Lecture terminée le : 14 juillet 2019
Résumé : Passer l'automne à Kyoto. Toute une saison, autant dire une éternité... Margaux en rêvait depuis toujours. Mais la veille de son départ pour le Japon, elle n'a plus envie. Entre-temps, elle a rencontré Mathias et ça change tout. Comment va-t-elle supporter ces trois longs mois de séparation, privée de Mathias, de ses caresses et ses baisers ? Pour ne rien arranger, elle vient d'apprendre que sa mère ne faisait plus partie du voyage et qu'elle-même allait jouer les jeunes filles au pair, coincée entre un père pas facile à vivre et une petite sœur énergique comme une pile électrique. Si elle savait ! Là-bas, Margaux va s'émerveiller devant ses premières feuilles d'érable rouges, les momiji, les fleurs de camélia et les temples illuminés. Elle va rencontrer Éric Dufay, jeune photographe au sourire carnassier et aux yeux pétillants qui a un don certain pour l'agacer. Là-bas, l'automne va passer plus vite que prévu.
Auteur : Karine Reysset
Edition : L’école des loisirs
Genre : Contemporain
Date de parution : 2010
Prix moyen : 10€
Mon avis : Un automne à Kyoto est un tout petit livre de moins de 200 pages mais qui m’a provoqué bien plus d’émotions que bien des pavés.
Margaux, 16 ans, était impatiente de partir passer une saison au Japon, en famille, jusqu’à ce qu’elle rencontre Mathias et qu’elle apprenne que sa mère ne sera finalement pas du voyage.
Or, entre son père artiste, taciturne et dépressif, incapable de passer du temps avec ses filles, et sa sœur de 4 ans, véritable pile électrique épuisante, Margaux n’est plus guère emballée par le projet.
Arrivée au Japon, elle peine à trouver sa place. Elle est enfermée dans un rôle de petite fille par son père qui demande à un voisin de les surveiller quand il s’éloigne d’elles un quart d’heure et en parallèle, par son attitude distante, il lui demande d’endosser son rôle d’adulte pour tenir la maison et s’occuper sans cesse de sa sœur, ce qui épuise l’adolescente qui n’a pas un instant à elle.
Très vite, elle commence à douter de la raison invoquée par sa mère (un travail) pour ne pas venir. Elle sent que son petit monde est en train de s’effondrer et communiquer avec Matthias est moins satisfaisant que prévu, le jeune homme n’étant clairement pas intéressé par tout ce qui touche Margaux. Mais une amourette d’ado de moins d’un mois peut-elle vraiment survivre à trois mois de séparation, alors qu’ils se connaissent finalement bien peu et n’ont quasiment jamais passé de moments en tête à tête, Mathias étant, comme tous les garçons de son âge, greffé à sa bande de potes ?
Tout cela, Margaux nous le raconte trois mois après les faits. Elle nous parle donc avec un certain recul et répond souvent à nos questions au moment où on se les pose. Je l’ai trouvé très sévère envers elle-même.
J’ai éprouvé une forte antipathie pour son père, qui se sert de ses filles comme d’armes contre son épouse. C’est le type même du gars qui veut priver sa femme de la présence de ses enfants, mais dont on sent que s’occuper de sa fille de 4 ans le gonfle profondément, et qui compte donc sur sa fille adolescente pour gérer tout ça, sans se préoccuper de si cela met la jeune fille en difficulté pour travailler ses cours (CNED).
Du moment que Môssieu a la paix !
En revanche, j’ai vraiment beaucoup aimé la mère, bien qu’on ne la voie qu’à travers ses lettres et quelques appels téléphoniques. J’ai particulièrement aimé la lettre qu’elle envoie à Margaux pour lui expliquer la situation tout en indiquant clairement que les choix qu’elle fait en tant que femme ne regardent qu’elle. C’est important car même si sa fille lui en veut sur le moment, c’est une manière de lui dire : ce n’est en rien ta faute, tu n’as aucune responsabilité dans cette histoire, c’est une décision personnelle.
Quant à Éric, le photographe, je n’ai rien pensé de particulier de lui. C’est un homme à un tournant de sa vie, s’engageant sur un chemin dont il n’est pas sûr. Une certaine faiblesse sous ses airs de bad boy qui lui permet de se laisser émouvoir par l’adolescente. Par un mauvais bougre, pas un héros romantique non plus.
Il n’a d’intérêt qu’en cela où il permet à Margaux de se découvrir elle-même.
L’écriture est poétique. Dans les réflexions de Margaux, on trouve des haïku, des listes aux titres à rallonge…
La description de Kyoto est zen, on croirait voir une carte postale, et c’est presque à regret qu’on referme ce livre plein d’émotions et de mélancolie (et qu’on se dit qu’on va économiser pour aller visiter Kyoto !)
Un extrait : Cette salle, sans porte ni fenêtre, ouverte sur la nature, donnant sur cyprès immense soutenu par une dizaine de tuteurs aussi épais que des troncs d’arbres, invite à la méditation, à la réflexion ; trois minutes, une heure, sept ans, une décennie, pour repenser à tout ce qui s’est passé ces trois derniers mois. Cet arbre-là est là depuis près de huit siècles, qui suis-je face à lui ?
Margaux, seize ans et demi en théorie, une sœur de quatre printemps, des parents qui s’aiment, des parents qui se séparent, un amoureux, deux amoureux (plus d’amoureux ?). Je pourrais très bien être née de la dernière pluie ou avoir déjà traversé les millénaires accrochée au dos d’un éléphant ou d’un papillon, me ballottant au gré du vent.