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Biographie et Témoignages

  • [Livre] Il était une fois … mon endométriose

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    Lecture terminée le : 07 mai 2021

     

    Résumé : L’endométriose touche une femme sur dix. Cette pathologie, qui se développe pendant les règles, est une maladie complexe et mystérieuse. Elle engendre souvent une errance médicale de plusieurs années et une mauvaise gestion des douleurs. Dans ce livre, MaY nous raconte son parcours, qui est malheureusement assez commun. Le docteur Marc Even, en charge de la relecture médicale, apporte des précisions et des explications sur cette maladie encore trop méconnue et mal prise en charge. Vous découvrirez ainsi, à l’aide de MaY et de son trait humoristique et frappant de justesse, ce qu’est exactement l’endométriose, comment elle se diagnostique et se soigne, mais aussi tous les conseils pour l’accepter et mieux vivre avec au quotidien.
    MaY Fait Des Gribouillis, illustratrice de talent, est atteinte d’endométriose. Elle raconte dans ce livre son parcours difficile, son errance diagnostique, ses FIV…
    Marc Even est gynécologue-obstétricien spécialiste de l’endométriose.


    Auteur : Marc Even et MaY fait des gribouillis

     

    Edition : Mango

     

    Genre : Témoignage, Santé, Développement personnel

     

    Date de parution : 19 Mars 2021

     

    Prix moyen : 15€

     

    Mon avis : En ce moment, on entend beaucoup parler d'endométriose. Il faut dire que ce n'est pas que ça n'existait pas avant, mais plutôt que les femmes qui en étaient atteinte ne voyaient aucun mot, aucun diagnostic posé sur ce qu'elles ressentaient

    Les choses sont en train de changer, mais le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elles ne changent pas vite.

    Pour ma part, je ne sais toujours pas si je souffre d'endométriose. D'après ce que j'ai pu lire à droite et à gauche, j'aurais tendance à dire que non et à pencher plutôt pour de l'adénomyose.

    Je sais que j'ai un SOPK, mais même ça, les médecins ont du mal à poser des mots dessus.

    J'ai tout entendu au sujet du SOPK et de l'endométriose (et je n'ai entendu parler de l'adénomyose que depuis quelques semaines), mais surtout, et de la part de médecins :

    - le SOPK et endométriose c'est très à la mode, tout le monde veut l'avoir (ben tiens, avoir mal tout le temps, être perpétuellement épuisée, c'est bien connu, c'est le kif suprême)

    - la douleur des règles, c'est juste de l'hystérie féminine (et ma main dans ton pif, c'est de l'hystérie ?)

    - Ah ben ça, avoir mal au moment des règles, c'est tout à fait normal, c'est le lot de toutes les femmes, prenez un spasfon et mettez-vous une bouteille d'eau chaude sur le ventre... (merci mamie... sauf que tu es pas ma grand-mère, connasse, tu es médecin !)

    Bref... vous l'avez compris, on n'est pas plus avancées.

    Quant aux divers témoignages, ils partent tous d'un bon sentiment, mais la plupart du temps ils sont sur le modèle "j'ai vaincu l'endométriose", "grâce aux plantes je vis mieux avec l'endométriose", "Après trois salutations au soleil chaque matin pendant 3 mois je suis tombée enceinte malgré l'endométriose"... bref, des témoignages qui ont cela en commun que tout est bien qui finit bien. Et si comme je le disais plus haut, cela part d'un bon sentiment, en général, non seulement ça n'aide pas, mais ça peut être aussi extrêmement culpabilisant (en mode, si ça fonctionne pour elle, pourquoi ça ne fonctionne pas pour moi, je ne dois pas faire ce qu'il faut).

    Et c'est pour ça que j'ai tellement apprécié l'ouvrage de MaY fait des gribouillis.

    Elle ne montre pas que ses succès, elle partage avec nous son parcours avec ce qu'il y a de défaite face à la maladie, de fatigue qui empêche de travailler malgré toute la volonté qu'on peut y mettre, les sautes d'humeur, l'infertilité contre laquelle on ne gagne pas toujours.

    Mais en plus d'être extrêmement déculpabilisant, et de nous faire nous sentir beaucoup moins seules face à ces symptômes (qu'ils résultent d'ailleurs de l'endométriose ou pas du tout), cet ouvrage est également une mine d'informations, les explications que nous donne l'auteur étant complétées par de petits points écrits par un spécialiste, le docteur Marc Even. Le tout de façon toujours très claire.

    Le livre est complété par, au début un sommaire complet, et à la fin un index permettant de retrouver des pages parlant de sujet précis.

    Quant aux illustrations de l'auteur, elles apportent un plus humoristique, allégeant ainsi ce sujet difficile sans en affaiblir la portée pédagogique.

    J'ai passé un excellent moment en lisant ce petit livre qui saura donner beaucoup d'explications à des symptômes dont on ne peut pas définir l'origine, aidant ainsi au dialogue avec les médecins.

    Mais même quand l'on n'est pas touché par cette saleté, il peut être utile de lire cet ouvrage et ainsi de peut-être ne pas contribuer au mal-être des personnes touchée avec des réactions maladroites (ou stupides).

    Bien sûr, il y a d'autres moyens de soulager les douleurs de l'endométriose que ceux dont parle l'auteur, mais il ne faut pas oublier qu'elle nous partage sa propre expérience et que, comme elle le dit si bien, il n'y a pas une endométriose, mais des endométrioses, soit presque autant que de personnes atteintes. Et comme nous ne sommes pas égales devant la douleur, il est difficile de répertorier tous les moyens de lutter contre ce fléau au quotidien.

     

    Un extrait :

     

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  • [Livre] Lire Lolita à Téhéran

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    Lecture terminée le : 14 mars 2020

     

    Résumé : Après avoir dû démissionner de l'Université de Téhéran sous la pression des autorités iraniennes, Azar Nafisi a réuni chez elle clandestinement pendant près de deux ans sept de ses étudiantes pour découvrir de grandes œuvres de la littérature occidentale. Certaines de ces jeunes filles étaient issues de familles conservatrices et religieuses, d'autres venaient de milieux progressistes et laïcs ; plusieurs avaient même fait de la prison. Cette expérience unique leur a permis à toutes, grâce à la lecture de Lolita de Nabokov ou de Gatsby le Magnifique de Scott Fitzgerald, de remettre en question la situation " révolutionnaire " de leur pays et de mesurer la primauté de l'imagination sur la privation de liberté. Ce livre magnifique, souvent poignant, est le portrait brut et déchirant de la révolution islamique en Iran.


