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Romans contemporains - Page 3

  • [Livre] La gitane aux yeux bleus

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    Lecture terminée le : 16 juin 2020

     

    Résumé : Atticus Craftsman, un trentenaire anglais venu à Madrid afin de fermer l’unique librairie de l’entreprise de son père qui n’est pas rentable, a disparu. Cette librairie a une particularité : elle n’est gérée que par des femmes et celles-ci, Berta, Soleá, María, Asunción et Gaby, possèdent un plan pour empêcher la fermeture. Il semblerait qu’elles aient donc à voir avec la mystérieuse disparition d’Atticus, survenue quelques temps après son arrivée. L’inspecteur Manchego, chargé de l’enquête, va tant bien que mal essayer de comprendre ce qu’il s’est passé.


    Auteur : Mamen Sánchez

     

    Edition : Gallimard

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : 04 Juin 2020

     

    Prix moyen : 22€

     

    Mon avis : Malgré ce que le résumé pourrait laisser croire, ce roman tient plus du roman contemporain que du policier.
    Certes, il y a bien un policier dans l’histoire mais, sans aller jusqu’à dire qu’il ne sert à rien, il est plus un prétexte à rire qu’à voir appréhender des criminels.
    Malgré des sujets parfois graves, parfois émouvant, l’auteur a une plume qui passe sans transition et sans difficulté de l’émotion à la quasi-absurdité.
    On a donc des anglais en Espagne… et attention, des anglais très…anglais, vraiment très très anglais. Et puis pourvus de ces noms à coucher dehors (Marlow, Atticus…).
    Quasiment tous les moments drôles et/ou absurdes ont lieu en présence de cette famille bizarre comme tout et se pensant le summum de la distinction et du bon goût.
    En revanche toute l’émotion est ressenti en présence de l’une (ou plusieurs) des cinq femmes s’occupant de la version espagnole de la revue littéraire appartement à la famille anglaise.
    Berta, Asunción, Maria, Gaby et Solea sont exceptionnelles. Chacune a son histoire, chacune ses problèmes, elles sont d’âges divers, ont des vies familiales différentes, mais sont soudées comme les doigts de la main.
    Je ne saurais dire quel personnage j’ai préféré tant ils sont tous sympathiques (à part 1, mais il est là pour qu’on le déteste. Quant aux parents d’Atticus, s’ils ne sont pas à proprement parlé sympathiques, ils sont si involontairement drôles qu’ils entrent sans problèmes dans la catégorie « personnages appréciés »).
    Dans les personnages secondaires, j’ai adoré plus que tout la grand-mère de Soléa, Remedios. Elle est vraiment géniale (comme tout le reste de sa famille, d’ailleurs).
    J’ai vraiment beaucoup aimé ma lecture.
    Quelqu’un a dit dans son avis que ce roman serait vraiment parfait pour être adapté au théâtre.
    Je suis tout à fait d’accord, une pièce adaptée de ce roman serait surement géniale.

     

    Un extrait : Berta Quiñones, la pauvre, n’avait pas fermé l’œil de la nuit. Debout depuis six heures du matin, elle tuait le temps en attendant de pouvoir appeler les filles, réfléchissant à la manière dont elle leur annoncerait la mauvaise nouvelle, tout en lançant une machine, astiquant le sol de la cuisine, arrosant les plantes et passant l’aspirateur.
    Ce n’était pas son programme habituel du dimanche. Berta était l’exact inverse d’une maniaque du ménage. Les jours de congé, elle oubliait tout et tout le monde pour trainer au lit jusqu’à pas d’heure, comme une fillette solitaire et heureuse. Puis elle se préparait un café au lait, sortait sur le balcon et adressait son plus beau bâillement à sa rue déserte avant de passer le reste de la matinée à lire.
    La concernant, la solitude avait été un choix délibéré et avisé. Bien entendu, comme toutes les célibataires de la littérature, elle avait vécu dans sa jeunesse sa propre histoire d’amour non partagée. Et pas qu’un peu. En vérité, et Berta avait un peu honte de se l’avouer, le garçon de ses rêves n’avait même jamais soupçonné l’amour qu’elle lui portait. Jamais ils n’avaient échangé un seul mot. Ils ne se voyaient que de loin, et l’on peut penser qu’après les cinq années que dure leur « histoire » - au cours desquelles il ne leva qu’une fois la tête pour la regarder -, il n’eut pas la moindre pensée pour la fillette à lunettes, aux longues nattes, qu’il aperçut un matin en train de l’observer depuis le balcon de sa maison, la première du village, face au bureau du télégraphe.

     

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  • [Livre] Dix millions d'étoiles

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    Lecture terminée le
    : 16 août 2019

     

    Résumé : Adam est hyperactif : il a des tas d'amis et ne s'arrête jamais de courir. Quand on lui demande de prendre sous son aile un petit nouveau très introverti, il accepte sans hésiter. Très vite, il comprend que ce garçon n'est autre que Julian, un orphelin qui a vécu chez lui autrefois et dont il avait perdu toute trace. Adam est heureux de ces retrouvailles, alors que Julian est l'ombre de lui-même. Déterminé à l'aider et à comprendre ce qui s'est passé, Adam va découvrir des secrets qui pourraient coûter cher aux deux garçons...


    Auteur : Robin Roe

     

    Edition : PKJ

     

    Genre : Roman Contemporain

     

    Date de parution : 2018

     

    Prix moyen : 18€

     

    Mon avis : Je ne lis jamais un livre sans avoir lu le 4ème de couverture car c’est cette lecture qui me décide à acheter ou non un livre.
    Mais là, je l’ai depuis un bail et j’ai décidé de me lancer sans le relire.
    Dès le début de ma lecture, j’ai ressenti un malaise concernant Julian.
    Julian a 14 ans mais il a le comportement d’un enfant de 10 ans. Très vite, on apprend que ses parents sont morts et en fait on dirait qu’il a cessé d’évoluer depuis ce moment.

    Mais au-delà de ses problèmes d’expression orale, de timidité, etc…, Julian semble avoir de bien plus gros problèmes.
    On sait assez vite ce qu’il en est de manière générale, mais jamais je n’aurais pu soupçonner l’ampleur de ce qu’il va se passer.
    Adam, lui, a presque 18 ans. Bon élève, apprécié de tous ses profs passés et présents, il est, depuis sa petite enfance, atteint d’hyperactivité et, même s’il me fatiguait à sauter partout, il a l’air de plutôt bien gérer son problème.

