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[Livre] Un hiver en enfer

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Résumé : "Edward avait l'impression de se trouver dans un cauchemar. À regarder sa mère si calme, si parfaite, déblatérer les preuves criantes de l'isolement dément qu'elle lui faisait subir, Edward comprit qu'elle était vraiment dangereuse. Complètement tarée. Je n'aurai pas le temps de trouver les preuves avant de devenir dingue, moi aussi, pensa-t-il. C'est peut-être ce qu'elle cherche. M'emporter dans son délire. Il faut que je me casse d'ici, et vite !" Pour échapper à l'enfer familial, Edward, adolescent fragile, se réfugie dans sa vie virtuelle. Prisonnier des liens malsains d'une mère qui n'a jamais su l'aimer et soudain l'étouffe, l'isole. En plein coeur de l'hiver, Edward se sent en danger de mort. Deux êtres. Deux folies ? Une seule vérité sera possible. 

 

Auteur : Jo Witek

 

Edition : France loisirs

 

Genre : Thriller

 

Date de parution : 20 aout 2014

 

Prix moyen : 15€

 

Mon avis : Le roman se divise en deux parties. Au début du livre, la mère d’Edward sort d’une « cure de repos », probablement dans un institut psychiatrique. Edward fait preuve d’une méfiance presque maladive envers sa mère qui ne lui a jamais montré la moindre preuve d’affection, au grand désespoir de son père.
Dès le début, cette famille a un coté glauque. Certes, il y a une grande complicité entre Edward et son père et on voit bien que ces deux là s’adorent, mais le choix du père de ne garder les jeunes femmes qui travaillent pour eux qu’au maximum deux ans afin que son fils ne puisse pas forger de lien affectif trop fort avec elles est vraiment malsain.
Edward n’a aucune relation positive avec sa mère et plutôt que le laisser avoir une relation de substitution, son père lui retire cela. Il croit sans doute forcer son fils et sa femme à se rapprocher, mais tout ceci à l’effet inverse et Edward déteste encore plus sa mère pour le départ de certaines de ces personnes.
Puis il y a le drame, qui laisse en tête à tête la mère et le fils.
Dans la première partie du livre, l’histoire se met en place : Edward, en plein deuil, partagé entre le déni et la colère, sombre lentement, d’autant plus qu’il ne peut pas s’appuyer sur sa mère pour l’aider à se remettre de son chagrin.
Toute cette partie permet de mettre en place et d’expliquer le huis clos ou presque qui se met en place dans la seconde partie et de justifier les réactions des personnes qui entourent le jeune homme.
Personnellement, j’ai décidé de croire Edward envers et contre tout, peut être parce que son entourage ne le croit pas. Pourtant, il y a des moments ou c’est difficile. Non seulement ce que dit et pense Edward est délirant, mais en plus, certains faits semblent conforter la thèse qu’il invente beaucoup de choses et qu’il devient paranoïaque.
D’un autre coté certains autres faits semblent au contraire conforter ses dires. Cependant, même si le roman est raconté à la troisième personne, la plupart du temps, excepté certains passages concernant deux autres personnages, l’histoire est racontée du point de vue d’Edward : on ne sait que ce qu’il sait. On est alors en droit de se demander si l’histoire que l’on lit n’est pas altérée par l’interprétation des faits que fait Edward.
C’est assez tard dans le livre qu’on connaît enfin la vérité et celle-ci dépasse franchement tout ce qu’on aurait pu imaginer.
Malgré quelques coquilles (« coup » pour « cou » ; « réveille » pour « réveil »…), l’écriture est fluide et l’intrigue très bien menée.
Ce livre est mon troisième coup de cœur de l’année. Les thrillers ont la côte cette année : trois coups de cœur, deux thrillers !

Un extrait : Sa mère jouait du piano quand ils arrivèrent. Une suite de Philippe Glass. De la musique contemporaine dans un mobilier design très épuré. Tout était calme, rangé, à sa place. Un décor de magazine, sans bazar ni bibelots. Rose s’interrompit à leur entrée dans le salon. Elle se contenta de tourner légèrement la tête vers lui, les mains en suspens sur le clavier.