    Auteur : Azar Nafisi

     

    Edition : 10/18

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 01 septembre 2005

     

    Prix moyen : 9€

     

    Mon avis : Lire Lolita à Téhéran n’est que la 1ère des quatre parties composant le roman d’Azar Nafisi.
    Je pense qu’il vaut mieux avoir lu les romans dont parle l’auteur avant de lire ce livre. Déjà parce qu’elle en raconte les éléments clefs, voire la fin de chacun d’entre eux, mais aussi parce qu’elle en fait une analyse qu’il est intéressant de découvrir en ayant connaissance de ces histoires.
    Azar Nafisi nous raconte la révolution islamique telle qu’elle l’a vécu de l’intérieur.
    J’ai trouvé vraiment intéressant cette analyse de la révolution faite en parallèle de l’analyse des livres.
    Elle montre le manque d’arguments des islamistes conservateurs pour justifier leur haine de l’occident, leur incapacité à distinguer la fiction de la réalité, mais aussi leur lâcheté et leur hypocrisie car ce qu’ils interdisent farouchement aux autres, il ne s’en prive pas eux-mêmes.
    On voit que bon nombre de personnes n’ont pas pris les islamistes au sérieux, y compris l’auteur. D’ailleurs, une scène dans un café montre à quel point elle a pu se montrer parfois irresponsable.
    D’un côté, elle fait preuve à la fois de courage et de prudence en ne prenant que des filles dans son séminaire, et de l’autre, elle achète ouvertement des livres interdits dénichés dans de vieux stocks (ou des livres en passe d’être interdit par le régime), rencontre un homme qui n’est pas son époux dans des lieux publics…
    On dirait parfois qu’elle cherche à se faire arrêter.
    Ce qui est le plus étonnant, c’est de voir à quel point les valeurs dans les fictions anglo-saxonnes, celles-là même que la république islamistes interdit à cause de leur « décadence », sont en fait proche de celles prônées par le régime. Les conventions sociales à l’époque de Jane Austen étaient même parfois plus strictes et plus codifiées.
    Le roman n’est pas raconté chronologiquement mais en fonction des souvenirs qui se rattachent aux divers romans qu’elle analyse.
    J’ai beaucoup aimé le style de l’auteur et lire la montée de la république islamique par une personne qui aime son pays et qui est revenue y vivre volontairement change des récits de ceux qui y sont retenus contre leur gré (comme dans jamais sans ma fille). D’ailleurs, si on sait que l’auteur est mariée, son époux n’est que très peu évoqué dans le livre et ne semble,  à aucun moment, tenter de contrôler les actes de son épouse.
    Même si tous les points de vue, tous les témoignages sont sans nul doute digne d’intérêt et éclairent chacun à sa façon la vie du peuple iranien, lire le témoignage d’une personne qui ne s’est pas trouvé dans un danger particulier (crime d’honneur, prison, mariage forcé…) montre à quel point tout iranien, quel que soit ses idées et son niveau de vie, a été impacté par le changement de régime.

     

    Un extrait : Pour recréer cet autre monde, celui qui s’étendait dehors, je ne peux une fois de plus que faire appel à votre imagination. Prenons une de mes étudiantes, disons Sanaz, quand elle quitte ma maison, et suivons-la jusqu’à sa destination finale. Elle nous dit au revoir, enfile sa longue robe et son foulard noirs par-dessus son jean et son tee-shirt orange, serre le nœud autour de son cou pour recouvrir ses énormes boucles d’oreilles en or.
    Elle tire sous le tissu quelques mèches rebelles, met ses papiers dans le grand sac qu’elle porte en bandoulière et sort sur le palier. Elle s’arrête un moment en haut des escaliers pour enfiler les gants qui cacheront son vernis à ongle.
    Suivons Sanaz dans l’escalier, jusqu’à la porte qu’elle ouvre, puis dans la rue. Vous remarquerez peut-être que son allure et ses gestes ont changé. Elle a tout intérêt à ne pas se faire remarquer, à ne pas être vue, ni entendue.
    Elle ne se tient pas droite, mais baisse la tête vers le sol et ne regarde pas les passants qu’elle croise. Elle marche vite, avec une certaine détermination. Dans les rues de Téhéran et des autres villes d’iran, la milice patrouille dans des Toyota blanches, quatre individus des deux sexes par voiture, armés de fusils, avec quelquefois un minibus qui les suit.
    On les appelle le Sang de Dieu. Ils surveillent les rues pour s’assurer que des femmes comme Sanza portent bien leur voile, qu’elles ne se sont pas maquillées, qu’elles ne se promènent pas en publiant avec d’autres hommes que leurs pères, leurs frères ou leurs maris. Sanaz va passer devant des slogans, citations de Khomeyni et d’un groupe appelé Parti de Dieu : LES HOMMES QUI PORTENT LA CRAVATE SONT LES LAQUAIS DE L’AMERIQUE. LE VOILE PROTEGE LES FEMMES. A côté de ce slogan un dessin au fusain : un visage sans traits encadré par un sombre tchador. GARDE TON VOILE, MA SŒUR. GARDE TES YEUX, MON FRERE.
    Si elle prend le bus, elle s’assied du côté des femmes. Elle doit monter par la porte de derrière et s’installer dans les dernières rangées, qui leur sont réservées.
    Mais dans les taxis, qui prennent jusqu’à cinq passagers et passagères, tous sont, selon l’expression consacrée, serrés comme des sardines, de même que dans les minibus où, selon nombre de mes étudiantes à qui cela était arrivé, les filles se faisaient tripoter par des barbus prétendant craindre Dieu.

     

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  • [Livre] La muette

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    Résumé
     : L’amour fusionnel d’une adolescente pour sa tante muette, l’amour passionné de celle-ci pour un homme tournent au carnage dans l’Iran des mollahs.


    Auteur : Chahdortt Djavann

     

    Edition : Flammarion

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 2008

     

    Prix moyen : 5€

     

    Mon avis : On a ici un court témoignage anonyme (juste un prénom : Fatemeh), écrit en prison par une adolescente de 15 ans, condamnée à mort pour un crime qu’on ne découvre qu’à la fin du récit.
    Le récit est parvenu à Chadortt Djavann par le biais d’une journaliste iranienne, qui, pour des raisons évidentes de sécurité, a tenu à rester anonyme. Elle-même est entrée en possession du journal de Fatemeh par le biais d’un gardien de la prison où était incarcérée l’adolescente.
    C’est un récit parfois maladroit, la jeune fille ayant du quitter l’école à l’âge de 13 ans.
    Dans son témoignage, Fatemeh parle de ses parents et surtout de sa tante paternelle. Celle-ci, la muette, a également été condamnée.
    Dans cette histoire, on voit la toute puissance des mollahs et leur comportement indigne de la religion qu’ils prétendent représenter.
    Fatemeh en veut beaucoup à sa mère, qu’elle considère comme responsable de tout et elle n’a pas vraiment tort.
    En effet, le fanatisme religieux de la mère est bien la cause de la chute de la muette, qui va entraîner tout le reste.
    Au-delà de la toute puissance des mollahs, le récit pointe également du doigt la persécution des femmes et leur complète impuissance face aux désirs des hommes qui finissent toujours par se retourner contre elles : mariage forcée, accusation d’adultère de la part d’un prétendant éconduit…
    Le récit pointe également un problème qui inquiète fortement Amnesty international : la condamnation à mort des mineurs.
    Tout comme « la femme lapidée » de Freidoune Sahebjam, « la muette » est un récit édifiant sur les mensonges des hommes et sur ce que la dictature religieuse leur permet d’infliger aux femmes.

