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[Livre] Cendrillon et moi

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Résumé : C’est la marâtre la plus détestée de l’Histoire, celle dont on parle pour faire peur aux enfants désobéissants. Mais qui savait que la belle-mère de Cendrillon s’appelle en réalité Agnès, qu’elle a passé sa jeunesse à trimer comme bonne à tout faire, qu’elle a dû se battre comme une lionne pour accéder à un monde qui n’est pas le sien, que son époux est alcoolique et que sa belle-fille, petite princesse aux petons si délicats, est en réalité fort capricieuse? Agnès n’en peut plus des sornettes autour des pantoufles, des princes charmants et des citrouilles. Elle est bien décidée à rétablir la vérité, quitte à égratigner quelque peu la version officielle.


Auteur : Danielle Teller

 

Edition : Denoël

 

Genre : Fantasy

 

Date de parution : 11 Avril 2019

 

Prix moyen : 23€

 

Mon avis : Même si ce roman est classé dans fantasy, surement parce que c’est une réécriture de conte, il est ancré strictement dans le monde réel.
La belle-mère de Cendrillon, Agnès, va nous raconter comment elle en est arrivée à ce point-là : Belle-mère la plus détestée au monde.
Fille de serf, rien ne la destinait à approcher la noblesse autrement que pour la servir. Mais c’était sans compter sa capacité hors du commun à survivre.
Toute sa vie, Agnès a été dépossédée de ce qu’elle avait pu obtenir, de ses espoirs également. Et force est de constater que c’est bien souvent à cause de l’abbesse Elfida, marraine de Cendrillon, qu’Agnès est malmenée.
J’ai vraiment eu du mal à supporter l’abbesse. Sous ses dehors sages, éthérés, doux ou encore bienveillant, elle se révèle sèche, arrogante, avide de pouvoir et dépourvue de toute charité chrétienne. Elle entend bien que chacun reste à sa place, que les domestiques ne cherchent surtout pas à avoir une vie meilleure et se sert de sa position pour contraindre tous ceux qu’elle peut atteindre à se plier à ses ordres.
Agnès, elle, n’est pas du genre à se laisser faire. Elle a osé court-circuiter son supérieur pour être envoyée comme domestique à l’abbaye, et là, a profité de quelques leçons de la mère de l’abbesse Elfida, qui ne ressemble guère à sa fille. De ses leçons elle a tiré le maximum de bénéfices puis a su tirer son épingle du jeu quand elle se retrouve dans une situation embarrassante.
Elle apprend à lire quasiment toute seule et connait une évolution qui est impensable à l’époque : d’assistante lingère à servante, puis tavernière et enfin nourrice, ce qui va finalement la conduire à assumer les fonctions d’intendantes puis d’épouse.
Cendrillon est la fille de Emont, un fils cadet à qui l’abbesse a confié la gestion du manoir d’Aviceford et de ses terres, et de lady alba, la propre sœur de l’abbesse, réputée folle.
La fillette, prénommée Elfida comme sa marraine, est plus couramment appelée Ella.
Agnès, en tant que nourrice, a une certaine autorité sur la fillette, autorité qu’elle va quasiment perdre en épousant Emont après la mort d’Alba.
Depuis aussi longtemps qu’elle le connait, Emont est un alcoolique qui dédaigne les affaires et la gestion du manoir, qu’il laisse à des intendants plus ou moins compétents et fiables. Agnès va finir par prendre peu à peu les rênes du manoir, ce qui va « autoriser » Emont à se désintéresser encore plus de ses obligations qu’il sait à présent entre de bonnes mains.
Ella est une fillette difficile, capricieuse, bien trop gâtée par son père qui lui passe absolument tout et souffrant probablement de la même pathologie que sa mère que je soupçonne d’avoir été maniaco-dépressive.
Au fil de l’histoire, on peut voir que ce qui est reproché à la belle-mère de Cendrillon (l’avoir reléguée au grenier, l’avoir obligée à effectuer les tâches ménagères, lui avoir fait porter des haillons, lui avoir interdit d’aller au bal…) n’est pas complétement faux, mais a été amplifié jusqu’à devenir un comportement cruel alors qu’il ne s’agissait que de sanctions bien méritée qui n’ont pas eu la dureté ou la durée qu’on leur prête, ou encore tout simplement de bon sens.

Les relations entre Ella et Agnès sont parfois conflictuelles, mais cela ne dépasse pas ce qu’il est habituel de voir entre une mère et sa fille en pleine crise d’adolescence.
Au travers de la réécriture du conte, l’auteur nous dépeint une réalité historique révoltante où, quand on n’était pas « bien né », on n’avait aucune chance de sortir de sa condition car les portes étaient tout simplement fermées.

Le destin d’Agnès fait figure d’exception et a sûrement contribué aux rumeurs, comme si celles-ci était une façon de la remettre à sa juste place : au pied de l’échelle.
L’histoire est finalement celles de simples humains : pas de belle-mère diaboliques, pas de jeune fille à la perfection absolue.
Juste une mère et sa fille qui ont eu du mal à se comprendre.

 

Un extrait : La princesse Elfida tient sa grande popularité de sa beauté saisissante, mais il y a autre chose, dans sa nature même, qui fascine les masses. Son mutisme habituel et une douce hésitation quand quelques mots s’échappent de ses lèvres lui donnent l’air pudique, tout comme sa façon de baisser la tête et de vous regarder par en dessous, derrière ses longs cils. Si l’on exclut sa collection de babioles et ses chiens, elle semble n’avoir ni passion ni vice, et lorsqu’elle prend part aux réceptions royales, son regard s’égare vers des spectacles invisibles qu’elle est la seule à voir. Son caractère insaisissable offre un parchemin vierge à n’importe quelle histoire, et toutes les filles rêvant de devenir un jour princesses peuvent s’imaginer à la place de la célèbre Elfida.

J’en sais plus sur sa vie que quiconque sur cette terre, et la véritable histoire n’est pas aussi fantasque que celle chantée par les troubadours. Personne ne veut entendre parler d’une jeune noble de chair et de sang qui, comme toute enfant ordinaire, a mouillé son lit, cru mourir d’ennui, fait la fine bouche devant des légumes verts et s’est querellée avec sa famille. Par ailleurs, loin de moi l’idée de porter atteinte à l’adulation entourant la princesse, qui fait son bonheur et celui de ses admirateurs.

L’histoire que je m’apprête à écrire n’est pas celle de la princesse, mais la mienne, la seule que je sois en droit de raconter. Ma plume ressuscitera peut-être des fantômes qui me tiendront compagnie durant les longues journées au palais, et si elle échoue, mon esprit tout du moins sera à autre chose. Quant aux fables sur le bien et le mal et aux chansons sur les pantoufles de vair, je les laisse aux ménestrels. Libre à eux de donner leurs propres versions de l’histoire de Cendrillon.

 

Beaucoup aimé 4 étoiles.jpg

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