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[Livre] Le choix du roi

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Résumé : Royaume des Francs, 792. L’heure est grave : Charlemagne vient d'apprendre que son fils d’un premier lit, Pépin le Bossu, a conspiré contre lui. Le roi est loin d'avoir été un père idéal, mais la sentence est sans appel : le jeune traître doit rejoindre un monastère et y demeurer le restant de ses jours. Peu enclin à faire amende honorable et encore moins à devenir un homme de Dieu, Pépin dépérit. L'héritier déchu est loin de se douter que c’est par une entremise des plus inattendues que viendra son salut, avant d'entamer un périlleux voyage vers l'inconnu...


Auteur : Solène Beauché

 

Edition : Librinova

 

Genre : Historique, Fantastique

 

Date de parution : 15 novembre 2018

 

Prix moyen : 20€

 

Mon avis : Ce roman m’a vraiment happée.
A la lecture, on repère certains faits historiques connus, comme la mort de Roland à Roncevaux ou encore le défilé d’épouses de Charlemagne.
Pour d’autres, c’était plus difficile. Il a fallu que je fouine sur internet pour découvrir qu’Amaudra (aussi appelée Alpaïs) a bel et bien existé.
En fait, toute la base du roman est parfaitement juste historiquement parlant en ce qui concerne les personnages principaux. Puis, à partir du moment où Peypin le bossu et Amaudra se retrouvent, l’histoire se met en veilleuse, sans s’effacer totalement, pour laisser la place à la fiction.

Mais très franchement, à part lorsqu'il est question d’un don surnaturel (dont on connaît l’existence mais qui ne prend pas le pas sur l’histoire), tout est parfaitement crédible et pourrait tout à fait s’être déroulé ainsi.

L’histoire est découpée en trois parties, chacune étant racontée à la première personne par l’un des trois personnages principaux.
La première partie est du point de vue de Charles (Charlemagne). Mon Dieu que j’ai pu détester ce type ! Son arrogance est insupportable, son attitude générale est d’une hypocrisie sans nom ! Il n’a que Dieu à la bouche alors que son comportement va à l’encontre de cette religion et notamment son rapport avec ses femmes.
La seconde partie est racontée par Peypin le bossu et la troisième par Amaudra, les deux ainés de Charles qu’il a eu avec sa première épouse, Himiltrude, qu’il a répudiée pour conclure une alliance plus avantageuse, réduisant ses deux premiers enfants au rang de bâtard.
Ces deux jeunes gens ont vécu, chacun à leur manière, une vie misérable à cause de leur père.
Là, en revanche, j’ai vraiment adoré ces deux personnages et je serais bien incapable de vous dire si j’ai préféré Peypin ou Amaudra.
L’histoire de chacun d’eux m’a profondément touchée. La solitude que ressent Peypin au sein de sa famille, ou celle d’Amaudra, en exil, utilisée honteusement par son père sans pour autant qu’il daigne faire autre chose que la reléguer aux oubliettes, m’a interpellée de la même façon.
Cette saga familiale où un frère et une sœur se portent l’affection qui leur a toujours été refusée par un père égoïste, est portée par l’écriture captivante de l’auteur.
Son histoire est si bien documentée que j’ai parfois eu l’impression de lire du Philippa Gregory.
En demandant « Le choix du roi » comme service presse, j’espérais lire une histoire plaisante qui saurait me charmer.
Elle a dépassé toutes mes espérances car j’ai eu un vrai coup de cœur pour ce superbe roman.

 

Un extrait : Été 792. Je me redressai en sursaut, mon cœur battant la chamade. Le cauchemar qui m’avait réveillé m’engourdissait encore, plus vivace que jamais. Haletant, sans prendre la peine de me couvrir, j’enjambai le corps dénudé de l’une des jeunes filles qui partageait mon lit et me dirigeai vers la fenêtre. Dehors, la lune se dessinait en filigrane derrière une fine couche nuageuse. Ses contours nets et pleins découpaient dans le paysage des ombres ruisselantes. Une pluie diluvienne s’abattait sur Ratisbonne. Je lui présentai mon visage pour y laisser éclater quelques gouttelettes échappées des trombes d’eau crachées par le ciel. Un effluve de terre détrempée me parvint furtivement.

J’avais rêvé qu’on me volait ma couronne. Mes assaillants n’avaient rien d’identifiable. Leur figure était lisse, à peine parée d’yeux vides, sans âme, comme sculptés à même leur peau. Ce n’était pas la première fois que ces visions m’apparaissaient. C’était le prix de la royauté. L’angoisse d’être déchu, de devenir un homme parmi les hommes ou pire, de quitter ce monde en sachant son royaume entre de mauvaises mains. Que cette peur ne m’ait jamais taraudé eut été intolérable.

Je regagnai mon lit, que je distinguais tout juste dans l’obscurité à peine balayée de timides rayons lunaires. Aucune des deux servantes qui y dormaient à poings fermés, épuisées par nos ébats tardifs, n’avait bronché quand je m’étais réveillé en sursaut. L’une d’entre elles émit un gémissement discret tandis que j’embrassais son sein charnu, puis elle replongea dans un sommeil paisible. Le lendemain, elles retourneraient à leur vie de labeur avec la seule satisfaction d’avoir procuré une nuit de plaisir à leur roi. Le grain fin et ferme de leur peau contrastait avec le relâchement naissant de la mienne. Mon corps, bien qu’encore vigoureux, commençait à montrer les signes de ses quarante-cinq ans. Je n’étais plus un jeune homme.

Soudain, j’entendis un garde se braquer à l’entrée de ma chambre. Une voix essoufflée semblait insister pour s'entretenir avec lui.

— Pitié, je dois lui parler, c’est une question de vie ou de mort !

— Le roi est occupé, il ne veut être dérangé sous aucun prétexte.

Le tumulte provoqué par leur discussion fit tressaillir mes jeunes amantes qui, prises de panique, tentèrent tant bien que mal de cacher leur nudité. Elles étaient moins chastes quelques heures auparavant.

Je les laissai à leur affolement, plus soucieux d’aller à la rencontre de celui qui osait troubler ma prétendue quiétude. J’interpellai l’importun, que je n’étais pas sûr de reconnaître. Il portait l’habit monacal et était trempé jusqu’aux os.

— Que se passe-t-il ici ?

— Roi Charles, je vous prie de m’excuser, mais je ne vous dérangerais pas si ce n’était pas de la plus haute importance. Mon nom est Fardulf. Je viens vous avertir du danger qui vous guette. Je me suis rendu coupable d’avoir cédé à la fatigue dans l’église dont je suis le chapelain et il y a quelques heures de cela, un bruit de pas m’a réveillé. Sous les nefs, des conspirateurs parlaient à voix basse contre vous. Ils ont pour dessein de vous tuer et de mettre votre fils Pépin sur le trône à votre place.

— Pépin ? grinçai-je. Il n’a pas quinze ans, il est trop jeune pour régner. Et puis, la couronne d'Italie lui est tout acquise.

— C’est de votre autre fils qu’il s’agit, roi Charles. Celui qui est contrefait. Je l’ai vu. Il était là, avec les conspirateurs.

Un nœud étreignit ma poitrine tandis que le clerc, intarissable, continuait de radoter.

— Ils m’ont surpris et j’ai couru aussi vite que j’ai pu pour leur échapper. Ils ont bien failli me rattraper, mais ma loyauté envers vous…

Je n’écoutais déjà plus. J’avais été trahi par ma chair et mon sang.

 

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