     

    Un extrait : J’ai quine ans, je m’appelle Fatemeh, mais je n’aime pas mon prénom. Dans notre quartier, tout le monde avait un surnom, le mien était « la nièce de la muette ». La muette était ma tante paternelle. Je vais être pendue bientôt ; ma mère m’avait nommée Fatemeh parce que j’étais né le jour de la naissance de Mahomet, et comme j’étais une fille, elle m’avait donné le prénom de la fille du Prophète. Elle ne pensait pas qu’un jour je serais pendue ; moi non plus. J’ai supplié le jeune gardien de la prison pour qu’il m’apporte un cahier et un stylo, il a eu pitié de moi et exaucé le dernier souhait d’une condamnée. Je ne sais pas par où commencer. J’ai lu plusieurs fois le petit dictionnaire abandonné sur la corniche de la chambre où j’ai vécu plus d’un an. J’aimais apprendre ce que les mots signifiaient ; mais ne me rappelle pas tous les mots et leur sens. Je n’ai jamais rien écrit, à part quelques poèmes, une vingtaine, mais personne ne les a jamais lus. J’étais très bonne à l’école, mais j’ai dû la quitter à treize ans ; j’aurais bien aimé continuer et aller à l’université. Personne dans ma famille, ni d’ailleurs dans notre quartier, n’avait jamais mis les pieds dans une université. Où j’ai grandi, il n’y avait que la misère et la drogue, aucun destin n’échappait au malheur ; dans ce monde là, la pauvreté écrase les hommes et les femmes, les rend misérables, méchants et laids : trop de misère fait que les gens ne sont même plus capable de rêver. Mon oncle, le frère de ma mère, était drôle, drogué et beau, il avait vingt-deux ans et rêvait encore, un peu trop peut-être. La muette aussi était belle, elle avait de grands yeux brillants et un visage rassurant pour une muette. Moi, je ne suis pas belle, mais je ne suis pas laide non plus ; maintenant, dans cette cellule, je dois l’être. Les trois premiers jours de mon interrogatoire furent les plus lents dans l’histoire de l’humanité, soixante-douze heures sans sommeil sous les coups de matraque. Brûlure indescriptible.

     

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  • [Livre] Je voulais juste vivre

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    Résumé : Après des années de privations et de harcèlement, par une nuit glaciale, Yeonmi, 13 ans, et sa mère, réussissent à traverser le fleuve Yalu qui marque la frontière entre la Corée du Nord et la Chine. Elles laissent derrière elles leur pays natal et ses horreurs : la faim, la délation constante et surtout une répression impitoyable et le risque permanent d’être exécutées pour la moindre infraction. Mais leur joie n’est que de courte durée. Rien ne les a préparées à ce qui les attend entre les mains des passeurs. Après plusieurs années d’épreuves inhumaines et un périple à travers la Chine et la Mongolie, Yeonmi atteint finalement la Corée du Sud.
    À 22 ans, Yeonmi est désormais une combattante : c’est l’une des plus influentes dissidentes nord-coréennes et une activiste reconnue des droits de l’homme.


    Auteur : Yeonmi Park

     

    Edition : Le livre de poche

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 12 Avril 2017

     

    Prix moyen : 7€

     

    Mon avis : L’auteur raconte son histoire en trois parties : sa vie en Corée du Nord, sa fuite en Chine et son installation en Corée du Sud.
    Dans la première partie, elle nous décrit une vie digne des pires moments du moyen-âge : la famine, la saleté, le défaut de soins, les arrestations et la peur, cette peur qui ne lâche aucun individu depuis le premier jour où il a été capable de formuler une phrase. L’embrigadement est tel que la population croit réellement leur dirigeant immortel et capable de lire dans les pensées. La délation est obligatoire : ne pas dénoncer c’est soi-même commettre un crime.
    Chacun est en permanence sous surveillance et la moindre étincelle d’individualité, de pensée, d’analyse, est réprimée par l’envoie dans les camps de rééducation ou de travail (selon l’ampleur de la faute).
    La population n’est même plus capable de réaliser à quel point les déclarations du gouvernement sont remplis de contradictions.
    Parce qu’ils n’ont plus d’autres issues, sinon celle de mourir de faim, les parents de Yeonmi envisagent de fuir vers la Chine. La sœur ainée partira la première, Yeonmi et sa mère suivront quelques jours plus tard.
    Le père sera le dernier à se lancer, de peur que sa fuite ne provoque l’arrestation de ses frères et sœurs.

    On entre dans la seconde partie avec un sentiment d’horreur qui va crescendo. Car la Chine, c’est pire encore que la Corée du Nord si cela est possible. Traqués par la police qui cherche à les renvoyer en Corée du Nord (ce qui signifie la torture et/ou la mort), vendu par les passeurs, les trasfuges passent d’une dictature à une vie d’esclavage. Surtout les femmes : battues, violées par les différents intermédiaires, parquées dans des bordels ou réduites au rang d’esclave par des « maris » et leurs familles, elles ont à peine plus à manger qu’en Corée du Nord.
    Fuir la Chine s’avère aussi dangereux que fuir la Corée du Nord, les deux pays entretenant des relations que la Chine ne veut à aucun prix détériorer quand bien même cela signifie sacrifier la vie de millier de transfuges.
    Yeonmi et sa mère ont vécu des horreurs, traitées successivement comme des marchandises, des criminelles, des indésirables.
    Même l’arrivée en Corée du Sud, qui devrait être la fin du calvaire, puisque ce pays considère les Nord-Corréens comment des citoyens, a été difficile. Yeonmi ne savait pas comment se comporter, comment vivre cette liberté terrifiante, comment penser par elle-même sans qu’il y ait forcément de mauvaise réponses.

    De plus, la Corée du Sud étant un pays très élitiste et compétitifs, dès son arrivée, les officiels et les professeurs ont fait sentir à Yeonmi qu’elle n’avait aucune chance de se créer une vie meilleure et ce n’est que grâce à sa ténacité que la jeune fille a franchi les différents obstacles que l’on mettait encore en travers de sa route.

    Aujourd’hui militante pour le respect des droits de l’homme en Corée, Yeonmi est victime de sévères critiques. Son récit est jugé peu crédible (même si beaucoup de ses détracteurs sont des pro-Nord-Corréens).
    La première critique qui lui est faite est que d’autres transfuges ne racontent pas les mêmes exactions de la part du régime Nord-Coréen. Pour moi cette critique ne tient pas la route pour deux raisons : d’une part, avec la corruption qu’il y a dans ce pays, les habitants de deux villages différents ont pu être traités de manières plus ou moins sévères. Ensuite, il faut prendre en compte que, même sortis de Corrée du Nord, bon nombres de transfuges ont peur des représailles et se refuse à donner une image trop négative du régime.
    La seconde critique la plus rencontrée est que Yeonmi s’emmêle parfois dans les faits, les dates etc… Ici encore, ce n’est pas très probant car Yeonmi avait seulement 13 ans quand elle a fui en Chine. Vu son âge et ce qu'elle a traversé, il est possible qu'elle attribue à une personne les actions d'une autre, que ses repères temporels ne soient pas toujours parfaits et que son esprit ait pu combler certains blancs sans qu'elle en ait conscience. De là à penser qu’elle a inventé son histoire, c’est aller un peu loin.

    Pour finir, je dirai que le récit de Yeonmi est bouleversant mais que jamais l’auteur ne tombe dans le larmoyant ou se répète pour tirer des larmes aux lecteurs. L’auteur ne veut pas de la pitié de la communauté international, elle veut dénoncer les horreurs de son pays et celles commises par les passeurs et intermédiaires chinois qui se livrent ni plus ni moins au trafic d’êtres humains.

