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Premières lignes - Page 8

  • Premières lignes #69

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
    Le principe est de, chaque semaine, vous faire découvrir un livre en vous en livrant les premières lignes.
    Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !

     

    Cette semaine, je vous présente La terre qui penche de Carole Martinez

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    À tes côtés, je m’émerveille.
    Blottie dans mon ombre, tu partages ma couche.
    Tu dors, ô mon enfance,
    Et, pour l’éternité, dans la tombe, je veille.
    Tout aurait dû crever quand tu as gagné ton trou, gamine,
    Au lieu de quoi la vie a dominé, sans joie.
    Seule la rivière a tenté quelque chose pour marquer ton départ, ma lumineuse.
    Dans la brume du petit matin, elle a soudain figé ses eaux vertes tout du long, si bien qu’en amont de la Furieuse, les aubes des moulins se sont arrêtées de tourner, comme engluées dans du métal fondu. Dès que l’haleine humide et claire qui la nappait de vapeurs nocturnes est remontée à flanc de coteaux jusqu’à se dissoudre tout à fait dans la chaleur du jour, dès que la rivière est apparue, nue, débarrassée de ses longs voiles laiteux, les meuniers de la vallée ont découvert que la Loue enchanteresse s’était changée en miroir : plus rien ne bougeait dans son lit que le reflet du monde des berges et celui des nuages épars de mai. Alors, à mesure que le jour s’est déplié sur cette terre qui penche, la vie du dehors s’est laissé prendre au piège de sa propre image, étonnée de se voir des contours si nets à la surface des eaux mortes et inquiétantes qu’aucune ondulation ne venait plus troubler. La Loue faisait silence et, jusqu’à ce que les cloches aient sonné sexte, on n’a plus entendu le moindre clapotis contre les pierres. Chut ! Chut ! Même dans les pentes raides des gorges, qui, jamais jusque-là, ni de nuit, ni de jour, n’avaient cessé leurs papotages, les langues d’eau, saisies en pleine course, s’étaient tues. Chut ! Chut !
    Rien ne semblait pouvoir briser le sortilège qui avait pétrifié la rivière. Car c’était bien de cela qu’il s’agissait, de quelque enchantement !
    Ce matin qui a suivi la fin de notre histoire, mon éclatante, le vent lui-même a renoncé à remuer la surface plombée de la Loue. Aucune de ses caresses ne pouvait froisser l’enveloppe, lisse à pleurer, de la belle serpente. Nul sillage ne ridait cette étrange peau de métal qu’elle s’était forgée en une nuit. Ni frisson sous les ongles des araignées d’eau, ni tressaillement aux frôlements bleus d’une libellule, ni efflorescence sous les branches basses. La Loue ne prenait plus plaisir à lécher ses berges, plus de va-et-vient sur le sable ou la pierre, plus d’ondoiements dans sa chevelure d’algues, plus de soupirs, plus un souffle. Rien ne scintillait à sa surface. Le soleil, qui se faufilait entre les arbres pour la rejoindre, se glaçait à son contact. L’astre était réduit à un cercle blanc, sans feux.
     
    De quelle douleur espérait-elle se prémunir en métamorphosant sa nudité en armure, alors qu’aucune lame n’aurait pu la blesser, la trancher, la désunir ?
    Tous ceux qui, pour leur malheur, se sont interrogés en regardant la rivière arrêtée ce matin de mai, tous ceux-là, comme épris de leur image, sont restés, fascinés, au bord du gouffre dans lequel a fini par vibrer un monde second où ils avaient leur place, un autre monde dont la surface de la Loue leur montrait la voie.
    Il faut les comprendre ces rustres qui jamais ne s’étaient vus au miroir et qui observaient les détails de leurs traits et leur stature pour la première fois. Quelle surprise ! Quel ravissement ! Et même les plus laids n’ont plus bougé, attendant face à eux-mêmes, sans comprendre.
    Comme les hommes sont attentifs quand on leur parle d’eux !
     
    Seul le vieux jardinier que la tristesse avait conduit sur la grève aux fées et qui espérait quelque secours de la contemplation de l’onde, quelque rêverie consolatrice, lui seul, le muet, le doyen, le plus faible d’entre tous, a réussi à s’arracher à l’envoûtement. Pudiquement, il s’est détourné du maigre visage de bois sec, qui le fixait depuis l’autre versant du monde et dont il connaissait si bien la peine, et, flairant la mort, il a gravi lentement la sente pour gagner le château des Murmures et alerter les hommes. Ses jambes se raidissaient davantage à chaque pas, les cailloux roulaient sous ses pieds et sa canne s’accrochait aux racines, se prenait dans des trous. Arrivé à mi-chemin, il s’est arrêté plus longtemps pour reprendre son souffle et, comprenant qu’il ne pouvait pas exiger davantage de sa vieille carcasse et qu’il devrait attendre un moment avant de poursuivre son ascension, il s’est assis sur une grosse pierre. À peine installé, il a senti son cœur se serrer en apercevant les jeunes femmes qui dévalaient la pente leurs paniers de linge à la main ou sur la tête : il fallait qu’elles rebroussent chemin, ces toutes belles, qu’elles remettent leur lessive à plus tard ! Mais aucune d’elles n’a voulu entendre ses gestes confus de vieux fou. Ses grands bras décharnés qui s’agitaient et les pauvres sons qu’il tentait d’articuler avaient si peu de sens qu’elles ont ri de sa pantomime, les pauvrettes, et lui ont offert le muguet et les coucous qu’elles avaient piqués sur leur corsage ou dans leurs cheveux avant de poursuivre leur route en lui envoyant des baisers. La peste était passée, elle ne tuait plus personne ! Il n’y avait plus rien à craindre, ce beau printemps l’avait chassée. Le monde n’était pas mort ! Le jardinier aurait voulu courir à leur suite pour les retenir, mais il ne vivait plus au même rythme que cette jeunesse et avait renoncé depuis bien longtemps à attraper les demoiselles, si mignonnes fussent-elles. Et comment empêcher l’enfance de galoper joyeusement dans la pente ? Il s’est contenté de porter leur petit bouquet à ses narines et il a cherché à démêler l’odeur de leur peau de celle du muguet, en les regardant s’éloigner, ces toutes jeunes femmes auxquelles il avait donné en secret des noms de plantes et qui gambadaient gaiement vers leur fin. Le parfum de leur chair se laissait déjà étouffer par celui des fleurs sauvages, les coquelicots eux-mêmes faneraient moins vite qu’elles. Quel gâchis !