    Adam a rencontré Julian quand lui-même était en CM2 et avait participé avec sa classe à une sorte de tutorat de lecture d’élèves plus jeune.
    Puis, après la mort des parents de Julian, celui-ci avait été placé chez Adam et sa mère, jusqu’à ce que son oncle n’en réclame la garde.
    Russel, l’oncle en question, impose des règles qui semblent assez simples au premier abord mais qui se révèlent de plus en plus étouffantes, strictes et absurdes au fil des pages.
    Mais l’auteur ne se contente pas de suggérer ce que subi Julian, non, elle ne nous épargne aucun détails et j’ai eu à plusieurs reprise envie de pouvoir entrer dans le livre pour sortir Julian de là.
    J’ai beaucoup aimé la mère d’Adam. C’est une mère attentive sans être étouffante et elle devient un vrai tigre à dents de sabre quand on s’en prend à son fils.
    Du côté des amis d’Adam, les filles deviennent très vite très protectrices envers Julian, mais le plus intéressant de tous est Charlie. Il a un sale caractère, il est explosif, susceptible… Il n’y a guère que sa petite amie « en pointillé », Allison, pour le calmer et Adam qui lui, a pour technique de l’exaspérer.
    On pourrait croire que Charlie déteste tout le monde, et en particulier Julian, mais il est bien plus complexe qu’il n’y parait.
    Même si on la voit très peu, j’ai beaucoup aimé Dolores, l’assistante sociale.
    J’aurais vraiment aimé qu’on la voit davantage avec ses explosions de couleur bienveillantes.
    Ce livre est un coup de cœur mais bon sang qu’est-ce que certains passages ont été durs à lire ! J’aurais aussi aimé en savoir plus sur la psychologie de Russel. J4ai trouvé qu’il aurait pu être plus approfondi.

    Malgré le fait qu’Adam ne prenne pas toujours les bonnes décisions, il reste la meilleure chance de Julian, un vrai roc, un véritable ami.

     

    Un extrait : Lorsque la dernière sonnerie de la journée retentit, on dirait que quelqu’un a donné un coup de pied dans une fourmilière. Ça grouille de partout et ça s’agite dans tous les sens. Soudain, il y a une explosion sonore – des gens qui parlent, des téléphones portables qui bipent. Mais moi, je reste pétrifié en haut des marches devant le lycée.

    Mon père est appuyé contre un grand arbre de l’autre côté de la rue.

    Quand j’étais petit, c’était généralement ma mère qui passait me chercher après l’école, mais de temps à autre, mon père terminait plus tôt et me faisait la surprise de m’attendre à la sortie. Au lieu de se joindre à la file des voitures, il venait à pied. Ses mains étaient toujours tachées d’encre, comme celles d’un enfant qui a peint avec ses doigts, et il me disait : Comment ne pas marcher par une si belle journée ? Il me disait pareil même lorsqu’il pleuvait.

    Bien sûr, l’homme de l’autre côté de la rue n’est pas mon père. Ce n’est qu’une illusion produite par la lumière du soleil filtrant à travers les branches sur un joggeur qui s’est arrêté pour reprendre son souffle.

    Je reste planté là et je me sens lourd.

    Tellement lourd que les grandes marches me font l’effet d’une montagne qu’il faut que je descende. Tellement lourd que je ne parviens pas tout de suite à rassembler l’énergie nécessaire pour entamer le long trajet à pied jusqu’à chez moi.

    Alors que je suis à un peu moins d’un kilomètre du lycée, je me mets à frissonner. L’automne est là, mais trop tôt, j’ai l’impression. Un peu comme si je n’avais pas vu passer les trois derniers mois parce que certaines choses sont censées arriver chaque été.

    Je suis censé aller à la plage avec mes parents. Nous sommes censés voir des feux d’artifice, acheter des cierges magiques et chercher des coquillages. Je suis censé me coucher tard, manger des glaces à l’eau assis sous le porche à l’avant de la maison pendant que ma mère joue de la guitare et que mon père dessine. Et puis, alors qu’il me borde dans mon lit, papa est censé me demander : Combien d’étoiles ?

    Les très bons jours, je suis censé dire neuf ou dix, mais quand j’ai passé une journée extraordinaire, la meilleure de ma vie, je suis censé tricher et dire genre dix mille étoiles.

    Sauf que nous n’avons pas pu voir de feux d’artifice, ni manger de glaces à l’eau, ni faire aucune des activités de l’été, et j’ai cette douleur en moi, comme si je ne m’étais pas réveillé le matin de Noël.

     

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  • [Livre] J'irai revivre sous d'autres étoiles

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    Lecture terminée le : 04 août 2019

     

    Résumé : A 40 ans, la vie de Mathilde vole en éclats : elle découvre que son mari est infidèle et décide de le quitter. Mais comment se reconstruire ? Pour trouver des réponses, elle décide de réaliser un rêve : partir pour un long périple dans le désert.
    Au cœur de cette nature sauvage et grandiose, Mathilde rencontre des êtres qui, comme elle, ont été cabossés par la vie et sont à la croisée des chemins. Entre fous-rires et larmes, chacun se livre et retrouve un certain goût de vivre.
    Loin de ruminer sa peine au fin fond d’une contrée sauvage, Mathilde se rend compte qu’à quarante ans, son avenir lui appartient toujours. Et qu’il n’est jamais trop tard pour tout recommencer.
    Vivre ses rêves, enfin.


    Auteur : Francia Place

     

    Edition : France loisirs

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : 2019

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Quand Mathilde découvre que son mari la trompe, sa petite vie bien rangée vole en éclat. Le mari volage en rajoute une couche en rejetant la faute sur elle par cette faute : « Pense à la jeune fille que tu étais et regarde la femme que tu es devenue ».
    Tiens donc, ben qu’à cela ne tienne : depuis 20 ans, Mathilde part chaque année en vacances au même endroit parce que son crétin de mari refuse de découvrir quelque autre lieu que ce soit.
    Et bien là, c’est fini ! Voilà Mathilde qui assouvit un rêve de jeunesse en réservant un trek dans le désert marocain. Que son imbécile de mari se débrouille avec la maison et leur ado de fils, elle, elle prend le large !
    Durant son voyage, elle va rencontrer 4 personnes qui sont, elle aussi, venu essayer d’oublier leurs problèmes dans le désert.
    Aline a passé 15 ans à lutter pour élever ses enfants, pour joindre les deux bouts après la disparition de son mari. Et voilà-t-il pas que le bonhomme est revenu comme une fleur, des explications oiseuses plein la bouche.
    Frédérique, elle, est venue dans le désert pour tenter de se débarrasser de ses peurs. Et les peurs, ce n’est pas ce qui manque, chez Frédérique.
    Patrick, lui, souffre de dépression mais les origines de son mal être sont complexes.
    Enfin, Henry, qui ne dit pas pourquoi il fait ce voyage. Mais au vu de son attitude hautaine, méprisante et agressive, on se dit que ça doit être du lourd. Et en effet, c’est du très lourd !
    Au fil de leur voyage, ils se découvrent, voient au-delà de la raison qu’ils ont invoquée lors de leurs présentations.
    Chacun va apporter aux autres et apprendre des autres, non seulement de leurs compagnons de voyages mais aussi des autochtones qu’ils vont croiser.
    Dans le désert, Mathilde va réfléchir à sa vie à ce qu’elle veut en faire à présent. Elle revient sur les rêves qu’elle a abandonnés pour se consacrer à sa famille.
    Le moins qu’on puisse dire, c’est que le voyage va être profitable à Mathilde.
    La fin ne nous dit pas ce qu’elle va décider concernant son mari, mais j’espère qu’elle va le virer à coup de pompes bien placés !

    J’ai beaucoup aimé ce petit livre qui perle de sujets difficiles sans jamais tomber dans le mélodrame et sur un ton résolument optimiste.
    Pas un coup de cœur, mais presque !

