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Premières lignes #1

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Premières lignes est un rendez-vous livresque mis en place par Aurélia du blog Ma lecturothèque. La liste des participants est répertoriée sur son blog (Si ce n’est que son rdv est le dimanche et que je mettrai le mien en ligne chaque samedi).
Le principe est de, chaque semaine, vous faire découvrir un livre en vous en livrant les premières lignes.
Pour ma part, j’ai décidé de vous faire découvrir mes coups de cœurs !

 

Cette semaine, je vous présente Virtuosity de Jessica Martinez dont vous pouvez lire le résumé et ma chronique ICI

 

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"Le balcon me glaçait la joue. Dix étages plus bas, le trafic était dense sur la grande artère longeant le lac, pourtant j’avais l’impression que le ronronnement des moteurs résonnait à des kilomètres de là. Le spectacle sous mes yeux était d’un calme parfait : un ciel noir et sans étoiles surplombant le lac Michigan, mon bras nu glissé entre les barreaux métalliques de la rambarde et la crosse caramel de mon violon dépassant de mon poing serré.

Je n’avais qu’à ouvrir la main. Dérouler les doigts, un à un. Lorsque le dernier lâcherait prise, le violon fendrait la nuit telle une flèche, filant vers la terre ferme, en bas. Et tout serait terminé.

Je libérai mon souffle et sentis mon corps se plaquer contre le béton. Diana m’en voudrait pour la robe. C’était sa couturière qui avait travaillé la mousseline légère, au moyen de surjets et de fronces, pour obtenir ces cascades de bleus, déclinés en trois nuances. À présent écrasés sous moi, les tourbillons de tissu, chiffonnés, devaient absorber la saleté, la graisse et autres cendres de cigarette qui s’accumulent sur les balcons des chambres d’hôtel.

Je frissonnai. Le vent s’engouffrait par bourrasques, soulevant mes cheveux, qui me fouettaient le visage et le dos, décolleté. Je m’étais débarrassée depuis un moment des barrettes et épingles – c’était même la première chose que j’avais faite en pénétrant dans la chambre. Ensuite j’avais quitté mes chaussures à talons, mes collants et mes boucles d’oreilles. Ça n’avait pas suffi. Je n’arrivais pas à me défaire de la honte qui me collait à la peau.

J’étais alors sortie sur le balcon avec mon violon.

La morsure de ce cauchemar éveillé était encore vive, la tension continuait à me nouer la poitrine, la tête, les mollets et les doigts.

Un million deux.

Cet instrument valait un million deux cent mille dollars. Ce nombre était difficile à comprendre. À ressentir. J’imprimai un mouvement de balancier au violon, très léger, et fermai les yeux. Meurtrière. Le mot avait surgi dans mon esprit et je le chassai aussitôt. Ridicule : un violon n’était ni un bébé ni un animal. Il n’était pas vivant.

Je m’en convaincrais plus facilement cependant, si je ne l’avais pas senti respirer, pas entendu chanter.

Je soulève les paupières. Mes articulations, blanchies, frémissent. L’effet des comprimés se dissipe progressivement. La musique est terminée. J’ouvre la main."

 

Est ce qu'il vous tente?

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