     

    Alors, tentés?

  • Premières lignes #68

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente La légende des quatre de Cassandra O'Donnell dont vous pouvez lire ma chronique ICI

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    La lumière du jour commençait déjà à rosir pour annoncer le soir qui approchait. Un vent léger soufflait entre les arbres, faisant bouger en douceur les feuilles sur les branches. Mika courait, le museau collé au sol et la terre défilant sous ses pattes. Plus il avançait, plus l’odeur de sa proie saturait l’air et plus il avait du mal à contenir l’excitation qui le gagnait. Le sanglier était tout près maintenant, sa senteur était si forte que le jeune tigre parvenait à peine à se contrôler. Doucement, tu ne dois pas l’effrayer, songea-t-il en ralentissant soudain le rythme tandis qu’il atteignait le bord de la clairière. Puis, se glissant à travers les fourrés, il se mit à avancer silencieusement en espérant ne pas se faire repérer. La bête était énorme et un solitaire de cet âge pouvait se révéler extrêmement dangereux. Une seule erreur de sa part, une seule, et il risquait de se faire tuer. Tapi dans les hautes herbes, le petit tigre gratta nerveusement la surface rêche de ses griffes sur le sol et prit tranquillement le temps de l’observer. Gris-brun, le cou massif, l’arrière-train large et les défenses acérées, l’animal était plutôt impressionnant. Mais Mika s’en moquait. Il était parfaitement décidé à tenter sa chance. Tendant les muscles de ses pattes, il s’apprêtait à bondir sur sa proie quand il sentit soudain une main le tirer brusquement en arrière.
    — Non !
    Le sanglier, effrayé, se mit aussitôt à détaler et Mika, frustré de voir la bête lui échapper, se tourna vers le garçon brun aux yeux émeraude qui le tenait fermement au-dessus du sol et lui assena un coup de griffe.
    — Eh ! On se calme, d’accord ? Tu sais très bien que tu es beaucoup trop petit pour t’attaquer à un sanglier adulte, c’est trop risqué, soupira celui-ci en n’accordant même pas un regard au filet de sang qui s’écoulait à travers son pantalon déchiré.
    Le jeune tigre poussa un feulement de protestation et leva les yeux vers son grand frère en faisant onduler ses oreilles rondes. Petit ? Petit ? Oh bien sûr, il n’avait rien à voir avec Bregan. Son aîné, sous sa forme animale, mesurait déjà pas loin de 2 mètres, pesait près de 400 kilos et pouvait tuer un bœuf ou un cheval d’un seul coup de patte. Mais même si Mika était encore loin d’être aussi puissant, il était agile, discret, il pouvait grimper sur n’importe quel arbre et tenir bien plus de temps à la course que la plupart des adultes.
    — Allez, il est l’heure de rentrer, ajouta Bregan en lui ébouriffant gentiment la fourrure.
    Rentrer ? Sans même ramener une proie à la maison ? Alors là, pas question, songea Mika avant de balayer du regard les environs. La plupart des tigres préféraient chasser la nuit et possédaient une excellente vision nocturne, mais maman le jugeait encore trop jeune pour le laisser vagabonder avec les grands de 10 ou 12 ans. Or Mika trouvait ça profondément injuste, et il en avait plus qu’assez d’être traité comme un bébé. Il devait absolument prouver sa valeur et, pour ça, il ne pouvait pas se permettre de rentrer bredouille. Non, pas cette fois.