     

    Un extrait : Le briquet, à ce moment-là, ne sait pas à quel point il va être utile. Et changer la vie de la personne qui le triturait compulsivement. Le briquet, si pratique et si banal, atterrit sur le clavier de l’ordinateur de Vincent, rallume l’écran auparavant en veille.
    De nouveau, un diaporama des images de l’Afrique qui défile : des hommes, des paysages, le soleil, un désert. Mathilde tique sur la dernière photo. Celle du désert. La photo d’un rêve enfoui, oublié, écrasé par des années de routine et de certitudes. D’abnégation de soi aussi.
    Elle regarde l’écran, son amie, de nouveau l’écran. Une idée germe en elle, comme une corde lancée par l’univers pour la raccrocher à la réalité. A l’espoir.
    L’état provoqué par la consommation de cannabis s’envole instantanément. Jamais elle ne s’est sentie aussi lucide. Et aussi sûre d’elle.

    - Je vais partir ! s’écrit-elle, Léa, je vais aller dans le désert.

    - Quoi ?

    - Oui, je vais partir dans le désert ! De toute façon, je ne peux pas rester là et croiser Antoine tous les jours, ce n’est pas possible. Soit je m’en prends à lui, soit je me fais du mal.

    - Ah non, Mathilde, t’es pas sérieuse, tu ne vas pas faire une connerie, quand même ! Hé !

    - Mais non, rassure-toi ! fait Mathilde en balayant les craintes de son amie d’un geste de la main. Je ne parlais pas de ça. Mais ça va me bouffer, de rester là, je ne peux pas.

    Léa hausse les sourcils, les yeux interrogateurs.

    - T’es sérieuse ? Tu ne devrais pas plutôt réfléchir ? T’es pas vraiment dans ton état normal, là.

    Mathilde se redresse, comme illuminée. Cette idée improbable qui vient de lui traverser l’esprit, qui vient de lui apparaître comme la meilleure des solutions possibles, lui donne une énergie incroyable, la remplit d’une force nouvelle, terriblement tentante.

    - Mais oui, bien sûr que je suis sérieuse ! Je vais partir dans le désert ! J’en rêve depuis que je suis adolescente. Antoine n’a jamais voulu y aller. Je vais réaliser mon rêve, Léa, je vais aller dans le désert !

     

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  • [Livre] L'épicerie Sansoucy - L'intégrale

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    Lecture terminée le : 02 août 2019

     

    Résumé : Montréal, 1935. Dans le quartier ouvrier de Maisonneuve, la pauvreté règne et le chômage est le pain quotidien des miséreux. La famille nombreuse de Théodore Sansoucy s'entasse dans un logement au-dessus de son épicerie-boucherie avec les sœurs de sa femme Emilienne.

    Irène, l'aînée, est la vieille fille sage de la maisonnée. Léandre, forte tête, et Marcel, étudiant peu talentueux, entretiennent des relations tendues avec leur patron de père. Edouard, qui rêve de se marier avec la fille du notaire, Simone, amoureuse d'un Irlandais, ainsi que l'impénétrable Placide complètent le portrait de cette fratrie pour le moins hétéroclite.

    Derrière le comptoir, l'épicier reçoit des confidences, les dames venant colporter les ragots parfois cocasses du voisinage. Cependant, les commentaires sont bien moins drôles à entendre lorsqu'ils concernent sa vie familiale. Surtout s'il s'agit des frasques de ses enfants…


    Auteur : Richard Gougeon

     

    Edition : France loisirs

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : août 2018

     

    Prix moyen : 25€

     

    Mon avis : Autant je déteste tomber sur du patois québécois au détour d’un thriller, d’une romance ou autre roman, autant là, ça ne m’a pas dérangée.
    Mais bon une histoire familiale dans la classe moyenne du Québec de 1935, il fallait un peu s’attendre à y voir du patois québécois.
    On suit l’histoire de l’épicier Théodore Sansoucy et de sa très (trop) nombreuse famille. L’homme n’est pas agréable : gueulard et autoritaire, il exploite les membres de sa famille sans scrupule, furieux de devoir leur verser un salaire misérable mais n’hésitant pas à leur demander de payer leur pension.
    Son épouse, Emilienne, lui donne un coup de main.
    Du côté de ses enfants, l'aînée, Irène, travaille à l’usine, la plus jeune Simone, dans un restaurant.
    En ce qui concerne les fils, Léandre, le plus âgé, et Marcel, le plus jeune, travaillent à l’épicerie à plus ou moins plein temps. Le second fils, Edouard, est notaire et le 3ème fils, Placide, est placé chez les religieux.
    A tout ce petit monde s’ajoute les 3 sœurs d’Emilienne, Héloïse, Alida et Alphonsine, dont une seule occupe un emploi.
    Autour de ce petit noyau, se rajoute un gendre, deux belles-filles, le frère d’Emilienne, celui de Théodore, les amis des uns et des autres et bien sûr les clientes.
    L’impression générale qui me vient après ma lecture c’est : Mais quelle bande de minables !
    Ils sont tous plus pathétique les uns que les autres. Entre ceux qui se complaisent à médire, les magouilleurs, ceux qui méprisent leurs origines, ceux qui jugent… Ils sont détestables.
    Heureusement, il y en a quelques-uns qui relèvent le niveau.
    Pour commencer, et surtout, Irène, l'aînée des filles. Elle est douce, attentive, sait apaiser les conflits et aide sa mère à tenir la maison en plus de son emploi à l’usine. S’il y a un reproche à lui faire, c’est peut-être de ne jamais penser à elle.
    La plus jeune des filles, Simone, et la femme de l'aîné des fils, Paulette, ont bon fond mais ne sont pas des lumières (mais bon, elles sont aimables).
    Placide, le 3ème fils, met un peu de temps à se détendre et à trouver sa voie, mais il est dépourvu de méchanceté, tout comme son frère Marcel, le plus jeune de la fratrie qui est bosseur et qui ne délaisse pas son travail malgré les critiques incessantes de son père qui en a fait son souffre-douleur.
    Comme c’est une histoire familiale, il n’y a pas vraiment de but, d’objectif.
    Pour autant, j’ai trouvé que le livre se terminait de manière un peu abrupte.
    J’aurais aimé une fin peut-être plus tranchée, qui ne donne pas l’impression de finir au milieu d’une phrase.
    Même si les personnages sont dans l’ensemble peu sympathiques, avec leurs magouilles, une chose est sûre, c’est qu’on ne s’ennuie pas une seconde.
    On quitte la famille Sansoucy en se disant que, puisqu’ils se sont sorti de toutes leurs embrouilles, il n’y a vraiment de chance que pour la canaille !

     

    Un extrait : Une jeune fille écorchée entra en catastrophe, laissa la porte entrouverte et se précipita à l’étalage des paquets de gommes à bulles, en prit un qu’elle déballa rapidement, engouffrant quatre bonnes mâchées.

    — Dépêche-toi, ma Simone, tu vas être en retard au restaurant ! proféra son père.

    Simone rumina sa chique en bavardant deux minutes avec son frère et frôla l’épicier en lui donnant une bise sonore avant de faire éclater une immense bulle et de sortir en faisant claquer la porte.

    Madame Robidoux se pencha vers sa compagne en empruntant un petit air mesquin. La minijupe grise à plis pressés surmontée d’un chandail d’un rouge flamboyant qui retombait mollement sur les hanches de l’adolescente de seize ans l’avait scandalisée.

    — Lui avez-vous vu le rase-trou, mademoiselle Lamouche ? mentionna-t-elle.

