Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

[Livre] Le jour où je n'ai pas pu aller au collège

le jour ou je n'ai pas pu aller au college.jpg

Résumé : L'école peut parfois faire très mal, surtout à l'adolescence. Chaque année, 150 000 enfants de moins de 16 ans s'évaporent de l'Éducation nationale. Beaucoup d'entre eux sont atteints d'un mal peu connu : la phobie scolaire. Stress permanent, nuits sans sommeil, maux de ventre, visites à l'infirmerie pour échapper à une ou deux heures de cours. C'est par ces symptômes presque banals que l'histoire de Justine a commencé. Un matin d'octobre, à 15 ans, elle n'a tout simplement pas eu la force de continuer. Elle a refusé d'aller au collège, et n'y est pas retournée. Quelle famille est préparée à un tel choc ? Quels parents trouvent les bonnes réponses ? Quel adolescent peut entendre raison dans une telle situation ? Commence alors un long cheminement pour tenter de surmonter l'épreuve et pour reprendre le fil de l'apprentissage jusqu'au baccalauréat. Dans un récit à deux voix, Justine et sa mère, Anne-Marie, racontent les étapes de ce combat et lèvent enfin le voile sur ce phénomène encore tabou.

 

Auteur : Anne-Marie Rocco & Justine Touchard

 

Edition : Flammarion

 

Genre : Jeunesse

 

Date de parution : 24 aout 2013

 

Prix moyen : 19€

 

Mon avis : Même si je pense que nombres de parents ne seront pas d’accord avec moi, je trouve qu’il a fallu un sacré courage à Justine pour un jour dire : Stop !
Personnellement je n’ai pas eu ce courage. Et pourtant j’ai subi le collège et le lycée comme une peine de prison. Non seulement ça a été la pire période de ma vie, mais je ne m’en suis jamais remise et j’en ai conçu une véritable aversion pour toute espèce de contrainte ou de cadre hiérarchique (je ne supporte pas qu’on me dise ce que je dois faire, j’ai l’impression d’étouffer).
La phobie scolaire est de toute évidence bien connue par l’éducation nationale (il suffit de voir que le CNED en parle immédiatement et que l’éducation nationale a tout prévu, jusqu’au moindre document nécessaire pour qu’un enfant souffrant de phobie scolaire puisse être scolarisé à la maison) et je me pose la même question que la mère de Justine : pourquoi n’en parle-t-on pas ? Ni sur le site de l’éducation nationale, ni dans les réunions de prérentrée, histoire d’alerter les parents sur ce risque ? Non, la phobie scolaire est comme un secret bien gardé. Comment ? La sacro-sainte éducation nationale, la parfaite école républicaine ne ferait donc pas l’unanimité et pourrait même rendre malade les élèves. Non, du tout, c’est sûrement un complot !
Il ne faut surtout pas dévoiler au grand public que l’éducation nationale n’est rien d’autre qu’une immense machine à broyer tous ceux qui n’entrent pas parfaitement dans le moule : les timides qui peinent à s’exprimer à l’oral, ceux qui ont besoin de plus de sommeil et ne peuvent donc pas passer leurs soirées à réviser, apprendre, faire des devoirs, toujours plus nombreux, chaque professeur considérant que SA matière est la seule valant la peine, ceux encore qui ont juste plus de mal, qui ont besoin de plus de temps pour comprendre, qui n’écrivent pas vite….Tous ceux-là, à la trappe : on veut des robots à l’éducation nationale, de parfaits adultes en miniature sans états d’âme et sans personnalité, près à obéir avec la docilité d’un chien d’arrêt.
Le même problème s’est posé avec le harcèlement scolaire : combien de suicide d’adolescents poussés à bout a-t-il fallu avant que les pouvoirs public reconnaissent ne serait-ce que l’existence du phénomène ?
Dans ce récit à deux voix, on suit la même histoire mais vue alternativement par les yeux de Justine, bien décidée à ne pas remettre les pieds dans un lieu qui la détruit à petit feu, et par ceux de sa mère, qui vénère l’école et qui a beaucoup de mal à accepter les problèmes de sa fille. Même si elle fait des efforts, intérieurement, elle bout, elle ne comprend pas et elle veut à tout prix que sa fille réintègre un cursus normal (et peu importe si elle réussit brillamment par correspondance). D’ailleurs le psy de sa fille résumera parfaitement son attitude en lui disant : « Ce que vous voulez, c’est qu’elle réussisse malgré elle ! ».
Justine a fini par s’en sortir mais les deux auteurs posent la question cruciale : pour une personne qui s’en sort (et cela grâce à l’opiniâtreté des parents qui remuent ciel et terre pour trouver des solutions alternatives à l’éducation traditionnelle), combien d’adolescents broyés et détruits par le système ?
On n’a pas les chiffres. L’éducation nationale se garde bien de faire une étude là-dessus.

