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[Livre] Les filles de Sultana

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Résumé : Dans ce deuxième ouvrage qui évoque la vie de la princesse Sultana d’Arabie Saoudite, derrière le voile, derrière les murs de la domination masculine, une femme cultivée, intelligente et drôle, critique et raconte un pouvoir absolu.

Plus que le récit de la vie d’une princesse, d’une épouse et d’une mère de famille, ce livre est le cri d’une femme dans le désert masculin de son pays, ou la moindre velléité de féminisme, la plus minuscule des libertés, sont des péchés.

 

Auteur : Jean P. Sasson

 

Edition : Pocket

 

Genre : Témoignage

 

Date de parution : 16 Mars 1998

 

Prix moyen : 5€

 

Mon avis : Dans ce second témoignage, la princesse Sultana, dont le premier témoignage a été découvert par les hommes de sa famille, persiste dans la dénonciation des actions menées contre les femmes dans son pays. Mais, peut-être est-ce dû au fait qu’elle est plus surveillée, dans ce second tome, elle parle surtout de ses enfants et des actes de personnes étrangères à la famille (bizarrement, son mari, qu’elle accusait de tous les maux dans le premier tome, est ici compréhensif et ouvert). Bien sûr elle continue à ne pas épargner son père, son frère ou sa belle-mère, mais on la sent moins vindicative.
De ses trois enfants, son fils semble être le plus équilibré : les actions menées contre les femmes le révoltent, au point qu’il va transgresser la loi pour aider un couple d’amoureux à se retrouver malgré l’opposition de la famille de la jeune femme.
En ce qui concerne ses filles, c’est plus compliqué. Le bon côté des choses, c’est qu’elles ne vivent pas leur adolescence comme l’a vécu Sultana, puisque, contrairement à leur mère, elles ont l’amour de Karim, leur père.
Mais malgré l’amour qu’il leur porte, la société est ainsi faite, qu’il est plus souvent en compagnie de son fils que de ses filles et que leur frère a nécessairement plus de liberté qu’elles.
Leurs réactions va être diamétralement opposées : Maha, l’aînée, va traverser une crise où la haine de son frère va être aussi forte que son désir de s’émanciper de la pression des religieux ; tandis qu’Amani, la cadette, va plonger dans une ferveur religieuse qui va la conduire à l’extrémisme, au point d’inquiéter ses parents.
Sultana va revenir sur la pratique de l’excision, à laquelle elle va être confrontée à travers une de ses domestiques égyptiennes. Son impuissance à intervenir va la plonger dans une profonde affliction et cette pratique va fortement impressionner son fils, qui n’arrive pas à croire que l’on puisse faire cela à des petites filles (toutes les réactions de celui-ci rendent Sultana très fière car il n’a pas cette mentalité qui pousse les hommes d’Arabie Saoudite à asservir les femmes).
Nous allons également avoir des réponses à certains évènements cités dans le tome 1, comme le sort réservé à Sameera, l’amie d’une des sœurs de Sultana.
Le livre se termine sur une note à la fois plus sombre, avec un drame qui arrive à l’une des sœurs de Sultana, et plus légère, avec des sœurs unies autour de leur sujet de moquerie préféré, leur frère.
En anglais, le témoignage de Sultana est une trilogie. Le dernier tome (Princess Sultana's Circle) est centré sur des membres de la famille (une nièce, un cousin et des neveux). Il semblerait que l’éditeur français n’ait pas jugé utile de le publier.
En 2014, la journaliste qui relate le témoignage de Sultana a publié un quatrième tome.
La publication d’un tel nombre de tome fait s’interroger sur la véracité du récit. En effet, s’il est si difficile de parler à des journalistes étrangers, comment expliquer que Sultana ait pu le faire tant de fois, alors même que son premier témoignage avait été découvert ?
Malgré ces interrogations, ces livres restent très intéressants à lire.

Un extrait : Père n’est pas encore rentré, et apparemment nous sommes les derniers arrivés. Les onze autres enfants vivants de ma mère ont été convoqués, mais sans leurs conjoints. Je sais que trois de mes sœurs ont pris l’avion de Jeddah pour Ryyad, et deux autres sont venues de Taïf.
D’un coup d’œil, je m’aperçois que Karim est le seul membre extérieur à la famille. Même la dernière épouse de mon père et ses enfants sont invisibles. Je devine qu’on les a confinés dans leurs appartements privés.
L’urgence bizarre de cette réunion me ramène au livre et mon cœur se serre d’effroi. Ma sœur Sara et moi échangeons des regards angoissés. Elle est la seule de la famille à être au courant de cette publication, ses craintes sont les mêmes que les miennes.
Tous ceux de mon sang me saluent, excepté mon unique frère, Ali. Et je surprends des coups d’œil sournois et furtifs de sa part dans ma direction.
Quelques instants après notre arrivée, père pénètre dans la pièce. Ses dix filles se redressent en même temps, avec respect et, chacune à leur tour, rendent hommage à l’homme qui leur a donné la vie – sans le moindre amour.
Je n’ai pas vu mon père depuis quelques mois ; il me semble las et prématurément vieilli. Au moment où je tente de l’embrasser sur la joue, il se détourne avec impatience, refusant délibérément mon élan. Mes peurs n’en deviennent que plus intenses. Je vois bien maintenant à quel point je me suis montrée naïve en croyant que les Al Sa’ud étaient trop préoccupés par une insatiable soif de richesses pour prêter attention aux libres.
Je tremble de plus en plus.

 

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