     

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  • Premières lignes #67

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente La cité du ciel de Amy Ewing dont vous pouvez lire ma chronique ICI

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    Nous sommes les Céruléennes. Notre sang est magique.
    Les mères de Sera le lui répétaient depuis sa naissance. Elles le lui enseignèrent avant même qu’elle ne parle, ne pense par elle-même ou ne comprenne ce que ça signifie. Toutes les enfants céruléennes savaient que la magie coulait dans leurs veines ; que leur sang possédait des vertus curatives et qu’il créait entre elles une connexion des plus intimes.
    Aujourd’hui toutefois, cette magie n’était d’aucun secours à Sera.
    Dans le bois nébuleux, il faisait froid ; c’était le seul endroit de la Cité du Ciel où l’air n’était pas parfaitement tempéré. L’herbe craquela sous ses pieds nus lorsqu’elle se pencha pour saisir une poignée de filaments de nuage accrochés aux feuilles noires d’un arbre nébuleux. Des filaments aussi fins qu’une toile d’araignée. Les cheveux d’ange lui échappèrent des mains pour aller se fixer sur une feuille plus en hauteur, hors de sa portée.
    — Zut !
    Deux filles proches d’elle poussèrent un petit cri de surprise. Koreen lui décocha un regard perspicace. Rejetant sa chevelure bleu vif dans son dos, elle enroula son nuage jusqu’à former un fil des plus délicats, comme pour montrer l’exemple à Sera. Celle-ci baissa les yeux sur sa robe en fils de nuage, celle que sa mère céladon lui avait confectionnée ; elle sut qu’elle n’arriverait jamais à tisser assez de nuages pour s’en fabriquer une elle-même.
    — Ne cherche pas à les attraper, lui conseilla Leela, qui quitta son métier à tisser où elle avait déjà réuni une épaisse bobine de fil prête à être convertie en tissu. Laisse-les venir à toi.
    — Facile à dire pour toi, rétorqua Sera. Voilà trois semaines qu’on travaille dans ce bois et je n’ai fait aucun progrès.
    — On passera bientôt aux mines de gemmes d’étoiles, répondit Leela. Peut-être que tu y trouveras ta vocation.
    Leela était la meilleure amie de Sera. Sa seule amie, à vrai dire. Sa fougue, ses emportements incontrôlables et ses questions incessantes n’avaient pas l’air de la déranger. Pas plus que ses accès de rire frénétiques qui effrayaient même les oiseaux dans la volière.
    Leela la regarda, pleine d’espoir. Sera ne put se résoudre à lui dire qu’elle ne se croyait pas taillée non plus pour la chasse aux pierres précieuses. Elle ignorait quel rôle lui était destiné dans la Cité. Et bientôt, elle allait avoir dix-huit ans, elle deviendrait adulte. Elle craignait que la grande prêtresse ne lui attribue par défaut une place de novice au temple. C’était bien le dernier endroit au monde où Sera s’imaginait. Elle adorait Mère Soleil, évidemment, toutefois elle ne voyait pas l’intérêt de passer ses journées à chanter des cantiques en son honneur et à nettoyer le temple.
    Mais son éducation était terminée. Cela faisait un an que sa mère céladon avait cessé de l’instruire. Ensemble, les jeunes Céruléennes s’étaient initiées aux diverses tâches de la Cité du Ciel. Sa mère céladon espérait la voir marcher dans ses pas et développer un goût pour le tissage de nuages. C’était d’ailleurs elle qui avait fabriqué toutes les robes de sa fille. Sa mère orange voulait qu’elle prononce ses vœux, mais c’était peu probable – Sera arrivait systématiquement en retard à la messe et aux prières du soir. Sa mère violine jouait la plus douce des musiques à la harpe – on lui réclamait toujours un morceau lors des grandes occasions. Mais Sera n’ayant aucun talent musical, elle ne lui avait jamais mis la pression. En outre, Sera était trop turbulente pour la volière ; elle s’ennuyait au pâturage lorsqu’elle devait surveiller le troupeau de moutons de brume ; et elle n’avait pas la patience de s’occuper des abeilles dans le rucher.
    — Peut-être que Sera sera la première Céruléenne à n’avoir aucune vocation, fit remarquer Koreen d’un ton mielleux et cependant teinté d’acidité.
    Treena et Daina échangèrent un regard. Daina avait déjà trouvé sa vocation, s’occuper des vergers, et elle avait reçu la bénédiction de la grande prêtresse. Sa mission débuterait bientôt. Sera était quasi sûre que Treena demanderait à travailler avec les sages-femmes d’un jour à l’autre.
    — Bien sûr qu’elle va trouver sa vocation, rétorqua sèchement Leela.
    — Mais ce n’est pas encore le cas, souligna Daina.
    — Pour moi non plus, répliqua Leela du tac au tac.
    — Oui, mais…
    — J’aimerais m’occuper du cordon, l’interrompit Sera.
    Elle ignorait d’où lui étaient venues ces paroles, mais une fois qu’elle les eut prononcées, elle sut que c’était vrai. Les autres filles la dévisagèrent d’un air ahuri comme s’il venait de lui pousser une deuxième tête.
    — Le cordon ? répéta Elorin, perplexe.
    — Personne ne s’occupe du cordon, railla Koreen. Ça fait des années et des années qu’on n’a pas eu besoin de s’en occuper. C’est justement pour cette raison qu’on a amarré notre Cité à la planète du dessous.
    La Cité du Ciel n’avait rien de comparable aux autres planètes de l’univers. Pour commencer, ce n’était pas une planète à part entière. Elle n’était pas ronde comme un ballon mais plate, un disque ovale flottant avec un temple en son centre et un jardin tentaculaire à ses deux extrémités. Une fine membrane de magie l’englobait comme une coquille d’œuf, la protégeant du danger et sécurisant ses rebords pour empêcher les Céruléennes imprudentes de s’égarer et de tomber dans l’espace. Comme il n’y avait ni pluie ni neige ni aucune saison discernable, la Cité devait s’arrimer à une planète au moyen d’un lien, une fine chaîne magique constituée de maillons or, argent et bleu, invisible à l’œil humain mais parfaitement visible aux Céruléennes. Ce cordon alimentait la Cité, qui tirait ses nutriments de la planète à laquelle elle était attachée, il en aspirait les minéraux et les molécules de toutes sortes comme l’herbe puise l’eau dans le sol. Grâce à cela, le Grand Estuaire était rempli et les vergers arrosés. L’air était pur et les animaux en bonne santé.
    D’après la mère céladon de Sera, le voyage qui les avait conduites vers cette planète avait été semé d’embûches. Il remontait à presque neuf cents ans, à la suite de la Grande Tristesse. La vie des Céruléennes avait alors changé de manière irrévocable. Il leur avait fallu si longtemps pour trouver l’orbe vert-bleu-marron qui gravitait au-dessous de la Cité que l’Estuaire s’était quasiment asséché, que les champs de fleurs de lune avaient fané et presque disparu et que les moutons de brume avaient commencé à mourir.

