Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèque. La liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
Le principe est de, chaque semaine, vous faire découvrir un livre en vous en livrant les premières lignes.
Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !
Cette semaine, je vous présente Diabolic de S.J. Kincaid dont vous pouvez lire ma chronique ICI.
Tout le monde croit qu’un Diabolic n’éprouve pas la peur. Pendant les premières années de ma vie, pourtant, je n’ai rien connu d’autre. Cette terreur redoubla ce matin-là, lorsque les Empyreé vinrent m’inspecter dans les corrals.
Je ne savais pas encore parler, mais je comprenais presque tout. Le maître d’élevage était dans tous ses états lorsqu’il avertit ses assistants : le sénateur von Empyreé et sa femme, la matriarche Empyreé, allaient arriver d’un moment à l’autre. Les gardiens arpentèrent mon enclos en m’examinant de la tête aux pieds, à l’affût du moindre défaut.
Le cœur affolé, prête au combat, j’attendis le sénateur et la matriarche.
Puis ils entrèrent.
Dresseurs et gardiens s’agenouillèrent aussitôt devant eux. Le maître d’élevage prit leurs mains d’un geste révérencieux et les porta à ses joues.
– C’est un immense honneur pour nous de recevoir votre visite.
La peur m’envahit. Quel genre de créatures était-ce là pour que le redoutable maître des corrals lui-même se prosterne devant eux ? Le champ de force luminescent qui entourait ma cage me parut plus oppressant que jamais. Je me recroquevillai le plus loin possible. Le sénateur von Empyreé et sa femme s’approchèrent d’un pas tranquille et m’observèrent en silence à travers la barrière invisible.
– Comme vous pouvez le constater, déclara le maître d’élevage, Némésis a presque le même âge que votre fille, et nous avons modelé son apparence physique selon vos instructions. Au cours des prochaines années, elle deviendra seulement plus robuste et plus puissante.
– Êtes-vous certain que cette fille est dangereuse ? s’enquit le sénateur d’une voix traînante. On dirait un enfant effrayé.
Ses mots me glacèrent.
Il m’était interdit d’être effrayée. La peur me valait des décharges électriques, des réductions de rations, des mauvais traitements ; je ne devais jamais me montrer apeurée, devant personne. Je fixai le sénateur d’un regard féroce.
Il sembla sur le point d’ajouter quelque chose, mais il se ravisa et tourna la tête.
– Vous avez peut-être raison, grommela-t-il. Ses yeux ne trompent pas. On y décèle toute sa bestialité. Très chère, êtes-vous certaine de vouloir une chose aussi monstrueuse sous notre toit ?
– Toutes les grandes familles possèdent un Diabolic, maintenant. Je refuse que notre fille soit la seule à ne pas bénéficier de protection rapprochée, déclara la matriarche, avant de s’adresser au maître d’élevage : Je tiens à être sûre que nous en aurons pour notre argent.
– Bien entendu, répondit le responsable, qui fit signe à un assistant. Nous allons lui donner un leurre en pâture, et elle…
– Non, pas de leurre, le coupa la femme, d’une voix cinglante. Nous ne voulons rien laisser au hasard. Nous avons amené trois détenus. Affronter ces criminels endurcis sera une épreuve suffisante.
Le maître sourit.
– Bien sûr, Grandeé von Empyreé. On n’est jamais trop prudent. Il existe tellement d’éleveurs incompétents… Némésis ne vous décevra pas.
La matriarche adressa un hochement de tête à quelqu’un que je ne voyais pas. Le danger que je flairais depuis le début se matérialisa devant moi : on fit venir trois hommes aux mains entravées par des chaînes. Je me plaquai davantage contre le champ de force, dont je sentis les vibrations magnétiques dans mon dos. Une boule glaciale se forma dans mon ventre. Je savais ce qui allait se passer, ces hommes n’étaient pas les premiers qu’on me présentait.
Alors, tentés?