Résumé : Ceci est l'épopée drolatique d'une cuisinière qui n'a jamais eu peur de rien. Personnage loufoque et truculent, Rose a survécu aux abjections de cet affreux XXe siècle qu'elle a traversé sans rien perdre de sa sensualité ni de sa joie de vivre. Entre deux amours, elle a tout subi : le génocide arménien, les horreurs du nazisme, les délires du maoïsme. Mais, chaque fois, elle a ressuscité pour repartir de l'avant. Grinçant et picaresque, ce livre raconte les aventures extraordinaires d'une centenaire scandaleuse qui a un credo : "Si l'Enfer, c'est l'Histoire, le Paradis, c'est la vie".
Auteur : Franz-Olivier Giesbert
Edition : Gallimard
Genre : Historique
Date de parution : 26 avril 2013
Prix moyen : 21€
Mon avis : J’ai vraiment bien aimé ce livre, mais honnêtement, je cherche encore le « drolatique » dans cette histoire. Même si Rose a parfois des réactions qui arrachent un sourire, le livre est surtout tragique. Rose a tout connu des horreurs du XXème siècle : génocide arménien (elle sera la seule survivante de sa famille et connaitra l’esclavage sexuel), 2nd guerre mondiale (son ex-mari et ses enfants seront déportés, elle sera violé par un nazi), le régime de Mao (son 3ème mari sera tué. Elle n’aura la vie sauve que grâce à son emploi à l’ambassade qui lui permettra de fuir le pays).
Rose n’oublie rien, ne pardonne rien. Elle n’hésite pas à se venger en éliminant ceux qui lui ont fait du tort. Si on peut comprendre son envie de vengeance et si on ne va pas pleurer sur le sort de ses cousins adoptifs qui la réduisent en esclavage pour s’approprier l’héritage ou des collabos à qui elle a fait payer ses malheurs, on ne peut que s’interroger sur la moralité de cette femme qui s’érige en juge, jury et bourreau. D’autant plus qu’elle n’a pas hésité à travailler pour Himmler et plus si affinité, cuisinant même pour Hitler en personne pour avoir des informations sur le sort de ses enfants. Pendant tout ce temps, elle a fait les 4 volontés de ce haut fonctionnaire nazi sans broncher.
J’avoue que si j’ai été très intéressée par le côté historique (Rose nous fait découvrir ou redécouvrir l’Histoire), j’ai été moins emballée par toutes les parties se déroulant de nos jours et où une rose de 105 ans continue à avoir « la gâchette facile ».
Disons qu’à trop de surenchère, le personnage de Rose devient si absurde (mais pas dans le sens amusant du terme) qu’il perd tout intérêt au fur et à mesure qu’il perd en crédibilité.
C’est dommage car c’était une manière intéressante de raconter l’histoire. Mais je pense que la Chine de Mao était de trop. Ou alors il aurait fallu plus d’un personnage, pour que chacun ait sa part d’histoire.
Pour autant l’écriture est agréable et cette manière de raconter l’Histoire reste originale et percutante.
Une lecture en demi-teinte quand on en attendait autre chose, trompé par le résumé.
Un extrait : Je ne supporte pas les gens qui se plaignent. Or, il n’y a que ça, sur cette terre. C’est pourquoi j’ai un problème avec les gens.
Dans le passé, j’aurais eu maintes occasions de me lamenter sur mon sort mais j’ai toujours résisté à ce qui a transformé le monde en grand pleurnichoir.
La seule chose qui nous sépare des animaux, finalement, ce n’est pas la conscience qu’on leur refuse bêtement, mais cette tendance à l’auto-apitoiement qui tire l’humanité vers le bas. Comment peut-on y laisser libre cours alors que, dehors, nous appellent la nature et le soleil et la terre ?
Jusqu’à mon dernier souffle et même encore après, je ne croirai qu’aux forces de l’amour, du rire et de la vengeance. Ce sont elles qui ont mené mes pas pendant plus d’un siècle, au milieu des malheurs, et franchement je n’ai jamais eu à le regretter, même encore aujourd’hui, alors que ma vieille carcasse est en train de me lâcher et que je m’apprête à entrer dans ma tombe.
Autant vous dire tout de suite que je n’ai rien d’une victime. Bien sûr, je suis, comme tout le monde, contre la peine de mort. Sauf si c’est moi qui l’applique. Je l’ai appliquée de temps en temps, dans le passé, aussi bien pour rendre la justice que pour me faire du bien. Je ne l’ai jamais regretté.
En attendant, je n’accepte pas de me laisser marcher sur les pieds, même chez moi, à Marseille, où les racailles prétendent faire la loi. Le dernier à l’avoir appris à ses dépens est un voyou qui opère souvent dans les files d’attente qui, à la belle saison, pas loin de mon restaurant, s’allongent devant les bateaux en partance pour les îles d’If et du Frioul. Il fait les poches ou les sacs à main des touristes. Parfois, un vol à l’arraché. C’est un beau garçon à la démarche souple, avec les capacités d’accélération d’un champion olympique. Je le surnomme le « guépard ». La police dirait qu’il est de « type maghrébin » mais je n’y mettrais pas ma main à couper.
Je lui trouve des airs de fils de bourgeois qui a mal tourné. Un jour que j’allais acheter mes poissons sur le quai, j’ai croisé son regard. Il est possible que je me trompe, mais je n’ai vu dedans que le désespoir de quelqu’un qui est sens dessus dessous, après s’être éloigné, par paresse ou fatalisme, de sa condition d’enfant gâté.
Un soir, il m’a suivie après que j’eus fermé le restaurant. C’était bien ma chance, pour une fois que je rentrais chez moi à pied. Il était presque minuit, il faisait un vent à faire voler les bateaux et il n’y avait personne dans les rues. Toutes les conditions pour une agression. À la hauteur de la place aux Huiles, quand, après avoir jeté un œil par-dessus mon épaule, j’ai vu qu’il allait me doubler, je me suis brusquement retournée pour le mettre en joue avec mon Glock 17. Un calibre 9 mm à 17 coups, une petite merveille.