     

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  • Premières lignes #66

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente Il court, il court, le furet de M.J. Arlidge

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    Venu de la mer, le brouillard noyait la ville. Il l’enveloppait comme une armée d’envahisseurs, effaçait tous les repères, masquait la lune, Southampton devenant un endroit insolite et troublant.
    Silence de mort dans la zone industrielle d’Empress Road. Les ateliers de carrosserie avaient fermé, les mécaniciens et les employés du supermarché étaient partis, et les prostituées prenaient petit à petit leur place. En brassière et minijupe, elles tiraient sur leur cigarette, gagnant un soupçon de chaleur pour se protéger du froid glacial. Elles arpentaient la rue et s’efforçaient de vendre leur corps, même si dans l’obscurité elles ressemblaient davantage à des spectres décharnés qu’à des objets de désir.
    Le type roula lentement, balaya du regard la rangée de junkies à moitié nues. Il tâcha de voir à qui il avait affaire, en reconnut quelques-unes çà et là, sans y attacher d’importance. Ce n’était pas elles qui l’intéressaient. Ce soir, il visait quelque chose qui sortait de l’ordinaire.
    Il était partagé entre l’espoir, la peur et la frustration. Voilà des jours qu’il ne pensait qu’à ça. Il était si près du but à présent. Oui, mais si tout ça n’était qu’une fable, une chimère ? Il aplatit la main sur le volant. Elle devait nécessairement être là.
    Personne. Personne. Pers…
    Elle était là ! Toute seule, adossée au mur couvert de graffitis. Il se sentit brusquement surexcité. Elle dégageait quelque chose de particulier. Elle n’était pas en train d’examiner ses ongles, de fumer ou de papoter, elle se contentait d’attendre ; d’attendre qu’il se passe quelque chose.
    Il quitta la route, se gara à l’écart le long d’un grillage. Il lui fallait être prudent, ne rien laisser au hasard. Il regarda s’il y avait de l’activité alentour, mais le brouillard les avait désormais complètement isolés. À croire qu’il ne restait plus qu’eux deux sur terre.
    Il traversa résolument la route et se dirigea vers elle, puis se reprit et ralentit. Pas question de se précipiter, il se devait d’apprécier et de savourer la chose. L’attente se révélait parfois plus agréable que l’acte en lui-même, il le savait d’expérience. Il lui fallait prendre son temps. Dans les jours à venir, il aurait envie de revivre tout cela aussi précisément que possible.
    En toile de fond, une rangée de maisons abandonnées. Plus personne ne voulant habiter ici, ces baraques étaient vides et insalubres. Jonchées d’aiguilles usagées et de matelas encore plus sales, elles servaient de repaire aux fumeurs de crack et faisaient office d’asile de nuit. La fille leva les yeux et le regarda venir vers elle, à travers sa lourde frange. Elle s’écarta du mur en silence, lui désigna d’un signe de tête la masure la plus proche, puis y pénétra, sans autre forme de procès. Comme si elle se résignait à son sort. Comme si elle savait.
    Il pressa l’allure pour la rattraper, obsédé par son dos, ses jambes et ses talons ; son excitation était de plus en plus forte. Il l’entendait déjà crier et le supplier… Il accéléra quand elle s’engouffra dans le noir. Il n’y avait plus de temps à perdre.
    Le parquet craqua lorsqu’il entra. La maison à l’abandon était exactement comme il l’avait imaginée dans ses fantasmes. Une odeur d’humidité lui assaillit les narines ; ici, tout était pourri. Il se dépêcha d’entrer dans le salon, devenu un véritable dépotoir de strings et de capotes. Aucune trace d’elle. Alors comme ça, ils allaient jouer au chat et à la souris ?
    Dans la cuisine, personne. Il pivota sur ses talons, ressortit et emprunta l’escalier pour monter au second étage, ne cessant de regarder à droite et à gauche si sa proie était là.
    Il entra sans hésiter dans la chambre. Un lit moisi, une fenêtre cassée, un pigeon mort. Mais toujours aucun signe de la fille.
    La fureur le disputait maintenant à la concupiscence. Pour qui se prenait-elle, à l’emmerder ainsi ? Ce n’était qu’une putain, une petite merde ! Ah ça, elle le paierait cher.
    Il poussa la porte de la salle de bains, ça ne donna rien, fit demi-tour et se rendit dans l’autre chambre. Il allait la lui massacrer, sa petite gueule à la c…
    Sa tête bascula soudain en arrière. La douleur l’envahit ; on lui tirait violemment les cheveux pour l’obliger à reculer, à reculer… Il n’arrivait plus à respirer ; on lui collait un chiffon sur la bouche et le nez. Une odeur âcre lui chatouilla les narines, il réagit trop tard. Il se débattit de son mieux, mais déjà il tombait dans les pommes. Tout devint noir.

