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[Livre] Suzon

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Résumé : Paris, 1698. Fille de bourgeois, insolente, véritable garçon manqué grimpant aux arbres et jurant comme un charretier, Suzon est placée à huit ans au couvent des Ursulines de Saint-Denis.
Dans cette prison, elle se lie d’amitié avec Ederna, jeune aristocrate originaire de Saint-Malo, qui lui raconte mille histoires de corsaires bravant la mer pour la gloire du Royaume.
Rendue à sa famille à dix-sept ans, Suzon, toujours aussi rebelle, tombe éperdument amoureuse d’Antoine Carreau, chevalier de Léré. Mais le jeune homme est tué au cours d’un duel, laissant Suzon inconsolable, à la tête d’une petite fortune.
Elle décide de quitter Paris pour Saint-Malo, afin d’y rejoindre son amie Ederna, mariée et mère de deux enfants, qui l’accueille à bras ouverts.
Pourtant, Suzon rêve d’un autre destin que celui que la nature et la société lui ont prescrit. L’appel du large hante ses jours et ses nuits. Mais une femme peut-elle, même au siècle des Lumières, vivre sa vie librement et assouvir sa soif d’indépendance et d’infini ?
C’est donc travestie en homme qu’elle investit sa fortune pour armer une frégate et sillonner les mers au côté du séduisant capitaine Thomas Raquidel, qui ne sait rien de sa vraie nature.


Auteur : Louise Bachellerie

 

Edition : Delpierre

 

Genre : Historique

 

Date de parution : 21 Mars 2014

 

Prix moyen : 16€

 

Mon avis : J’ai beaucoup aimé le style de l’auteur qui emploie dans son récit les tournures de phrases que l’on pouvait trouver chez les auteurs du XVIIIème siècle. Cela nous permet de plonger encore plus dans l’histoire de Suzon car on a l’impression que l’histoire a été racontée par l’un de ses contemporains.
Dès le début de l’histoire, on apprend deux choses sur Suzon : son père lui reproche de n’être qu’une fille et c’est une forte tête.
Rebelle, garçon manqué, insolente, rien, ni les punitions, ni les brimades ne semblent pouvoir la faire plier. Expédiée au couvent sur les instances de sa belle-mère, les religieuses n’ont pas plus succès que le patriarche sur le caractère de la gamine.
C’est au couvent que Suzon va rencontrer Ederna qui a été mon personnage préféré du roman. Posée et plus conventionnelle que son amie, Ederna a aussi son petit caractère mais sait où est le devoir qu’elle doit à son rang et s’est résignée à faire un mariage dépourvu d’amour. Tout au long des aventures de Suzon, elle sera un peu son point d’ancrage. Sa maison, son époux, son frère, ses enfants, sont le cocon dans lequel Suzon se sent en sécurité et là où elle retourne à chaque fois qu’elle est confrontée à quelque chose de trop difficile. Ederna ne lui reproche jamais rien, ou quand elle le fait, c’est à demi-mot, avec douceur et sans jugement. J’ai vraiment beaucoup aimé ce personnage et sa famille. Plus que Suzon que j’ai souvent trouvé inconséquente avec sa façon d’agir avant de réfléchir et de prendre des décisions en dépit du bon sens.
Au début, Suzon ne se travestit en homme que pour pouvoir voyager en sécurité, le temps de rejoindre Ederna. Le travestissement peut la conduire en prison et, si on peut comprendre qu’elle n’ait pas osé prendre la route avec des biens précieux en tant que femme, on se serait attendu à ce qu’elle ne tente pas le sort en recommençant.
Mais non, à peine arrivée à Saint-Malo, Suzon est prise par l’appel du large et, toujours sous sa fausse identité masculine, elle affrète un bateau pour aller jouer au corsaire, risquant ainsi sa propre vie (une femme s’embarquant comme homme sur un bateau risquait la peine de mort) et celle de son entourage (tout homme sur un bateau soupçonné d’avoir eu connaissance de la nature féminine d’un « matelot » est condamné à être pendu).
A travers les péripéties de Suzon, on découvre la vie en mer. La dureté des capitaines, la dureté impitoyable des éléments et des hommes : quand on ne meurt pas empoisonné par de la viande avarié ou durant une tempête, on a toutes les chances d’être frappé par une punition injuste dont l’issue est souvent la mort.
A côté de la vie en mer, on a un aperçu des débuts du règne de Louis XV, du commencement de la traite des nègres, à laquelle s’opposent déjà les philosophes, les salons parisiens, la piraterie…
Le roman se lit assez vite, même si la lecture est quelque peu ralentie par l’abondance de détails historiques qu’il faut le temps d’assimiler.
J’ai eu peur à plusieurs reprises, non seulement pour Suzon mais aussi et surtout pour son entourage qui n’est pas épargné.
La fin du roman prépare le suivant qui sera consacré à la génération suivante en la personne de Louise, la fille de Suzon.

 

Un extrait : Le sieur Pierre-Siméon Truchot, négociant en drap, indienne et soieries, établi à Paris, rue Saint-Dominique (anciennement chemin des vaches), nourrissait bien des reproches à l’égard de sa fille aînée. Le premier était qu’elle avait coûté la vie à sa mère, passée de vie à trépas quelques jours seulement après ses couches. Le second était qu’elle était une fille. Il avait espéré que ce premier enfant serait un garçon, un mâle vigoureux et plein de promesses : celle d’abord de le seconder, puis de lui succéder dans son négoce qui, en 1698, était fort prospère. Au lieu de cela, le nourrisson était malingre, dépourvu des attributs qu’on aurait aimé lui voir, et il l’avait privé définitivement de la compagnie de dame Flavie, sa première épouse qu’il aimait d’amour.
Pour que la petite ne mourût pas de faim, il avait fallu embaucher une nourrice qui fait aussi office de servante. Deux ans plus tard, à l’aube du nouveau siècle, Pierre-Siméon Truchot avait repris femme. Si la première s’était montrée inapte à enfanter sans y perdre la vie, la seconde était d’une fécondité telle que, après de deux naissances en deux ans, le drapier avait résolu de renoncer aux plaisirs de la chair. Mais son épouse, qui était encore jeune et ardente, lui avait démontré que Dieu n’aurait point prisé qu’il négligeât son devoir conjugal. De leur lit naquirent donc deux autres enfants braillards qui exigèrent qu’on employât deux nouvelles servantes et qu’on engageât force dépenses diverses.
Tous les marmots vécurent, crurent et embellirent, montrant tous une belle santé et des organes qui défiait en puissance, lorsqu’ils étaient réunis, les cris des marchants ambulants, les hennissements des chevaux et le bruit des marteaux frappant et taillant la pierre alentour, dans la rue, où l’on construisait à tour de bras de nouvelles demeurent et entrepôts.

 

Beaucoup aimé 4 étoiles.jpg

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