    — Qu’est-ce que vous dites, madame Robidoux ? réagit l’épicier, subodorant une remarque offensante à l’égard de sa fille.

    — Je dis que c’est pas une heure pour commencer son épicerie, commenta la dame. Il y a du monde comme la Bazinet qui sait pas vivre.

    — À part de ça, elle reste dans un troisième sur Orléans, au nord de Rouen, renchérit Léandre.

    — Un beau jeune homme comme vous a sûrement autre chose à faire le samedi soir que d’attendre que la dernière cliente de la semaine passe la porte, ajouta madame Robidoux, en donnant un coup de coude à sa compagne.

    — Justement, j’ai hâte d’en finir, répondit le commis, esquissant un sourire poli.

    Madame Robidoux et mademoiselle Lamouche quittèrent le magasin. L’angélus du soir sonna. Et Marcel n’avait pas terminé les livraisons. Léandre acheva de balayer le petit coin qui lui restait. D’autres traînards pourraient surgir à l’épicerie. L’idée d’éteindre quelques ampoules lui traversa l’esprit, mais cela s’avérait inconvenant : madame Bazinet était encore à la boucherie. Papier à la main, il entreprit de remplir la commande en rêvassant aux petits plaisirs que lui et Paulette se permettaient le samedi soir.

     

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  • [Livre] Un automne à Kyoto

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    Lecture terminée le : 14 juillet 2019

     

    Résumé : Passer l'automne à Kyoto. Toute une saison, autant dire une éternité... Margaux en rêvait depuis toujours. Mais la veille de son départ pour le Japon, elle n'a plus envie. Entre-temps, elle a rencontré Mathias et ça change tout. Comment va-t-elle supporter ces trois longs mois de séparation, privée de Mathias, de ses caresses et ses baisers ? Pour ne rien arranger, elle vient d'apprendre que sa mère ne faisait plus partie du voyage et qu'elle-même allait jouer les jeunes filles au pair, coincée entre un père pas facile à vivre et une petite sœur énergique comme une pile électrique. Si elle savait ! Là-bas, Margaux va s'émerveiller devant ses premières feuilles d'érable rouges, les momiji, les fleurs de camélia et les temples illuminés. Elle va rencontrer Éric Dufay, jeune photographe au sourire carnassier et aux yeux pétillants qui a un don certain pour l'agacer. Là-bas, l'automne va passer plus vite que prévu.


    Auteur : Karine Reysset

     

    Edition : L’école des loisirs

     

    Genre : Contemporain

     

    Date de parution : 2010

     

    Prix moyen : 10€

     

    Mon avis : Un automne à Kyoto est un tout petit livre de moins de 200 pages mais qui m’a provoqué bien plus d’émotions que bien des pavés.
    Margaux, 16 ans, était impatiente de partir passer une saison au Japon, en famille, jusqu’à ce qu’elle rencontre Mathias et qu’elle apprenne que sa mère ne sera finalement pas du voyage.
    Or, entre son père artiste, taciturne et dépressif, incapable de passer du temps avec ses filles, et sa sœur de 4 ans, véritable pile électrique épuisante, Margaux n’est plus guère emballée par le projet.
    Arrivée au Japon, elle peine à trouver sa place. Elle est enfermée dans un rôle de petite fille par son père qui demande à un voisin de les surveiller quand il s’éloigne d’elles un quart d’heure et en parallèle, par son attitude distante, il lui demande d’endosser son rôle d’adulte pour tenir la maison et s’occuper sans cesse de sa sœur, ce qui épuise l’adolescente qui n’a pas un instant à elle.
    Très vite, elle commence à douter de la raison invoquée par sa mère (un travail) pour ne pas venir. Elle sent que son petit monde est en train de s’effondrer et communiquer avec Matthias est moins satisfaisant que prévu, le jeune homme n’étant clairement pas intéressé par tout ce qui touche Margaux. Mais une amourette d’ado de moins d’un mois peut-elle vraiment survivre à trois mois de séparation, alors qu’ils se connaissent finalement bien peu et n’ont quasiment jamais passé de moments en tête à tête, Mathias étant, comme tous les garçons de son âge, greffé à sa bande de potes ?
    Tout cela, Margaux nous le raconte trois mois après les faits. Elle nous parle donc avec un certain recul et répond souvent à nos questions au moment où on se les pose. Je l’ai trouvé très sévère envers elle-même.
    J’ai éprouvé une forte antipathie pour son père, qui se sert de ses filles comme d’armes contre son épouse. C’est le type même du gars qui veut priver sa femme de la présence de ses enfants, mais dont on sent que s’occuper de sa fille de 4 ans le gonfle profondément, et qui compte donc sur sa fille adolescente pour gérer tout ça, sans se préoccuper de si cela met la jeune fille en difficulté pour travailler ses cours (CNED).
    Du moment que Môssieu a la paix !
    En revanche, j’ai vraiment beaucoup aimé la mère, bien qu’on ne la voie qu’à travers ses lettres et quelques appels téléphoniques. J’ai particulièrement aimé la lettre qu’elle envoie à Margaux pour lui expliquer la situation tout en indiquant clairement que les choix qu’elle fait en tant que femme ne regardent qu’elle. C’est important car même si sa fille lui en veut sur le moment, c’est une manière de lui dire : ce n’est en rien ta faute, tu n’as aucune responsabilité dans cette histoire, c’est une décision personnelle.
    Quant à Éric, le photographe, je n’ai rien pensé de particulier de lui. C’est un homme à un tournant de sa vie, s’engageant sur un chemin dont il n’est pas sûr. Une certaine faiblesse sous ses airs de bad boy qui lui permet de se laisser émouvoir par l’adolescente. Par un mauvais bougre, pas un héros romantique non plus.
    Il n’a d’intérêt qu’en cela où il permet à Margaux de se découvrir elle-même.
    L’écriture est poétique. Dans les réflexions de Margaux, on trouve des haïku, des listes aux titres à rallonge…
    La description de Kyoto est zen, on croirait voir une carte postale, et c’est presque à regret qu’on referme ce livre plein d’émotions et de mélancolie (et qu’on se dit qu’on va économiser pour aller visiter Kyoto !)

     

    Un extrait : Cette salle, sans porte ni fenêtre, ouverte sur la nature, donnant sur cyprès immense soutenu par une dizaine de tuteurs aussi épais que des troncs d’arbres, invite à la méditation, à la réflexion ; trois minutes, une heure, sept ans, une décennie, pour repenser à tout ce qui s’est passé ces trois derniers mois. Cet arbre-là est là depuis près de huit siècles, qui suis-je face à lui ?
    Margaux, seize ans et demi en théorie, une sœur de quatre printemps, des parents qui s’aiment, des parents qui se séparent, un amoureux, deux amoureux (plus d’amoureux ?). Je pourrais très bien être née de la dernière pluie ou avoir déjà traversé les millénaires accrochée au dos d’un éléphant ou d’un papillon, me ballottant au gré du vent.