     

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  • Premières lignes #65

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente Je sais où tu es de Claire Kendall dont vous pouvez lire ma chronique ICI

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    Lundi 2 février, 7 h 45

    C’est toi. Bien sûr. C’est toujours toi. Quelqu’un me rattrape et quand je me retourne, c’est toi que je vois. Je savais que ce serait toi, et pourtant je perds l’équilibre sur la neige gelée. Je me relève en titubant. Il y a des cercles humides sur mes collants au niveau des genoux. L’humidité transperce mes mitaines.
    N’importe quelle personne sensée resterait chez elle par un froid aussi glacial, à supposer qu’elle ait le choix. Mais pas toi. Tu es sorti faire un petit tour. Tu tends le bras pour m’aider à retrouver mon équilibre, tu me demandes si ça va. Je m’écarte en me débrouillant pour rester stable sur mes deux pieds.
    Je sais que tu m’espionnes sans doute depuis que je suis sortie de chez moi. Je ne peux pas m’empêcher de te demander ce que tu fais ici, même si je sais que tu ne me donneras pas la vraie raison.
    Tes paupières cillent, comme l’autre fois. Signe de nervosité chez toi. « Je me promenais, Clarissa, tout simplement. » Tu vis dans un village à huit kilomètres d’ici, mais peu importe. Tes lèvres blanchissent. Tu les mords, comme si tu devinais qu’elles ont perdu leur peu de couleur et que tu essayais de faire affluer le sang. « C’était bizarre, cette manière de te comporter vendredi au boulot, Clarissa. De quitter la salle de conférence subitement. On s’est tous dit la même chose. »
    Cette façon que tu as de répéter mon prénom, ça me donne envie de crier. Le tien est devenu laid pour moi. J’essaie de l’empêcher d’entrer dans ma tête, comme si cela allait miraculeusement t’empêcher toi d’entrer dans ma vie. Mais il revient à pas de loup. Il s’impose. Exactement comme toi. À chaque fois.
    Deuxième personne. Singulier. Présent. Voilà ce que tu es. Dans tous les sens possibles.
    Mon silence ne te décourage pas. « Tu n’as pas décroché de tout le week-end. Tu n’as répondu qu’à un seul de mes textos, et encore, de façon guère aimable. Qu’est-ce que tu fais dehors par un froid pareil, Clarissa ? »
    Je ne vois pas plus loin que l’instant présent. Je dois me débarrasser de toi. T’empêcher de me suivre jusqu’à la gare et de deviner où je vais. Si je t’ignore, ça ne me mènera à rien, là, maintenant ; dans la vraie vie, les conseils qu’ils donnent dans leurs brochures ne marchent pas. Je doute de trouver quoi que ce soit qui marche avec toi.
    « Je suis malade. » Mensonge. « C’est pour ça que je suis partie vendredi. Il faut que je sois chez le médecin avant huit heures. »
    « Tu es la seule femme de ma connaissance à être jolie même malade. »
    Je commence pour de vrai à me sentir mal. « J’ai de la fièvre. J’ai vomi toute la nuit. »
    Tu approches la main de ma joue, comme pour vérifier ma température. J’ai un brusque mouvement de recul.
    « Je t’accompagne. » Ta main est restée en l’air, rappel maladroit de ton geste déplacé. « Tu ne devrais pas rester seule. » Tu ponctues ta phrase en laissant retomber ta main lourdement.
    « Je ne veux pas que tu attrapes ce que j’ai. » Malgré ce que je viens de dire, je crois avoir conservé un ton calme.
    « Laisse-moi prendre soin de toi, Clarissa. Il gèle – tu ne devrais pas être dehors par ce froid avec tes cheveux mouillés – tu vas attraper mal. » Tu sors ton portable. « J’appelle un taxi. »
    De nouveau tu m’as coincée. Avec la barrière métallique noire derrière moi je ne peux pas reculer davantage. Je risquerais de glisser dessous – et la route est à un mètre en contrebas. Je fais un pas sur le côté, me repositionne, mais malgré cela, tu m’écrases. Tu as l’air tellement imposant dans cette doudoune grise.
    L’ourlet de ton jean est trempé à force de traîner dans la neige – toi non plus tu ne prends pas soin de toi. Tes oreilles et ton nez sont rouge vif dans ce froid glacial. Les miens aussi, je suppose. Tes cheveux châtains sont ternes, alors que tu viens sans doute de les laver. Fermée, crispée, ta bouche ne se détend jamais.
    Un sentiment de pitié pour toi m’envahit sournoisement, malgré mes efforts pour me protéger et garder mes distances. Toi aussi tu dois être en manque de sommeil. Parler avec méchanceté, même à toi, voilà qui va à l’encontre de la gentillesse que mes parents m’ont enseignée. Et puis de toute façon, si je me montre impolie, tu n’en disparaîtras pas pour autant. Je sais pertinemment que tu feras semblant de ne pas avoir entendu et que tu me suivras. Et ça, je ne le veux pour rien au monde.