     

    Un extrait : Le Yalu serpente comme la queue d’un dragon entre la Chine et la Corée du Nord pour rejoindre la mer Jaune. À Hyesan, il débouche dans la vallée du mont Paektu, où la ville de 200 000 habitants s’étend entre les collines ondoyantes et un haut plateau recouvert de champs, de bosquets d’arbres et de tombes. Le fleuve, généralement calme et peu profond, gèle complètement en hiver, qui dure une bonne partie de l’année. C’est l’endroit le plus froid de Corée du Nord, avec des températures qui descendent parfois jusqu’à -40 °C. Seuls les plus résistants y survivent.

    Hyesan, c’était chez moi.

    Sur l’autre rive du fleuve, se trouve la ville chinoise de Changbai, dont un grand pourcentage de la population est d’origine coréenne. Les familles des deux côtés de la frontière commercent les unes avec les autres depuis des générations. Enfant, dissimulée dans l’obscurité, je scrutais souvent depuis la berge les lumières de Changbai de l’autre côté du fleuve, me demandant ce qu’il se passait au-delà des limites de ma ville. C’était excitant d’observer les feux d’artifice colorés qui explosaient dans le ciel de velours noir durant les fêtes et pour le Nouvel An chinois. Nous n’avions pas cela de notre côté de la frontière. Parfois, lorsque je descendais au fleuve pour remplir mes seaux d’eau et que le vent soufflait dans la bonne direction, je pouvais sentir la bonne odeur de nourriture, des nouilles et des raviolis chinois qu’on préparait dans les cuisines de l’autre côté. Ce même vent apportait les voix des enfants chinois qui jouaient sur la rive opposée.

    « Hé, toi ! Tu as faim ? criaient les garçons en coréen.

    — Non ! Tais-toi, espèce de gros Chinois ! » leur répondais-je.

    C’était un mensonge. En réalité, j’avais très faim mais à quoi bon s’en plaindre ?

     

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  • [Livre] Le chemin parcouru

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    Résumé : Sierra Leone, années 90. II s'appelle Ishmael Beah. Hier encore, c'était un enfant qui jouait à la guerre. Désormais, il la fait. Un jour de 1993. sa vie bascule brusquement dans le chaos. Ishmael a douze ans lorsqu'il quitte son village pour participer dans la ville voisine à un spectacle de jeunes talents. Il ne reverra jamais ses parents.

    Après des mois d'errance dans un pays ravagé par la guerre, il tombe avec ses compagnons aux mains de l'armée. Faute de troupes, les deux camps - armée gouvernementale et groupes rebelles - enrôlent de force les enfants des villages capturés. Drogué, privé de tout repère moral ou simplement humain dans un monde qui s'est effondré, Ishmael devient insensible, incapable de réfléchir, transformé en machine à tuer. A quinze ans, grâce à l'UNICEF, il est envoyé dans une mission humanitaire et, avec l'aide des médecins, il va apprendre à se pardonner et à se reconstruire.

    Ce récit fascinant d'une traversée de l'enfer à l'aube de la vie est une leçon de courage et d'humanité, destinée à devenir un classique de la littérature de guerre.


    Auteur : Ishmael Beah

     

    Edition : Presse de la cité

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 03 janvier 2008

     

    Prix moyen : 19€

     

    Mon avis : Ce livre a été une vraie claque. Il a été totalement impossible à lâcher, même si je n’ai pas pour autant atteint le coup de cœur.
    L’histoire que nous raconte Ishmael ne décrit pas seulement la vie d’un enfant soldat, mais il nous raconte aussi sa vie quand la guerre lui est tombée dessus, son errance pour retrouver ses parents et tenter d’échapper à l’enrôlement de force par les rebelles, la traversée de village où les pré-ados et les ados sont regardés avec hostilité car les récit de villages pillés par les enfants soldats ont précédé Ishmael et ses camarades. Il nous parle du nombre de fois où il a frôlé la mort, que ce soit en tombant sur les rebelles ou aux mains de villageois terrorisés et donc insensibles.
    Et quand ils croient être enfin en sécurité, c’est aux mains de l’armée régulière qu’ils tombent. Si celle-ci n’enrôle pas les gamins par la force brute, l’alternative qu’elle leur propose ne leur laisse, en réalité guère de choix.
    On peut se rendre compte que, rebelles ou armée régulière, les deux exploitent sans scrupules les enfants, n’hésitant pas à les droguer pour les rendre plus insensibles à la peur, au danger, à la douleur, et aux abominations qu’on leur demande de commettre.
    Quand enfin l’UNICEF arrive pour les tirer de là, j’ai trouvé ses membres très maladroits. Ils commencent par arriver en terrain conquis, agissant comme si les enfants soldats appelaient leur arrivée de leurs vœux. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la réaction des gosses va les surprendre. Ensuite, si je comprends la nécessité de les rééduquer, de contrevenir au lavage de cerveau qu’ils ont subis, j’ai trouvé qu’ils étaient mal préparés, qu’ils faisaient preuve d’arrogance et de condescendance, ce qui ne les a pas fait entrer dans les bonnes grâces des enfants. J’ai surtout trouvé qu’ils étaient mal préparés, même s’ils sont animés des meilleures intentions. Mais mettre dans la même pièce des enfants-soldats rebelles et des enfants-soldats armée, c’était presque comme leur donner des fusils et déclarer la chasse ouverte.
    Cette guerre est partout et, quand elle s’arrête, il y a un autre coup d’état, et une autre guerre, avec d’autres alliances qui débute. On a l’impression qu’Ishmael ne peut pas y échapper. Car si les rapports entre les différentes factions ont changés, si les alliances se sont modifiées, les grands perdants restent les enfants-soldats, qu’on renvoie au front dans une guerre qui n’est pas de leur fait mais où ils se font allégrement massacrer.
    J’ai trouvé qu’Ishmael avait un sang-froid et un courage exceptionnel, que ce soit dans les premières années, quand il fuit les rebelles, ou plus tard, quand il décide qu’il ne sera plus un enfant-soldat et qu’il est prêt à prendre le risque de tenter de quitter le pays pour se sortir de ce pays ravagé.

     

    Un extrait : Il courait sur la guerre toutes sortes d’histoires qui donnaient l’impression qu’elle se déroulait dans une terre lointaine, différente. C’est seulement quand les réfugiés ont commencé à passer par notre ville que nous avons compris qu’elle avait lieu dans notre pays. Des familles qui avaient parcouru des centaines de kilomètres à pied nous racontaient que les soldats avaient tué plusieurs des leurs et incendié leur maison. Certains habitants avaient pitié d’eux et leur offraient un endroit où loger, mais la plupart des réfugiés refusaient parce que la guerre finirait par atteindre notre ville, disaient-ils. Les enfants de ces familles ne nous regardaient pas, ils sursautaient en entendant le bruit d’une bûche qu’on fendait ou le claquement sur un toit de tôle d’une pierre lancée par la fronde d’un gosse chassant les oiseaux. Les adultes venant des zones de guerre restaient plongés dans leurs pensées pendant les conversations avec les anciens de ma ville. Outre la fatigue et la faim, il était clair qu’ils avaient vu des choses qui accablaient leur esprit, des choses que nous refuserions de croire s’ils nous en parlaient. Je pensais parfois que certaines des histoires racontées par les réfugiés étaient exagérées. Les seules guerres que je connaissais étaient celles que j’avais lues dans les livres ou vues au cinéma dans des films comme Rambo, ou encore celle du Liberia voisin, dont j’avais entendu parler aux informations de la BBC. Mon imagination d’enfant de dix ans n’était pas capable de comprendre ce qui avait détruit le bonheur des réfugiés.