     

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  • [Livre] La merveilleuse boutique de crèmes glacées de Viviane

    La merveilleuse boutique de crème glacée de Viviane.jpg

     

    Lecture terminée le : 27 juin 2019

     

    Résumé : Quand Imogen et Anna héritent de façon totalement inattendue de la petite boutique de crèmes glacées de leur grand-mère, leur vie va se trouver chamboulée. Le glacier qui se trouve à Brighton en bord de mer possède énormément de charme mais n'attire plus les clients. L'été approchant à grand pas, les deux sœurs vont devoir trouver des solutions ! Leur meilleure volonté pourra-t-elle surmonter les tensions dans leurs familles leurs vies sentimentales agitées et le très réputé climat anglais ? Une chose est sûre, cet été ne sera pas comme les autres...


    Auteur : Abby Clements

     

    Edition : Prisma

     

    Genre : Contemporaine

     

    Date de parution : 05 juin 2014

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Il parait que c’était LE roman de l’été 2014. Je suis un poil en retard, pas vrai ? Il faut dire que question livres, je suis longtemps arrivée après la bagarre (comme les flics la cavalerie).
    Ça n’arrive plus (bon ok, disons que ça arrive moins souvent) depuis que je regarde booktube.
    J’ai donc vu souvent ce livre mentionné sans savoir exactement de quoi il parlait.
    Mais j’avais besoin d’une histoire se déroutant en été et ça me paraissait coller (la crème glacée m’a un peu mis sur la voie, j’avoue).
    Le début est un peu long et tout le côté « psychologique » (La passion du voyage d’Imogen, la relation amoureuse d’Anna, la dépression de leur père, les manipulations de la tante Françoise…) est survolé et la résolution de ces « problèmes » bien trop facile et rapide considérant l’importance donné à chacun d’entre eux quand ils sont présentés.

    Par contre, j’ai adoré la réhabilitation de la boutique, et surtout les expérimentations d’Anna qui me donnent envie d’enfin tester ma sorbetière.
    Sinon, tout est plutôt prévisible et notamment les amourettes des deux sœurs.

    En fait, il aurait fallu soit se consacrer exclusivement à la boutique et aux crèmes glacées et à ce qui touche directement à cela, soit faire un roman plus long pour intégrer les relations sentimentales des sœurs en les approfondissant correctement.

    Cela dit, je l’ai lu en pleine canicule et il faut avouer que lire un bouquin où il faut avouer que lire un bouquin où il n’y a pas à réfléchir est assez appréciable.
    C’était une lecture sympathique, à défaut d’être palpitante.

     

    Un extrait : Toute la famille connaissait bien la maison, surtout Tom et Martin qui y avaient grandi. Une maison mitoyenne de style victorien, dans une rue calme et résidentielle, aux pièces spacieuses et aux plafonds hauts, flanquée d’un grand jardin avec un bassin. Tous y avaient des souvenirs. Cette maison avait toujours été pleine de bruit et de vie.

    Viviane parlait depuis des années de trouver quelque chose de plus petit et fonctionnel. Mais Anna sentait bien qu’il lui était difficile de quitter le foyer qu’elle avait partagé tant d’années avec son mari Stanley.

    — Elle revient à parts égales à ses deux fils, Tom et Martin.

    Les frères échangèrent un signe de tête amical.

    Le notaire remonta légèrement ses lunettes sur son nez, et se tourna à nouveau vers ses papiers.

    — Passons à une autre part importante de la succession.

    Tous savaient ce qui allait suivre. Les mains manucurées de Françoise se levèrent vers son collier pour en triturer les délicates perles crème.

    Anna se mordit la lèvre. Tandis que le notaire feuilletait les pages, elle repensa à la conversation familiale au petit déjeuner, chez ses parents :

    — Elle n’est pas trop mal située, cette boutique, avait commenté Françoise en se versant une tasse de café noir. (La nourriture devant elle demeurait intacte.) Je crois qu’elle a du potentiel. Espérons que Viviane aura bien réfléchi à la personne la mieux placée pour le comprendre.

    L’ambition dans sa voix était impossible à ignorer.

    — Oui, je ne sais pas très bien ce que j’en ferais, avait dit Tom d’un ton un peu rêveur. (Il plongea une mouillette dans son œuf à la coque et la tint en l’air.) Je n’ai guère l’esprit d’entreprise, et ces temps-ci, je suis très occupé par mes sculptures. Et maman sait bien que Jan consacre tout son temps à l’agence. Enfin, elle savait bien, rectifia-t-il en posant sa mouillette au bord de son assiette, comme si sa faim avait disparu.

    — Et nous bien sûr, on vit à Paris, remarqua Martin en beurrant un toast.

    — Mais ce n’est pas forcément un problème, objecta Françoise en portant sa tasse à ses lèvres maquillées de rouge. Martin, tu sais bien que je cherchais un petit… Comment dit-on déjà ? Un petit projet. Ce serait peut-être la solution ? Bien entendu, nous devons attendre de connaître la décision de Viviane, mais espérons qu’elle aura montré davantage de sens des affaires que dans la gestion de sa boutique.

     

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  • [Livre] J'aime tout ce qui me rappelle que je suis pas la seule à souffrir sur cette Terre

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    Lecture terminée le : 15 juin 2019

     

    Résumé : Loveday travaille dans une librairie d'occasion et préfère la compagnie des livres à celle de ses semblables. Elle reçoit un jour trois mystérieuses livraisons de livres qui la plongent dans les souvenirs de son enfance difficile. Quelqu’un connaît le secret de sa vie. Est-ce Archie, son patron marginal et paternel ? Rob, l’amoureux éconduit qui ne cesse de la harceler ? Nathan, le poète-magicien qu’elle vient de rencontrer, celui qui pourrait l’aider à trouver les mots pour raconter son histoire ? Le moment semble venu pour elle d’affronter son passé et d’enfin tourner la page.


    Auteur : Stephanie Butland

     

    Edition : Milady

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : 17 octobre 2018

     

    Prix moyen : 18€

     

    Mon avis : Tout l’univers de Loveday, jeune femme de 25 ans, tourne autour de la petite librairie d’occasion où elle travaille dans la petite ville de York.
    Loveday est solitaire, elle se décrit elle-même comme une misanthrope et n’a pas vraiment l’intention de faire le moindre effort pour s’ouvrir aux autres, à part Archie, son patron.
    Elle a eu un petit ami, Rob, mais depuis qu’elle a rompu (et à juste titre), il la harcèle littéralement ce qui l’a conforté dans l’idée qu’elle se fait du genre humain.
    Loveday a eu une enfance difficile qu’elle s’efforce de cacher jusqu’à l’obsession.
    Le récit alterne entre trois périodes : le présent, en 2016 ; 2013 qui est la période où Loveday est sortie avec Rob et enfin 1999, qui est la période où son enfance à basculée.
    Sans vous dévoiler le secret de Loveday, je peux vous dire que j’ai trouvé son attitude à propos de tout cela très puérile. Qu’elle ait eu ce type de réaction au moment où tout est arrivé, c’est normal, qu’elle ait continué à avoir une réaction épidermique à ce sujet à l’adolescence, c’est également compréhensible, qu’à l’âge adulte, elle ait encore de la rancœur, je peux le concevoir, mais qu’elle continue à nier les faits 17 ans après, des faits dont elle avait déjà connaissance enfant, juste parce que la vérité lui déplait, là c’est un peu trop. A un moment il faut grandir, surtout quand son attitude rejailli sur d’autres personnes.
    Heureusement, il y a Nathan. Nathan, magicien confirmé et poète amateur, qui est bien décidé à tout faire pour faire sortir Loveday de sa coquille.
    Parallèlement à cette nouvelle rencontre, Loveday, en triant les cartons de livres déposés quotidiennement devant la boutique, tombe sur des livres issus directement de son passé, comme si quelqu’un voulait la forcer à y faire enfin face.
    J’ai eu un vrai coup de cœur pour Archie, le patron de la librairie, qui semble avoir vécu 1000 vies en une, et qui veille sur Loveday comme si c’était sa fille d’aussi près qu’elle veut bien le laisser approcher.
    Je crois que j’avais craqué sur ce livre dès le titre. C’est plus fort que moi, j’adore les titres à rallonge. Je les trouve tellement plus intéressants que les titres courts qui se veulent percutants. Bien sûr ça ne fonctionne pas avec tous les genres mais c’est parfait avec les romans contemporains.
    Sans mon agacement pour Loveday, ce livre aurait pu être un coup de cœur.
    Il reste quand même une excellente lecture.

