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Premières lignes #66

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Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèqueLa liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
Le principe est de, chaque semaine, vous faire découvrir un livre en vous en livrant les premières lignes.
Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !

 

Cette semaine, je vous présente Il court, il court, le furet de M.J. Arlidge

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Venu de la mer, le brouillard noyait la ville. Il l’enveloppait comme une armée d’envahisseurs, effaçait tous les repères, masquait la lune, Southampton devenant un endroit insolite et troublant.
Silence de mort dans la zone industrielle d’Empress Road. Les ateliers de carrosserie avaient fermé, les mécaniciens et les employés du supermarché étaient partis, et les prostituées prenaient petit à petit leur place. En brassière et minijupe, elles tiraient sur leur cigarette, gagnant un soupçon de chaleur pour se protéger du froid glacial. Elles arpentaient la rue et s’efforçaient de vendre leur corps, même si dans l’obscurité elles ressemblaient davantage à des spectres décharnés qu’à des objets de désir.
Le type roula lentement, balaya du regard la rangée de junkies à moitié nues. Il tâcha de voir à qui il avait affaire, en reconnut quelques-unes çà et là, sans y attacher d’importance. Ce n’était pas elles qui l’intéressaient. Ce soir, il visait quelque chose qui sortait de l’ordinaire.
Il était partagé entre l’espoir, la peur et la frustration. Voilà des jours qu’il ne pensait qu’à ça. Il était si près du but à présent. Oui, mais si tout ça n’était qu’une fable, une chimère ? Il aplatit la main sur le volant. Elle devait nécessairement être là.
Personne. Personne. Pers…
Elle était là ! Toute seule, adossée au mur couvert de graffitis. Il se sentit brusquement surexcité. Elle dégageait quelque chose de particulier. Elle n’était pas en train d’examiner ses ongles, de fumer ou de papoter, elle se contentait d’attendre ; d’attendre qu’il se passe quelque chose.
Il quitta la route, se gara à l’écart le long d’un grillage. Il lui fallait être prudent, ne rien laisser au hasard. Il regarda s’il y avait de l’activité alentour, mais le brouillard les avait désormais complètement isolés. À croire qu’il ne restait plus qu’eux deux sur terre.
Il traversa résolument la route et se dirigea vers elle, puis se reprit et ralentit. Pas question de se précipiter, il se devait d’apprécier et de savourer la chose. L’attente se révélait parfois plus agréable que l’acte en lui-même, il le savait d’expérience. Il lui fallait prendre son temps. Dans les jours à venir, il aurait envie de revivre tout cela aussi précisément que possible.
En toile de fond, une rangée de maisons abandonnées. Plus personne ne voulant habiter ici, ces baraques étaient vides et insalubres. Jonchées d’aiguilles usagées et de matelas encore plus sales, elles servaient de repaire aux fumeurs de crack et faisaient office d’asile de nuit. La fille leva les yeux et le regarda venir vers elle, à travers sa lourde frange. Elle s’écarta du mur en silence, lui désigna d’un signe de tête la masure la plus proche, puis y pénétra, sans autre forme de procès. Comme si elle se résignait à son sort. Comme si elle savait.
Il pressa l’allure pour la rattraper, obsédé par son dos, ses jambes et ses talons ; son excitation était de plus en plus forte. Il l’entendait déjà crier et le supplier… Il accéléra quand elle s’engouffra dans le noir. Il n’y avait plus de temps à perdre.
Le parquet craqua lorsqu’il entra. La maison à l’abandon était exactement comme il l’avait imaginée dans ses fantasmes. Une odeur d’humidité lui assaillit les narines ; ici, tout était pourri. Il se dépêcha d’entrer dans le salon, devenu un véritable dépotoir de strings et de capotes. Aucune trace d’elle. Alors comme ça, ils allaient jouer au chat et à la souris ?
Dans la cuisine, personne. Il pivota sur ses talons, ressortit et emprunta l’escalier pour monter au second étage, ne cessant de regarder à droite et à gauche si sa proie était là.
Il entra sans hésiter dans la chambre. Un lit moisi, une fenêtre cassée, un pigeon mort. Mais toujours aucun signe de la fille.
La fureur le disputait maintenant à la concupiscence. Pour qui se prenait-elle, à l’emmerder ainsi ? Ce n’était qu’une putain, une petite merde ! Ah ça, elle le paierait cher.
Il poussa la porte de la salle de bains, ça ne donna rien, fit demi-tour et se rendit dans l’autre chambre. Il allait la lui massacrer, sa petite gueule à la c…
Sa tête bascula soudain en arrière. La douleur l’envahit ; on lui tirait violemment les cheveux pour l’obliger à reculer, à reculer… Il n’arrivait plus à respirer ; on lui collait un chiffon sur la bouche et le nez. Une odeur âcre lui chatouilla les narines, il réagit trop tard. Il se débattit de son mieux, mais déjà il tombait dans les pommes. Tout devint noir.

 

Alors, tentés?

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