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[Livre] Journal d'un vampire en pyjama

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Résumé : « Me faire sauver la vie est l’aventure la plus extraordinaire que j’ai vécue. » 
Journal intime tenu durant l'année où M. Malzieu a lutté contre la maladie du sang qui a altéré sa moelle osseuse et la mort personnifiée, Dame Oclès.

 

Auteur : Mathias Malzieu

 

Edition : Albin Michel

 

Genre : Témoignage

 

Date de parution : 27 janvier 2016

 

Prix moyen : 18€

 

Mon avis : Dès les premières pages, j’ai su que je ne pourrais pas lâcher ce livre jusqu’à la fin.
Mathias Malzieu nous emmène dans son univers hospitalier avec un mélange de doute et d’humour déconcertant. Je ne sais vraiment pas comment il a pu garder un tel sens de l’humour au vue des épreuves qu’il a traversé.

Quand, au tout début du livre, il décrit le prélèvement de moelle osseuse par le sternum, j’ai eu le souffle coupé au moment même où je lisais l’acte tant j’avais presque l’impression d’y être. Je crois même que j’ai eu un gémissement de douleur (et comme j’ai commencé ce livre au boulot, pendant ma pause déjeuner, je vous laisse imaginer le regard des collègues).
Atteint d’une aplasie médullaire, Mathias Malzieu a besoin de transfusions pour survivre et va faire plusieurs séjour en chambre stérile, d’où le titre : vampire en pyjama. Puisqu’il a besoin du sang des autres et qu’il est très pale car fortement anémié, il se voit comme un vampire.
Je ne sais pas où il a trouvé la force de faire face à tout cela, peut être grâce à sa compagne, son père, sa sœur ? Très sûrement grâce à la rage de vivre qui l’habite.
J’avoue que quand il décrit la première fois où il a senti qu’il n’allait pas bien, je suis allée voir le clip de la mécanique du cœur, histoire de voir si, entre les différents plans, on voit que quelque chose ne va pas. Et bien non, il a toujours la même énergie, il saute partout, on n’imagine pas une seconde, quand on voit ce clip, qu’il était déjà atteint de sa maladie, au point de mettre sa vie en danger, sans le savoir.
J’ai beaucoup aimé son interprétation de l’épée de Damoclès qui devient l’épée de Dame Oclès, une espèce d’enquiquineuse toujours là pour plomber le moral et rappeler que peut importe l’espoir, tout pourrait mal finir. Dur de lui tenir tête, de l’ignorer, de se concentrer sur la guérison en sentant sa présence, juste là, à côté, prête à frapper…
Dans sa manière d’écrire, Malzieu nous associe à son attente, au fil des pages, des dates inscrites en haut de chaque chapitre, on espère, comme lui, recevoir enfin une bonne nouvelle : des analyses meilleures ? Un traitement qui fonctionne ? Un donneur ? On ressent à quel point il est partagé quand sa sœur fait les tests pour voir si elle est compatible : partagé entre l’espoir qu’elle le soit et que le cauchemar s’arrête, et le refus de la voir entre les mains des médecins, de subir un prélèvement, de ressentir la moindre douleur. Difficile de se protéger soit même tout en ménageant les autres. Rosy semble avoir été une véritable bouée de sauvetage, solide et stable quand tout semble s’effondrer. Et si elle a eu des doutes, on dirait qu’elle a tout fait pour les montrer le moins possible.
Il y a aussi le dévouement et la présence constante du personnel hospitalier et en premier lieu des infirmières. Elles font tout pour que les hospitalisations se passent bien, pour rassurer, pour rappeler que tout espoir n’est pas perdu.
Malheureusement, il y en a d’autres, moins sympathiques : ceux qui se lèvent du milieu, qui se disent amis mais abandonnent le malade à son sort, ceux qui regardent comme s’il était une bête curieuse… Celui qui m’a le plus choquée c’est le chauffeur de taxi, ce n’est plus de la connerie à ce stade, c’est la mise en danger délibérée, il mériterait de perdre sa licence. J’espère qu’il a lu le livre, qu’il s’est reconnu, et qu’il est mort de honte ! (Mais j’ai des doutes, ce genre d’abruti ne lis pas ce genre de livre et surtout, ne se remettent jamais en question !)

J’ai lu ce livre sans avoir jamais rien lu ni écouté de cet auteur-chanteur, à part le début de jack et la mécanique du cœur (juste la chanson « le jour le plus froid du monde ») donc sans aucun a priori ni attente particulière. Je suis vraiment ravie de l’avoir découvert avec ce livre ci.


