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[Livre] La cité dénaturée

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Lecture terminée le : 21 avril 2020

 

Résumé : Suite aux changements climatiques, la nature est devenue hostile. Pour s’en protéger, la Cité a été créée, avec en son sein un environnement docile. Christian y coule des jours tranquilles, en compagnie de ses frères et sœurs de couvée. Quand, par accident, il entre en possession d’étranges graines capables de faire pousser de la nourriture, il se retrouve au cœur d’une conspiration et devient la proie de tous les officiels de la Cité. Commence alors pour Christian et Tahiti-Bise, son vieux chaton doté de parole, une fuite qui les conduira aux limites de leur monde, à la découverte du pouvoir des fruits et légumes biologiques.


Auteur : Laurent Salipante

 

Edition : Plumes Solidaires

 

Genre : Science-Fiction

 

Date de parution : 24 Octobre 2019

 

Prix moyen : 15€

 

Mon avis : En général, quand un roman est très court, je trouve toujours qu’il est bâclé à un endroit ou à un autre. En général c’est la fin qui est sacrifiée : trop rapide, précipitée, comme si les auteurs voulaient, en un minimum de mots, donner les informations qui auraient dû être distillées sur 50 ou 60 pages.
Mais pas ici. L’auteur a réussi à nous livrer une histoire complète et avec une fin digne de ce nom, sans précipitation, en moins de 200 pages.
Au début j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire car les chapitres alternent entre deux périodes différentes et l’histoire qui les relie ne se dévoile que peu à peu.
Mais il n’a pas fallu longtemps pour que je sois plongée totalement dans cette histoire et que je tourne les pages de plus en plus vite afin de savoir ce qui avait mené de la 1ère période (celle de Christian le jeune) à la seconde (celle de Christian l’ancien). Et bien sûr, je voulais savoir comment ça allait finir !
Ce roman est une dystopie (bon ok, en fait, c’est plus un roman d’anticipation, vu la situation actuelle, mais c’est trop flippant pour l’envisager, alors je préfère le voir comme une dystopie).
Dans la 1ère période, on est dans un futur très aseptisé. Rien n’est naturel. Les enfants naissent pas « fournées » et, à de rares exceptions près, sont dépourvus de parents. Tout est synthétique que ce soit les animaux (parlant, souvent), la nourriture ou les arbres et les fleurs.
Christian, notre héros, est d’ailleurs parfaitement… satisfait n’est pas le mot, plutôt blasé, habitué, conditionné à tout cela et n’a nulle envie de voir les choses changer. D’ailleurs le changement semble être synonyme de danger. Mais les circonstances, et une rencontre, vont le faire remettre en question toutes ses certitudes.
Dans la 2nd période, on retrouve Christian, plus âgé, bien qu’on ne sache pas combien de temps s’est écoulé, dans une situation totalement différente.
Au fur et à mesure de la lecture, on comprend comment et pourquoi Christian a évolué d’une période à l’autre.
La fin m’a mise un peu mal à l’aise.
J’ai eu le sentiment que l’Humain était incapable d’apprendre de ses erreurs. Qu’il en commettra toujours de nouvelles car il ne semble porté que par un désir de pouvoir, de domination, d’appropriation.
Ce roman a beau montrer à quel point l’Humain a besoin de la nature, je me demande combien de grands privilégiés seraient prêts à abandonner un peu de leur fortune, un peu de leur pouvoir pour le bien de la planète, de la nature dont on a tant besoin, et quand, dans les circonstances de crises sanitaires actuelles, je vois les lobbies réclamer un moratoire sur les mesures environnementales au nom du profit, je crains que le monde de l’auteur ne finisse par devenir une réalité.
J’ai beaucoup aimé l’écriture de l’auteur. Elle est fluide, sans fioriture et les descriptions, sans être longues, rendent la lecture très visuelle.
J’espère vraiment que l’Humanité finira par avoir le même sursaut de conscience que certains des personnages du livre et qu’on évitera d’en arriver au monde de Laurent Salipante !

 

Un extrait : — Christian!

           La voix stridente de Ludivine Soller fend l’air. Une flèche de mépris entre les allées fleuries du deuxième étage de Vizions — l’agence de publicité possède, comme toutes les entreprises de la Cité, un luxuriant open-parc de travail. Elle demeure la prêtresse incontestée de la section animation. Flamboyante, hors de la masse grouillante des besogneux tâcherons, Ludivine Soller a ses quartiers sous un somptueux saule artificiel, le symbole de sa réussite.

           Christian déteste cette harpie aux cheveux rouges et aux dents longues qui ne cesse de harceler les agents sous ses ordres, s’imaginant qu’un chef se comporte de la sorte. Elle le lui rend bien, lui reprochant sans arrêt sa nonchalance. Christian est un des jeunes animateurs de Vizions. Sa description physique s’avère peu remarquable : des cheveux noirs coupés mi-courts, des yeux marron noisette, une enveloppe épidermique blanche, élastique comme il se doit, ferme, sans tache ni disgrâce, un corps pourvu d’un réseau pileux à la fois souple et solide d’un brun tout à fait quelconque, des pommettes saillantes et un nez étroit qui ne porte pas ombrage à ses collègues.

           Christian n’entretient que peu de rapports avec les autres Citoyens. Il en arrive parfois à douter de ce que les technogénéticiens nomment dans leur jargon «les atomes crochus», pour parler en réalité dun élémentaire travail de neuro-génétique sociale. Ce lien lunit pourtant aux Citoyens de la même fournée. Tous des frères et des sœurs. Parmi eux néanmoins, une femme et un homme comptent particulièrement : Amanda et Georges. Ses seuls atomes crochus.

           — Christian!

           C’est la troisième fois depuis ce matin que Ludivine Soller l’interrompt dans la création de sa réclame. Christian se lève sans hâte, abandonnant ses personnages holographiques, en pleine extase figée, devant un paquet de céréales pour le petit-déjeuner. Il s’étire en bâillant et s’engage avec résignation dans l’allée centrale bordée d’hibiscus rouges synthétiques, une des nombreuses créations de la firme MontasoFlore. Les fleurs exhalent une large gamme d’antioxydants et un peu de vitamine C. Il inspire à pleins poumons les molécules revigorantes.

           Les baies vitrées filtrantes dispensent une lumière homogène sur les aires de travail. Une clarté pâle conçue pour stimuler la production d’ACTH de cette usine à hormones qu’est l’hypophyse. L’attention des animateurs s’en trouve renforcée, leur mémoire immédiate augmentée. Le seul inconvénient est qu’une exposition prolongée peut avoir l’effet inverse : plonger l’honnête travailleur dans une torpeur abrutissante. Impossible dès lors de distinguer un effet secondaire des baies d’une véritable paresse.

           Christian se demande parfois si l’apathie qui le gagne chaque jour davantage est provoquée par cette stimulation de son cerveau.

 

Beaucoup aimé 4 étoiles.jpg

           

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