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[Livre] Samedi 14 novembre

Je remercie les éditions Sarbacane pour cette excellente lecture

 

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Résumé : Vendredi, 13 novembre 2015. B. était à la terrasse d'un café, quand les terroristes ont tiré. Son frère est mort, lui s'en sort indemne. 
Il quitte l'hôpital au matin, monte dans le métro. Son regard croise celui d'un passager. 
Il reconnaît le visage de l'un des tueurs et décide de le suivre.

Auteur : Vincent Villeminot

 

Edition : Sarbacane

 

Genre : Jeunesse

 

Date de parution : 02 novembre 2016

 

Prix moyen : 15,50€

 

Mon avis : L’écriture de Vincent Villeminot est toujours aussi addictive et ce quelque soit le sujet qu’il aborde. Ici, il a décidé de s’attaquer à un sujet difficile, à peine un an après les faits, quand tout est encore frais, peut être un peu trop, dans les esprits.
Les paragraphes sont courts, les chapitres tout autant, parfois juste une demi-page. Du coup, même si le texte en lui-même ne comporte guère d’action, cette construction donne un sentiment d’urgence. Ce n’est pas un livre qu’on pose facilement. En ce qui me concerne, je ne l’ai pas posé et l’ai lu en 2h à peu près.
Son personnage principal, B., est à la fois une victime des attentats et un membre de la famille d’une victime. Sur place lors d’une des attaques, il n’a été que légèrement blessé mais à vu son frère aîné tomber sous les balles des terroristes. Ce choix est un pari risqué car la manière de traiter le personnage peut être mal perçu par les victimes et familles des victimes.

En dehors de l’histoire principale qui suit B., passant du rôle de victime à celui d’agresseur, presque malgré lui, il ya les entractes qui sont comme des flashes sur les personnes qui entourent ou croisent B.
B. agit sous le coup du choc, de la colère, de la rage. Son frère est mort. Il a du mal à réaliser mais à chaque fois qu’il réalise la rage reprend le dessus. Il va commettre des actes qu’il n’aurait jamais commis en temps normal. Et même si certaines de ses actions sont choquantes, on a du mal à lui en vouloir.
Vincent Villeminot, à travers ces actes que commet le jeune homme déboussolé, fait passer un message comme le risque d’amalgame : non tous les musulman ne sont pas des terroristes, voile ne veut pas dire intégrisme, et important aussi, les familles des intégristes ne sont pas toujours complices.
Du coté des victimes, un autre message passe : ne sont pas victimes que ceux qui sont tombés sous les balles : leurs familles, leurs amis, les familles et amis des survivants traumatisés sont autant de victimes collatérales qui n’ont pas été recensées par les médias mais qui ont bel et bien été touchés par ces attentats.
Ce livre est une vrai claque, les dialogues sont parfois, souvent, surtout au début, violents et même choquants, mais c’est un choix de ne pas édulcorer « l’après ». Parce que « après » les gens étaient choqués et violents, en pensées sinon en actes.
Ce roman assez court (un peu plus de 200 pages) peut servir de base pour ouvrir le dialogue sur le sujet avec de jeunes adolescents qui n’ont peut être pas eu la possibilité de s’exprimer sur ce sujet délicat.
Il n’y a plus qu’à espérer que des professeurs intelligents le donnent à lire à leurs élèves. Et que si ce n’est pas le cas, ce soit les parents qui s’en chargent !

Un extrait : Et puis ensuite, il y eut une brève pause de silence, B. s’en souviendrait.
Quelques secondes, deux ou trois, c’est très court, comme s’il fallait que chacun se remette de sa stupeur. Ou peut-être est-ce attendre, reprendre son souffle ; comprendre qu’on est vivant ; s’assurer qu’ils sont vraiment partis, les tueurs. Ou bien est-ce tout le bruit, le vacarme du monde qui se sont retirés ? Il paraît que lorsqu’une munition d’artillerie explose, l’effet de souffle te donne ce sentiment – tout l’air s’en va, en une seconde, juste avant que les shrapnels te déchirent ; que la peau cesse d’être une peau, un bouclier, une frontière entre le monde et toi.
Mais là, ce n’est pas ça. Il n’y a pas eu de shrapnels.

Il y a eu la voiture qui freine, les portières qui s’ouvrent, claquent. Et, sans une semonce, les rafales. Deux armes. Des fusils d’assaut, marque kalachnikov, modèle AKM (ou peut-être AKMS en tôle emboutie), dont on vide les chargeurs.
Il y a eu – autour de B. – les chaises qui se renversent, les tables, les corps qui tombent, les verres qui explosent en esquilles, en milliers de débris ; l’impact sec sur les vitrines, les cris, de surprise, d’effroi.
Et ensuite, les portières, le moteur qui s’emballe.
Puis ce silence.
Ce sursis.

B. relève les yeux, à quatre pattes sur le trottoir, dans les chaises emmêlées, les tables, dans le givre du verre.

La voiture est partie.

Il a le temps de penser : « Je ne suis pas mort », avant la fin du monde.
Un gémissement.

Il a le temps de se demander : « Pierre ? Où est Pierre ? »
Et puis, une femme se met à pleurer, doucement. Et toutes ces voix, d’un coup, tous ces cris. De peur. De douleur. Des appels. Des suppliques. Des soupirs.

 

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