Un extrait : 7 novembre 2013

J’entre dans une de ces boutiques médicales aux allures d’hôpital miniature qu’on appelle laboratoires. Une dose de silence bleu, une piqûre et un sucre plus tard, je suis libéré. « Vous êtes très très blanc, monsieur Malzieu… Ça va aller ? » L’infirmière qui vient de me piquer a ce sourire surentraîné à la compassion qui fout la trouille.

Nous sommes le vendredi précédant le week-end du 11 novembre, je n’aurai donc les résultats que mardi. Je remonte le boulevard Beaumarchais au ralenti. Une petite vieille avec un mini-chien coiffé comme elle me double sur la place de la République. J’achète L’Équipe et mange des nuggets pour ne penser à rien pendant plusieurs minutes d’affilée. Ça marche un peu.
Je rentre chez moi. C’est juste à côté mais ça me prend du temps. Je suis crispé de froid dans mon manteau alors que les gens se promènent en pull, peinards. Ça fait des semaines que je ne prends plus l’escalier, aujourd’hui même dans l’ascenseur je suis essoufflé.
Depuis quelques mois, on me dit tout le temps que je suis blanc. C’est vrai que j’ai un peu une tête de vampire. Pas la catastrophe non plus, il m’est déjà arrivé d’être plus fatigué en tournée. Je m’allonge quelques minutes en écoutant Leonard Cohen et me sens légèrement mieux.

J’appelle le taxi qui doit m’emmener sur le montage du clip. Entre-temps le téléphone sonne, un numéro que je ne connais pas.

– Bonjour, monsieur Malzieu ?

– Oui.

– Docteur Gelperowic à l’appareil, le laboratoire vient de m’appeler pour me communiquer vos résultats en urgence…

– Ah bon ? Ils m’avaient dit que je n’aurais rien avant mardi.

– Ils ont préféré vérifier immédiatement votre hémoglobine, qui s’avère être très basse. Vous êtes très fortement anémié. Le taux normal de globules rouges se situe entre 14 et 17 milligrammes. Vous en avez 4,6. Il faut aller vous faire transfuser immédiatement.

– Comment ça ?

– Vous n’avez pas assez d’oxygène dans le sang, il faut aller aux urgences, tout de suite !

– Tout de suite ?

– Avec aussi peu de globules rouges, vous ne devriez même pas tenir debout… Surtout évitez les efforts physiques, vous risquez l’accident cardiaque.

– Quel hôpital je dois appeler ?

– Le plus proche, ne tardez pas surtout !

Chaque phrase est une gifle. Je suis assommé.
Je m’assois sur mon lit pour essayer de trier mes émotions. Toutes mes pensées deviennent floues. Les questions se catapultent, les réponses pas trop. Je me repasse le souvenir de la journée de la veille, à sauter partout comme le plus con des dragons. J’aurais pu me cramer le cœur en direct.
Le téléphone sonne à nouveau, c’est le même numéro.

– C’est encore le docteur Gelperowic. Nous venons de récupérer de nouveaux résultats…

– Alors ?

– Malheureusement, les trois lignées de globules sanguins sont atteintes. Votre taux de plaquettes est très bas.

– Les plaquettes ? Je ne me souviens plus exactement…

– Il s’agit des cellules qui arrêtent les saignements. Vous en avez très peu.

– Comment ça « très peu » ?

– La norme est entre 150 000 et 450 000, mais vous, vous en avez 11 500. En dessous de 20 000, on transfuse systématiquement. Vous avez saigné du nez récemment ?

– Oui.

– Surtout ne vous rasez pas, ne manipulez pas d’objets coupants et essayez de ne pas vous cogner, pour éviter tout risque hémorragique. Les globules blancs sont également touchés, monsieur Malzieu.

– Ce qu’on appelle les défenses immunitaires ?

– Oui. Vous avez 750 polynucléaires neutrophiles alors qu’il vous en faudrait le double. Je ne vous cache pas que c’est inquiétant…

– On va me transfuser pour ça aussi ?

– Ces globules-là ne se transfusent pas. En attendant la prise en charge, lavez-vous les mains le plus souvent possible.

– Mais qu’est-ce que tout ça veut dire ?

– Il faut vous faire quelques examens complémentaires pour diagnostiquer. On va devoir explorer votre moelle osseuse pour comprendre pourquoi vous perdez votre sang.

Les battements de mon cœur s’accélèrent. Mon petit appartement paraît immense. Hémoglobine, plaquettes, polynucléaires, transfusion… ces mots avancent sous mon crâne telles des ombres menaçantes. Je tape « moelle osseuse » sur Internet : « A un rôle vital dans le fonctionnement du corps humain. Elle est responsable de la formation des cellules particulières (globules rouges, blancs et plaquettes) appelées cellules souches hématopoïétiques. Ces cellules produisent l’ensemble des globules indispensables à la vie. »

Indispensables à la vie ?

 

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