— Bonsoir, Edward. Je suis contente de te voir. Tu as bonne mine. Tu as eu des notes aujourd’hui ?

Il la détestait en réalité, même après quinze jours d’absence. Guérison ou pas, son sentiment demeurait intact. Il aurait voulu l’aimer, il avait espéré cet amour, mais ça n’avait pas été possible. Ça ne s’était pas fait. Sa mère avait toujours été si distante avec lui et, depuis la mort de sa grand-mère deux ans auparavant, cela avait empiré. “Maniaco-dépressive”. Les médecins avaient ainsi mollement diagnostiqué l’étrange comportement de cette femme qui passait sa vie enfermée dans la maison à jouer du piano, à disparaître dans ses pensées ou à courir les magasins pour acheter quantité de vêtements qu’elle finissait par donner au personnel de la maison ou aux bonnes œuvres. Elle ne s’occupait de rien, ni de personne. Une figurante. Une ombre. Avec cet épouvantable regard de tristesse qu’un léger sourire permanent ne réussissait pas à camoufler. Depuis quelque temps, Edward ne supportait plus cette tristesse, et encore moins les phases d’excitation de sa mère, qui se mettait alors à ranger la maison, à donner des ordres sans queue ni tête au personnel ou encore à nettoyer sa chambre d’ado, pourtant toujours parfaitement ordonnée. Il avait ses repères, ses habitudes de rangement, il lui avait interdit de fouler son territoire mais Rose, dans ses phases “maniaques”, n’écoutait rien ni personne. La seule chose dont elle était capable était de lui acheter des fringues qu’il ne mettait pas, des livres qu’il ne lisait pas. Elle était tarée, cette brute de Traval avait raison. Tarée et insensible. Incapable de le prendre dans ses bras, de lui organiser une fête d’anniversaire, de l’emmener à l’école, de lui faire des crêpes, un gâteau ou de lui offrir un de ces gestes tendres que les mères savent normalement prodiguer à leurs enfants.

— Salut Ed, tu vas être content, j’ai fait du tiramisu ! le prévint Helena, en ébouriffant son épaisse chevelure brune. Vous voulez boire quelque chose ?

— Pas tout de suite, merci, répondit son père à la jeune étudiante qui fit un passage éclair dans le salon, avant de filer en cuisine. Nous allons d’abord écouter un peu Rose. N’est-ce pas, Ed ? La musique a manqué à cette maison, ma chérie. Tu nous as manqué, murmura Paul-Thomas en embrassant délicatement la nuque de sa femme.

Voilà, c’était comme ça chez les Barzac. Du grand mensonge organisé. Une mise en scène de vie familiale. Sa mère jouait du piano à longueur de temps et autour d’elle chacun faisait son possible pour que tout ait l’air normal. Son père affichait un air éternellement jovial et embauchait tous les deux ans une nouvelle “dame de maison” qui interprétait à merveille le rôle de la maman de substitution. Câlins, histoires du soir, après-midi au parc, goûters d’anniversaire puis, plus tard à l’adolescence, sorties ciné, rendez-vous scolaires ou chez le dermatologue. Les employées étaient nourries, logées et même très bien rémunérées pour ça, triées sur le volet et embauchées en contrat à durée déterminée. Deux ans de service, pas plus. Il fallait que ces femmes comblent les défaillances affectives de la mère, mais pas qu’elles la remplacent. Paul-Thomas y mettait un point d’honneur. De la tendresse, mais pas de lien affectif prolongé.
Pourtant, Edward s’était attaché à elles, lui. Il avait eu le cœur brisé plusieurs fois au départ de ces femmes qui, parfois, sentaient bon la tendresse maternelle. Il avait même pleuré et supplié, mais son père, malgré l’amour qu’il lui témoignait, n’avait jamais voulu déroger à cette règle. Pas plus de deux ans. Pas d’attaches. Tout cela à cause de sa mère et de sa foutue maladie qui emportait tout sur son passage.

 

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