     

    Alors, tentés?

  • Premières lignes #64

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente Ce que murmure la mer de Claire Carabas dont vous pouvez lire ma chronique ICI

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    Je suis la dernière fille du roi des océans.
    Depuis la nuit des temps, les légendes de ma glorieuse famille fascinent tous ceux qui les écoutent. Personne, même sur la terre, ne peut ignorer notre nom. Notre puissance s'étend jusqu'aux profondeurs qui vous resteront à jamais inconnues et sur des immensités que vous ne savez pas imaginer. Je garde les clefs de ces mondes. J'en connais les secrets. Je veille sur tous les trésors qui y ont sombré. Je nage au-dessus de mers de pierreries, de perles et d'or. Mes coffres regorgent de sesterces, de piastres, de pistoles, de liards, de doublons, de sols et d'écus... Il n'y a pas d'époque, pas de lieux qui ne m'aient livré ses monnaies. Tous les peuples terrestres payent leur tribut. Les statues destinées aux plus beaux jardins, les théières en argent, les fines porcelaines bordées de dentelles bleues, les vins dans leur flacon, les poteries, les tiares façonnées pour des reines, c'est moi qui les possède.
    Je règne sur les créatures les plus puissantes du monde. Je commande aux dauphins, aux pieuvres et aux baleines. Les requins se prosternent dans mon sillage. Les raies suivent mon cortège. Mes sujets sont multitudes. Des monstres insoupçonnés, des anges de grâce, des lutins minuscules, des géants titanesques se côtoient dans un monde dont vous ignorez les règles. C'est moi qui les régis. Un geste de ma main déclenche des tempêtes. Je gouverne vagues, tourbillons, courants, marées, flux et reflux, embruns et écumes. Ma colère balaie tout, ma splendeur vous fascine.
    J'organise des festins au cœur de mes palais. Mes fêtes ont le faste des plus grandes cours. Les conques font résonner leur corps au plus profond des eaux. Des algues épicées éclatent sous les dents. Les oursins et les huîtres sont aussi au menu. À ma table, je reçois des penseurs, des savants, des artistes. Et à la fin des soirées, ils se mélangent pour danser au son du chant amer des baleines.
    Parfois, je monte à la surface. Tout le long du chemin, la sagesse me répète que je ne devrais pas. Ma place est sur mon trône, auprès de mes sujets, mais je ne peux pas m’empêcher de franchir la frontière. Je sais pourtant ce qu'il coûte de vouloir savoir. Ma tête crève le plafond de la dernière vague. Je suis seule, écrasée dans l'eau par le poids de l'air. Je monte seule, toujours, sans soldat, sans arme. Je défends que quiconque m'accompagne. Je suis déjà si chargée de ma peine...
    Je quitte mon monde, une fois de plus, pour aller à la rencontre du vôtre. Je m'approche des lumières qui ceinturent vos rivages. Je respire l'odeur de votre terre, de vos plantes et de vos feux. Je longe vos côtes. Je peux nager longtemps. Inlassable, je fends l'eau. Je cherche ce chant à nul autre pareil. Ce chant que les femmes adressent à leurs hommes perdus.
    Il y a, sur chaque côte de la terre, une femme qui chante et qui pleure l'absent. Ce chant m'attire, irrépressiblement. Je m'approche des femmes. Je n'ai pas peur qu'elles me voient. Elles sont toutes à leur chant. Rien ne les distrait de leur peine. Ni le soleil qui sautille sur les vagues, ni la nuit qui les berce dans son velours, ni même les sirènes. Leurs larmes se déversent dans la mer. Moi, j'ai tant pleuré déjà ! Alors, gare à moi si je les écoute trop. La nostalgie me prend. Je me sens presque humaine.

     

    Alors, tentés?

  • Premières lignes #63

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
    Le principe est de, chaque semaine, vous faire découvrir un livre en vous en livrant les premières lignes.
    Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !

     