     

    Un extrait : Un livre, c’est cet instant suspendu entre le craquement de l’allumette et le jaillissement de la flamme.
    Archie dit que les livres sont nos meilleurs amants et nos amis les plus exigeants. Il a raison. Mais j’ajoute aussi qu’ils peuvent blesser.
    Je croyais le savoir le jour où j’ai trouvé le Brian Patten, mais il est apparu que j’avais encore beaucoup à apprendre.
    Je termine toujours à pied le trajet jusqu’à la librairie où je travaille, en poussant mon vélo. C’est plus simple. Elle est située au cœur du vieux quartier de York, dans une rue pavée qui rétrécit à partir de l’arrêt de bus. Ce matin de février, je marchais donc à côté de mon vélo quand je failli heurter une de ces femmes qui se croient tout permis sous prétexte qu’elles circulent avec une poussette. Son engin à cheval entre la chaussée et le trottoir, elle attendait pour traverser, me barrant le passage.
    Je m’apprêtais à la contourner, quand mes yeux tombèrent sur un livre abandonné par terre à côté d’une benne à ordures, comme si quelqu’un l’avait lancé vers la poubelle en passant, sans vraiment viser. Bien entendu, je m’arrêtai net : on ne laisse pas un livre sur un trottoir.

     

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  • [Livre] Au bonheur des filles

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    Résumé : Du haut de ses 19 ans, Vivian sait déjà qu’elle ne veut pas du destin tout tracé par ses parents. Mais de sa bulle protégée, elle est loin de s’imaginer le tourbillon incroyable qu’est New York au début des années 1940. Alors, quand après un énième échec scolaire elle est envoyée chez sa tante Peg qui possède un théâtre en plein Times Square, Vivian n’en croit pas ses yeux. Entre la ville qui vibre sans cesse et la troupe d’artistes et de danseuses qui cohabitent joyeusement dans le théâtre, Vivian découvre l’exubérance, la fête et la liberté. Surtout auprès de sa nouvelle amie Celia, une sublime showgirl très émancipée pour l’époque… Mais un faux pas lors d’une virée nocturne fera hélas chavirer le nouveau monde de Vivian et la renverra à la case départ.

    Quand on a goûté au bonheur d’être une fille libre, peut-on y renoncer ?


    Auteur : Elizabeth Gilbert

     

    Edition : Calmann-Lévy

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : 05 Février 2020

     

    Prix moyen : 22€

     

    Mon avis : Vivian fait le désespoir de ses parents.
    Ceux-ci sont des petits bourgeois conservateurs, un peu snob et contre l’entrée en guerre des USA, ne supportant pas de voir Vivian, leur fille de 19 ans ne pas suivre à la lettre le chemin qu’ils ont tracé pour elle.
    Excédés, et malgré l’antipathie que son père ressent pour sa sœur, ils prennent la décision de l’expédier chez sa tante Peg, à New York.
    Peg, en bonne artiste un peu bohème, un peu alcoolique, beaucoup fauchée, qui tient un petit théâtre minable des bas quartiers de la ville, ne songe pas une seconde à imposer des limites à cette nièce qui lui tombe sur les bras, laquelle nièce ne tarde pas à s’accoquiner avec une showgirl d’à peu près son âge qui a bien l’intention de la dégourdir un peu.
    Et là, on plonge dans le tourbillon du New York des années 40 et de toutes les bêtises que peuvent faire deux filles de 20 ans immatures dans une ville où l’alcool coule à flot et où les hommes se jettent aux pieds des jeunes femmes pourvus qu’elles soient un minimum jolies.

    Toute cette histoire, Vivian, vieille dame, la raconte à Angela, une jeune dont on ne sait pas qui elle est sinon que Vivian a fait sa robe de mariée dans les années 70 et que, maintenant que ses deux parents sont morts, elle a une question à poser à Vivian.
    C’est pour y répondre que la vieille dame remonte à ses 19 ans et raconte toute son histoire.
    Et son histoire, c’est avant tout l’histoire d’une jeune fille de bonne famille qui s’émancipe en s’appropriant son corps.
    Alors, certes, elle ne prend pas que des décisions très heureuses, ni très intelligentes, mais ce sont ses décisions et elle ne veut laisser ni son père, ni son frère, ni un hypothétique mari s’arroger le droit de contrôler son corps à sa place et décider pour elle de son destin.
    Quant à l’évènement qui la réexpédie chez ses parents, comme dit dans le résumé, s’il est vrai que Vivian  a un peu « déconné », j’ai trouvé que cela prenait des proportions incroyables.
    A l’époque des faits, la jeune fille s’est effondrée et a accepté sans broncher, et même en les trouvant justifiés (un effet de son éducation) tous les reproches qui lui sont faits. Des décennies plus tard, elle s’insurge que seules les femmes aient eu à assumer les conséquences de cet évènement.
    Pour ma part, j’ai trouvé qu’on avait affaire-là à une belle bande d’hypocrites. Que ce soit la tante Peg qui se plie aux quatre volontés de son amie (impliquée indirectement) ou l’amie en question qui réécrit l’histoire et massacre littéralement Vivian psychologiquement plutôt que de s’interroger sur son propre entourage et ses propres actions, je les ai trouvées profondément injustes et à la limite du ridicule dans leur propos tant ils ne reflètent pas la vérité des faits.
    Quant au frère de Vivian, pour qui se prend exactement ce petit con moralisateur ?
    Et au milieu de toute cette bande d’hurluberlus tous plus indigne de confiance les uns que les autres, il y a Olive. Sérieuse et inébranlable Olive. Elle parait être une affreuse rabat-joie, mais sans elle la bande ne survivrait pas une semaine.
    On peut dire qu’elle est la seule adulte dans cette histoire et, si elle désapprouve l’attitude de Vivian, elle ne lui tourne pas le dos pour autant.
    A travers son récit, Vivian passe sans transition de l’insouciance aux restrictions et aux horreurs de la guerre.
    Vivian va murir dans cette seconde partie de sa vie à New York et prendre son destin en main.
    Je ne m’attendais pas à ce que la réponse à la question d’Angela nous entraîne dans cette direction mais j’ai beaucoup apprécié le tournant qu’a pris la vie de Vivian (ou plutôt le tournant qu’elle lui a fait prendre).
    Je n’ai pas lu Mange, prie, aime, le titre le plus connu de l’auteur mais j’ai vraiment aimé sa plume dans ce roman –ci et l’ambiance qu’on y trouve.
    J’ai mis un peu de temps pour le lire mais je ne regrette absolument pas de m’être lancée dans ce roman, bien au contraire, car j’ai passé un super moment et je le recommande sans réserve.

