Résumé : Pour Naomi, adolescente timide et réservée, rien ne va plus : elle est obligée de déménager pour suivre sa mère et son copain à Dijon ! Au programme : maison délabrée, beau-père insupportable… et nouveau collège. Comment se refaire des amis quand on n’ose pas parler ? La vie perd toutes ses couleurs pour Naomi, jusqu’au jour où sa grand-mère lui offre un kaléidoscope peu ordinaire… Lorsqu’elle regarde à travers, la jeune fille voit des portes s’ouvrir sur des mondes inconnus et fabuleux, qui lui promettent des heures d’évasion. Arbres aux mille secrets, créatures cruelles et merveilleuses, nature changeante aux décors inconnus…
À force de fuir la réalité, Naomi ne risque-t-elle pas de se perdre un peu plus… ?
Auteur : Marie Caillet
Edition : Castelmore
Genre : Jeunesse
Date de parution : 15 Mai 2019
Prix moyen : 15€
Mon avis : Naomi est une adolescente de 12 ans mal dans sa peau.
Elle doit quitter Paris pour Dijon car le nouveau copain de sa mère y a ouvert une boutique de fleuriste. Autant dire que ni elle, ni sa sœur, ne sont ravies.
Naomi déteste sa nouvelle maison et trouve son beau-père insupportable, même si, objectivement, il est plutôt cool et ne s’impose pas aux deux filles, les laissant s’habituer à lui à leur rythme tout en étant disponible pour elles. Leur mère est plus pénible. Elle veut forcer les choses car elle veut que ses filles acceptent leur nouveau beau-père sans conditions et franchement, elle est lourde. Les choses iraient 10 fois plus vite si elle foutait un peu la paix à tout le monde à ce sujet.
En 6ème, Naomi semble avoir été la cible de moqueries voire de harcèlement et à quelques jours de sa rentrée en 5ème dans un nouveau collège, elle n’est pas sereine et craint d’être de nouveau prise pour cible car elle se sent différente des autres.
Elle est timide, parler en public est un calvaire (et ce n’est pas le corps enseignant qui va l’aider sur ce coup-là), elle a du mal à se faire des amis… Et comme les ados sont une bande de hyènes prompts à s’acharner sur celui qui montre le moindre signe de faiblesse…
Je me suis beaucoup retrouvée en Naomi, sauf que moi c’est dans la lecture que je me suis plongée et que je n’ai jamais été sérieusement blessée par mes harceleurs.
Naomi, elle, va se réfugier dans un monde différent, magique, grâce au kaléidoscope de sa grand-mère.
J’ai trouvé qu’elle y passait beaucoup de temps, que ça devenait une obsession et que ça ne l’aidait pas tellement au début vu que son attitude en présence de ses camarades en devient encore plus bizarre (mais vu ma tentative de noyade dans les univers imaginaires par livres interposés, je me vois mal lui jeter la pierre).
Il vient remplacer son doudou, qu’elle a perdu dans le déménagement et lui ouvre un nouveau mode d’évasion, quoi qu’il va lui falloir tout le livre pour le comprendre.
Le monde dans lequel évolue Naomi à travers le kaléidoscope ne semble avoir aucune règle. A moins qu’il ne faille que Naomi prenne suffisamment confiance en elle pour comprendre ces règles et faire face à celles qui régissent la vie sociale des ados.
J’ai beaucoup aimé ce livre qui parle avec beaucoup de justesse du véritable cauchemar que sont les interactions sociales pour certains ados, surtout quand ils ne rentrent pas pile poil dans le moule, du manque total d’empathie des professeurs, incapable de se rendre compte qu’ils aggravent un problème parce que pour eux aussi, il est plus simple d’avoir une bande de petits moutons bien formatés, et de l’incompréhension des parents qui sentent bien que quelque chose ne va pas sans vraiment comprendre quoi (et parfois sans réellement vouloir le comprendre car pour eux ce ne sont que des broutilles tant que ça n’interfère pas avec les résultats).