Un extrait : Dans le vaste gymnase transformé en salle de réunion, les tapis de sol ont été roulés sur le côté, et des rangées de chaises de classe alignées sur le revêtement synthétique vert balisé de lignes blanches. Devant le mur du fond, sous les paniers de basket-ball, ont été placés deux bureaux, autour desquels sont déjà assis les intervenants. Par ses dimensions et sa disposition, l’installation a quelque chose d’impressionnant, comme si nous allions assister à une grand-messe. Et c’est bien de cela qu’il s’agit. Ce 24 septembre 2007, le principal du collège de la région parisienne dans lequel est scolarisée Justine organise la première réunion de parents d’élèves de 3e, et au seul son de sa voix, on peut deviner que les absents ont encore plus tort que d’habitude. « Il n’y aura pas de passage de justesse en classe de 2de », avertit d’emblée le brave homme à la barbe poivre et sel, qui tient à alerter les parents sur le caractère décisif de l’année scolaire qui commence. Il veut manifestement leur mettre la pression dès cette première réunion, comme il l’a fait à la rentrée pour leurs enfants. Le moment est grave, expliquent tour à tour le principal, les professeurs et le conseiller principal d’éducation (CPE) : il y a le brevet en vue à la fin de l’année, et comme pour les lycéens qui s’apprêtent à passer le baccalauréat, des « brevets blancs » seront organisés plusieurs fois au fil des mois. Une façon d’expliquer aux parents que, dorénavant, leurs rejetons auront droit au même traitement que leurs aînés. Cette fois, l’enfance est bien finie…

Mais le principal sujet de la réunion, c’est bien sûr la perspective de l’entrée au lycée. Car le type d’établissement vers lequel l’élève sera orienté déterminera ses possibilités d’études après le bac. Filière générale et technologique, ou filière professionnelle ? La bouche en cœur, les enseignants expliquent qu’« entrer en 2de professionnelle n’est pas une voie de garage », la preuve étant qu’il y a « plus de demandes que de places ». Mais tout le monde a bien compris le contraire, et moi la première. J’ai de bonnes raisons pour cela : Justine, ma fille, ne manifeste aucune vocation pour la mécanique, l’hôtellerie ou le secrétariat, et je ne tiens pas à ce qu’on lui fasse faire d’office un choix qu’elle risque de regretter. Pour l’instant, elle n’a pas la moindre idée du métier qu’elle veut faire plus tard, et je ne crois pas avoir remarqué qu’autour d’elle ses camarades aient des projets tellement plus précis. Seulement, l’année dernière, le conseil de classe a été formel, et a inscrit son verdict en bas du dernier bulletin de 4e : « avis favorable de passage en 3e en vue d’une orientation en filière professionnelle ». J’en suis tombée des nues.

Personne n’avait jugé utile de nous avertir de cette décision, pourtant lourde de conséquences pour l’avenir de Justine, de nous l’expliquer, de nous parler des choix qui ainsi s’ouvraient – ni de ceux qui se fermaient. La décision couperet est donc arrivée anonymement par la poste, à la fin juin. Au début, je n’ai pas compris que cette mention resterait inscrite au fer rouge sur le dossier de Justine jusqu’au terme de sa scolarité. Quant à elle, je ne suis pas sûre qu’elle y ait prêté particulièrement attention, ou qu’elle en ait mesuré la portée exacte. Car une orientation professionnelle pour une adolescente de 15 ans qui ne manifeste pas d’intérêt pour une vocation particulière, mais dont les résultats sont probablement jugés insuffisants, c’est bien une sanction et une voie de garage. Affirmer le contraire s’avère d’une hypocrisie sans borne. C’est cependant le discours qu’on nous sert.

Pendant cette réunion, tous les propos que j’entends me semblent terriblement éloignés de ce qui pourrait éventuellement concerner ma fille. Laquelle ne me paraît pourtant pas être une martienne, si je la compare à ses camarades. À ceci près que là où d’autres parlent avec aplomb, y compris lorsqu’ils se trompent, elle n’ose pas s’exprimer, craignant de se ridiculiser en proférant une bêtise. Les élèves doivent faire preuve de « maturité », explique gravement le CPE, « acquérir l’autonomie de leur propre travail » et « démarrer une réflexion sur leur projet personnel ». Et les parents se montrer vigilants sur le travail de leurs enfants, ajoutent les enseignants : une heure à une heure et demie par jour, quatre heures le week-end. Un minimum, insistent-ils. Il leur faut aussi veiller à ce que l’ordinateur de leur ado soit éteint quand ils travaillent. Ne parlons même pas de la télévision, évidemment à bannir dans une vie idéale où l’existence de l’adolescent doit être tournée vers sa réussite scolaire, au risque qu’il envoie un jour tout balader. Tout va aller très vite, alertent les professeurs : « Dès la mi-janvier, 50 % des cours de l’année sont faits. »

À la fin de la réunion, l’ambiance est donc un peu lourde, l’inquiétude se lit même sur certains visages. Sur le mien aussi. Pourquoi cette mise en scène, destinée à susciter l’inquiétude plus qu’à motiver ? On se croirait presque à Guignol, où revient régulièrement la peur des coups de bâton du gendarme. Sauf que là, personne n’a envie de rire. Je repars, guère rassurée, et en me posant mille questions.

 

Commentaires

  • Tiens c'est rigolo (ou pas) le dernier Kinsella aborde le même sujet. Un sujet assez tabou d'ailleurs en France. Cette lecture a du être vraiment enrichissante. A bientôt

  • Ah je ne le connais pas. Je vais aller voir le résumé!

Écrire un commentaire

Optionnel