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[Livre] Vous parler de ça

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Résumé : Melinda Sordino ne trouve plus les mots. Ou plus exactement, ils s'étranglent avant d'atteindre ses lèvres. Sa gorge se visse dans l'étau d'un secret et il ne lui reste que ces pages pour vous parler de ça. Se coupant du monde, elle se voit repoussée progressivement par les élèves, les professeurs, ses amis, et même ses parents. Elle fait l'expérience intime de la plus grande des injustices: devenir un paria parce que ceux donc elle aurait tant besoin pensent que le mal-être, c'est trop compliqué, contagieux, pas fun. Melinda va livrer une longue et courageuse bataille, contre la peur, le rejet, contre elle-même et le monstre qui rôde dans les couloirs du lycée.

 

Auteur : Laurie Halse Anderson

Edition : France loisirs

 

Genre : Young adult

 

Date de parution : 09 octobre 2014

 

Prix moyen : 15€

 

Mon avis : Avant de lire ce livre, j’ai lu beaucoup de critiques. La plupart étaient bonnes, mais un nombre non négligeable de critiques reprochaient à l’auteur de ne pas révéler clairement ce qui est arrivé à Melinda et de se contenter de raconter sa vie quotidienne.
Je pense que les auteurs de ces critiques sont totalement passés à côté du livre : le but n’était pas de raconter ce qu’il lui est arrivé (on le devine assez rapidement, rien que le titre est assez évocateur, mais peut être que les ados les plus jeunes ne feront pas la relation tout de suite) mais de montrer l’impact que cet événement a sur sa vie quotidienne : la réaction de son entourage à son quasi-mutisme, la chute de ses notes etc…
Au point où j’en suis de ma lecture, personne ne semble savoir ce qui lui est arrivé. Personne ne semble vraiment s’en soucier non plus d’ailleurs. Ses parents lui reprochent son silence et la baisse de ses notes (mais la famille ne semblait pas être unie, même avant) ; ses profs lui reprochent son silence et son manque d’implication dans ses études ; enfin ses anciennes amies lui reprochent d’avoir appelé la police lors de la fête donnée à la fin du collège, mais sans se demander pourquoi elle en est venue là. Elle a gâché leur soirée, voilà tout ce qui compte.

Ses parents sont d’un égoïsme qui laisse sans voix. Même les convocations par le lycée ne les détournent pas de l’explication la moins dérangeante : Melinda est en crise d’adolescence et refuse de parler pour les emmerder. Pour le personnel enseignant, à l’exception du prof d’art plastique, c’est un refus de coopérer et les punitions tombent. Comme si ne pas parler était une insulte faite aux autres. Aucun d’entre eux ne se dit que ce refus de parler cache peut être un malaise.
Je n’ai qu’un regret, c’est de ne pas savoir les conséquences que l’événement à la fin du bouquin a réellement eu sur les parents de Melinda, sur l’équipe pédagogique du lycée, sur ses anciennes amies qui l’ont rejetée et sur celui qu’elle appelle « ça ».

Mais que ceux qui se plaignaient de ne pas tout savoir clairement se rassure : dans la seconde moitié du bouquin on apprend tout : le déroulé des événements, les noms… Rien ne nous sera caché, plus de place à l’imagination, Melinda a beau ne rien dire à personne, à nous, elle ne cachera rien.


Un extrait : C’est la rentrée ; mon premier jour au lycée. Je pars avec sept cahiers neufs, une jupe que je déteste et l’estomac noué.

À l’angle de ma rue, le car s’arrête dans un chuintement. La porte s’ouvre, je monte. Je suis la première passagère de la tournée. Quand le chauffeur redémarre, je suis encore debout. Bon, où est-ce que je m’assois ? Je n’ai jamais été le genre rebelle qui squatte les places du fond. Si je m’installe au milieu, quelqu’un que je ne connais pas pourrait s’incruster à côté de moi.

Et si je m’assieds à l’avant, je passerai pour une gamine… mais à la réflexion, c’est aussi le meilleur moyen d’attirer l’attention de mes amies, au cas où

l’une d’elles aurait envie de m’adresser la parole.

Ça y est, les élèves envahissent le car par groupes de quatre ou cinq. En s’avançant dans l’allée, celles et ceux que j’avais connus au collège, en sport ou en travaux pratiques de physique-chimie, me jettent des regards noirs. Je ferme les yeux. C’est bien ce que je craignais.

Lorsque le car a fini de recueillir ses derniers passagers, je suis la seule à ne pas avoir de voisin.

Le chauffeur rétrograde pour gravir les collines, faisant rugir le moteur. Les types du fond en profitent pour brailler des obscénités. Quelqu’un a eu la main

lourde sur le parfum, alors j’essaie d’ouvrir ma vitre, mais les petits loquets restent bloqués. Derrière moi, un garçon déballe son petit déjeuner et me balance un truc. Un papier atterrit sur mes genoux – l’emballage

d’une barre chocolatée.

On passe à côté des gardiens, occupés à repeindre la plaque du lycée. Le conseil d’établissement a décidé que « Lycée Merryweather – Foyer des Troyens » envoyait un message contradictoire quant à l’abstinence que les élèves sont censés observer ; il nous a donc transformés en Spartiates. Les couleurs de l’école resteront le violet et le gris. Le conseil n’avait pas d’argent à mettre dans de nouveaux maillots.

Si les élèves de Terminale ont le droit de traîner jusqu’à la sonnerie, on conduit les Secondes dans l’amphithéâtre principal. Des clans se forment, les

élèves se regroupent plus ou moins consciemment : les sportifs, les bobos, les intellos, les pom-pom girls, les roots, les bling-bling, les graines de fachos, les nanas populaires, les lèche-culs, les artistes maudits, les théâtreux, les gothiques, les métalleux. Je ne fais partie d’aucun de ces clans. J’ai passé la moitié du mois d’août à buller devant des dessins animés débiles – une sacrée

perte de temps. Pas une fois je n’ai mis les pieds au centre commercial, je ne suis allée ni au lac ni à la piscine, et je n’ai pas non plus décroché le téléphone. Je débarque au lycée avec une coupe de cheveux naze, des

fringues horribles, un karma pourri. Et, encore une fois, personne ne veut s’asseoir à côté de moi.

Je suis un paria.

 

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