     

    Un extrait : Franchement, je ne comprenais pas ce que je faisais à la fac, hormis sacrifier à une destinée dont personne ne s’était donné la peine de m’expliquer le but. On me serinait depuis ma plus tendre enfance qu’un jour j’étudierais à Vassar, mais pour quoi faire ? Quel bénéfice était-je censée en retirer, exactement ? Pourquoi devais-je cohabiter dans cette petite chambre malodorante avec une sincère future réformatrice sociale ?

    A ce moment-là, de toute façon, je n’en avais déjà que trop soupé des études. L’enseignement que m’avait dispensé pendant toutes ces années l’Emma Willard School for Girls et ses brillantes diplômées de l’une ou l’autre des Sept Sœurs ne suffisait donc pas ? J’étais pensionnaire depuis l’âge de douze ans ; peut-être avais-je le sentiment d’avoir purgé ma peine. Combien de livres faut-il lire pour prouver qu’on est capable d’en lire un ? Je sais déjà qui est charlemagne, alors fichez moi la paix, telle était ma vision des choses.

    De surcroît, peu après la rentrée de ma funeste première année universitaire, j’avais découvert un bar, à Poughkeepsie, qui servait jusque tard dans la nuit de la bière bon marché au son d’un orchestre de jazz. Comme j’avais mis au point un plan astucieux pour m’évader discrètement du campus, qui impliquait de laisser une fenêtre ouverte, et de cacher une bicyclette à proximité (j’étais le cauchemar de la surveillante du dortoir), je fréquentais assidûment ce lieu. J’avais par conséquent un peu de mal à assimiler les conjugaisons latines au sait du lit puisque le matin, en général, j’avais la gueule de bois.

    Ce n’était cependant pas le seul obstacle.

    Il me fallait bien trouver le temps de fumer toutes ces cigarettes, par exemple.

    En deux mots, j’étais très occupée.

     

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  • [Livre] Et si les chats disparaissaient du monde

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    Résumé : A 30 ans, le narrateur de ce livre apprend par son médecin qu'il est condamné. Il ne lui reste plus que quelques semaines à vivre. Aussi lorsque le Diable, cet étonnant visiteur en short, lui propose un marché, n'hésite-t-il pas longtemps. Les clauses du contrat ? Effacer, à chaque jour que Dieu fait, une chose de la surface de la Terre lui vaudra vingt-quatre heures de vie supplémentaires... Les téléphones, les montres : jusqu'ici, c'est à qui perd gagne... Mais lorsque le Diable lui propose de supprimer les chats, sa vie va basculer une deuxième fois...


    Auteur : Genki Kawamura

     

    Edition : Pocket

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : 2018

     

    Prix moyen : 6€

     

    Mon avis : Je n’aurais jamais cru qu’un si petit bouquin me bouleverserait autant. A travers l’histoire du narrateur, se pose la question de la valeur que l’on accorde à ce qui nous entoure ainsi que la valeur que l’on accorde à sa propre vie.
    Un conte initiatique, oui, mais non dénué d’humour. Car de l’humour, il y en a, de l’humour noir, certes, mais de l’humour quand même.
    A-t-on réellement besoin du téléphone ?
    Après tout, on s’en est passé pendant des siècles. Comme dit le narrateur, l’absence de téléphone « ce n’est pas pratique » mais leur existence est-elle vraiment indispensable à la notre ?
    Et que serait-on prêt à perdre d’autre ? A-t-on besoin des films ? Des montres ? De la TV ? Des ordinateurs ? Des voitures ? Le fait qu’on s’en passait parfaitement avant leur invention les rend elles moins nécessaires à notre vie ?
    Avant la découverte du feu, les hommes préhistoriques se sont parfaitement débrouillés sans. Cela signifie-t-il que l’on peut s’en passer pour autant ?
    Ça peut paraître extrême comme comparaison mais c’est le fond de l’histoire : qu’est ce qui est important ?
    En parallèle de ces choix et de leurs conséquences, le narrateur revient sur son passé et sur les événements qui ont formé l’homme qu’il est aujourd’hui.
    Il parait qu’il y a une adaptation ciné de ce livre et que le livre est bien plus léger que le film.
    Quand je repense à l’état dans lequel la lecture du livre m’a mise, je ne suis pas sûre d’être capable de regarder le film.
    Ce livre m’a poussé à me demander à quoi j’étais capable de renoncer si j’étais forcée de faire des choix.
    Et vous ? Est-ce que vous feriez disparaître les chats ?
    Moi je sais déjà ce que je ferais !

     

    Un extrait : C’était il y a sept jours.

    Bien qu’indisposé par un rhume qui n’en finissait pas de s’aggraver, j’avais continué de distribuer le courrier, comme d’habitude. J’avais de la fièvre, et le côté droit de mon crâne commençait à m’élancer. Tu sais que j’ai horreur des médecins ; j’ai donc préféré m’en remettre aux médicaments en vente livre et ai laissé traîner l’affaire deux semaines durant. Puis j’ai consulté.
    Ce n’était pas un rhume.
    Mais un cancer du cerveau de stade 4.
    Il me restait six mois à vivre au mieux, mais je pouvais tout aussi bien y passer d’ici la fin de la semaine.
    Tel était le diagnostic du docteur, pour le moins sinistre.
    Il me parla de chimiothérapie et de soins palliatifs…
    Plusieurs choix semblaient s’offrir à moi. Mais je n’écoutais plus.
    Un souvenir auditif venait de ressusciter du fond de ma mémoire. Quand j’étais petit, on allait à la piscine durant les vacances d’été. Une fois, j’ai sauté dans le grand bassin. Plouf ! Glou, glou, glou. Je coulais.
    « Il faut toujours s’échauffer ! »
    La voix de maman. Je l’entendais mal du fond de l’eau.

    L’interminable séance a pris fin.
    Aussitôt que le médecin eut prononcé son dernier mot, j’ai laissé tomber mon sac et me suis dirigé vers la porte en titubant. Sourd aux appels du docteur, je suis sorti du cabinet en hurlant « Aaaaaah ! », ai bousculé les passants, suis tombé, ai roulé, me suis relevé. Puis j’ai couru, les membres agités de soubresauts pitoyables, jusqu’à me retrouver sous un pont où, incapable de faire un pas de plus, je suis tombé à genoux en sanglotant.
    Non, je déconne.
    Dans ces moments-là, étrangement, on a tendance à rester calme.

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  • [Livre] Les quatre filles du révérend Latimer

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    Résumé : Australie, début du XXe siècle. Les sœurs Latimer sont au nombre de quatre : Edda et Grace, les aînées, sœurs jumelles nées de la première union de leur père, un pasteur dont l’épouse est morte en couches ; Heather et Kitty, des jumelles également, filles de l’ancienne gouvernante du presbytère qui a épousé le révérend en secondes noces.

    En 1925, les sœurs âgées de 18 et 19 ans fuient l’austérité du presbytère et l’autorité maternelle pour se former au métier d’infirmière dans l’hôpital de leur ville natale, en Nouvelle-Galles du Sud.