     

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  • [Livre] L’enfer de Kathy

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    Résumé : L'enfer, Kathy ne craint pas d'y aller, elle y a vécu toute son enfance. C'était en Irlande, au début des années 1970.
    Maltraitée par un père colérique, violée pour la première fois à sept ans, la veille de sa première communion, elle est placée à huit ans dans un foyer de redressement où elle subit abus et maltraitance, et où elle est de nouveau violée. Quand elle dénonce son agresseur - un prêtre catholique -, on la « sauve » en l'envoyant à l'hôpital psychiatrique, où elle servira de cobaye pour de nouveaux traitements, dont les électrochocs !
    Puis c'est dans un couvent des sœurs de Marie-Madeleine (les tristement célèbres Magdalene Sisters) de Dublin qu'elle est internée. Dans cette institution religieuse accueillant les jeunes filles dites « perdues », elle prie et trime toute la journée, pour expier ses fautes.
    Mais de quels péchés doit se repentir une enfant dont le seul tort est de se voir abandonnée de tous ? Comment garder espoir face à la cruauté d'adultes censés veiller sur elle ?


    Auteur : Kathy O’Beirne

     

    Edition : Pocket

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 05 juillet 2012

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Kathy décrit avec précision les horreurs infligées à des jeunes filles sans défense par des personnes à la moralité soi-disant exemplaire.
    Tout commence mal pour la petite fille qui, dès l’âge de 5 ans, est battue, humiliée, voire torturée par son père. Aujourd’hui adulte, Kathy ne sait toujours pas pourquoi son père a fait preuve d’une telle cruauté envers elle. Qu’avait-elle de différent de ses deux sœurs ? De ses frères ?
    Mais même si les agissements de l’homme sont à vomir, ce n’est rien à côté de ce que les institutions religieuses ET d’Etats ont pu faire subir à Kathy. Une école religieuse dans laquelle elle trimait comme une bête sans jamais voir l’intérieur d’un livre de classe, un hôpital psychiatrique où elle sert de cobaye pour de nombreux produits et actes « thérapeutiques » dans lequel on ne l’a envoyé que parce qu’elle a dénoncé le prêtre qui l’avait violé, puis le comble de l’horreur avec une des tristement célèbres couvents des sœurs Madeleine (qu’on préfère appeler aujourd’hui les laveries des sœurs Madeleine, comme si cela justifiait les traitements infligés aux détenues, car oui, c’était des détenues), dont les agissements ont été portés à la connaissance du public international avec le film Magdalene sisters de Peter Mullan en 2001. Quand on sait que le dernier de ces couvents de l’horreur n’a été fermé qu’on 1996, on croit rêver, et quand on apprend par Kathy que, loin d’avoir été libérées, les anciennes Madeleines sont souvent, encore aujourd’hui, détenues dans des hôpitaux psychiatriques, on se demande à quoi joue le gouvernement irlandais (et les organisations internationale : il n’y a pas que dans le tiers monde qu’il faut se battre pour le respect des droits de l’homme).
    Kathy O’Beirne a gardé la foi car qu’on soit croyant ou non, il semble évident que les personnes qui ont commis ces atrocités ne méritent pas de représenter la communauté des fidèles, quelle que soit leur religion.

     

    Un extrait : Je suis en train de courir dans un grand couloir. Devant moi, la lumière du soleil filtre à travers le carreau d’une porte. On dirait la lumière du paradis. Derrière se cache un ciel bleu azur sous lequel une plage dorée s’étire à l’infini le long des vagues chargées d’écume. C’est là que je voudrais être : sentir la chaleur du soleil sur ma peau, construire des châteaux de sable, nager dans l’eau. Mon enfance idéale. Mon paradis.
    En atteignant la porte, je suis presque éblouie par cette lumière. Je tente de l’ouvrir, mais il n’y a pas de poignée et des barreaux protègent la vitre. Je frappe contre eux en hurlant mais personne de l’autre côté ne peut m’entendre. Dans mon dos, des bruits de pas résonnent et se rapprochent lentement. Je ferme les yeux et tombe à genoux, les mains jointes.
    Les larmes ruissellent sur mes joues tandis que les pas s’immobilisent derrière moi. La lumière au-dessus de ma tête s’évanouit en même temps que le soleil, la mer et le sable sont absorbés par une nuit obscure, sans lune. Me voici plongée dans les ténèbres de ma sinistre enfance. Je m’agrippe aux barreaux et laisse échapper un hurlement de douleur, de honte, de rage et de haine mêlées. Je suis une fillette prise sous le joug cruel d’un cauchemar sans fin.

     

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  • [Livre] 12 ans d’esclavage

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    Si vous désirez acheter ce livre, vous pouvez cliquer ICI ou sur l'image. Vous serez alors redirigés sur bookwitty. Si vous achetez le livre par ce lien, je touche une petite commission. Cela ne change rien au prix! D'ailleurs, j'indique dans la fiche le prix auquel je l'ai acheté, mais si entre-temps une version poche est sortie, je vous mets le lien vers le format le moins cher (après à vous de voir!)



    Résumé : 1841, ville de Washington. Deux hommes abordent Solomon Northup et lui proposent de jouer du violon dans leur cirque itinérant. À peine a-t-il accepté de les suivre qu’il est drogué et enlevé. Son identité est effacée et il est contraint de se présenter comme un esclave de naissance.

    Pendant douze terribles années, Solomon est vendu de propriété en propriété, travaillant dans les champs de coton ou sur des chantiers de construction en Louisiane. Dormant à même le sol poussiéreux, affamé, fouetté, il est menacé de mort par des maîtres qui le considèrent comme un sous-homme. Seule sa volonté de fer lui permet de ne pas sombrer dans la folie. Car Northup n’a qu’un objectif : survivre pour retrouver sa femme et ses trois enfants. Il ne laisse pas la cruauté le briser, et n’oublie jamais qui il est réellement : un homme prêt à tout pour retrouver sa liberté.