    Cette semaine, je vous présente Am stram gram de M.J. Arlidge

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    Sam dort. Je pourrais le tuer là, maintenant. Son visage n’est pas tourné vers moi : ce ne serait pas difficile. Se réveillerait-il si je bougeais ? Essaierait-il de m’arrêter ? Ou serait-il simplement soulagé que ce cauchemar finisse ?
    Je ne peux pas penser des choses pareilles. Il faut que j’essaie de me rappeler ce qui est vrai, ce qui est bon. Mais quand on est prisonnier, les jours paraissent sans fin et l’espoir est le premier à mourir. Je me creuse la tête en quête de souvenirs joyeux susceptibles de repousser les idées noires : ils sont de plus en plus durs à convoquer.
    Nous ne sommes là que depuis dix jours (onze ?), et pourtant la vie normale ressemble déjà à un souvenir lointain. On faisait du stop après un concert à Londres quand c’est arrivé. Il pleuvait des cordes, plusieurs voitures nous avaient déjà dépassés sans même nous jeter un regard. Trempés jusqu’aux os, on s’apprêtait à retourner à l’abri quand une camionnette a fini par s’arrêter. À l’intérieur, il faisait chaud, il faisait sec. On nous a offert du café venant d’une bouteille Thermos. Sa seule odeur a suffi à nous revigorer. Au goût, c’était encore meilleur. Nous n’avions pas conscience que ce serait notre dernière gorgée de liberté.
    Quand je suis revenue à moi, j’avais la tête comme une casserole. Une croûte de sang sur les lèvres. Fini la camionnette douillette. J’étais dans un endroit glacial, obscur. Étais-je en train de rêver ? Derrière moi, un bruit m’a fait sursauter. Ce n’était que Sam qui se relevait en titubant.
    On avait été dépouillés. Dépouillés et largués. Laborieusement, j’ai avancé en me tenant aux parois qui nous entouraient. Des carreaux froids, durs. J’ai percuté Sam et je l’ai étreint une seconde, inhalant cette odeur que j’aime tant. Cet instant passé, l’horreur de la situation nous a frappés.
    On était dans une fosse à plongeon. Délaissée, mal aimée, elle avait été privée de ses plongeoirs, de ses panneaux, même de ses marches. Tout ce qui pouvait être récupéré l’avait été. Ne restait qu’un bassin profond et lisse, impossible à escalader.
    Ce putain de monstre écoutait-il nos cris ? Probablement. Car quand on a fini par se taire, c’est arrivé. Un portable sonnait : durant une seconde merveilleuse, on a cru à l’arrivée des secours. Ensuite on a vu l’écran du téléphone éclairé sur le sol du bassin. Sam n’a pas bougé, alors j’ai couru. Pourquoi moi ? Pourquoi fallait-il toujours que ce soit moi ?
    « Bonjour Amy. »
    À l’autre bout du fil, la voix était déformée, inhumaine. J’avais envie d’implorer pitié, d’expliquer qu’il s’agissait d’une terrible erreur, mais le fait qu’on connaisse mon nom m’a vidée de toute conviction. Comme je ne répondais pas, la voix a enchaîné, implacable, froide :
    « Est-ce que tu veux vivre ?
    — Qui êtes-vous ? Qu’est-ce que vous nous av…
    — Est-ce que tu veux vivre ? »
    Pendant une minute, impossible de répondre. Ma langue refuse de m’obéir. Ensuite :
    « Oui.
    — Par terre, à côté du téléphone, tu trouveras un flingue. Il y a une balle dedans. Pour Sam ou pour toi. C’est le prix de votre liberté. Vous devez tuer pour vivre. Est-ce que tu veux vivre, Amy ? »
    Impossible de parler. J’ai envie de vomir.
    « Alors, oui ou non ? »
    On raccroche. Et là Sam demande :
    « Qu’est-ce qu’ils ont dit ? »
     
    Sam dort à côté de moi. Je pourrais le faire. Là, maintenant.

     

    Alors, tentés?

  • Premières lignes #62

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !

     

    Cette semaine, je vous présente Horizons - T01 - Sombre ballade de Lysiah Maro

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    Prologue

    Je me souviens du 15 juillet 2105 comme si c’était hier.
    Cette journée s’annonçait aussi chaude que les précédentes et rien ne laissait présager qu’elle resterait gravée dans l’histoire de l’Humanité comme la plus sanglante de toutes. Et pourtant…
    Au petit matin, les médias relayèrent une terrible information. L’Hexagone, touché de plein fouet dans sa plus haute fonction, venait de perdre son Président. Assassiné. Voilà ce qu’ils disaient. Et ce n’était que le début. En quelques heures, des communiqués officiels similaires nous parvinrent de l’ensemble des pays du G50.
    Commença alors notre descente aux enfers. Qui ? Comment ? Pourquoi ? Autant de questions qui ne trouvaient aucune réponse auprès des administrations dépassées par les événements. Cette situation sans précédent plongea la civilisation dans la confusion la plus totale. Le monde s’embrasa, la folie et le chaos se propagèrent, mais ce n’était qu’un avant-goût de ce qui nous attendait.
    Au crépuscule, l’impensable arriva. Ce que nous avions pris pour un violent orage au départ se révéla être notre pire cauchemar : La Rupture.
    Le lendemain, le soleil caressa la Terre rouge sang, ravagée par des crevasses pleines de cadavres.
    Le monde tel que nous le connaissions jusqu’ici n’existait plus.

     

    Alors, tentés?

     

  • Premières lignes #61

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente Victoria de Daisy Goodwin

