enflammer. Toujours était-il que le régime de Hugh, à base de travail manuel et de sueur, ne donnait guère de résultats, de l’avis de ses concitoyens. Billy ne venait-il pas de se voir retirer son permis pour la seconde fois, après avoir été de nouveau arrêté pour conduite en état d’ivresse ? Et sa pauvre petite épouse n’avait-elle pas un sacré bleu à la mâchoire, l’autre jour ? Leur petit garçon de sept ans n’avait-il pas l’air trop grave et trop réfléchi pour son âge ? Et Billy Crosby ne continuait-il pas à boire autant, à se montrer plus agressif que jamais, à courir les filles et à ouvrir sa grande gueule à tort et à travers ? Les Linder auraient dû renoncer depuis longtemps, disaient les gens ; n’importe qui d’autre aurait jeté l’éponge, c’était certain.

     

  • [Livre] Perdue et retrouvée

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    Résumé : Essayez d'imaginer:
    Une enfant kidnappée. Une famille déchirée.
    Lentement, au fil des ans, cette famille va recoller les morceaux.
    Elle reste un peu fragile, bien sûr, mais toujours unie.
    Et voilà que l'enfant, devenue adulte, revient à la maison...
    C'est là que l'histoire commence. Et si la fin du cauchemar n'était que le début d'un autre ?


    Auteur : Cat Clarke

    Edition : Robert Laffont

    Genre : Thriller psychologique

    Date de parution : 23 avril 2015

    Prix moyen : 17,90€

    Mon avis : L’histoire semble presque « banale » au début. Une enfant, Laurel, kidnappée à l’âge de 6 ans est rendue à sa famille 13 ans plus tard. Alors on se demande bien pour quelle raison son kidnappeur l’a relâchée au lieu de s’en débarrasser puisqu’elle a vu son visage pendant 13 ans et pourrait donc l’identifier, mais le roman semble être basé sur la reconstruction de cette famille du point de vue de la petite sœur (2 ans plus jeune). Et puis, au fil des pages, un certain malaise m’a gagné…
    Ce n’était pas tant les parents qui semblent ne s’intéresser qu’à leur aînée et plus du tout à leur cadette, car on se dit qu’après 13 ans d’absence, ils ont peur de la perdre de vue, de la contrarier etc….
    Ce n’est pas non plus la mère, qui semble bien décidée à accumuler de l’argent grâce aux interviews rémunérées, aux propositions diverses… On se dit que c’est son caractère et que, même s’il est un peu écœurant, il n’est pas non plus anormal…
    Ce n’est pas davantage l’oscillement entre adoration, surprotection et jalousie que développe Faith, la cadette, à l’égard de cette sœur aînée qui « débarque du ciel »…
    Non, ce qui a provoqué mon malaise, c’est Laurel elle-même. Elle semble…trop enthousiaste à l’idée de se montrer, de faire face aux journalistes, de répondre aux propositions rémunérées qu’elle reçoit. Elle semble aussi dissimuler des choses et malgré le fait que les psychologues parlent de possibilité de flash-back, de stress post traumatique, je n’arrive pas à me convaincre qu’il ne s’agit que de cela.
    Laurel ne se souvient pas de certains faits de son absence, panique quand les policiers veulent lui faire un test ADN… Tout est explicable bien sur : après 13 ans aux mains d’un psychopathe, il n’est pas étonnant qu’elle ne se souvienne pas d’un élément datant d’avant ses 6 ans et qu’elle refuse un examen qu’elle peut trouver invasif… mais le malaise persiste, pas tant à cause de ces deux éléments que de son attitude générale. Elle semble ne rien éprouver de réel, être toujours dans la représentation…
    Les indices disséminés tout au long du roman permettent assez facilement de découvrir une partie de la solution, mais ce n’est qu’une partie. Les révélations des derniers chapitres ont vraiment été une surprise !

    Un extrait : Le téléphone sonne. Maman m’embrasse sur la joue avant d’aller répondre. Ses lèvres sont sèches et gercées.

    — Allô ? Oui, c’est elle-même…

    Elle cale le combiné entre son épaule et son oreille avant d’essuyer les miettes sur le comptoir de la cuisine. Je monte à vive allure préparer mon sac. Je n’ai pas besoin de grand-chose – j’ai des vêtements et des affaires de toilette à l’appartement de mon père. Ce qui se révèle assez embêtant, parfois, quand je laisse ma veste préférée chez maman, alors que je reste chez lui, et vice versa. Pourtant, ça vaut la peine de s’échapper de là deux jours par semaine. Je me sens différente, chez papa et Michel. C’est comme si je respirais mieux, d’une certaine manière. C’est sûrement à cause de l’air conditionné.

    Ma mère est debout, le dos tourné, quand j’entre dans la cuisine. Elle ne repose pas le combiné à la fin de l’appel.

    — Maman ?

    Elle m’ignore.

    — Maman ? Ça va ?

    Le « Je vais bien, chérie » attendu ne vient pas. Elle déroge au scénario habituel.

    Je contourne donc la table en traînant les pieds pour aller me planter devant elle. Elle est pâle. Une larme roule sur sa joue gauche. Je la regarde se frayer un chemin le long de sa mâchoire, puis dans son cou.

    Au bout d’un moment, elle lève enfin les yeux sur moi. Ils ont quelque chose de différent. Impossible de savoir quoi exactement, sauf que ça m’inquiète.

    Maman se racle la gorge. Elle commence à marmonner un truc quand elle s’interrompt. Je ne suis pas sûre d’avoir envie d’entendre ce qu’elle a à dire, mais il semble que je n’ai pas le choix.

    — C’était la police.

    Non. S’il vous plaît, mon Dieu, non ! Pas aujourd’hui. Pas le coup de fil qu’elle redoute tant depuis treize ans. Il ne peut pas tomber maintenant.

    Ma mère chancelle légèrement, comme si elle était sur le point de s’évanouir. Je lui attrape le bras et l’aide à marcher jusqu’à la table. Elle s’effondre sur une chaise. Le téléphone rebondit bruyamment sur le plateau de bois. Elle prend mes mains dans les siennes. Je m’accroupis devant elle.

    — Explique-moi ce qu’il se passe, maman. S’il te plaît.

    Elle s’éclaircit de nouveau la voix.

    — Ils ont trouvé une fille. À Stanley Street.

    Stanley Street est la rue où nous vivions à l’époque où c’est arrivé.

    — Ils pensent que… Ils pensent que c’est Laurel… (Elle serre mes doigts si fort que j’en ai mal.) Ils me demandent d’aller l’identifier au poste de police.

    Mes jambes cèdent sous moi. Heureusement que je me tiens déjà au niveau du sol.

    — Oh, maman, je suis tellement désolée ! Je ne peux pas… Oh, mon Dieu !

    Ma mère me sourit alors.

    — Oh, non, Faith ! Ce n’est pas ce que… Quelle imbécile, j’aurais dû réfléchir avant de parler !

    Elle lâche mes mains et tend la sienne pour me caresser la joue.

    — Ils pensent que c’est elle… Ils en sont quasi sûrs… Faith… Elle est en vie ! Laurel est vivante !