     

    Auteur : Solomon Northup

     

    Edition : Michel Lafon

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 1853 mais dans cette édition : 28 novembre 2013

     

    Prix moyen : 16€

     

    Mon avis : Comme beaucoup, j’ai vu le film avant de lire le livre, tout simplement parce que j’ignorais son existence jusqu’à la mention dans le générique « basé sur le livre… ». Et la première question que je me suis posée c’est : pourquoi j’ignorais l’existence de ce livre ? Qu’est-ce qu’ils foutent à l’éducation nationale ? Non parce que quand on étudie l’esclavage à l’école, ça ne les effleure pas de recommander la lecture d’un livre écrit justement par un esclave ? Ce livre est un témoignage unique car Solomon est une des rares personnes à non seulement avoir survécu à l’esclavage, mais à avoir connu la liberté avant, à avoir été éduqué et donc à avoir la possibilité non seulement de raconter ce qu’il a vécu mais de décrire l’esclavage de l’intérieur avec les yeux d’un homme libre.
    On a là un témoignage exceptionnel.
    On en peut qu’être touché par le destin de Solomon. Et être furieux contre le marchand d’esclaves qui sait pertinemment qu’il est en train de vendre un homme libre. J’ai été encore plus furieuse de voir que leurs actes vont rester impunis.
    Pour les maîtres c’est encore autre chose car même si la majorité se conduit comme des monstres, il reste qu’ils vivent selon leur éducation et que pour eux l’esclavage est quelque chose de normal.
    Ce n’est guère mieux, mais je trouve que les marchands qui attaquent, droguent, kidnappent, des hommes libres pour se faire plus d’argent, sont encore pire que les planteurs (D’autant qu’on sait qu’ils vont se prendre la guerre de sécession en travers de la tête une dizaine d’années plus tard, donc on se dit qu’ils ne perdent rien pour attendre).
    J’ai trouvé aberrant que les deux marchands ne reçoivent aucune sanction alors qu’ils ont délibérément violé une loi du pays. Là on ne parle même plus de morale, d’humanité ou autre, ils ont violés la loi, ils devraient être punis.
    Solomon garde espoir du début à la fin même s’il a appris à ses dépens à taire son statut d’homme libre. Il faut dire qu’à part son tout premier maître qui aurait peut-être réagit (et encore, car même s’il est bienveillant, il ne remet absolument pas en cause le droit des blancs à avoir des esclaves), les autres l’auraient probablement tué plutôt que d’admettre qu’ils détenaient illégalement un homme libre en esclavage (même s’ils auraient pu dire qu’ils l’avaient acheté en toute bonne foi).
    Je parle volontairement de loi et de droits des planteurs car, au moment où Solomon a été enlevé, on ne pouvait pas invoquer les droits de l’homme pour critiquer l’esclavage, étant donné que les personnes de couleur n’étaient pas considérées comme des Hommes, du moins dans les états du sud.
    Alors bien sûr que c’est affreux, amoral, et profondément injuste, mais à ce moment de l’histoire tout cela n’entrait pas en ligne de compte.
    Il y avait peu de loi qui protégeaient les hommes de couleur libres (je dis de couleur, par pour une question de politiquement correct, mais parce que certains esclaves avaient une peau plus blanche que celles de leurs maîtres, n’ayant que très peu de sang africain, pourtant cette ascendance, aussi lointaine soit-elle, suffisait à faire d’eux des esclaves).
    Le livre n’a pas vraiment d’happy end. Certes Solomon recouvre la liberté (on le sait dès le titre et rien que le fait qu’il ait pu écrire ce livre nous indique qu’il n’est plus esclave) mais il a perdu 12 ans de sa vie, a souffert le martyre et laisse derrière lui des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui continuent à souffrir en toute légalité.

     

    Un extrait : Après dîner, ils me firent appeler dans leur chambre et me donnèrent 43 dollars, somme qui dépassait de loin les salaires qui m’étaient dus. La raison de cet acte de générosité, me dirent-ils, était qu’ils n’avaient pas donné autant de représentations que ce qu’ils m’avaient laissé envisager à notre départ de Saratoga. Ils m’informèrent également que le cirque avait eu l’intention de quitter Washington le lendemain mais avait finalement décidé, à cause des funérailles, de rester un jour supplémentaire. Comme toujours depuis notre rencontre, ils étaient envers moi d’une extrême gentillesse. Ils ne perdaient jamais une occasion de me féliciter et j’avais pour eux une admiration certaine. J’avais en eux une foi sans réserve et leur aurais fait confiance dans toute situation. Leur conversation, leur constante bienveillance – leur encouragement à me procurer un certificat d’homme libre et une centaine d’autres petites attentions qu’il est inutile de retranscrire ici – indiquaient qu’ils étaient véritablement des amis, soucieux de mon bien-être. Je ne les imaginais pas être autre chose à l’époque. Pour moi, ils étaient alors innocents de cette incroyable vilenie dont je les crois désormais coupables. Ceux qui lisent ces pages auront autant d’éléments que moi pour déterminer s’ils étaient complices de mes malheurs – des monstres inhumains subtilement déguisés en hommes –, s’ils m’avaient sciemment éloigné de mon foyer, ma famille et ma liberté. S’ils étaient innocents, ma soudaine disparition a, en effet, dû leur sembler inexplicable. Mais, ayant depuis analysé mille fois chaque détail, je n’ai jamais pu me résoudre à une conclusion qui leur soit aussi indulgente.

    Après m’avoir remis l’argent, dont ils semblaient disposer en abondance, ils me déconseillèrent de sortir ce soir-là, arguant que je n’étais pas un habitué de la ville. Je promis de suivre leur conseil et les laissai tous les deux. Je suivis un domestique de couleur jusqu’à ma chambre, située au fond du rez-de-chaussée. Je m’allongeai et pensai à ma femme, à mes enfants et à la distance qui nous séparait, puis m’endormis. Mais aucun ange miséricordieux ne vint à mon chevet cette nuit-là pour m’enjoindre de m’enfuir ; aucune voix de compassion ne m’avertit, dans mes rêves, de l’épreuve qui m’attendait.

     

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  • [Livre] Directs du droit

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    Résumé : Recordman des acquittements aux assises, Éric Dupond-Moretti aurait un peu trop tendance, selon ses détracteurs, à faire relaxer tous ses clients. Il nous montre ici que la Justice, elle, à une réelle propension à condamner tous ceux qui paraissent devant elle.

    À travers le récit de plusieurs affaires criminelles dans lesquelles il est intervenu, traitées comme des thrillers dans des chapitres coups de poing, il dénonce les imperfections d'un système qui respecte de moins en moins les droits de la défense.

     

    Auteur : Eric Dupond-Moretti

     

    Edition : Michel Lafon

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 18 janvier 2017

     

    Prix moyen : 18€

     

    Mon avis : Au travers d’affaires qu’il a traité, le ténor du barreau nous fait part de son inquiétude devant une évolution de la justice peu favorable à la défense. Véritable retour en arrière moyenâgeux, les magistrats semblent, pour certains, penser que quelqu’un qui se retrouve aux assises à forcément quelque chose à se reprocher et peu importe si les preuves de sa culpabilité sont des plus légères.
    Ainsi, ils n’hésitent pas à influencer les jurés lors des délibérés, voire à modifier leurs votes quand ils ne leurs conviennent pas. La morale et la religion apparaissent de plus en plus souvent dans les débats au mépris de la règle de droit qui stipule que le droit doit s’affranchir de la morale.
    Les magistrats livrent une véritable guerre aux avocats de la défense, vus comme des traîtres qui défendent les criminels, oubliant que la loi française garanti le droit à la défense à tous, même au pire des criminels. Les magistrats voudraient-ils que les avocats de la défense fassent mal leur office pour leur garantir la condamnation des prévenus ? Qu’en est-il de la maxime : Innocent jusqu’à preuve du contraire ?
    Dans les sept chapitres présentés, on va pouvoir découvrir des pratiques indignes de représentants du droit : tentative d’intimidation, plainte auprès du barreau parce qu’un avocat s’est plaint d’un mauvais comportement, fuite dans la presse, audience devant la cour d’assise d’un homme, mineur au moment des faits et déjà acquitté par la cour d’assise des enfants, condamnation d’un homme pouvant prouver qu’il n’était pas présent sur le territoire français au moment des faits…
    Véritable lanceur d’alerte, Éric Dupond-Moretti met en garde contre cette évolution qui tend à bafouer les droits les plus élémentaires de tout justiciable : un procès équitable et le droit à une défense.

