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[Livre] Cœur de Brindille

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Résumé : Été 1975, Cité des Biscottes, dans le Nord de la France. Lolita dite Brindille, une adolescente de 15 ans, vit seule avec sa mère, alcoolique notoire. En vraie « fleur de béton », Brindille ne rêve que de partir – d’abord et avant tout, pour revoir son frère aîné Angelo, incarcéré à Marseille.

C’est à l’occasion d’une rencontre foudroyante avec un jeune jongleur travaillant dans un cirque tzigane qu’elle concrétise ce désir… au grand désarroi de son professeur de lycée, très attaché à cette élève atypique qui va se lancer à sa poursuite. Mais Lolita laisse peu de traces ; lancée sur les routes avec le cirque, elle apprend le métier, change d’identité, s’adapte aux péripéties en suivant son instinct, toujours. En cargo, à pied ou sur la selle d’un scooter, elle ira jusqu’au bout de son aventure…

… par le chemin où naissent les légendes !

 

Auteur : Yves-Marie Robin

 

Edition : Sarbacane

 

Genre : Jeunesse

 

Date de parution : 10 juin 2015

 

Prix moyen : 15,50€

 

Mon avis : Dès le début de ce livre, j’ai eu du mal à me représenter Brindille, pour une raison toute bête : la couverture. En effet, sur la couverture, on voit une jolie brunette, qu’on identifie logiquement comme étant Brindille, puis dans la description de l’adolescente, on entend parler de crête iroquoise turquoise… Et bien j’ai beau ne jamais juger un livre sur sa couverture, pour moi Brindille, c’était cette brunette, et je n’ai pas réussi à la rattacher à cette description. C’est un peu comme si la couverture d’Harry Potter montrait un ado genre surfeur californien, musclé avec de longs cheveux blonds alors que le personnage est décrit comme petit brun ébouriffé clairement mal nourri.
Comme quoi le choix de la couverture reste quand même important. Sur ce coup-là, j’ai le sentiment que Sarbacane s’est un peu plantée.
J’ai eu du mal à entrer dans le livre. Il faut dire que l’écriture, quoi que très belle, reste un peu particulière. Il m’a fallu un bon tiers du roman pour réussir à être vraiment plongée dans l’histoire et sur un livre de 192p, c’est long…trop long.
De plus le résumé nous induit en erreur, on s’attend à une folle traversée au sein du cirque et puis finalement, du cirque, on ne voit quasiment rien.
C’est une histoire, qui malgré son début qui montre une situation un peu sordide entre un frère en prison et une mère prostituée alcoolique qui ne s’adresse à sa fille qu’en l’insultant, est vraiment utopique. En effet, Diego et Brindille ne rencontre que des gens bienveillant : que ce soit le routier qui les prend en stop, la propriétaire du resto-route qui les nourrit et les loge gratuitement sans poser la moindre question, le capitaine du bateau qui s’attendrit devant eux… C’est peu crédible. Même le flic qui contrôle Brindille du seul fait de sa coiffure se radoucit très vite. Et en prison, même combat : le frangin, à l’infirmerie est pris sous l’aile de l’infirmier qui décrète qu’il va rester à l’infirmerie où il est au chaud et en sécurité. Mais dans quel monde vit l’auteur ? En prison, c’est à peine si on rafistole les détenus avant de les renvoyer dans la jungle que forme la prison.
Ce côté : malgré des parents pourris et une assistante sociale « aux trousses », on vit en réalité au pays des bisounours, a eu tendance à m’énerver un peu.
Il y a de grand thèmes abordés, des thèmes qui aurait pu être intéressant et apporter une vraie profondeur à l’histoire (la déportation du grand père de Diego, l’alcoolisme et la violence familiale, la prison, l’abandon scolaire…) mais ils ne sont qu’effleurés, si vite qu’on a à peine le temps de les voir passer.
La relation entre Diego et Brindille peut passer pour trop rapide, mais pour moi elle reflète la réalité des adolescents qui se disent prêt à mourir s’ils sont séparés l’un de l’autre alors qu’ils ne se connaissent que depuis 12 heures.
J’ai aussi trouvé que la fin arrivait trop vite et trop « facilement » je dirais. Encore une incursion au pays des bisounours où tout va bien dans le meilleur des mondes. J’aurais aimé un peu plus de réalisme.
Cela dit, j’ai passé un bon moment et ça reste une bonne lecture, notamment pour les adolescents à qui elle est destinée. C’est une lecture à leur recommander du moment qu’ils ont conscience que dans la vraie vie, les choses, de ce genre de circonstances, se passent rarement aussi bien.