    Là, chacune pourra aussi laisser libre cours à ses aspirations personnelles, dont la recherche de l’amour. Mais la Grande Dépression n’est pas loin, qui pourrait balayer bien des rêves d’émancipation dans une société encore très patriarcale…

    Une grande fresque sentimentale qui s’attache à la destinée de quatre jeunes femmes énergiques et attachantes.


    Auteur : Colleen McCullough

     

    Edition : Archipoche

     

    Genre : Roman contemporain

     

    Date de parution : Septembre 2016

     

    Prix moyen : 9€

     

    Mon avis : J’ai bien aimé ma lecture, malgré pas mal de longueurs, mais il est vrai que, quand j’ai terminé le livre, je n’ai pas eu d’autres pensées que : « Tout ça pour ça ? ».

    Chacune des sœurs Latimer a une personnalité bien distincte, au point qu’on en oublie qu’Edda et Grace, ainsi qu’Heather « Tufts » et Kitty sont jumelles.
    J’ai trouvé dommage que l’auteur survole Heather. Il faut dire qu’elle est la seule à ne pas faire de vagues. Sérieuse et raisonnable, elle cesse de voir son mentor quand leur réputation à tous deux serait susceptible de souffrir de leur amitié et revient vers lui quand ce danger est passé. Elle ne se bat pas bec et ongle pour avoir une avancée professionnelle, se contentant de se montrer à la hauteur et de saisir les opportunités qu’on lui propose. Elle ne souhaite ni trouver le grand amour, comme Grace, ni être mère de famille à tout prix, comme Kitty, ni même exercer un métier qui est encore très masculin, comme Edda. Elle est là, elle est solide et attentive, mais on dirait que, comme elle ne crée pas de scandale, elle ne vaut pas la peine de s’y attarder.
    Edda, elle, adore son métier d’infirmière, mais son rêve aurait été d’être médecin. Bien que la loi le lui permette, les femmes médecins n’ont pas la vie facile car il s’agit encore d’un métier très masculinisé. De plus les études ne sont pas données et son père, poussé par son épouse, ne lui a pas permis de suivre cette voie. Edda peut paraitre très autoritaire mais c’est parce qu’elle veut le meilleur pour les siens.

    Grace est sans doute celle que j’ai le moins appréciée. Elle est tour à tour pleurnicheuse, agressive, intéressée…

    A quasiment chacune de ses apparitions, elle m’a tapé sur le système.

    Enfin, il y a Kitty. Kitty ne vit que pour les enfants : ceux du service pédiatrique, puis ceux de l’orphelinat. Elle rêve plus que tout d’en avoir à elle. La malédiction de Kitty c’est sa beauté époustouflante. Sa mère l’a menée partout comme une bête de concours sans se préoccuper des sentiments de sa fille et, une fois libérée de cette mégère, elle continue à être jugée avant tout sur ses traits.

    Autour de ces quatre sœurs on voit plusieurs personnes. Le révérend Latimer, leur père, gentil mais trop effacé, Maud, belle-mère d’Edda et Grace et mère de Tufts et Kitty, malveillante et égoïste, Jack, qui se comporte parfois en gamin capricieux, Bear, totalement irresponsable, Charles, lamentable à tout point de vue, et enfin mes deux personnages secondaires préférés : le docteur Liam Finucam, ami et mentor de Tufts et Rawson Schiller, un politicien qui va être d’une grande importance dans la vie d’Edda.

    Le plus gros intérêt du livre, à mes yeux, c’est de nous dépeindre la vie en Australie une fois que le pays a été touché par la crise économique qui a débuté avec le crash boursier de 1929.

    En parallèle, on peut assister à l’émancipation de la femme avec entre autre la création du diplôme d’état d’infirmière qui va permettre à ces dernière d’être mieux rémunérée et donc plus indépendantes.

    Malgré tout, j’ai eu une impression d’inachevée. L’impression qu’il n’y avait pas de fin, qu’on arrêtait tout au milieu d’une scène. J’attendais plus de problème de la part de Maud, par exemple.

    Malgré tout, si le côté « saga familiale » m’a laissée plutôt froide, j’ai beaucoup apprécié le côté historique.

    On ne peut donc pas dire que c’était une mauvaise lecture, mais on est loin du coup de cœur.

     

    Un extrait : Ce n’était pas que Maude Latimer se comportât sciemment en tyran. Au contraire : elle se tenait pour une véritable sainte parmi les mères et les marâtres. Les quatre enfants ayant le même père, jamais elle ne se rendait coupable de discrimination entre Tufts et Kitty, ses propres filles, et les deux autres jumelles. C’est du moins ce qu’elle répétait à quiconque s’intéressait à elle de près ou de loin. Comment ces quatre adorables gamines auraient-elles pu irriter, fût-ce un seul instant, une femme qui s’épanouissait à ce point dans ses fonctions maternelles ? Et tout, en effet, aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes, ainsi que se l’imaginait Maude, si le destin n’avait joué à la fratrie l’un de ces petits tours dont il a le secret : Kitty, la plus jeune des jumelles de Maude, possédait une beauté bien supérieure à celle de ses sœurs, qu’elle éclipsait comme le soleil ternit l’éclat de la lune.

    Or, depuis la plus tendre enfance de la petite, jusqu’à ce jour censé célébrer son départ prochain, sa mère n’avait cessé de marteler à qui voulait l’entendre combien sa fille était parfaite. Et chacun s’accordait à reconnaître que l’épouse du pasteur avait raison… mais, mon Dieu, comme on se sentait las dès qu’on la voyait paraître, tenant fermement Kitty par la main, tandis que ses trois sœurs suivaient quelques pas en arrière. Les habitants de Corunda s’accordaient sur un point : Maude était en train de faire de Grace, Edda et Tufts les ennemies jurées de Kitty – elles devaient la haïr ! On était également d’avis que la pauvre Kitty, pour sa part, ne pourrait devenir qu’une jeune personne détestable, capricieuse et arrogante.

    La réalité vint démentir tous les pronostics. Pour quelle raison ? Le mystère demeurait entier, sauf aux yeux du pasteur, qui tenait l’affection mutuelle de ses filles pour une preuve irréfutable de l’amour divin. Bien entendu, Maude volait la vedette à Dieu Lui-même : c’était à elle, à elle exclusivement, affirmait-elle, que revenait le mérite d’avoir élevé quatre sœurs si joliment unies.

    Ces dernières ressentaient pour elle autant de pitié que d’antipathie, ne l’aimant qu’à la manière dont s’aiment les femmes d’une même famille, liées ou non par le sang. Quant à l’alliance que les jumelles avaient forgée contre leur mère ou belle-mère, elle était sans rapport avec le sort injuste réservé à Tufts, Edda et Grace, mais bien plutôt avec les tourments qu’endurait Kitty, objet de toutes les attentions de Maude.

    Kitty aurait pu se révéler une enfant exigeante et un peu peste, au lieu de quoi elle était silencieuse, timide et réservée. De vingt mois ses aînées, Edda et Grace furent les premières à s’apercevoir des effets dévastateurs du comportement de Maude sur sa jolie fillette ; Tufts ne tarda pas à partager leurs vues. Alors naquit la conspiration des trois sœurs pour arracher Kitty aux griffes de sa mère, conspiration qui, au fil du temps, ne cessa de gagner en intensité.

     

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