     

    Un extrait : En quatre ans, j’ai encore vu changer le monde que je connais le mieux : celui de la justice. Depuis que j’ai prêté le serment d’avocat, en 1984, ce monde est en révolution perpétuelle, pas forcément pour le meilleur. Les lois, votées à la va-vite et au doigt mouillé, les lois, propulsées dans le code pénal par le vent versatile de l’émotion alors qu’elles devraient résister à cette tornade, les lois se durcissent. Les faits divers successifs modèlent et remodèlent la hiérarchie des crimes : du temps où André Gide siégeait comme juré à la cour d’assises de la Seine-Inférieure, il était plus grave d’incendier une grange que de violer une fille de ferme. Nous étions au début du XXe siècle, avant la Grande Guerre, avant l’acquittement de Raoul Villain, l’homme qui avait assassiné Jaurès en 1914 : le pire des crimes, après la défaite de l’Allemagne, c’était le pacifisme, et la veuve de Jaurès fut même condamnée aux dépens. À la fin des années 1990, quand éclatèrent, en Belgique l’affaire Dutroux, et dans le Pas-de-Calais celle d’Outreau, la pédophilie, communément présentée comme plus grave que l’homicide, était hissée par l’opinion sur la plus haute marche de ce dérisoire podium. Depuis janvier 2015 et la tuerie de Charlie Hebdo, il n’est pas pire abomination que l’attentat islamiste. Peu importe ces échelles éphémères : les appels à la sévérité aveugle (donc injuste) se multiplient ; les établissements pénitentiaires français n’ont jamais été aussi surpeuplés, mais des députés veulent supprimer les aménagements de peine pour certaines catégories de détenus, créer des « Guantánamo à la française » pour des suspects qui n’ont pas été condamnés, transformer la Constitution en blanc-seing pour le tout-répressif. Ce n’est donc plus « surveiller et punir », comme du temps de Michel Foucault, mais punir d’abord pour mieux surveiller, au cas où. La société de ce début de XXIe siècle se met à ressembler à ce qu’avaient imaginé des auteurs de science-fiction comme George Orwell ou Philip K. Dick : j’ai peur.

     

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  • [Livre] Le palanquin des larmes

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    Résumé : Le Palanquin des larmes, paru en 1975, est un récit biographique écrit par Georges Walter de la vie de Chow Ching Lie, pianiste, écrivain et femme d'affaires née à Shanghai en 1936.

    Le palanquin des larmes est le récit de la vie de Chow Ching Lie, qui fut fiancée de force à l'âge de treize ans, et eut son premier enfant à quatorze ans. Le récit, recueilli par Georges Walter, traite de la condition des femmes dans la chine de la guerre sino-japonaise, la guerre civile, et l'époque Maoïste.

    Il aborde aussi la vie traditionnelle des chinois de classe paysanne et les problèmes qu'engendre la révolution dans la famille de Chow Ching Lie.

     

    Auteur : Chow Ching Lie

     

    Edition : j’ai lu

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 10 janvier 2011

     

    Prix moyen : 8€

     

    Mon avis : Chow Ching Lie nous livre, à travers la plume de Georges Walter, l’histoire d’un esclavage perpétuellement renouvelé. La belle-fille, épouse du fils ainé, est la domestique de ses beaux-parents, l’esclave de sa belle-mère ; le fils, même adulte, même marié, doit se plier sans mot dire aux desideratas de ses propres parents, quitte à sacrifier le bonheur de ses enfants dans la foulée.
    Il faudra attendre l’arrivée de Mao au pouvoir pour que les mariages forcés, tout comme le meurtre des nouveau-nés filles, soient interdits. A cinq mois près, Ching Lie aurait échappé à un mariage qui la révulsait.
    Même si son histoire est difficile, j’ai trouvé Ching Lie trop effacée, trop soumise. Sa jeune sœur cède moins facilement devant les pressions et même quand elle est obligée de se plier aux règles, elle n’hésite pas à faire savoir qu’elle désapprouve.
    La mère de Ching Lie est une idiote sans cervelle. D’un côté, elle veut à toute force marier sa fille de force, ne prenant en compte que la fortune de la belle-famille sans s’intéresser une seconde à la personnalité du fiancé, mais de l’autre, elle refuse de lui apprendre à coudre ou à cuisiner, car c’est pour elle les signes de l’esclavage. En mariant sa fille à une famille traditionnelle refusant le moindre progrès social, elle aurait pu se douter qu’il serait indispensable à sa fille de savoir préparer un repas ou coudre un vêtement.
    Tout au long du mariage de sa fille, elle ne pense qu’à l’argent, allant jusqu’à compter le nombre de bouchée qu’elle mange pour se les faire rembourser par la belle-famille.
    Ching Lie finira par s’habituer à un époux faible qui ne sait fonctionner que par le chantage au suicide et semble ne pas comprendre que sa femme puisse ne pas l’aimer.
    En dehors de son drame personnel, Ching Lie nous parle un peu des évolutions de la chine à cette époque et surtout de l’arrivée de Mao et de la rééducation par le travail de la Terre. On voit bien qu’on a affaire à une dictature quand les gens n’ont pas le droit de quitter le pays sans autorisation tant le nouveau gouvernement a peur de les voir vivre comme ils l’entendent loin de la Chine.
    Personnellement ce livre ne m’a pas donner envie de pleurer sur le sort de Ching Lie, mais en revanche il m’a bien décidée à ne jamais mettre les pieds dans un pays aussi hypocrite que la Chine.

     

    Un extrait : Je suis née dans la Chine de la misère et des larmes. Petite fille, j’ai souffert et pleuré de bonne heure. J’étais jolie : ce n’est pas un mérite, ce fut une malédiction. Laide et difforme, je n’aurais sans doute pas été mariée de force à l’âge de treize ans. Mais mon malheur ne vint pas de ma seule beauté : il était à l’image d’un vaste pays, où il ne faisait pas bon vivre, où il n’était surtout pas bon de naître si l’on avait l’infortune d’être une fille. J’aurais pu venir au monde dans une famille pauvre où l’on m’aurait à ma naissance enveloppée dans des chiffons et jetée avec les ordures. Qu’est-ce qui est plus cruel, étouffer un enfant à sa naissance ou plus tard, ne pouvant la nourrir, la vendre pour qu’elle devînt pensionnaire à Shanghaï d’une des maisons closes de la Quatrième Rue ? Ce dont je parle ici ne date pas du Moyen Âge, c’était le sort de la Chinoise au milieu du XXe siècle et très exactement jusqu’à Mao Tsé-toung qui, en 1950, édicta la première loi interdisant, entre autres, le meurtre des nouveau-nés, ainsi que les mariages forcés et l’abus de pouvoir de la belle-mère, tous ces fléaux qui furent aussi douloureux que les inondations et les famines.

