Résumé : Trois amis s'embarquent dans une drôle d'aventure : retaper en plein hiver une maison abandonnée dans un village desert de la région des fjords, à l'ouest de l'Islande, pour la transformer en gîte estival. Chacun a des motivations très différentes pour s'imposer ce défi : Gardar y voit une chance de s'extraire de la spirale des dettes et de regagner l'admiration de sa femme, Katrin, qui l'accompagne par pure solidarité conjugale. Leur amie Lif les suit parce qu'elle y voit une chance de faire le deuil de son propre mari, récemment décédé. Tous trois ont une chose en commun : ils s'attendaient à être seuls.
De l'autre côté du fjord, la police fait appel à Freyr, un psychiatre brisé par la disparition mystérieuse de son fils, trois ans auparavant, pour éclaircir les circonstances troubles du suicide d'une vieille femme. Il ne s'attendait pas à ce que cette enquête le ramène à son drame personnel.
Auteur : Yrsa Sigurdardottir
Edition : Points
Genre : Thriller
Date de parution : 03 octobre 2013
Prix moyen : 8€
Mon avis : Je vous le dis tout net, je suis une flipette. Je classe greemlins dans les films d’horreur, fais de la spéléologie sous ma couette à la première note de musique un tant soit peu inquiétante, et suis absolument incapable de regarder la bande annonce de Hostel, Saw ou Beetlejuice jusqu’au bout.
Donc je veux bien admettre que je ne suis pas d’une fiabilité absolue quand je dis que ce livre est flippant !
Je me doute que vous croirez sans mal que MOI, j’ai flippé, mais je vous imagine déjà en train de ricaner que le plus effrayant doit être une branche tapant contre une fenêtre une nuit sans lune.
Et bien QUE NENNI !! Parce que je ne suis pas la seule à avoir flippé (mais je l’admets, peut-être la seule à avoir refusé de lire après 18h) ! Lisez les différentes critiques et vous verrez que c’est un cri quasi-unanime (que voulez-vous, il y a des guerriers partout) : Ce bouquin file les jetons !
Et pourtant… Il ne se passe rien de très clair. On est loin du tueur à la hache qui découpe allégrement ses victimes dans de grandes éclaboussures de sang.
Non… rien de tout cela !
Juste une atmosphère pesante, glaciale, sans la moindre romance ou touche d’humour pour faire redescendre la tension.
L’histoire alterne entre Freyr, un psychiatre sollicité par la police pour donner son avis sur deux affaires : le saccage d’une école maternelle et le suicide d’une sexagénaire, et Gardar, Katrin et Liff, partis sur une ile désertée pour retaper une maison qu’ils comptent reconvertir en maison d’hôtes.
A priori, les différentes situations n’ont absolument rien à voir les unes avec les autres.
Et pourtant… au fil de la lecture, des liens subtils apparaissent.
L’auteur réussi ainsi à réunir, dans un certain sens, tout un tas de personnages dont l’existence semblaient pour certains anecdotiques.
Et bien non, le plus petit des personnages a un rôle à jouer, aussi ténu soit-il, dans l’élaboration du dessin complexe qui se dessine sous nos yeux.
Aucun des personnages n’est vraiment sympathique, certains sont même franchement antipathiques, mais cela n’empêche pas d’accrocher à l’histoire (ce qui n’est pas évident à obtenir pour un auteur en l’absence de personnages ralliant les lecteurs à sa cause).
L’enquête policière est complexe et tout ne tombe pas tout cuit dans le bec des flics. J’ai beaucoup aimé suivre les recherches et interrogations qui la jalonnent.
Mais ce qui fait le plus peur, c’est l’atmosphère présente sur l’île, une atmosphère glaçante, oppressante et surnaturelle.
Il y a une présence dans ce village abandonné dont on ne sait pas vraiment si elle est humaine, surnaturelle ou encore produite par l’imagination des 3 occupants, seuls, isolés, en un lieu prétendument maudit.
Au final, les passages consacrés à Freyr, bien loin de faire baisser la tension ressentie lors des huis-clos de l’île, ne font que renforcer celle-ci.
Il n’y a pas à dire, les auteurs nordiques ont vraiment le chic pour les thrillers et celui-ci ne fait pas exception : Il est prenant, flippant, addictif…
bref, je n’ai qu’une chose à dire : Lisez !
Et flippez ! (Et ce sera bien fait si vous avez ricané !)
Un extrait : Les vagues faisaient tanguer l’embarcation dans un incessant va-et-vient. La proue se soulevait doucement au rythme des secousses plus brusques qui malmenaient la coque, violemment projetée de gauche à droite. Le capitaine se débattit pour amarrer le petit bateau à un fin poteau métallique, mais le ponton flottant, tout érodé, ne cessait de se dérober, comme s’il s’agissait d’un jeu de cache-cache. Il répéta patiemment les mêmes mouvements, encore et encore – il lançait le cordage effiloché en direction du poteau, et chaque fois la corde manquait sa cible, comme repoussée. La mer semblait se jouer d’eux, pour leur rappeler qui commandait. L’homme réussit finalement à arrimer son embarcation, mais il n’aurait su dire si c’était parce que les vagues s’étaient lassées de le provoquer, ou bien si sa patience et son expérience de capitaine avaient eu raison des caprices des éléments. L’air grave, il se tourna vers les trois passagers et annonça :
« Vous pouvez y aller. Mais attention en descendant. » Puis, d’un mouvement du menton, il désigna les cartons, les sacs et les autres affaires qu’ils avaient emportés. « Je vais vous aider à débarquer tout ça, ajouta-t-il, mais malheureusement je ne peux pas vous accompagner jusqu’à la maison. » Il contempla le large en plissant les paupières. « On dirait que je ferais bien de rentrer aussi vite que possible. Vous aurez le temps de faire le tri quand je serai reparti. Il doit y avoir une brouette qui traîne quelque part.
— Pas de problème. »
Garðar adressa un vague sourire à l’homme, sans pour autant se mettre à décharger. Il expira bruyamment en bougeant nerveusement les pieds, puis dirigea son regard vers l’intérieur des terres, où plusieurs maisons se détachaient le long de la plage. Un peu plus loin, des toits scintillaient. On n’était qu’au début de l’après-midi, pourtant la pâle lumière hivernale déclinait déjà. Bientôt, il ferait complètement noir.