A travers le monde imaginaire de son kaléidoscope, Naomi va apprendre à avoir confiance en elle et en ses capacités et au final, à avoir peut être moins peur de s’ouvrir aux autres.
Un extrait : « Collège public de la Salpêtrière. »
Tels sont les mots que j’ai tapés sur Google dimanche matin – en m’y reprenant à trois fois pour écrire « Salpêtrière ». J’aurais pu me contenter du courrier que m’a donné maman, avec la date de la pré-rentrée, l’adresse du collège et toutes les infos pratiques, mais c’était plus fort que moi.
J’ai regretté mon geste dès que j’ai vu les photos.
Je ne sais pas à quoi je m’attendais. Un endroit avec des arbres et de la pelouse, j’imagine – une sorte de mini-Poudlard, étant donné que maman nous a rabâché que l’avantage de déménager, c’est qu’on aurait plus d’espace et de verdure. À la place, un bâtiment grisâtre et une cour en bitume, avec trois pauvres arbres au milieu, m’ont sauté à la figure. J’ai quitté Google en vitesse.
Le lundi matin, dès que je me réveille, les images jaillissent devant mes yeux. Intactes.
« Biiip ! Biiip ! Biii… »
J’arrête le hurlement de mon réveil et je me contracte sous ma couette. La première chose que j’aperçois est mon sac de cours au pied de mon bureau. Un courant d’adrénaline me parcourt le dos, les jambes, les doigts. Je donnerais n’importe quoi pour que ma couette tiède devienne un terrier dans lequel je puisse m’enfoncer, loin du réveil, de la rentrée et de l’odeur de pain grillé qui glisse déjà sous la porte.
Mais c’est le jour J. Je n’ai pas le choix.
Je repousse l’édredon et traîne les pieds jusqu’à ma chaise de bureau. Mes habits m’y attendent, bien pliés. Jean, pull bleu sombre, bottines. Rien pour sortir du lot, mais rien pour m’en écarter. C’est maman qui a préparé ma tenue. En sixième, elle me laissait m’habiller, mais cet été elle a insisté pour refaire toute ma garde-robe. On dirait que l’idée d’un faux pas l’angoisse encore plus que moi.
— Bien dormi, ma puce ?
Christophe est déjà là quand je descends à la cuisine. Je m’assieds sur mon tabouret du bout des fesses. L’odeur du pain grillé me soulève le cœur.
7 h 30. Boule au ventre.
Christophe s’agite autour de la table, dépose une assiette devant moi. Je me force à prendre une tartine et à l’enduire de confiture. C’est une cuisine différente des autres années, un décor différent derrière la fenêtre. Même l’homme qui s’assied en face de moi est différent. Et, pourtant, je retrouve exactement les mêmes sensations qu’à toutes les rentrées. L’angoisse brouille tout, jusqu’au goût des tartines.
Est-ce que le changement de collège va changer quelque chose ? Vais-je trouver ma place ? Me refaire des amis ?
— Bonjour, Sandra, dit Christophe. Je te sers quoi ?
Je lève le nez de mon assiette, tout en notant que Sandra, elle, n’a pas droit au « ma puce ». Ma sœur fonce vers la table en grommelant je ne sais quoi et renverse la moitié du sachet de céréales dans son bol. Christophe toussote.
— Bon, les filles…, il y a un changement de programme. Votre mère doit se rendre à sa nouvelle agence à 9 heures et, comme c’est à l’opposé de votre collège, c’est moi qui vais vous emmener à votre pré-rentrée. On démarre dans vingt minutes, c’est bon pour vous ?
J’ai beau fixer la toile cirée, je devine qu’il lance des petits coups d’œil dans ma direction. Sandra conservant un silence buté, je lui fais un petit « oui » de la tête. Il se détend visiblement.
— J’irai vous chercher à midi trente. Vous verrez, vous allez vous faire des copains super vite, j’en suis sûr !
Il m’adresse un clin d’œil. Je remarque qu’il a les iris presque aussi bleus que ses lunettes. Son regard déborde de sympathie, mais c’est comme si je me trouvais bloquée dans un bocal aux parois invisibles. Rien ne m’atteint.