    La famille où je suis née en 1936 ne m’aurait certes pas vendue, j’ai été pendant toute mon enfance à Shanghaï entourée d’affection et même couvée par un père plein d’amour, mais dans une aisance où le souvenir de la misère ne parvint jamais à s’estomper. C’est pourquoi, à cause de la cupidité d’une partie de ma famille, j’ai été vendue, moi aussi, sous des apparences certes plus honorables, celles du mariage, et même avec un déploiement de faste comme on en vit peu dans mon pays. Comédie de grande alliance familiale qui augmenta, par sa dérision, ma tragédie personnelle : j’étais une écolière connaissant la légende de Liang et Tso qui meurent pour leur amour comme Roméo et Juliette et je me voyais condamnée à vivre sans amour. D’autres, par millions, ont connu la faim du corps alors que je n’ai manqué de rien, mais les malheurs de la Chine sont les enfants d’une même famille. Aucun d’eux n’y échappe au sort commun.

    En entreprenant le récit de ma vie je ne crois nullement qu’elle soit exemplaire : que pèsent mes malheurs dans la tourmente qui a déchiré un continent pendant les cinquante ans qui ont précédé ma naissance et les treize ans qui l’ont suivie, puisque c’est l’année de mes treize ans que la Chine a été libérée dans tous les sens du terme ? Dans le cocon de la petite bourgeoisie de Shanghaï où vivaient soixante mille étrangers, on pouvait entendre les rumeurs des marins en goguette de toutes les flottes du monde. Mais on était sourd à la bataille gigantesque que les armées rouges vêtues de chiffons livraient depuis tant d’années aux armées bien équipées du maître de la Chine, le généralissime Tchang Kaï-chek. Personne, dans ma famille – à l’exception de mon frère aîné – n’était conscient que l’Histoire allait basculer d’un seul coup.

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  • [Livre] L’enfant de l’enfer

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    Résumé : Malgré ses années d’expérience en tant que mère d’accueil, Cathy Glass fait face à un défi de taille avec le cas d’Aimee, petite fille de 8 ans, qui n’a jamais connu que des conditions de vie déplorables : pas d’hygiène, pas d’éducation… et une violence omniprésente. Alors qu’elle découvre les joies simples de l’enfance, Aimee se libère de ses plus sombres souvenirs.

     

    Auteur : Cathy Glass

     

    Edition : France Loisirs

     

    Genre : Témoignage

     

    Date de parution : 2017

     

    Prix moyen : 13€

     

    Mon avis : Cathy va devoir relever un sacré défi avec Aimee. La fillette est assez attachante, se montrant extrêmement lucide sur sa vie avec sa mère mais voulant tout de même lui être loyale et donc se montrant assez difficile dès qu’elle a vu ou parler à sa mère. Le problème est que le juge a accordé des conversations téléphoniques tous les soirs où il n’y a pas de rencontre, lesquelles ont lieu 3 fois par semaine. Autant dire que pour chaque pas en avant que fait Cathy avec Aimee, elle en fait 3 en arrière et 2 sur le côté.

    La mère d’Aimee, Susan, est agressive, violente et connais assez bien le système (elle a 6 ou 7 enfants, tous placés les uns après les autres depuis 25 ans) pour savoir ce qu’elle doit dire ou faire pour rendre la vie impossible à la famille d’accueil. Elle porte plainte, provoque enquêtes sociales et contrôles qui minent non seulement le moral de la famille mais aussi tout progrès fait avec la fillette.
    Cependant, j’ai trouvé que Susan était finalement moins à blâmer que les services sociaux. A 8 ans, Aimee a eu une douzaine d’assistantes sociales dont pas une ne connait vraiment le dossier, les services sociaux ont plus à cœur de couvrir leurs arrières que d’aider efficacement la fillette. Aimee, qui aurait dû être placé dès sa naissance, est passée entre les mailles du filet pendant 8 ans, 8 années pendant lesquelles elle a vécu une vie sordide.
    Contrairement à d’autres parents biologiques auxquels a eu affaire Cathy, ici, on n’a aucun doute sur l’amour que Susan porte à sa fille, mais elle ne sait pas l’élever et surtout elle est incapable d’échapper à l’emprise de la drogue et du coup de celle de ses différents dealers.
    J’ai aussi été choquée que Cathy soit systématiquement considérée comme fautive a priori par les services sociaux : quand le coup de téléphone quotidien n’a pas pu être donné, on lui dit qu’elle est obligé de le faire, sans se demander s’il y a eu un problème quelconque, quand Susan laisse échapper son agressivité, l’assistante qui supervise ses rencontres avec Aimee n’intervient pas, et la directrice du centre ne trouve rien d’autre pour la calmer que de lui dire de venir dans son bureau faire la liste de tout ce qu’elle reproche à Cathy.
    Susan est droguée jusqu’à la moelle et malheureuse de ne plus avoir sa fille près d’elle, on peut comprendre son agressivité, mais pourquoi la laisser s’enliser dans cette attitude ? L’absence de réaction des services sociaux est presque criminelle.
    Heureusement Cathy peut compter sur le soutien de sa famille et sur celui de son assistante sociale référente qui se bat bec et ongles pour que sa meilleure mère d’accueil ne soit pas harcelée.
    Il faut vraiment une grande force morale pour faire ce métier car, en plus des révélations souvent à la limite du soutenable que fait un enfant abusé quand il commence à se sentir en sécurité, il ne s’agit souvent que de placement de longue durée mais temporaire (entre 6 mois et 18 mois). Largement de quoi s’attacher profondément à lui, avant de le voir partir pour une autre famille.
    Je ne sais pas si j’aurais cette force.

     

    Un extrait : « Aimee est agressive. Elle donne des coups de pied, elle crie sur sa mère et lui tire les cheveux. Sa mère a avoué avoir peur d’elle et, quand Aimee s’en prend à elle, il lui arrive de s’enfermer dans la salle de bain ou de courir se réfugier chez des voisins. Sa mère a déclaré qu’Aimee avait étranglé les chatons que leur chatte venait d’avoir. »

    - Quoi ?
    Le cri m’échappa à la lecture du rapport.
    Jill hocha la tête gravement.
    - Continue. Ca ne s’arrange pas.
    Jill est mon assistante sociale de référence – ou référent tout court – à Homefinders, l’organisme où je suis inscrite comme parent d’accueil. Nous étions installées dans son bureau et Jill m’observait attentivement à mesure que je lisais la description de la petite fille de huit ans que les services sociaux venaient de prendre en charge et cherchaient à placer.
    Je poursuivi :

    « Les parents d’Aimee sont séparés et Aimee vit principalement avec sa mère. L’appartement est toujours sale, glacial, et il n’y a jamais de nourriture dans les placards. Aimee et sa mère dorment sur un matelas souillé posé par terre au milieu du salon car l’unique chambre est trop humide. Aimee est souvent débraillée, d’allure misérable, et elle a des poux. Elle refuse d’aller à l’école. Sa mère est incapable de s’occuper d’elle et la laisse souvent en compagnie d’autres adultes, la plupart du temps des hommes et des drogués notoires. Susan (la mère d’Aimee) est incapable de fixer des limites à suivre et se défend en expliquant qu’Aimee devient violente si elle l’empêche de faire ce qu’elle veut. Une assistante familiale a tenté d’intervenir pour proposer son aide mais Susan était incapable de tenir tête à sa fille. La mère et le père d’Aimee se droguaient tous les deux par intraveineuses. Il est probable qu’ils continuent. Les deux parents ont fait de la prison pour trafic de stupéfiants. »


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