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    Un rai de la lumière de l’aube tombait sur la fissure, au coin du plafond. La veille, la lézarde dessinait comme une paire de lunettes ; mais au cours de la nuit, une araignée avait brodé sa toile sur la craquelure, comblant les interstices. À présent, songea-t-elle, on aurait dit une couronne. Pas celle de son oncle, à l’air si lourde et si inconfortable, mais une couronne de reine – délicatement ajourée, mais robuste. Après tout, elle avait une tête minuscule, comme maman, et sir John ne manquait jamais de le lui faire remarquer ; le moment venu – et à présent, il n’y avait plus de doute que ce moment viendrait –, il lui faudrait une couronne à sa taille.
    Un ronflement s’éleva en provenance du grand lit.
    — Nein, nein, geignit sa mère, luttant contre ses démons dans son sommeil.
    Le moment venu, songea la jeune fille, elle insisterait pour disposer de sa propre chambre. Maman pleurerait, bien entendu ; elle affirmerait qu’elle ne faisait qu’essayer de protéger sa précieuse Drina. Toutefois, celle-ci resterait ferme. Elle s’imaginait déjà en train de déclarer : « Je suis la reine, et la cavalerie de la garde royale est là pour ma protection, maman. Je pense être en sécurité dans ma chambre. »
    Elle deviendrait reine un jour : elle le savait, à présent. Le roi son oncle était âgé et en mauvaise santé ; et à l’évidence, il était trop tard pour que sa femme, la reine Adélaïde, conçoive un héritier. Pourtant, Victoria – comme elle se plaisait à se prénommer, bien que sa mère et tous les autres l’appellent Alexandrina ou pire encore, Drina, un surnom qu’elle trouvait plus humiliant qu’attachant – ne savait pas quand ce moment surviendrait. Si le roi venait à mourir avant qu’elle ait atteint sa majorité, d’ici à deux ans, il était fort probable que sa mère, la duchesse de Kent, soit nommée régente. Sir John Conroy, son bon ami, gouvernerait à ses côtés. Victoria contempla le plafond. Conroy ressemblait à cette araignée : il avait tissé sa toile partout dans le palais. Sa mère s’était aussitôt laissé prendre, mais la jeune fille se jura que l’heure venue, elle-même ne se laisserait pas piéger.
    Elle frissonna malgré la douceur de ce matin de juin. Chaque semaine, à l’église, elle priait pour la santé de son oncle le roi. Mentalement, elle ajoutait systématiquement une infime requête au Seigneur Tout-Puissant : s’il décidait de reprendre Sa Majesté le roi Guillaume IV en son sein, pouvait-il patienter jusqu’à son dix-huitième anniversaire ?
    Victoria ne savait pas clairement ce que signifiait être reine. Elle avait suivi les leçons d’histoire de sa gouvernante Lehzen, ainsi que les exposés du doyen de Westminster sur la constitution, mais personne ne parvenait à lui expliquer ce à quoi une reine employait ses journées. Son oncle le roi semblait passer le plus clair de son temps à priser du tabac et à se plaindre de ce qu’il appelait les « foutus whigs ». Victoria ne l’avait vu avec sa couronne qu’une fois ; et c’était seulement parce qu’elle lui avait demandé de la mettre. Il lui avait expliqué qu’il la portait pour ouvrir les séances au Parlement et lui avait demandé si elle aimerait l’y accompagner. Victoria avait répondu que ça lui plairait beaucoup ; mais sa mère avait décrété qu’elle était trop jeune. Plus tard, Victoria avait entendu maman en discuter avec sir John ; elle regardait un album d’aquarelles derrière le canapé et ils n’avaient pas remarqué sa présence.
    — Comme si j’allais permettre qu’on voie Drina en public en compagnie de cet affreux vieux gâteux ! s’était exclamée sa mère avec mauvaise humeur.
    — Plus vite il se soûlera à mort, mieux ce sera, avait affirmé sir John. Ce pays a besoin d’un monarque, pas d’un bouffon.
    La duchesse avait poussé un soupir.
    — Pauvre petite Drina ! Elle est si jeune pour endosser une telle responsabilité.
    Sir John avait posé la main sur le bras de la duchesse en déclarant :
    — Mais elle ne régnera pas seule. Vous et moi, nous nous assurerons qu’elle ne fasse rien de stupide. Elle sera entre de bonnes mains.
    Sa mère avait minaudé, comme toujours dès que sir John l’effleurait :
    — Ma pauvre petite orpheline de père. Quelle chance elle a de vous avoir, vous, un homme qui la soutiendra en toute occasion.
    Victoria entendit des pas dans le couloir. D’habitude, elle devait rester au lit jusqu’au réveil de sa mère ; mais ce jour-là, elles se rendaient à Ramsgate pour respirer l’air marin et elles devaient partir à 9 heures. La jeune fille avait tellement hâte de s’en aller ! À Ramsgate, au moins, elle pourrait regarder par la fenêtre et apercevoir de véritables gens. Là, à Kensington, elle ne croisait jamais personne. La plupart des jeunes filles de son âge avaient fait leur début en société, à présent ; mais sa mère et sir John affirmaient qu’il était trop risqué pour elle de se trouver en contact avec des personnes de son âge.

     

    Alors, tentés?

     

  • Premières lignes #60

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    Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
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    Cette semaine, je vous présente Fandom de Anna Day

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    Prologue

    Dans une semaine exactement, je serai pendue.
    Je serai pendue pour mes amis, pour ma famille et, avant tout, par amour. Une perspective qui ne me réjouit pas beaucoup quand j’imagine le nœud coulant autour de mon cou, mes pieds qui cherchent à tâtons la terre ferme, mes jambes qui battent l’air… dansent dans le vide.
    Ce matin, je ne me doutais de rien. Ce matin, j’étais au Comic-Con et je respirais l’odeur des hot dogs mêlée à celle de la transpiration et des parfums, dans une atmosphère de costumes bariolés, de flashs d’appareils photo, de tambours et de violons. Et hier, j’étais au lycée en train de stresser à cause d’un exposé débile et je rêvais d’être dans un autre monde.
    Méfiez-vous de vos souhaits, car parfois la réalité peut vraiment vous jouer des tours.

     

    Alors, tentés?