Un extrait : Un matin d’été 1975, dans le lard brumeux d’un jour banal, Lolita dite « Brindille » - 15 ans à la pesée – vit son destin fleurir avec les premières heures. Le foulard du rouge-gorge en guise d’étendard, un anneau dans le sourcil et la crête iroquoise, elle observait depuis la fenêtre de sa cuisine, au 5ème étage de la Cité des Biscottes, la cathédrale rouge et or d’un cirque tzigane étendu sur l’herbe du terrain vague.
Ca prenait vie. Par grappes, ahanant et tirant sur des cordes, une drôle de tribu soulevait le dôme en toile sous les ordres d’un boiteux en bleu de ferrailleur. Sacré gaillard, celui-là ; le visage fier, ruisselant, magnifique avec son chapeau de Camargue orné d’une plume d’aigle royal, au brun roux chatoyant dans le soleil levant…
Brindille plissa les yeux. Leur convoi de caravanes alignées en demi-cercle, comme dans un film sur l’Ouest américain, imposait une frontière à l’intrus : le respect, et même la crainte devant leur force, leur culture – indomptable.

- Lolita, ferme cette bon Dieu de fenêtre ! Et puis, va voir ailleurs si j’y suis. On est mercredi, et…

- Je sais : aujourd’hui, c’est ta journée spaghetti.

- Dis pas de mal sur mon client italien ! Surtout un régulier.

Haussant les épaules, la jeune fille tira le rideau, tourna le dos au dehors et soupira avant d’engloutir un yaourt nature – copieusement arrosé de sirop grenadine.

- On pourrait aller au cirque, ce soir ? Avec le bifton de ton étalon italien !

- Le cirque, c’est ça. L’argent que gagne mon cul, il sert à payer le loyer ! Ma vie est déjà assez crasseuse pour que j’aille pas en plus respirer celle des autres…

- Le loyer, on te croit. Tu la picole, ta vie, c’est pour ça qu’elle pue !

- Mais fous-moi le camp, espèce de cul-gras ! Sale teigne de petite morue avariée ! Je t’en foutrai moi, du cirque !

Pour éviter la morsure du ceinturon, Lolita détala. En passant devant le cadre du père accroché dans l’entrée, elle le retourna par habitude, face contre mur, puis elle prit son trousseau de clés sans un regard envers sa mère et s’engouffra dans l’escalier en sifflotant.
Sourire en coin : d’un coup de patte agile et déjà bien rôdé, cette redoutable pickpocket venait de piquer cent balles dans le porte-monnaie maternel. Une manœuvre que son frère Angelo lui avait enseignée… avant de prendre cinq ans à Marseille, derrière les barbelés d’une prison obscure.
Déboulant sur l’air de l’Internationale dans le hall de l’immeuble, l’adolescente cria en direction de la conciergerie :

- Irma, si la vieille me demande…dites-lui que je ne suis pas encore née !!

Et avant même que la gardienne, une Polonaise qui avait torché pas moins de quatre génération de gueulard dans la cité, n’ait eu le temps d’entrouvrir sa lucarne, Lolita s’était fait absorber par l’asphalte, son ombre pulvérisée en millions de lambeaux disparaissait sous un ciel bleu cristal…

 

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